archives parlementaires. [24 février 1791.] 494 [Assemblée nationale.] « avec les chevaux qui lui sont nécessaires. ( Rires et applaudissements .) « Qu’il sera donné à Mesdames une garde pour « leur sûreté et tranquillité, et un double extrait « de la présente délibération par la voie de M. de « Narbonne. « Fait en la maison commune, etc., etc... « Signé: VÉLY. » « Nous soussignés, officiers municipaux, certi-« fions, à tous qu’il appartiendra, que le sieur « Véîy, qui a signé l’extrait ci-dessus, est secré-« tairc-greffier de la municipalité. » M. l’abbé Haury. S’il devait y avoir deux avis dans cette Assemblée sur l’objet de la délibération que l’on vous propose en ce moment, je n’aurais demandé la parole que le second et je me serais réservé la faculté de connaître des objections qu’il m’est impussible de prévoir. Les principes exposés dans le procès-verbal que vous venez d’entendre sont d’une nature très sérieuse et très intéressante pour la liberté publique. La municipalité d’Atnay-le-Duc, qui vous instruit de ce qui vient d’arriver dans son sein le 22 de ce mois, ne peut être suspecte d’aucune espèce de partialité. Elle ne nous dit pas qu’elle a été forcée par la commune; mais le texte entier de son procès-verbal susipose que si la municipalité, à qui l’autorité provisuire est déférée par la Constitution, avait pu faire respecter ses ordres, le voyage de Mesdames n’aurait point été troublé. Il est infiniment dangereux de voir ainsi s’élever la multitude contre l’autorité des corps administratifs et de se substituer à leur place. Le peuple français est libre ; mais le peuple, qui est la source de tons h-s pouvoirs, ne doit en exercer aucun p, r lui-même. Les habitants d’Arnay-Ie-Duc ont des officiers mun cipaux dans lesquels ils doivent avoir une entière confiance, puisqu’ils les ont choisis; ils 11e peuvent un seul instant suspendre l’autorité qu’ils ont créée par leur choix pour l’exercer eux-mêmes. La municipalité d’Arnay-le-Duc ne mérite donc aucun reproche. Mais, Messieurs, dans un temps où il n’existe presque plus d’autre tribunal dans Je royaume que le tribunal de l’opinion publique, il importe bien moins d’exercer notre puissance que de répandre les véritables principes de la Cons!ituiiou française. Il faut doue, Messieurs, que le royaume entier sache qu’il n’existe aucune loi en France qt i soumette des voyageurs quels qu’ils soient à avoir des passeports. La liberté, Messieurs, n’est pas une exception ; la liberté est un droit, et toutes les fois qu’un homme n’est point privé de sa liberté par un jugement compétent, celui qui porte atteinte à la liberté d’un citoyen français viole les droits les plus essentiels de la Constitution. Mesdames, dans la rigueur de vos principes, Messicuts, n’étaient donc pas obligées de ; résen-ter un passeport. Elles ce pouvaient pas surtout présenter un passeport de l’Assemblée nationale, parce que l’Assemblée nationale, occupée de tous les intérêts qui sont communs à tous les citoyens, ne connaît aucun particulier en France et ne donne par conséquent des passepoils qu’à ses membres. La conduite de Mesdames a donc été sans reproche au moment où elles sont parties. La commune d’Arnay-le-Duc, en les arrêlant, Messieurs, a été égarée par un prétexte frivole qui vous est dénoncé dans le procès-verbal. La commune de Paris vous avait présenté une pétition. Elle vous demandait une loi conslitu-t onnelle qui fixât les droits des personnes augustes qui composent la dynastie régnante. Une pétition de la commune de Paris n’est pas un décret, et il serait bien extraordinaire que toutes les fois que la commune de Paris voudra vous présenter une pétition, le provisoire lui fut accordé dans le royaume avant même que le corps législatif ait prononcé. Eh, Messieurs, c’est ma-uif stement le provisoire que la commune d’Arnay-le-Duc a donné à la commune de Paris, et cela contre l’autorité du roi qui s’était expliqué par un passeport et contre la prudence du Corps législatif qui n’avait point fait droit sur la demande de la commune de Paris, mais qui l’avait renvoyée à son comité de Constitution. Vous ne pouvez donc tolérer l’insurrection de la multitude contre une municipalité, le plus faible, mais le premier des corps administratifs. Vous ne pouvez pas exposer les municipalités à se voir forcées à agir contre le vœu de leur conscience, à déposer des droits qu’elles tiennent de la loi. Le procès-verbal dont on vous a donné lecture est certainement l’ouvrage des plus habiles praticiens; on croirait qu’il a été rédigé par un procureur. On y fait les plus adroits rapprochements des dates; on y dit que la date du passeport devrait être postérieure à celle de la pétition de la commune dé Paris; tout cela, pour prouver que le nom du roi ne doit pas être respecté dans le royaume. Ces observations, faites pour tenir de l’espace dans l’étude d’un procureur, ne méritent aucune attention de l’Assemblée. Je demande donc que l’Assemblée nationale décrète dans l’instant qu’a-près avoir entendu la lecture du procès-verbal dressé dans la maison commune d’Arnay-le-Duc, désapprouvant