608 {Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I 18 brumaire an II 1 (8 novembre 1793 préparées ont paralysé toutes les résistances ; le défaut de subsistances pouvait devenir une arme terrible dans les mains des malveillants; par leurs soins et leur sollicitude, Ysabeau, Tal-Men, Baudot et Chaudron -Roussau ont brisé cet instrument de révolte, et nous espérons de leurs soins infatigables et de notre surveillance, que l’abondance renaîtra au sein d’un peuple long¬ temps opprimé par la faim et par le despotisme de la prétendue Commission populaire. « Ce département qui, par la prodigieuse in¬ fluence que lui avait acquise dans la République sa réputation dans les premières époques de la Révolution, semblait appeler à lui un pouvoir dictatorial, devait nécessairement être désigné et choisi pour le�principal foyer de la contre-révo¬ lution. Il_était| devenu, en effet, le repaire des intrigants et des conspirateurs : un petit nombre de purs républicains, que les mensonges artifi¬ cieux et les perfidiesÆde nos millionnaires qui avaient pris lejmasque du patriotisme, n’avaient point séduits/ ont conservé et alimenté le feu sacré de la liberté au milieu des conspirations qui voulaient l’anéantir. La présence de nos représentants a doublé, triplé les forces de ces vertueux républicains; ils ont comprimé l’au¬ dace effrénée des factieux, le glaive de la loi a déjàf frappé la tête de plusieurs J coupables, d’autres, avant que notre surveillance fût mise en activité par la loi, sont allés porter chez les nations étrangères leur opprobre et leurs re¬ mords. « La jeunesse bordelaise qui fut un moment égarée par les traîtres qui voulaient paralyser son courage,*! à| la ï voix des représentants du peuple qui ont parlé le langage de la vérité, s’est formée en nombreux bataillons, elle s’élance sur les frontières, et va prouver aux tyrans coalisés ce que peut la volonté suprême d’une grande nation qui, pour le maintien de la liberté et de l’égalité, abdique la paix et brave la mort. « Législateurs, courageux Montagnards ! à une grande absurdité, fruit de l’intrigue et des pas¬ sions, vous avez substitué une Constitution qui est l’ouvrage de la raison et de l’humanité. Redoublez d’efforts, s’il est possible, pour en assurer le’ maintien; restez fermes au poste d’honneur/ où la confiance nationale vous a placés; et /du sommet de la Montagne, lancez ces décrets* révolutionnaires qui glacent d’effroi les traîtres et les conspirateurs. Vous connaissez l’énergie et la valeur d’un peuple qui a dompté les insurrections du dedans qui, malgré les grandes trahisons de| plusieurs généraux, lutte avec succès contre la ligue des tyrans de l’Eu¬ rope : pour la renverser, il lui reste deux alliés redoutables à ses ennemis et qui ne l’abandon¬ neront jamais, le courage et la persévérance. Hâtez-vous donc, législateurs, de consommer, par un mouvement rapide et 4 général, cette Révolution glorieuse, et nos bouches et nos cœurs vous proclameront alors les sauveurs de la République. « Les membres composant le conseil général provisoire de la commune de Bordeaux. (Suivent 14 signatures. ) « Bordeaux, le 1er jour de la 2e décade du 2e mois de la 2e année de la République fran¬ çaise, une et indivisible. » Compte rendu du Journal des Débats et des Décrets ( 1 ). Un secrétaire lit une lettre de la commune de Bordeaux. ' Elle annonce que dans cette commune la République a triomphé des obstacles que lui opposaient le fédéralisme et l’aristocratie. La conspiration des Girondins a été dévoilée et déjouée. Plusieurs révolutionnaires ont déjà expié leur crime par la mort. La Révolution s’est faite à Bordeaux sans commotion. Les sans-culottes jouissent déjà des fruits de la véritable liberté; les malveillants