388 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. JJ KSbrTm plaindre d’avoir perdu deux membres en défen¬ dant la liberté, mais bien pour vous exprimer mes regrets de ne pouvoir plus accompagner mes camarades dans le champ d’honneur, et venger la patrie des insultes de ses ennemis. Agé de 15 ans, j’avais le bonheur de servir la patrie. J’étais placé sur les palissades de Valen¬ ciennes, un boulet de canon m’emporta la jambe gauche .et me blessa la droite de telle manière, que je ne puis plus m’en servir. Mon père, en travaillant, nourrit mes frères. Je vous demande pour moi quelques secours. Citoyens, vous voyez à côté de moi le citoyen Hébert et son épouse; je rends hommage à leur humanité; ils m’ont prodigué tous leurs soins. Je me plais l’admission à la barre du citoyen Desert dans les termes suivants : I. Compte rendu du Bulletin de la Convention. Un jeune homme, âgé de 15 ans 6 mois, sur un brancard, a été introduit à, la barre. « Je ne viens pas, dit-il, dans le sein de cette auguste Assemblée, gémir sur l’événement malheu¬ reux qui m’a privé de l’usage de deux membres (les deux jambes), mais dire que je suis glorieux de les avoir perdus à la défense de la patrie, en combat¬ tant pour la liberté. Mon plus grand regret est d’être réduit à l’impossibilité de suivre une aussi belle car¬ rière dans laquelle je voulais me battre jusqu’à la mort, et mon dernier souffle eût été pour crier : Vive la République ! vive la Montagne ! » La Convention nationale décrète la mention ho¬ norable de la conduite du citoyen Albert, qui a pris soin du jeune Desert, volontaire de la section de la Fontaine de Grenelle, lui accorde un secours de 300 livres et renvoie au ministre de la guerre pour lui accorder une pension. II. Compte rendu du JournaCdes Débats et des Décrets. Deux citoyens introduisent à la barre un jeune militaire qu’ils portent sur�un brancard. Il prend la parole i « Je ne viens point me plaindre, dit-il, d’avoir perdu deux membres à la défense de la patrie, mais bien de ne pouvoir plus suivre mes camarades dans la carrière glorieuse que nous parcourions naguère ensemble. Agé de quinze ans et quelques mois, je servais déjà la patrie. Placé en sentinelle aux palis¬ sades de Valenciennes, un boulet de canon m’a em¬ porté la jambe gauche et a frappé la droite, de sorte que j’en suis aussi privé. Le travail de mes parents suffit à peine à la nourriture de mes frères et sœurs. Je viens vous demander du secours et ren¬ dre un hommage authentique à l’humanité du ci¬ toyen et de la citoyenne Hébert, qui m’accompa¬ gnent et qui m’ont prodigué tous leurs soins jusqu’à ce jour. (On applaudit vivement.) Le Président exprime la sensibilité de la Con¬ vention; il loue le courage du jeune guerrier et l’hu¬ manité de ceux qui l’accompagnent; il les invite tous aux honneurs de la séance. Ils entrent; chacun s’empresse aussitôt d’être l’or¬ gane de la patrie reconnaissante. On demande qu’il soit accordé un secours provisoire de 300 livres; que la pétition soit renvoyée au ministre de la guerre pour la constitution d’une pension, et qu’il soit fait mention honorable au Bulletin du civisme du jeune guerrier et des vertus hospitalières dont ses hôtes sont animés. Toutes ces propositions sont décrétées. à leur en témoigner ma reconnaissance. ( Vifs applaudissements ) . Le Président répond au pétitionnaire et l’ad¬ met aux honneurs de la séance, ainsi que ceux qui l’accompagnent. Plusieurs membres se disputent la parole pour demander que la Convention témoigne la reconnaissance de la patrie à ce jeune et brave guerrier. La Convention lui accorde un secours pro¬ visoire de 300 livres, renvoie sa pétition au mi¬ nistre de la guerre pour déterminer la pension qui lui est due d’après la loi, et décrète la men¬ tion honorable de son civisme, ainsi que les vertus hospitalières des citoyens qui lui ont donné des secours. La commune de Laudemont (Landemont), dis¬ trict de Mont-Gloud (Mont-Glone), département de Maine-et-Loire,- rendue à la liberté par la rentrée des armées de la République, a accepté la Constitution, offre les témoignages de sa re¬ connaissance à la Convention nationale, et l’in¬ vite à rester à son poste. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). ® Suit V adresse du conseil général de la commune de Landemont (2). « Landemont, le 20e jour du 2e mois de l’an II de la République française, une et indivisible, « Législateurs. « Les membres composant le conseil général de la commune de Landemont, district du Mont Glone, département de Maine-et-Loire, les uns-emprisonnés, les autres dispersés et réfugiés dans vos villes, durant la persécution que les aristocrates ont exercée dans leur malheureux pays, se sont enfin réunis à la maison commune sous la protection des armées de la République. Ils se sont procuré la Constitution républicaine que vous avez donnée à la France ; ils l’ont lue avec joie et reconnaissance et iis vous prient d’agréer leur acceptation. Plaise à l’Etre su¬ prême que cette Constitution sortie de la Mon¬ tagne, comme ses lois, soit éternelle comme lui. Mais permettez, législateurs, qu’ils vous disent que votre tâche n’est pas encore remplie et que leurs vœux sont : que vous restiez à votre poste jusqu’à ce que la France soit en paix, et la Constitution en pleine activité. « Salut. » (Suivent 9 signatures). (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 242. (2) Archives nationales� carton G 284, dossier 821.