l’insurrection anticonstitutionnelle de la commune d’Arnay-le-Duc contre le vœu de la municipalité d’Arnay-le-Duc, déclarant que le peuple n’a jamais droit de s’opposer, même provisoirement, aux décisions des corps administratifs, puisque la manière de se pourvoir lui est assurée par la Constitution en lui ouvrant toutes sortes de recours auprès des co1 ps administratifs qui lui sont supérieurs; l’Assemblée nationale désapprouve la commune d’Arnay-le-Duc, lui défend de mettre aucun obstacle au passage de Mesdames, tantes du roi, qui, en voyageant pour sortir du royaume, exercent une faculté dont la Constitution n’a encore privé aucun citoyen français. Pour rassurer l’Assemblée nationale, je lui rappellerai que son comité de Constitution, dont l’autorité provisoire me semble un peu plus imposante que celle de la commune de Paris, ne propose pas dans le projet de décret qu’il vous a présenté de mettre des obstacles à la liberté des personnes de la famille du roi dans le degré ou se trouvent Mesdames. J’ai une seconde observation à vous faire, c’est que la loi ne peut avoir un effet rétroactif. Les communes ne peuvent décider contre le vœu des muniripalités et des départements, contre le silence du Corps législatif qui n’avait mis aucun obstacle à un départ dont il était instruit. Il ne faut pas souffrir que le peuple exerce un pouvoir dont il est la source, mais dont l’autorité royale et le Corps législatif sont les réservoirs. Ce serait méconnaître les intérêts du peuple; ce serait sacrifier sa propre liberté que de ne pas lui dire et lui redire quM ne doit exercer aucun [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 février 1791.] 495 pouvoir, et que les corps administratifs créés par fa loi que le peuple a créée doivent être écoutés quand ils parlent en son nom. M. Regnaud (de Saint-Jean-d' Angêly). Je crois, eomme le préopinant, qu’en principe les citoyens doivent voyager librement et que les communes ne peuvent, ni par la force, ni par l’expression de leurs vœux, s’opposer aux intentions des municipalités. Mais ici il ne paraît pas que l’intention de la municipalité d’Arnay-le-Duc ait été contraire à la délibération de la commune. La conduite de la commune est suffisamment excusée par les troubles et les terreurs dont nous sommes environnés. Si nous étions dans un moment calme, j’adopterais la proposition qui vous est faite de témoigner votre désapprobation, mais quand les gens de l’esprit le plus sage voient dans les projets des ennemis de la Révolution de quoi appuyer au moins la moitié de ces terreurs, il est possible de ne trouver dans la conduite de la commune d’Arnay-le-Duc que l’acte d’un patriotisme exagéré. ( Murmures et applaudissements.) Je ne crois donc pas que vous puissiez prononcer une improbation solennelle, et je pense que sur cette première partie de la motion du préopinant, il n’v a pas lieu à délibérer. Sur la seconde partie je" ne diffère d’avec lui que sur la forme de la rédaction. L’Assemblée peut-elle dire qu’il faut rendre à Mesdames la liberté de continuer leur voyage? Cela n’est pas de son ressort. S’il existe une loi, c’est au roi à la faire exécuter ; s’il n’en existe pas, c’est au roi à assurer à tous les citoyens la liberté de faire ce que la loi n’a pas défendu. (Murmures.) Je ne dis pas que l’attachement de Mesdames pour le roi, que leur amour pour la paix publique n’aurait pas dû leur prescrire une conduite différente; mais je dis qu’il ndxiste pas d’autre loi que celle qui exige la permission du rui et que cette permission a été donnée. On s’est autorisé de la pétition de la commune de Paris; mais la demande d’une loi n’entraîne pas l’inexécution des lois existantes, ou bien il y aurait un espace de temps pendant lequel la loi ne subsisterait pas, et, pendant cet intervalle, il n’y aurait plus de société. Il faut motiver le décret, en disant que pour a-surer le respect dû à des lois non abrogées et à l’autorité des corps administratifs, l’Assemblée renvoie cette affaire au roi, entre les mains duquel reposent tous les moyens nécessaires pour faire jouir les citoyens de la liberté assurée par la loi. M. Fréteau. Dans une circonstance à peu près semblable, l’Assemblée a décrété que M. Necker, retenu inconsütutiormellement, aurait la liberté de continuer son voyage; vous ne pouvez en user autrement aujourd’hui à l’égard de Mesdames. Le préopinant a bien reconnu le principe sur lequel il ne peut y avoir deux opinions dans l’Assemblée; mais il en a tiré mal la conséquence, en demandant le renvoi au pouvoir exécutif. Lorsqu’une municipalité méconnaît un des principes les plus sacrés que vous ayez proclamés, quand elle enfreint une de vos loi-, est-il au-dessous de votre dignité, n’est-il pas de: votre devoir de manifester hautement votre désapprobation et de rappeler cette municipalité solennellement à ses obligations ? G’est parce que la Constitution est menacée par des factieux, que tous les bons citoyens doivent se réunir pour que les actes d’insubordination et toutes les atteintes portées à la loi soient désormais réprimés. Je ne puis adhérer