n’ont plus d’amis; les républicains seuls sont armés et les véritables principes les animent. Y. Le ministre de l’intérieur demande que LA SESSION DES CONSEILS DES CORPS ADMI¬ NISTRATIFS SOIT RECULÉE (2). Suit le texte de la lettre du ministre de V inté¬ rieur, d’après un document des Archives natio¬ nales (3) : Le ministre de l’intérieur, au citoyen Président de la Convention nationale. « Paris, ce 16 brumaire, l’an II de la République française, une et indivi¬ sible. « Citoyen Président, « Plusieurs administrateurs de départements demandent que l’époque annuelle, qui est très prochaine, des sessions des conseils des corps administratifs soit reculée, attendu que les cir¬ constances extraordinaires où nous sommes les ont forcés d’envoyer une grande partie de leurs membres en divers lieux, soit pour la partie militaire, soit pour les subsistances. « Je dois te prier, citoyen Président, de mettre sous les yeux de la Convention nationale cette demande qui exige une prompte détermi¬ nation. Je n’ajouterai qu’une réflexion, et le département de l’Orne me la fournit, c’est qu’il serait convenable que les sessions périodiques fussent fixées peu de temps après l’année ré-(1) Journal des Débats et des Décrets (brumaire an II, n° 416, p. 254). D’autre part, l'Auditeur national [n° 413 du 19 brumaire an II (samedi 9 novembre 1793), p. 4] rend compte de l’adresse du conseil général provisoire de la commune de Bordeaux dans les termes suivants ; « Les citoyens de Bordeaux remercient la Con¬ vention de les avoir délivrés de la tyrannie de la prétendue Commission populaire. » (2) La lettre du ministre de l’intérieur n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 18 bru¬ maire an II ; mais il y est fait allusion dans le compte rendu de cette séance publié par le Mercure uni¬ versel. En outre, le texte original de cette lettre, qui se trouve aux Archives nationales, porte en marge l’indication suivante 2 « Renvoyé au comité de légis¬ lation, 18 brumaire an II. Philippeaux, secrétaire. » (3) Archives nationales , carton Dm 370, dossier 1, [Couvention aationale.j ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j f nb0™Xe “9“ 609 volue, afin que les comptes de ces administra¬ tions pussent embrasser l’exercice entier. « Paré. » Compte rendu du Mercure universel (1) Le ministre de l’intérieur demande que l’époque de la session des administrations soit changée. Renvoyé au comité de législation. VI. Le citoyen Jean -Alexandre Carnet trans¬ met a la Convention un mémoire conte¬ nant UN PROJET DE DÉNOMINATIONS ORDI¬ NALES POUR LES MOIS ET LES JOURS DE L’ AN¬ NÉE FRANÇAISE (2). Suivent le texte de la lettre d'envoi et celui du mémoire d'après des documents des Archives nationales (3) : « Montpellier, 7e jour de la lre décade de l’an II de la République française, une et indivisible. « Citoyen Président, « Des moyens de simplifier les dénominations ordinales du calendrier s’étant présentés à mon esprit, j’ai cru devoir en faire hommage à la Convention nationale. Je vous prie de vouloir bien être, auprès de cette Assemblée vraiment digne de gouverner le premier empire de l’uni¬ vers, l’interprète de mon respect et de mon admiration. « Salut et fraternité. « Jean-Alexandre Carnet. » Mémoire contenant un projet de dénominations ordinales pour les mois et les jours de Vannée française. I. Dans le système des poids et mesures, dont le calendrier ou mercure des temps est une dépen¬ dance nécessaire, on vient d’employer avec succès les dénominations ordinales. On y dé¬ signe, par exemple, 1,000 mètres par un miliaire et le centième de l’unité monétaire par un cen¬ time. C’est ainsi que les astronomes désignent le tiers et le quart du zodiaque par les mots trine ou quartite ; c’est encore