[Convention nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. « 539 N® 1. Lettre du 'procureur syndic du district de Saint-Gaudens (1). Le procureur syndic du district de Saint-Gaudens, au citoyen Président de la Convention natio¬ nale. « Citoyen Président, « La commune de Saint-Gaudens a enfin triomphé du fanatisme, du prestige et de l’er¬ reur; elle m’a apporté le buste en argent de son patron ; if a pesé 68 marcs qui vont passer au creuset. Elle démolit le clocher de la paroisse. Un curé de l’arrondissement s’est déprêtrisé et part pour l’armée, simple volontaire; un ex-cha¬ noine a aussi livré aux flammes ses lettres de prêtrise; un vicaire de Saint-Gaudens a détruit de sa main dans la commune et dans toutes les avenues tous les signes fanatiques. Encore quelques jours, plus de prêtres, les calices, les ciboires, les ostensoirs, au creuset ; plus de dogme que celui de l’amour de la patrie, de la liberté et de l’égalité. C’est là le fruit des mâles efforts de la Société montagnarde de Saint-Gaudens. « Vive la République, son unité et son indi¬ visibilité ! « Le sans -culotte procureur syndic du district de Saint-Gaudens, « Mariande. « De Saint-Gaudens, le 28 brumaire l’an II de la République. » N° 2. Lettre du président du conseil du département de l'Aude (2). Le président du conseil du département de l'Aude, à la Convention nationale. « Carcassonne, le nonidi de la 3e décade de brumaire de l’an II de la République, française, une et indivisible. « Citoyens représentants, « Dans le département de l’Aude, comme au sein de la Convention, les ministres du oulte ca¬ tholique se déprêtrisent et se marient. Le ci¬ toyen Cazanave, ci-devant vicaire d’une des pa¬ roisses de cette commune et la citoyenne Gros ont donné hier cet utile exemple. Persuadés que la Convention nationale verra avec plaisir ce pas de plus fait vers la raison, cette victoire remportée sur les préjugés, ce dernier coup porté à la superstition, nous nous empressons de le lui annoncer. Toutes les administrations et la Société populaire de cette commune ont assisté à cette cérémonie, qui rappelle le triomphe de la vérité sur l’erreur, de la philosophie sur le fanatisme. « Le président et le procureur général syndic du département, précédés et suivis des autres fonctionnaires publics et d’un concours immense de citoyens, ont conduit les époux à l’autel de la patrie; ils ont allumé pour eux le flambeau de l’hymen; ils les ont offerts pour modèle à tous les patriotes, aux cris mille fois répétés de Vive la République! vive la Convention ! vive la Montagne ! Des prêtres ont célébré, par leurs discours, ce mariage que nous appelions depuis longtemps par nos vœux, et ils ont pris ren¬ gagement de se prévaloir bientôt eux-mêmes des droits inaliénables qu’ils tiennent de la na¬ ture; ils ont béni la Convention d’avoir, par ses décrets philosophiques, par ses lois révolution¬ naires, mûri la raison et hâté le règne henreux de la vérité. « Législateurs, vous avez plusieurs fois sauvé la patne, achevez d’affermir la liberté et ne quittez les rênes du gouvernement, que lorsque tous les ennemis de la République seront anéan¬ tis, tous les préjugés vainous et tous les Fran¬ çais devenus sans-culottes. « Vive la République une et indivisible ! « Salut et fraternité. « Pech, président. » N° 3. Lettre écrite au citoyen MicJiaûd, député, par le citoyen Claudet, procureur de la commune de Pontarlier, département du Doubs (1). « Pontarlier, le 4 frimaire de l’an II de la République française, une et indivisible. « Représentant du peuple, « Je te prie d’annoncer à la Convention que le conseil général de cette commune a arrête à sa séance du jour d’hier que tous meubles pré¬ cieux tout à fait inutiles servant au culte se disant catholique seraient, à la diligence de la municipalité, envoyés*à la Convention pour être purifiés au creuset national, conséquemment servir à l’affermissement de la liberté. « Ces objets consistent en sept calices, six patènes, une paire de burettes, deux plats, un soleil, un encensoir, trois ciboires, une navette, six services, trois ouillers à ragoût, une écuelle et son couvercle et deux chandeüers de table, le tout en argent. « Par le premier courrier, je t’annoncerai leur arrivée en t’envoyant le procès-verbal consta¬ tant le poids. « Comme tu vois, voilà un grand pas pour nos montagnes vers la philosophie ! (1) Archives nationales, carton C 283, dossier 810. (2) Archives nationales, carton