à ce qu’on a dit pour excuser un zèle inconsidéré; aujourd’hui que tous Ls pouvoirs sont marqués, que tous les corps administratifs et judiciaires sont établis, il est néces-saii e de réprimer avec éclat tous les excès par lesquels une partie du peuple s’élèverait au-dessus d’eux et mettrait en suspens leur autorité. (Murmures et applaudissements.) Vous avez voulu que les municipalités fussent garantes de l’infraction faite aux lois : il y a aujourd’hui un an que vous avez rendu ce décret. Eh 1 que deviendrai' nt les principes, que deviendrait cette responsabilité, si une commune pouvait mettre sa volonté à la place de celle du corps municipal, dans les choses où ce corps a seul le droit de vouloir ! En vain les tribunaux, en vain les corps administratifs excercent les pouvoirs conformément à la Constitution, si l’appel interjeté à la multitude elle-même de l’exécution de vos décrets, rend inutiles et infructueux toutes les vertus, tout le civisme, tout le courage des citoyens qu’elle a elie-même appelés à l’administration. (Applaudissements.) Il serait inutile de faire des lois si, quand leur exécution est jurée par le peuple, elles sont détruites par le peuple même. On me dira que la Constitution est établie de droit et non de fait; mais ici cette observation est de nulle valeur. La commune a été avertie, par le district et par la municipalité, qu’aucune loi ne s'opposait au départ de Mesdames. Je demande donc la double mesure, et qu’il soit dit : d’une part, comme le roi vous le demande dans ce moment-ci, que la liberté de continuer leur voyage est assurée à Mesdames, qui se sont mises en route avec toutes les précautions qu’elles pouvaient prendre; et, d’autre pari, que vous exprimiez dans votre décret une improbation de la conduite tenue par la commune d’Aruay-le-Duc et que vous la déclariez inconstitutionnelle. (Applaudissements.) M. d’André. La question qui se présente est extrêmement simple; elle ne peut au fondéprou ver aucune difficulté. Mesdames sont arrêtées à Arnay-le-Duc; la commune donne pour motif qu’y ayant une pétition de la commune de Paris, renvoyée au comité de Constitution, elle n’a pas pu laisser passer Mesdames. 11 faut donc savoir à présent si une pétition renvoyée au comité de Constitution peut suspendre l’exécution d’une loi ou être considérée comme une 1 A. Il me semble que personne ne peut être de cet avis; et il su [fit de déclarer que nulle loi ne s’oppose au départ de Mesdames. Renvoyer purement et simplement au pouvoir exécutif, ce serait amener une solution toute différente : la municipalité et le district sont ses agents pour l’exécution de la loi ; ils n’ont pu assurer cette exécution. Ce serait dire au roi : « Envoyez des troupes. » Dans les circonstances présentes, il faut tâcher que les lois soient exécutées paisiblement. Une dééla-ation de Ja part du Corps législatif suffira; il faut la donner. Ainsi je propose le décret suivant : < L’Assemblée nationale déclare qu’il n’y a aucune loi qui s’oppose au départ de Mesdames. » M. Barnave. La commune dont on attaque la conduite n’a pas été mue par une résistance à la loi, mais seulement par le doute qui s’est élevé sur le sens et sur l’exécnti m des décrets rendus dans le sein de l’Assemblée nationale; elle n’a ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 février 1791.) 496 [Assemblée nationale.] cru agir que pour le Lien commun ; ou ne peut lui reprocher que l’inconsidéralion de son zèle. C’est donc l’explication de ces mêmes décrets que l’on doit donner et alors le pouvoir exécutif aura tous les moyens nécessaires pour faire exécuter la loi réelle. Je propose, en conséquence, que le décret que vous allez rendre soit ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, considérant que les décrets d’ordre rendus dans son sein ne sont nullement lois du royaume et obligatoires pour les citoyens; (Murmures-) « Considérant qu’aucune loi ne s’oppose à l’éloignement de Mesdames ayant une permission du roi ; « Renvoie au roi, pour statuer sur les suites de la permission qu’il leur a donnée, et charge son Préûdent de remettre à Sa Majesté les différents décrets eu exécution desquels l’Assemblée nationale est prête à statuer sur les devoirs des membres de la famille royale. » ( Murmures prolongés .) M. de Mirabeau. Je demande la parole. M. le Président. Laissez-moi poser la question. M. de Mirabeau. La question me paraît si simple, que je ne croyais pas qu’elle eût besoin d’être posée. M. le Président. Il faut établir l’état de la délibération. M. de Mirabeau. La discussion n’est pas fermée et je dois avoir la parole. M. le Président. M. Fréteau a proposé. . . . M. Fréteau. Voici ma rédaction: « L’Assemblée nationale déclare inconstitutionnelle la délibération de la commune d’Arnay-le-Dnc du 22 de ce muis, tendant à suspendre le voyage de Mesdames (Murmures.) ; ordonne que le roi sera prié d’assurer, par les moyens que la Constitution met en son pouvoir, la liberté (Murmures.) ..... de tous les citoyens français ; et déclare qu’aucune loi n’a ôté à Mesdames le droit de continuer leur voyage. » Plusieurs