336 s [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES I 26 brumaire an il / 16 novembre 1793 Fabre d’Eglantine. D’après un de vos dé¬ crets, tous les étrangers, avec les gouvernements desquels nous sommes en guerre, ont dû être arrêtés. Ce que vient de dire Camille ne peut donc s’appliquer qu’aux jeunes gens nés en France de parents étrangers. Puisque ces citoyens sont Français, ils doivent en remplir les charges; mais il faut dire qu’il serait peut-être contraire aux intérêts de la République d’obliger ces jeunes gens à aller combattre des hommes qu’ils regardent comme de leur nation. On pourrait envoyer ces Anglais, par exemple, sur les fron¬ tières du Midi. Thuriot-Il y a des Anglais sur toutes les frontières; ainsi on ne peut pas dire qu’il faut envoyer les jeunes gens dont il est question plutôt de tel côté que de tel autre. Je demande qu’aucun étranger ne puisse être admis dans les bataillons de la première réquisition. Un membre. A peine avons -nous assez d’armes pour armer les bras de tous les Français qui se sont levés pour voler à la défense de la liberté, pourquoi donc admettre des étrangers dans nos armées ? Merlin (de Thionville). Vous avez dû remar¬ quer que ça été presque toujours des étrangers qui, dans nos armées, ont crié à la trahison pour occasionner des déroutes. Je demande qu’ils soient exclus de nos armées. Après quelques débats, la Convention décrète que le comité de Salut public lui fera un rapport sur cet objet. La commune de Beaumont-sur-Oise envoie le reste de ses calices, ciboires, etc.; elle demande qu’il lui soit accordé 2 pièces de canon, en échange de 2 coulevrines,- et invite la Conven¬ tion à rester à son poste. Mention honorable, insertion au « Bulletin », et renvoi de la demande des canons au ministre de la guerre, qui demeure autorisé à y pour¬ voir (1). Compte rendu de V Auditeur national (2). La commune de Beaumont-sur-Oise, qui a déjà donné 100 marcs d’argenterie, offre aujour¬ d’hui le reste des objets qui servaient ci-devant au culte. Elle offre de plus deux coulevrines et demande deux pièces de quatre. Renvoyé au ministre de la guerre. quelques sections ont trouvé ces réclamations justes et Camille invite la Convention à y avoir égard. Thuriot. Je pense comme le pré’opinant, mais les Anglais sont partout, au nord, au midi, à l’ouest. Il faudrait garder dans l’intérieur les jeunes gens pour lesquels on réclame; ils sont la plupart artisans. Qui empêche de les employer à des travaux utiles à la République? Bourdon (de l'Oise) demande qu’on leur fasse supporter une imposition plus forte qu’aux autres citoyens, à raison de ce qu’ils ne sont point exposés aux dangers de la guerre. Toutes ces propositions sont renvoyées au comité de Salut public. (1) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 25, p. 264. (2) Auditeur national [n° 421 du 27 brumaire an II (dimanche 17 novembre 1793), p. 6]. La commune d’Asnières, département de Paris, apporte l’argenterie de son église et demande à être autorisée à distribuer aux citoyennes les plus indigentes, et particulièrement aux veuves, femmes ou enfants des défenseurs de la pairie, les linges et les étoffes diverses des ornements qui servaient au culte, en en enlevant les galons, qui seront remis à la Monnaie. « Un membre [Léonard Bourdon (1)] con¬ vertit cette pétition en motion, et demande, en la généralisant, que toutes les communes ou sec¬ tions qui renonceraient à avoir un culte salarié par la nation, fussent autorisées à faire de leurs ornements et linges d’églises l’usage proposé par les pétitionnaires. Sur cette motion, la Convention nationale passe à l’ordre du jour (2). » Compte rendu de V Auditeur national (3). La commune d’Asnières, en présentant son argenterie, a demandé qu’il lui fût permis de conserver les étoffes des ornements d’église pour, après en avoir enlevé les galons d’or et d’argent, les faire servir aux vêtements des indigents. Léonard Bourdon demande à cet égard l’ordre du jour, motivé sur le droit qu’ont les communes de disposer de ces objets quand elles ont renoncé au culte public. La Convention passe à l’ordre du jour, laissant aux communes à faire de ces objets telles dispo¬ sitions qui leur conviendront. La commune de Vitry-sur-Seine vient égale¬ ment déposer au pied de la Raison tous les ins¬ truments de la superstition, et féliciter la Con¬ vention nationale d’avoir anéanti la faction liber-ticide qui voulait rétablir le despotisme. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (4). Suit V offre de la commune de Vitry-sur-Seine (5). Commune de Vitry-sur-Seine. « Citoyens représentants, « Encore un pas vers la raison. Depuis que le Dieu des Incas a dissipé les brouillards du ma¬ rais fangeux, les Français se sont régénérés; (1) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton C 277, dossier 726. (2) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 25, p. 264. (3) Auditeur national [n° 421 du 27 brumaire an II (dimanche 17 novembre 1793), p. 5]. D’autre part, le Journal des Débats et des Décrets (brumaire an II, n° 424, p. 358) rend compte de la pétition de la commune d’Asnières dans les termes suivants : « Une commune, qui donne aussi son argenterie, demande la permission de disposer du linge qui ser¬ vait aux cérémonies religieuses, pour l’usage des pauvres et des parents des citoyens qui sont aux frontières. « La Convention passe à l’ordre du jour, motivé sur ce que les communes peuvent disposer de ce qui leur appartient, pour le plus grand intérêt public, et sur ce qu’elle veut laisser au peuple tout le triomphe de la philosophie sur l’erreur, de la raison sur le fanatisme. » (4) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 25, p. 265. (5) Archives nationales, carton C 278, dossier 742. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. brumaire an il 337 tous les monstres qui désolaient la surface de la j République se sont présentés à nos yeux éton¬ nés; le mensonge d’un côté, le fanatisme et la superstition de l’autre ont été démasqués et du haut de la sainte Montagne la liberté chérie de tout être raisonnable s’est fait voir à décou¬ vert; la vérité et la raison étaient à ses côtés. De ces trois divinités sont sortis les droits de l’homme et la constitution qui feront le bonheur de toutes les nations. Oui, législateurs, de toutes les nations, car elles finiront par reconnaître la puissance de ces déesses bienfaisantes. Pénétrés de ces vérités, terrassant tous ces monstres qui nous ont dévorés jusqu’à présent, nous apportons dans cet auguste sanctuaire tous les instruments qui n’ont que trop long¬ temps servi à nous tenir dans l’esclavage. « Enfants de la liberté, sur le point de partir pour sa défense, réunis à tous nos concitoyens en lui faisant avec eux cette offrande, nous désirons vous faire connaître les sentiments avec lesquels nous volons combattre les tyrans cou¬ ronnés et leurs satellites, et nous jurons de ne rentrer dans nos foyers qu’ après les avoir exter¬ minés, notre religion est dans la nature, notre culte est pour la liberté et notre amour pour la patrie. « Vive la République! » Compte rendu du Mercure universel (1). Les citoyens et citoyennes de la commune de Vitry-sur-Oise (sic), vêtus d’ornements sacerdotaux, portant sept à huit bannières ou guidons, des croix d’argent; l’un portait l’en¬ censoir; cet autre un soleil; ceux-ci, chacun des chandeliers, cet autre, un goupillon ; des femmes ayant des burettes; une autre, une lampe, etc... « Encore un pas vers la raison, dit l’orateur; nous vous apportons l’argenterie de notre église; nous l’avions offerte aux saints pour plaire à notre curé; nous en faisons le sacrifice à la patrie pour être libres. » (Applaudissements.) Mention honorable. La séance est levée à 4 heures et demie. (2) Signé : P. A. Laloi, président; C. Duval, Fourcroy, Frécine, secrétaires. En vertu du décret du 29 prairial, l’an n de la République française une et indivisible. S. E. Monnel, Eschassériaux, P. J. Duhem. PIECES ET DOCUMENTS NON MENTIONNÉS AU PROCES-VERBAL, MAIS QUI SE RAP¬ PORTENT OU QUI PARAISSENT SE RAP¬ PORTER A LA SEANCE DU 26 BRUMAIRE AN n (SAMEDI 16 NOVEMBRE 1793). I. Le citoyen Cardon propose un ensemble de MESURES DESTINÉES A SURVEILLER LES MÉDE-(1) Mercure universel [27 brumaire an II (di¬ manche 17 novembre 1793), p. 272, col. 2], (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 265. Ir« SÉRIE. T. LXXIX. CINS ET PHARMACIENS ET A ORGANISER UN SERVICE D’HYGIÈNE (1). Suit le texte de la pétition du citoyen Gardon, d'après un document des Archives nationales (2). Le citoyen Gardon, à la Convention nationale. « Citoyens représentants, « Je me serais bien gardé de venir interrompre vos importants travaux si je n’avais à vous faire une dénonciation importante, et digne de toute votre attention. « Grâce à votre énergie, citoyens représentants, l’espèce humaine aura bientôt à se féliciter de l’entière disparition des tyrans, ainsi que des préjugés qui l’ont si longtemps opprimée, et le souvenir de ces temps désastreux sera pour elle une jouissance de plus. « Cet affreux despotisme, que nous avons terrassé, n’est pas entièrement anéanti, il en existe encore une branche importante, et voua l’indiquer, c’est assurer sa destruction. « Vous vous empresserez d’autant plus de l’opérer, cette destruction, qu’il n’est pas un seul individu, si précieux -qu’il puisse être, qui, d’un jour à l’autre, ne soit exposé à en être vic¬ time. « En attendant que l’effet des lois que vous préparez sur l’instruction publique ait mis chaque individu des générations suivantes en état d’être à soi-même son principal médecin, je ne doute pas, citoyens représentants, que vous ne portiez votre attention sur les charla¬ tans de toute espèce qui ont jusqu’ici, et impu¬ nément, sacrifié à leur cupidité tant de victimes souvent précieuses à leurs familles ou à la patrie. « En ce moment, citoyens, des milliers de nos braves défenseurs, victimes plus encore de l’ineptie des officiers de santé, que du fer de nos barbares ennemis, vous crient, de leur lit de douleur : Citoyens représentants, hâtez-vous de mettre un terme à ce brigandage exercé trop longtemps. Vous pouvez l’anéantir d’un mot, en décrétant que tout citoyen possesseur d’un remède quelconque dont l'efficacité aura été constatée par l’expérience aura bien mérité de la patrie s’il se rend à l’invitation qui lui est faite de venir le déposer entre les mains d’une com¬ mission de santé que vous chargerez de les recevoir et de les classer. « Par ce moyen, citoyens, vous aurez très promptement une médecine pratique infini¬ ment préférable et plus certaine que toutes les pratiques, souvent erronées de nos médecins, et dont les variations sont la plus forte preuve des qualités conjecturales et routinières, tant et si j ustement reprochées à nos prétendus guérisseurs. (1) La pétition du citoyen Cardon n’est pas men¬ tionnée au procès-verbal de la séance du 26 bru¬ maire an II; mais on lit en marge de l’original qui existe aux Archives nationales l’indication suivante 1 « Renvoyé au comité d’instruction publique, le 26 brumaire, 2e année républicaine. Charles Duval, secrétaire. » (2) Archives nationales, carton F” 1008, dos¬ sier 1199. 22