ARCHIVES PARLEMENTAIRES a»Ogi RÉGNE DE LOUIS XVI. ASSEMBLjB NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DÉMEUNIER. Séance du jeudi 24 décembre 1789, au soir (1). La séance commence par la lecture d’une adresse de la ville de Moret en Gatmais portant adhésion à tous les décrets et offrandes en don patriotique de la somme de 3,000 livres. L’Assemblée permet aux députés de cette ville d’assister à la séance. M. Roy, député d’Angoulême, offre au nom de la paroisse des Maleville en Angoumois, un don patriotique de 325 livres 3 sols 3 deniers, montant au rôle du supplément des impositions des ci-devant privilégiés de ladite paroisse, pour les six derniers mois de 1789. La ville de Rozoy en Brie offre à la nation lu sacrifice volontaire du produit des impositions des ci-devant privilégiés pour les 6 deniers mois de 1789 et déclare qu’elle adhère formellement à tous les décrets de l’Assemblée nationale dont elle invoque la protection dans la prochaine distribution des districts. Il est fait lecture d’une délibération de la ville de Beaumont-sur-Oise portant remerciement et adhésion à tous les décrets de l’Assemblée nationale et offrande patriotique des contributions des ci-devant privilégiés pour les 6 derniers mois de 1789. Les députés de cette ville sont admis à assister à la séance. M. le comte de Wirieu, l'un des trésoriers des dons patriotiques, lit l’état de différentes offrandes (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. lre Série. T. XI. patriotiques. Il demande ensuite que l’Assemblée prenne un parti au sujet du don de 900,000 livres, offert par des Génevois. M. Rewbell. Les Génevois n’ont offert d’effectuer leur don qu’aux époques où on leur payerait les rentes viagères qui leur sont dues, et cela ressemble à un contrat d'atermoiement entre un débiteur et ses créanciers. J’opine pour le refus. M. Chasseboeuf de Volney. Dans aucun cas la France ne peut accueillir une offre qui blesse sa dignité; elle doit être encore rejetée si elle contrarie la justice et si elle peut être regardée comme le prix de la servitude du peuple génevois, accablé par la plus dure aristocratie. Tandis que nous travaillons à assurer la conquête de notre liberté, pouvons-nous, sans manquer à nos propres principes, consolider chez une nation voisine un système qui a manqué de perdre la France? Une vaine politique peut vendre des secours que l’équité désavoue et condamne, mais un peuple généreux et libre ne doit jamais se conduire que par les maximes d’une saine morale. Je travaille à connaître les véritables motifs de cette munificence, que nous ne devons accepter que dans le cas où elle serait offerte par des Génevois résidant et domiciliés en France. M. Barnave. L’offre des Génevois étant faite lar ceux qui gouvernent la République, on doit a considérer comme un appat tendant à engager a France à la protection du gouvernement aristocratique; la confiance que nous devons avoir daus notre crédit et nos propres forces, ne doit pas nous porter à accepter des secours étrangers; j’ai vu, d’ailleurs, une lettre de Genève par laquelle on assure que cette offre n’est point h\\%\ 2 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 décembre 1789. l’effet de la volonté de toute la République, mais bien de ceux qui la gouvernent. Enfin, la seule chose juste en rejetant cette offre est de faire payer aux Génevois qui possèdent des terres en France le quart des revenus. M. le marquis d’Estourmel. Je crois qu’il est convenable que M, le président écrive au ministre des finances pour s’instruire des causes de ce don et de l’intention de ceux qui le font. M. Chassebœuf de Volney. Depuis 35 ou 40 ans que la République de Genève est sous la garantie du gouvernement français, elle lui a coûté plus de 10 millions. Plusieurs membres , interrompant : Dites plus de 20 millions. M. Chassebœuf de Volney. J’ai entre les mains deux lettres de Genève, qui m’assurent que le don qui vous est offert n’émane pas de la République. Je demande que la discussion soit ajournée. L’Assemblée consultée ajourne à mardi soir l’affaire de Genève. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’Angély). Il y a quatre mois que les députés de Saint-Domingue sollicitent de l’Assemblée un décret qui autorise les colonies à recevoir des farines étrangères que la métropole ne peut leur fournir. Si la multitude des affaires ne vous permet pas d’entendre le rapport dont vous avez chargé, le 29 août, six membres du comité d’agriculture et du commerce, votre intention ne pouvant pas être que la colonie manque de subsistance, vous entendrez sans doute qu’elle se pourvoira elle-même . M. Paul Aalrac. Les colons ont pris cette permission d’eux-mêmes et depuis bien longtemps ils ont ouvert leurs ports. D’ailleurs les farines sont proportionnellement à meilleur marché dans la colonie que dans la métropole, puisque la farine ne s’y vend que 4 sous la livre. M. de Gony-d’Arsy. C’est une assertion dont l’orateur ne pourrait nous fournir la preuve. M. de Eameth. Il me paraît très-douteux que la farine puisse être à un prix si modique à Saint-Domingue, d’après le cours du blé en France. M. de Thébandière. Il est indispensable que l’Assemblée s’occupe de cette affaire, parce que la permission que le gouvernement a donnée pour l’introduction des farines des Etats-Unis expire au 1er février prochain. M. le Président. J’observe que cette affaire n’est point portée à l’ordre du jour. L’affaire de Saint-Domingue est ajournée à mardi après l’affaire de l’offrande de Genève. M. Daignon, médecin ordinaire du Roi, offre à l’Assemblée plusieurs ouvrages de sa composition et un thermomètre de santé, monté en or et garni de diamants, en se réservant la moitié d§ sa valeur. La confrérie du Saint-Sacrement de Saint-Roch fait un don patriotique de 2,002 livres en espèces. Les personnes qui l’apportent sont autorisées à assister à la séance. M. le Président donne lecture du résultat du scrutin pour la nomination des nouveaux membres du comité des recherches. Les députés élus sont : MM. Palasne de Champeaux, Buzot, Goupil de Préfeln, Gaultier de Biauzat, Bouteville-Dumetz, Alquier, Le Goazre de Kervélégan, l’abbé Joubert, Gourdan, Salicetti, Verchère de Reffye, Salomon de La Saugerie. M. de Lafare, évêque de Nancy, qui avait eu le même nombre de suffrages que ce dernier, donne sa démission. M. le marquis de Gony-d’Arsy. J’ai eu l’honneur le 2 de ce mois de prendre en présence de la nation un engagement solennel. Je viens vous prier de fixer le jour, après les fêtes, qu’il vous plaira d’accorder une audience entière pour entendre la dénonciation du ministre de la marine (1) et la lecture de toutes les preuves et pièces justificatives que nous sommes chargés de présenter à l’Assemblée nationale au nom de nos commettants. Pour éviter, s’il est possible dans une cause aussi importante, que des papiers ministériels ne travestissent mes paroles, comme certains l’ont déjà fait, et ne me fassent dire précisément le contraire de ce que j’aurais dit, je demande permission de déposer par écrit sur le bureau ces quatre mots, qui-contiennent la requête que j’ai l’honneur de vous présenter. Quelques voix : A l’ordre, l’orateur ! Le dépôt annoncé n’a pas lieu et l’Assemblée n’ordonne rien sur la motion. M. Coroller Du Monstoir, député d'Henne - bon. Je suis chargé de présenter un don patriotique de la ville de Port-Louis, qui n’est peuplée que de vieux militaires retirés et de marins sans fortune. Cette population aurait donné de grandes sommes si elle n’avait consulté que son patriotisme et elle a fait de grands efforts pour vous offrir celle de 947 livres. Les jeunes citoyens volontaires ont ouvert les premiers une caisse patriotique pour obtenir cette somme. Les officiers et soldats du bataillon auxiliaire des colonies me chargent également de vous offrir 2,250 livres. Les officiers et soldats du 1er bataillon de Bas-signy joignent à ces sommes, celle de 3,600 livres. Le bataillon auxiliaire des colonies ne s’est pas borné à offrir la somme de 2,250 livres; j’ajoute qu’une partie de ce bataillon employé au service du port de Lorient a versé dans la caisse patriotique de cette ville une autre somme de 1,190 livres. (1) M. de La Luzerne.