membres demandent la question préalable. Plusieurs membres demandent la priorité pour la rédaction de M. d’André. M. de Mirabeau. Monsieur le Président, comme il est extrêmement ..... M. de Tracy. J’avais certainement Ja parole avant vous. Monsieurle Président, je n’attends que l’ordre de l’Assemblée pour dire mon opinion. Plusieurs membres : Parlez ! parlez ! M. le Président. Il y a un ordre de discussion proposé sur la question. D’ailleurs, vous n’auriez pas la parole; elle appartient d’abord à MM. Bouchotie, Le Chapelier, de Grillon. On a réclamé une priorité; c’est sur cela que M. de Mirabeau a demandé la parole. M. de Mirabeau. Je demande la priorité pour la rédaction que je vais proposer, et comme cette question me paraît avoir consumé beaucoup de temps, je ne motiverai mon opinion que dans le cas où elle éprouverait de l’opposition. Voici comment je rédige le projet de decret par lequel vous avez à déclarer un principe incontestable : « L’Assemblée nationale, considérant qu’aucune loi existante du royaume ne s’oppose au libre voyage de Mesdames, tantes du roi, déclare qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur le procès-verbal de la commune d’Arnay-le-Duc ; renvoie l’affaire au pouvoir exécutif.» (Applaudissements à droite et au centre.) M. de Tracy. Voici ma rédaction... M. de Mirabeau. Je vais motiver la mienne en très peu de mots. Ce n’est ici qu’une question de fait ; car ce que l’Assemblée statuera, demain ou après, ne décidera pas si Mesdames ont aujourd’hui le droit de voyager. Cette question ne peut être jugée que par l’état présent des lois : or nulle loi ne les en empêche. Et il faut bien que l’Assemblée nationale l’ait pensé ainsi, puisqu’elle n’a pas cru devoir prendre de mesures legales pour empêcher l’exécution du voyage dont elle était averlie et qu’elle n’y a pas mis d’obstacle; il faut bien aussi que la municipalité de Paris l’ait pensé ainsi, puisqu’elle a délibéré qu’aucune loi ne s’opposait au départ de Mesdames; puisque, dans sa pétition, elle demande une loi nouvelle et ne réclame pas l’exécution d’uee loi existante. Qu’objecte-t-on dans le système de ceux qui veulent que l’Assemblée prononce une improbation formelle? On dit qu’il y a une infraction à la loi. Mais l’Assemblée nationale en ordonnant l’impression de la pétition de la commune de Paris a fort concouru peut-être à induire en erreur et à élever les doutes dont nous voyons l’effet. (Applaudissements.) Ce n’est pas tout ; on ne peut se dissimuler que nous ne nous trouvons pas dans des circonstances ordinaires, que nous ne sommes pas encore parvenus à établir le jeu régulier de l’organisation sociale; il y aurait donc une extrême rigueur à imprimer la tache d’une désapprobation sur une municipalité qui s’est adressée à vous, en motivant sa conduite d’une manière très respectueuse pour le chef de la nation? (Applaudissements .) Je le demande à tous les opinants dans tous les systèmes : que voulons-nous en ce moment? Nous voulons faire une déclaration qui, ne laissant aucune espèce de prétexte à une infraction à la loi existante, nous assure que la tranquillité publique ne sera pas troublée par la continuation du voyage de Mesdames, parce que certes la paix publique est notre premier devoir et notre première sollicitude. Eh 1 n’avons-nous pas de trop grands objets de surveillance et de sollicitude pour donner au voyage de Mesdames plus d’importance qu’il eu a? (Applaudissements.) Que vous demandé-je? La déclaration d’un fait incontestable, une prononciation parfaitement régulière et enfin un renvoi qui est un hommage à la loi. Je dis : « L’Assemblée nationale, considérant qu’aucune loi existante du royaume ne s’oppose au libre voyage de Mesdames ..... » Ce fait est-il contesté, oui ou non?... M. Gourdan. Je le conteste. M. de Mirabeau. Existe-t-il une loi ? [24 février 1791.] 497 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] M. Gourdan. Il y en a une; c’est le salut du peuple. ( Murmures et applaudissements .) M. de Mirabeau. Le salut du peuple est surtout intéressé à ce qu’il n’y ait pas de tiraillement d’opinions et de mouvements en sens contraire, quand la chose publique exige une unité parfaite d’actions et de volontés. Le salut du peuple n’est pas intéressé à ce que Mesdames couchent 3 ou 4 jours de plus en route. Leur voyage est peut-être un mouvement d’imprudence; mais il ne porte aucune atteinte à la loi. Tous les bons citoyens, sans doute, doivent, dans les circonstances qui nous pressent, restera leur poste et montrer leur attachement au chef de la nation. Mesdames ont fait une chose imprudente, impolitique; mais non illégale : il n’y a donc pas lieu à délibérer ; et puisqu’il y a eu empêchement à l’exécution de la loi, il faut renvoyer au suprême exécuteur de la loi. Pourquoi l’Assemblée se chargerait-elle d’une responsabilité qui n’est pas la sienne? Je soutiens qu’il est de sa sagesse, de sa politique, si un corps aussi puissant peut avoir de la politique, de renvoyer cette affaire au pouvoir exécutif. M. de Tracy. Je ne discuterai pas, j’ai une rédaction à proposer. Je suis d’accord avec le préopinant sur le fait et sur les principes, et je ne diffère que dans un point. Le principal objet n’est pas le voyage de Mesdames, mais le respect dû à la loi. Ou il y a une loi, ou il n’y en a pas : dans le premier cas, elle doit être observée, elle n’est point abrogée; dans le second, il en est une aussi ancienne que la nature, c’est que ce qui n’est pas défendu est permis. (Murmures.) Voici mon projet de décret : « L’Assemblée nationale déclare qu’aucune loi existante ne s’oppose au voyage de Mesdames, et en conséquence elle désapprouve les obstacles qui y ont été apportés...» ( Nouveaux murmures.) Ce n’est pas là une mesure sévère, c’est l’application des principes. Je continue : « et ordonne qu’ils soient levés ». Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée. M. Alexandre de iLameth. Je veux présenter une raison. Un grand nombre de membres : Il faut fermer la discussion. (La discussion est fermée à la presque unanimité.) M. Camus. J’adopte la rédaction de M. d’André, mais avec cet amendement : « Et sera le Président chargé de se retirer par devers le roi pour le prier de ne point accorder de permission à aucune autre personne de sa famille pour voyager, jusqu’à ce que le décret ajourné sur cet objet ait été rendu par l’Assemblée nationale et accepté par le roi. <» ( Applaudissements .) M. Alexandre de Eamelh. Malgré le mouvement que me paraît avoir l’opinion de l’Assemblée, je crois devoir exprimer ma pensée. Je suis loin de croire, avec plusieurs des préopinants, que le voyage de Mesdames présente peu d’importance; je suis loin de penser qu’il soit peu important qu’une partie de la famille royale sorte lre Série. T. XXIII. du royaume et donne le spectacle scandaleux d’aller provoquer, d’aller réunir des ennemis contre une Révolution qui lui assure de si grands avantages. (Murmures à droite ; applaudissements à gauche.) Un membre à droite : Nous voyons ce que la Révolution leur a ôté; monîrez-nous ce qu’elle leur a donné. M. d’Estourmel. La discussion est fermée. M. Alexandre de Lameth. Je m'étonne que les opinants ne distinguent pas les moments qui accompagnent la Révolution de ceux qui la suivent... M. d’Ëstourmel. Monsieur le Président, monsieur n’a pas la parole pour discuter. M. Alexandre de ILameth. Je ne suis pas étonné, Messieurs, qu’une partie de l’Assemblée veuille m’obliger à ne point motiver la rédaction ue je veux vous proposer; certes, on ne deman-erait pas mieux que l’Àssemblée nationale, que la nation entière, en regardant la Révolution comme achevée, oubhât ta sollicitude, Ja surveillance, qui, seules, peuvent en assurer le succès. M.d’Estourmel. Mais, Monsieur le Président... M. Alexandre deEameth. Je prie, et avec instance, tous les membres de cette Assemblée qui, depuis 20 mois, ont donné tant de preuves de patriotisme et de courage, de ne pas se méprendre snr le sentiment qu’on veut leur inspirer: celui d’une sécurité aveugle perdrait la chose publique. Et, je le répète avec toute la force que peut donner la conviction, la Révolution ne s’achèvera pas, si on se laisse aller à la regarder comme achevée. (Applaudissements.) On vous propose de blâmer la commune d’Ar-nay-le-Dac. . . M. de Etochebrune. Je demande si la discussion est fermée. M. Alexandre de Lameth. Je le dirai avec franchise : je ne puis dissimuler l’étonnement que j’ai éprouvé eu voyant, après la lecture du procès-verbal que vous avez entendue, des membres patriotes se laisser aller à vous proposer d’im-prouver formellement la conduitede la commune d’Arnay-le-Duc, conduite dont le procès-verbal m’a paru présenter l’exemple du patriotisme le plus pur, conduite qui est motivée sur le renvoi que vous avez ordoiiué de la pétition de la commune de Paris au comité de Constitution. ( Mouvement prolongé à gauche.) M. d’André, montrant le côté gauche. Monsieur le Président, voulez-vous bien mettre l’ordre là-bas, car on va bientôt s’y battre. M. de ILianeourt. J’exige, Monsieur le Président, que vous forcjezl’opinantàse renfermerdans sa rédaction. M.Regnand (de Saint-Jean-d' Angély). Monsieur le Président, vous n’avez pas le droit de laisser parler M. de Lameth. M. Alexandre de Lametli. Puisqu’on me presse d’en venir à ma rédaction, voici mon opi-32 {Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (24 février 1791.] 498 nion: je pense que les lois anciennes encore existantes donnent au roi le droit d’accorder ou de refuser aux personnes de sa famille la permission de voyager lior3 du royaume. Mou avis est donc que, sans permettre qu’aucun obstacle soit apporté au voyage de Mesdames et qu’en déclarant que les lois anciennes ne sont pas abrogées, M. le Président soit chargé de prier le roi de peser dans sa sollicitude s’il doit, dans les circonstances actuelles, permettre à Mesdames de sortir du royaume. M. de Folleville. L’Assemblée ne tombera pas dans le piège qu’on lui tend. (Bruit.) M. le Président agite la sonnette. M. de Folleville. Vous ne sonniez pas quand M. de Lameth parlait. M. d’André. Je me renferme dans la question ; je n’ai pas de réflexions à faire à l’Assemblée ni au public. La question est de demander la priorité pour ma proposition, qui me paraît la plus sage et je demande qu’on la mette aux voix. M. de Mirabeau. Je réclame la priorité pour ma motion. M. il’André. J’adopte la rédaction de M. de Mirabeau; la sienne et la mienne, c’est la môme chose. Plusieurs membres demandent la priorité pour la rédaction de M. de Lameth. (L’Assemblée accorde la priorité à la rédaction de M. de Mirabeau.) M. Barnave. J’ai à proposer un amendement qui rentre dans l’idée deM.de Lameth, et qui peut s’adapter à la rédaction de M. de Mirabeau. 