ainsi que Romulus (1) Mercure universel §19 brumaire an II (samedi 9 novembre 1793), p. 139, col. 1]. (2) La lettre d’envoi et le mémoire du citoyen Carney ne sont pas mentionnés au procès-verbal de la séance du 18 brumaire an II; mais en marge du document qui se trouve aux Archives nationales, on lit l’indication suivants : « Renvoyé au comité d’ins¬ truction publique, le Î8 de brumaire an II de la République française, insertion au Bulletin. Phi-uppeaux, » (3) Archives nationales, carton F17 1007, dos¬ sier 1276. ayant formé une année de dix mois, en désigne les six derniers par les mots quintile, sextile, septembre, octobre, novembre et décembre. Mais les dix termes que je viens de citer ont évidemment, dans l'emploi que l'on en fait, un avantage notable sur les mots mille, un centième, tiers, quart, cinquième, sixième, septième, hui¬ tième, neuvième et dixième. Le terme mille ne désigne pas plus 1,000 mètres que 1,000 hommes ou 1,000 arbres ou 1,000 maisons. Un centième ne désigne pas plus une parcelle de l’unité moné¬ taire que d’une once ou d’un fil ou d’un inter¬ valle. Mais le mot miliaire désigne 1,000 mètres, et ne désigne que cela : le mot centime désigne la centième partie de l’unité monétaire, sans qu’on puisse l’appliquer à une fraction d’au¬ cune autre unité : les mots quintile, sextile, sep¬ tembre, etc., désignent l’ordre des mois, et des mois seulement. En un mot, les dix termes ci-dessus sont enlevés à l’usage commun et fixent l’esprit sur des objets particuliers. Parmi les patriotes les plus ardents, j’en ai vu qui, sans être plus attachés à la période septénaire qu’à toute autre, regrettent les mots lundi, mardi, etc. Us trouvaient plus facile de se rappeler le jour de la semaine que le quan¬ tième du mois, et il faut avouer que sur 100 per¬ sonnes prises au hasard, 90 ignorent le jour du mois, tandis qu’il n’en est pas 5 qui ignorent celui de la semaine, preuve incontestable que la première de ces choses est plus facile à retenir que la seconde (sic). « La dénomination purement ordinal 3, me disait un de ces patriotes, est fort commode pour le calculateur qui veut avoir la somme ou la différence de deux époques données, mais elle laisse nager dans le vide celui qui veut retenir un jour particulier. Les mots premier, second, troisième, etc., sont la signification la plus vague et la plus indécise, puisqu’elle est applicable à tous les objets soit physiques, soit idéaux; mais les mots lundi, mardi, etc., appar¬ tiennent uniquement au calendrier, et c’est, à mon avis, ce qui leur donne un corps, une tenue, une consistance que n’ont point les termes sim¬ plement numériques. L’appellation des sept jours de la semaine étant proscrite civilement, il faut sans doute y renoncer dans l’usage civil ; mais ne pourrait -on pas imaginer des noms pour les dix jours de la décade? Si cela ne se fait point, je désespère de savoir jamais à quel jour de l’année je me trouve. » IL Ces propos me firent naître l’idée de dénomi¬ nations ordinales qui seraient appropriées au calendrier. J’imaginai, par exemple, qu’on pour¬ rait appeler les trois mois d’automne (voy. la planche, cellule AE) : primai, secondai, terbal ; les trois mois d’hiver (cellule BE) : quartobre, quintobre, sextobre; les trois mois de printemps (cellule CE) : septime, octime, novime, et les trois mois d’été (cellule DE) : dizaine, onzaine, dou¬ zaine. Ces dénominations sont ordinales, comme l’exige le décret avec très grande raison; mais les terminaisons al, obre, ime et aine les atta¬ chent exclusivement à l’énonciation des dates. Remarquez que les mots complémentaire et révolutionnaire (cellule DE) riment avec les trois mois du dernier trimestre dont ils sont un appendice. 39 lie SÉRIE. T. LXXVIII.