C 284, dossier 821. (1) Archives nationales, carton C 283, dossier 810. | Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j � 540 « Tu diras de plus que nos cloches sont déjà parties pour être converties en canons; cet ob¬ jet est d’environ huit milliers pesant; que les chandeliers en cuivre ont fait partie de ce con¬ voi ; que les fers et grilles des différentes églises de cette commune sont démontés et prêts à partir pour Besançon (il y en a environ 40 mil¬ liers); que les femmes et filles s’occupent depuis longtemps à faire de la charpie qu’elles desti¬ nent au soulagement de nos braves défenseurs; ue les ex-hospitalières ont été remplacées par e braves et vertueuses républicaines; qu’enfin le citoyen Barrey, prêtre et vicaire du culte sa¬ larié, après s’être rendu aux vœux de la nature, a abdiqué publiquement son caractère d’impos¬ teur. « Tu trouveras sous ce pli l’extrait de sa dé¬ claration que tu feras passer au comité d’ins¬ truction publique en conformité du décret de la Convention inséré au Bulletin, séance du 24 brumaire. « Tu me feras plaisir de m’accuser réception de l’envoi dudit extrait. « Reçois les embrassements de tous tes amis et particulièrement les miens. « Ton frère et ami, « Claudet, 'procureur de la commune. » Extrait du registre des délibérations du conseil municipal de la commune de Pontarlier (1). A la séance publique et permanente du tridi de la première décade de frimaire de l’an second de la République française, une et indivisible. Le citoyen Barrey, prêtre et vicaire de cette paroisse, devenu homme dès l’octidi de la troi¬ sième décade de brumaire, voulant encore don¬ ner de plus grandes preuves de son patriotisme, a non seulement abdiqué sa qualité de men¬ teur, c’est-à-dire de prêtre, a déposé sur le bu¬ reau ses lettres de prêtrise, celles des quatre ordres mineurs, celles du sous-diaconat, celles du diaconat, enfin celles de prêtre et vicaire pour Pontarlier pour à l’instant être brûlées, déclarant en outre que par la suite il ne dirait plus que la vérité. En foi de quoi il a signé au registre : Barrey. Et à l’instant lesdites lettres ayant été livrées aux flammes, aux cris de Vive la République! la municipalité applaudissant aux principes de philosophie dudit Barrey, a arrêté qu’extrait du présent lui serait délivré. Signé au registre : Claudet; A. Argez; Sa-MET; C. J. WlLLEMIN; Ta VERNIER; Ta VER¬ NIER (D.-M.); Livremon père; Simon et Jacquemet, secrétaire-premier. Pour expédition : Jacquemet, secrétaire-greffier. (I) Archivés nationales, carton C 283, dossier 810. N° 4. Lettre des officiers municipaux de la commune de Void. Compte rendu du Bulletin de la Convention (1). Les officiers municipaux de la commune de Void, département de la Meuse, écrivent que leurs cloches vont se changer en canons. « Nous vous envoyons, disent-ils, nos bons dieux d’ar¬ gent, pesant 14 livres 11 onees, pour les trans¬ former en espèces républicaines. N’abandonnez le gouvernail que quand le vaisseau de l’État sera hors de danger. » Mention honorable. N° 5. Lettre des administrateurs du district de Chinon (2). Les administrateurs du district de Chinon, au citoyen Président de la Convention nationale. « Chinon, 8 frimaire l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. « Citoyen, « La raison l’emporte enfin sur la supersti¬ tion ; le flambeau de la philosophie semble éclai¬ rer tous les yeux. Déjà 14 communes ont ap¬ porté à l’administration toute l’argenterie de leurs églises et tous les autres outils du culte catholique, même en cuivre. La loi conservait à chaque commune une cloche, il s’en trouve qui les envoient toutes. « Nous aimons mieux, « disent les habitants des campagnes, de bons « canons pour défendre la patrie, qu’entendre « ces sons de sinistre présage. » « Sans doute sous peu de jours l’administra¬ tion aura toute l’argenterie du district, elle s’em¬ pressera de suite de la faire passer à la Con¬ vention. « A chaque séance de la Société populaire les prêtres rendent hommage à la République en brûlant leurs lettres de prêtrise; le fanatisme doit enfin courber pour toujours sa tête hideuse sous les lois immuables du bon sens. « Dechartre ; B astard, vice-président; Bran¬ ger; Bonneau; Champignt, procureur syndic; Lelorrain, secrétaire. » (1) Supplément au Bulletin de la Convention de la séance du 3e jour de la 2e décade du 3e mois de l’an II (mardi 3 décembre 1793). (2) Archives nationales, carton C 284; dossier 821;