11 consiste à charger M. le Président de dire au roi, que de lui dépend d’accorder ou de refuser la permission de voyager aux membres de sa famille. Je demande aussi que M. le Président mette sous les yeux de Sa Majesté la situation du royaume et les motifs pressants qui se puisent dans l’intérêt public. (Applaudissements à gauche.) Plusieurs membres demandent la question préalable. M. Brlois-Beaumetz . Je demande la parole. M, le Président. Je ne vous la donne pas. M. Hegnaud (de Saint - Jean-d'Ângély). Monsieur le Président, vous n’avez pas le droit de refuser la parole à M. de Beaumetz. M. le Président. Monsieur, vous n’avez pas la parole. M. Regnatid (de Saint-Jean-d' Angély) . Vous n’avez pas le droit de m’imposer silence; je demande que l’Assemblée soit juge entre vous et moi. Parlez, Monsieur de Beaumetz, vous avez la parole. M. le Président. Je ne puis donner la parole à M. de Beaumetz sans que l’Assemblée l’ordonne. ( Murmures prolongés.) . Plusieurs membres se lèvent et demandent la parole. M. de Fa Rochefoucauld. Il résulterait de ce que M. le Président vient de dire... M. d’André. Monsieur le Président, je. demande la parole contre vous. (Applaudissements au centre et à droite.) M. de Fianconrt. Monsieur le Président, vous êtes partial ; c’est un despotisme parlementaire. M. le Président. Je ne connais de juge que l’Assemblée. M. Prieur. Je demande que M. de Beaumetz ait la parole. M. le Président. L’Assemblée paraissant ne pas croire que la discussion fermée empêcha de donner la parole, parlez, Monsieur. M. de Liancourt. Monsieur le Président, c’est vous qui l’avez rouverte ; nous ne sommes pas dupes de cela. M. de Févis. La discussion étant fermée sur le fond, c\st uniquement de l’amendement de M. Camus qu’il s’agit. Cet amendement, bon peut-être en lui-même, me parent porter sur des alarmes relatives au bruit du départ de Monsieur; alarmes qui ont occasionné le ridicule aitroupement de mardi ; alarmes qui cessent quand Monsieur a donné sa parole. (Murmures à gauche.) Mon amendement, que je crois plus qu’un autre dans les principes de la Révolution, de la Constitution et de la liberté, est que l’Assemblée déclare que, conformément aux principes de la Constitution, il est défendu aux municipalités, corps administratifs et autres personnes de donner ou d’exiger des passeports. M. Charles de Fanieth. Je demande la parole. M. Briois-Beaumetz. Si l’amendement de M. de Lameth n’avait pas été précédé de quelques motifs et qu’il se fût contenté de le présenter purement et simplement, comme M. Camus,. je me serais contenté de l'abandonner à la question préalable qui le serrait de très près. Mais les motifs qui ont précédé cet amendement m’ont paru mériter une réfutation très sérieuse. Ilest en effet très important que les vrais amis de la Constitution, que ceux qui l’aiment constamment — et sans doute nous l’aimons mus — (Murmures à gauche ; applaudissements au centre)... Il est, dis-je, très important que les amis de la Constitution et de la liberté soient enfin d’accord sur les moyens de les aff rmir l’une et l’autre de les rendre inaccessibles aux efforts de nos ennemis. Le préopinant a déclaré qu’il croyait que ces moyens devaient être les mêmes que ceux avec lesquels on a commencé la Révolution, c’est-à-dire l’insurrection... (Murmures à gauche.) M. Alexandre de Fanieth. Je n’ai pas dit cela. M. Briois -Beaumetz. On me déclare que j’ai mal compris et mal entendu. 499 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [U février 1791. j Plusieurs membres à gauche : Oui ! oui ! M. Briots-Beaumetz . J’y consens/, je me résous à avoir mal entendu et je me réjouis de voir que nous nous rallions tous aux vrais principes. Nous convenons qu'autant il a été� nécessaire, au berceau de la Révolution,. de déployer d’énergie contre l’autorité despotique dont il fallait enfin délivrer ce beau royaume et qui pesait si lourdement sur nous, autant il est nécessaire aujourd’hui de rasséréner l’horizon, de rassurer l’état des affaires, de faire renaître l’ordre et la tranquillité et d’apprendre au peuple que le bonheur, l’aisance dont il a l’espoir, l’assurance de jouir, ne peuvent, exister pour lui qu’avec le rétablissement de la paix. (Vifs applaudissements.) Je me réjouis de voir que personne ne conteste ces maximes bienfaisantes; et si, après la sanction que leur donnent les applaudissements de l’Assemblée, quelqu’un croyait encore qu’il faut s’opposer à l’autorité légitime, qu’il faut protéger la résistance aux lois, je devrais mettre en garde l’Assemblée contre des principes qui tendraient évidemment à rétablir tous les désordres, contre des conseils perfides, dignes seulement des ennemis véritables du peuple, du bonheur public et de la liberté. (Vifs applaudissements à droite.) M. Charles de Lameth. J’avoue que j’ai été surpris de voir le préopinant demander la parole sur l’amendement de mon frère, pour n’en pas dire un seul mot, et pour lui prêter les sentiments que son caractère connu repousse absolument. (Murmures et applaudissements .) J’espérais que le préopinant aurait du moins cru devoir épargner son collègue. Je crois que l’amendement qui vous a été proposé par mon frère et que j’avais l’intention de proposer moi-même (Rires à droite)... quand j’ai demandé la parole, est de la plus grande importance dans les circonstances où nous nous trouvons. Je ne combats nullement les principes sur lesquels on a appuyé la liberté de Mesdames comme de tout citoyen, de sortir du royaume et d’aller où bon leur semble. Cependant, c’est une question que votre comité s’est réservé de résoudre, si, dans un moment de Révolution, chaque citoyen n’est pas tenu de rester dans sa patrie... (Murmures et applaudissements) et s’il n’est pas coupable d’abandonner un pays où la liberté s’établit, pour revenir après les secousses jouir des bienfaits achetés par tant de travaux. Les anciens ont loué ceux qui s’attachaient à une opinion déterminée, ceux qui se dévouaient pour leur pays, et ils ont également frappé de blâme et les émigrants et les impartiaux. (Applaudissements et murmures.) Je reviens à l’amendement : il est impossible que l’Assemblée nationale méconnaisse les circonstances critiques où nous sommes. (Marmuw à droite). M. de Bonnay prononce de son banc quelques paroles qui ne parviennent pas jusqu’au bureau. M . Charles de Lameth. Monsieur de Bonnay, vous avez présidé, et très bien présidé ; vous savez qu’on ne doit pas interrompre un opinant. M. de Bonnay. Je prie qu’on ne vous interrompe pas. M. Charles de Lameth. L’Assemblée nationale est instruite par le roi lui-même qu’il a résisté au désir de Mesdames... (Murmures à droite),., qui, pour le dire en passant, se sont plutôt évadées de la capitale qu’elles ne sont parties pour un voyage... M. de llontlosier. Il n’y a que des prisonniers qui s’évadent; et ce'que vient de dire M. de Lameth ferait croire que la famille royale est prisonnière à Paris. Je demande qu’il soit rappelé à l’ordre. M. d’Estourmel. Je demande que M. de Lameth soit rappelé à l’ordre. M. d’André. Je demande que M. d’Estourmel soit rappelé à l'ordre pour interrompre sans cesse. M. l'abbé Manry. Je consens que M. d’Estourmel soit rappelé à l’ordre; mais je demande grâce pour M. de Lameth. M. Charles de Lameth. L’Assemblée a lieu de penser que le roi n’attend peut-êire que son vœu pour agir; et l’on vous proposerait de vous associer à Mesdames contre le désir du roi et le vœu de la nation ! Plusieurs membres : Aux voix 1 MM. de Bois-Rouvray , de Bonnay et autres membres : La discussion est fermée. M. Charles de Lameth. Quel est l’objet de l’amendement? C’est d’avertir le roi. Qui est-ce qui en a plus que nous le droit et le devoir ? C’est de lui dire que le peuple est affamé, ruiné par les émigrations. ( Murmures et applaudissements.) Voilà ce qu’un bon citoyen doit désirer : entendre déclarer au roi par le Président de l’Assemblée nationale, que l’Assemblée n’est plus responsable des malheurs publics , quand elle, a dit aux tantes du roi, nourries et entretenues par la nation, qui leur a prouvé constamment son attachement et ses égards, qu’il est étonnant qu’elles l’abandonnent. (Applaudissements.) Je ne crois pas qu’un ami de la liberté et de la prospérité publique puisse demander la question préalable sur un pareil amendement. Plusieurs membres demandent la question préalable. (Bruit prolongé.) M. de llenou. Je crois que l’Europe sera bien étonnée d’apprendre que l’Assemblée nationale s’est occupée pendant quatre heures du départ de deux dames qui aiment mieux entendre la messe à Rome qu’à Paris. (Rires et applaudissements.) Je demande qu’on aille aux voix sur la rédaction de M. de Mirabeau, et que la discussion soit fermée sur le fond et sur les amendements. Plusieurs membres : Aux voix ! M. Le Chapelier. Je demande à dire une parole, si M. de Lameth ne retire pas son amendement. M. Alexandre de Lameth. Non, Monsieur, je ne le retire pas. M. Le Chapelier. Ma parole, la voici; M. de [24 février 1791.] 500 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Lameth, tout en déclarant qu’il n’y a pas de loi pour empêcher Mesdames de voyager, propose par amendement de représenter au roi l’état actuel du royaume pour qu’il retienne ses tantes. M. Alexandre de Lameth. Ce n’était pas un amendement; c’était une rédaction portant que, d’après la loi antérieure, il appartenait au roi de donner aux membres de sa maison la permission de voyager. Dès lors, mon opinion personnelle était que l’Assemblée nationale devait charger son président de le déclarer au roi et en même temps de lui représenter la situation actuelle du royaume pour que le roi, dans sa sollicitude, puisse juger s’il devait permettre à Mesdames de sortir du royaume. M. Le Chapelier. Il résulte de la déclaration de M. Lameth que je ne m’étais pas trompé dans les intentions de son décret et que je me trompais fort peu dans ses expressions. Il résulte de l’état de la délibération que, la priorité ayant été accordée au projet de M. de Mirabeau, M. Barnave a converti en amendement la proposition de M. de Lameth. Sous quelque nom que l’Assemblée l’adopte, je dis que cette proposition, qu’on la considère comme amendement ou comme motion, n’est propre qu’à mettre le trouble dans le royaume, et voici comme je le prouve. Il arrivera, après le vœu manifesté par l’Assemblée, de deux choses l’une : ou le roi interdira à Mesdames ses tantes la faculté de continuer leur voyage, ou il ne la leur interdira pas. S’il la leur interdit, il sebrouille avec sa famille ; s’il ne la leur interdit pas, d’après le vœu de l’Assemblée, il se brouille avec son peuple. Je demande donc la question préalable sur l’amendement de M. de Lameth. Plusieurs membres : Sur tous. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il n’y a lieu à délibérer sur aucun amendement.) M. le Président. Je mets aux voix la question rincipale, qui est la rédaction de M. de Mira-eau : « L’Assemblée nationale, considérant qu’aucune loi existante du royaume ne s’oppose au libre voyage de Mesdames, tantes du roi, déclare qu’il n’y a lieu à délibérer sur le procès-verbal de la commune d'Àrnay-le-Duc, et renvoie l’affaire au pouvoir exécutif. » (Ce décret est adopté.) M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de ce soir. La séance est levée à quatre heures et demie. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DUPORT. Séance du jeudi 24 février 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. Un de MM. les secrétaires donne lecture des adresses suivantes : Adresse du commissaire du roi auprès du tribunal du district de la Grasse, qui annonce que sur 75 fonctionnaires publics qui sont dans ce district, 71 ont prêté solennellement le serment civique. Adresse de la société des amis de la Constitution de Rodez, qui atteste que c’est au patriotisme de domNogaret, vicaire de la ci-devant Chartreuse de cette ville, que la nation doit la découverte d’un dépôt d’argent, billets et autres effets précieux dont les religieux vouaient la frustrer. Celte société sollicite une gratification pour ce patriote généreux, persécuté par ses supérieurs. Adresse des officiers municipaux de la commune de Prenne, disirict de Villeneuve, composée de 28 paroisses, qui annoncent que tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics, et même un ancien curé non fonctionnaire, se sont consacrés à la patrie, par un serment civique, avec un zèie admirable-Adresse des volontaires patriotes du Port-au-Prince, qui expriment à l’Assemblée la plus vive reconnaissance au sujet de la mention honorable qu’elle a daigné faire de leur patriotisme dans son décret du 12 octobre dernier. Ils renouvellent le serment de demeurer inviolablement attachés à leur patrie et à leur roi. Adresse du sieur Delaroche, vicaire fonctionnaire du district de Chalans, département de la Vendée, qui fait hommage à l’Assemblée de la prestation de son serment civique. Adresse des officiers du tribunal du district de VihierS; département de Maine-et-Loire, qui présentent à l’Assemblée nationale le tiibut de leur admiration et de leur dévouement. Adresses des officiers municipaux de Chanlac, département de l’Ardèche, de Saint-Angel, département du Puy-de-Dôme, et de Saint-Loup-les-Landes, département de la Creuse, contenant les procès-verbaux du serment civique prêté par les curés et vicaires de ces différentes paroisses. Un de MM. les secrétaires fait lecture des procès-verbaux des séances des 22 et 23 février au soir, qui sont adoptés. M. Voulland fait lecture à l’Assemblée de nouveaux documents arrivés du département du Gard et relatifs aux troubles d’Uzès. 1° D’une lettre du directoire du département du Gard, ainsi conçue : i-Mous vous avons rendu compte des troubles qui se sont manifestés à Uzès, les 14 et 15 de ce mois, et des mesures que le directoire a jugées nécessaires. Aujourd’hui nos commissaires nous ont instruits que la grande affluence des gardes nationales qui, de tous les environs d’Uzès, accourent au secours de cette ville, a occasionné des désordres qu’on s’est vainement efforcé de prévenir : deux maisons ont été brûlées. Nous avions chargé le district d’Uzès de renvoyer dans leurs municipalités respectives les gardes nationales qui étaient déjà arrivées, de se reposer sur les troupes de ligne que nous avions requises, et sur nos soins. Nous avons pensé que le rétablissement de l’ordre exigeait de nouveaux moyens , de nouvelles précautions ; et, par un arrêté dont nous vous envoyons copie, nous avons requis 300 hommes de la garde nationale de Nîmes, de se rendre à Uzès avec deux pièces de canon, à l’effet d’entretenir le bon ordre, le respect dû aux (1) Cetto séance est incomplèto au Moniteur.