346 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I ** a" » L J / 19. Hpfpmhrp 17Q9 indigents ou mal aisés, met en pratique les principes d’égalité, consacrés par la Constitu¬ tion ; et la Révolution ne finira, qu’alors que l’é¬ quilibre le plus juste sera rétabli entre le riche et le pauvre; lorsque le premier aura fait assez de sacrifices ; lorsqu’il paiera toutes les charges de la République; lorsqu’il ne regardera plus les jouissances du luxe comme des besoins réels; lorsqu’il sera convaincu que la nature et la loi ne font d’autre différence entre les hommes, que celle du mérite et des vertus. Vos commissaires s’attacheront à combattre et à détruire certains préjugés fanatiques, qui entretiennent l’ignorance ; t la superstition dans les campagnes, et arrêtent les progrès de l’es¬ prit public; ils démontreront que toutes les minutieuses pratiques d’honoraires, de messes, d’absoutes, etc., sont autant de charlataneries utiles à la cuisine des prêtres, et ne servent de rien pour la vertu et les moeurs; et cependant toutes les ruses de cupidité monacale sont sou¬ vent mises à la place de la véritable adoration d’un Dieu grand et magnifique, qui ne veut d’autre hommage de la part des hommes que celui de l’obéissance aux lois, celui de la fra¬ ternité et de l’union; ils dénonceront les prêtres qui, contre la volonté nationale, persévèrent dans l’habitude de conserver tout ou partie de leur costume; ils représenteront aux habitants des campagnes, l’utilité du mariages des prêtres, et l’avantage qui devra en résulter pour les mœurs et pour la patrie; car alors qu’un prêtre reste célibataire il s’isole en quelque sorte de la nature, pour en violer souvent les droits les plus sacrés; il se dérobe le sentiment délicieux de la paternité, qui attache les hommes à la Société par autant de liens qu’il a d’enfants. Le fanatisme crie au scandale lorsqu’on annonce le mariage d’un prêtre, mais la nature et la raison s’écrient : voilà un homme nouveau rendu à la patrie. Qu’il est estimable ce prêtre, qui, s’élevant au-dessus des préjugés, réclame ses droits sociaux, et veut partager, avec ses concitoyens, les avantages de la paternité; il sera, à coup sûr, bon mari, bon père, bon citoyen. Vos commissaires ordonneront la suppression de ces distinctions aristocratiques, accordées à la richesse et à la vanité dans la célébration des mariages, des baptêmes et des enterrements; ces sonneries inutiles, qui troublent le repos de tous pour l’amour propre d’un seul; ils sup¬ primeront ces bancs, ces chaises qui rappro¬ chent le riche de l’autel, lorsque son immora¬ lité l’éloigne si souvent de Dieu ; ils appren dront surtout à respecter tous les cultes par le silence. L’Etre suprême veut des autels dans nos âmes et non pas dans nos bouches; il veut le cœur de l’homme, et non pas des querelles religieuses; il veut que les hommes s’arment pour défendre la liberté, l’égalité et les lois, et non pas pour combattre pour des systèmes auxquels ils ne comprennent rien. Ils exhorteront les habitants de toutes les commune à réduire les cérémonies du culte aux trois décades de chaque mois, afin de donner plus de temps et de jours aux travaux de l’agri¬ culture et des arts. Le travail, l’amour de la patrie, l’obéissance aux lois sont une adoration continuelle, agréable au Créateur; et un trait d’humanité, un trait d’héroïsme, un acte de vertu honorent bien plus la divinité, que des prières insignifiantes que le peuple ne comprend pas, et qu’il chante ou prononce machinalement. Les commissaires passeront à la situation où se trouve dans ce moment la République; ils feront le tableau de la rage infernale des prêtres, qui ont voulu alarmer les consciences et diviser les hommes par la religion elle-même, qui de¬ vrait les réunir tous ; des exécrables manœuvres des aristocrates, qui ont cherché à les alarmer sur leur propriété et sur leur existence, pour leur faire haïr la nouvelle forme du gouverne¬ ment ; ils leur représenteront tous les tyrans de l’Europe armés contre nous, conspirant contre notre liberté, et tâchant de nous charger de nouveau des fers que nous avons brisés. Eh bien ! leur direz-vous, l’Eternel, l’Etre suprême, le père de l’égalité, nous a couvert de sa toute-puissance; il l’a mise dans nos mains, et sur tous les points de la République, nous sommes victorieux; partout nos ennemis sont terrassés; encore quelques efforts, encore quelques sacri¬ fices, et les esclaves des tyrans, étonnés de notre courageuse persévérance, de notre union inté¬ rieure, de notre attachement à la souveraineté nationale, à la Convention, à la Constitution, voudront être libres à leur tour. Montons tous sur la Montagne sacrée de nos représentants; et de là foudroyons nos ennemis, ou qu’ils viennent nous demander la paix, la fraternité, et les tables saintes de nos lois. Après avoir électrisé les âmes, les commis¬ saires provoqueront, de la part des riches culti¬ vateurs et manufacturiers, la dîme de leurs trou¬ peaux, de leurs vins, de leurs fourrages, et de leurs étoffes. Nos frères, nos enfants, nos concitoyens, sont en face de l’ennemi; ils souffrent la faim et le froid ; il faut les nourrir et les couvrir; et puisque nous leur devrons la liberté, dépouillons -nous, en leur faveur, de notre superflu, et qu’importe aujourd’hui le superflu, puisque le plus bel orne¬ ment, la plus belle propriété de l’homme, ce sont les vertus républicaines, la sans-culotterie, la bienfaisance et le triomphe de la liberté. La Société populaire de Carcassonne, après avoir adopté ce plan d’instruction, en a délibéré l’impression et l’envoi à la Convention nationale, à toutes les sociétés de la République, et à toutes les communes du département. Signé : Fermer, Dupré, commissaires rédac¬ teurs; Heirissoh, 'président; Marin, 'tout, Champagne, secrétaires. Le conseil général de la commune de Brassem-pay (Brassempouy), district de Saint-Sever, dé¬ partement des Landes, félicite la Convention sur son énergie; il l’invite de rester à son poste jus¬ qu’à la paix, et demande l’expulsion des Saurine, Cadroy et Lefranc, députés de ce département. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Le conseil général du district de Valance (Va¬ lence), département de Lot-et-Garonne, fait pas¬ ser l’extrait de son procès-verbal du 13 de ce mois duquel il résulte que le citoyen Antoine Durios, de la municipalité de Saint-Circes [St-CiricesJ, prêtre et vicaire de la paroisse de Saint-Pierre-d’Auvillars, s’est démis de ses fonctions ecclésiastiques et qu’il ne s’occupera désormais qu’à prêcher l’amour de la liberté et de l’éga-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 131. (Convention nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. f.rlma11? an II 347 lité comme les seules bases des vertus républi¬ caines; en conséquence, il a remis sur le bureau ses lettres de prêtrise, et en a demandé acte. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Extrait des registres des procès-verbaux du conseil du district de Valence, au département de Lot-et-Garonne (2). Le treize frimaire, l’an second de la Répu¬ blique française, dans la salle du conseil du district de Valence, le citoyen Antoine Durios, de la municipalité de Saint-Cirice, prêtre et, vicaire de la paroisse de Saint-Pierre-d’Auvillar canton du même lieu, a dit que, guidé par le flambeau de la raison et éclairé des lumières de la philosophie, il renonçait, en sa quadté de prêtre, aux fonctions qu’n avait remplies jusqu’à ce jour, pour ne s’occuper désormais qu’à prêcher l’amour de ±a liberté, de l’égalité et toutes les vertus républicaines, auquel effet il a remis sur le bureau ses lettres de prêtrise, et en a demandé acte. Le conseil, applaudissant aux principes du citoyen Durios, l’a invité à les propager et lui a donné le baiser fraternel en témoignage de la satisfaction que son abdication lui donnait. De quoi a été dressé procès-verbal que le citoyen Durios a signé. Fait en conseil les jour, mois et an que dessus. Signé : Pradelle, président et Latapie, secrétaire. Pour expédition : Le secrétaire du district de Valence, Latapie. Les maire et officiers municipaux de la com¬ mune de Tours annoncent que leurs cloches des¬ cendent; que l’argenterie du culte va prendre le chemin de la Monnaie, ainsi que les dorures et broderies des ornements; que le linge est des¬ tiné aux défenseurs de la patrie, et les confes¬ sionnaux pour leur servir de guérites; que tous les ministres se déprêtrisent, et que le peuple ne veut plus d’autre culte que celui de l’huma¬ nité et de la raison. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (3). Suit la lettre des maires et officiers municipaux dé la commune de Tours (4). Les républicains, maire et officiers municipaux de la commune de Tours, à la Convention nationale. « Tours, primidi 18 frimaire l’an II de la République. « Citoyens représentants du peuple. « Nous n’avons jamais cessé d’être à la hau¬ teur des circonstances. Ce qui nous choquait (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 131. (2) Archives nationales, carton C 284, dossier 824. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 132. (4) Archives nàtionales, carton C 284, dossier 814. le plus, c’était de voir encore dans nos églises des hochets de la superstition. Depuis longtemps nous avions pris des mesures pour les faire dis¬ paraître. La raison a triomphé. Les cloches se descendent; l’argenterie va voyager pour la monnaie; les ornements seront dépouillés de leurs dorures et broderies, qui prendront le même chemin; le linge est destiné aux braves défenseurs de la patrie; les confessionnaux leur serviront de guérites. Tous les ministres du culte se déprêtrisent. Le peuple ne veut d’autre culte que celui de l’humanité et de la raison. Con¬ tinuez vos grandes mesures, et vive la Répu¬ blique. « Esnaul, maire. « Par la municipalité. « Vie, commis -greffier. » La Société populaire et sans-culotte de Nantes sollicite de la Convention nationale le prompt établissement des écoles primaires et des ateliers d’industrie. « Hâtez-vous, disent ces citoyens, de créer la pureté des mœurs par l’opinion, et la vigueur du corps par le travail : c’est par vos soins, sublimes Montagnards, que les erreurs passeront et que la vérité restera. » Mention honorable, insertion au « Bulletin » et renvoyé au comité d’instruction publique (1). Suit V adresse de la Société républicaine et sans-culotte de Nantes (2). Les sans -culottes montagnards composant la Société républicaine de Nantes, à la Conven¬ tion nationale. « Représentants du peuple, « Les préjugés disparaissent, enfin la liberté s’élève sur leurs débris, le fanatisme fait place à la raison, à la vérité. Mais l’instruction pu¬ blique est une des pierres fondamentales qu’il vous reste encore à placer à l’édifice impéris¬ sable de la Constitution française. C’est dans les écoles nationales que doivent se former et s’épurer les mœurs de la génération qui nous suivra. Vous êtes les pères de la patrie, pour le bonheur des enfants qu’elle produira, ne tardez pas à les arracher aux habitudes vicieuses du régime des rois et des prêtres qui l’ont si long¬ temps tyrannisée. Faites les jouir de l’instruc¬ tion si nécessaire, hâtez-vous pour cela, citoyens législateurs, d’ouvrir les écoles des vertus et les ateliers de l’industrie, hâtez-vous d’y créer la pureté des mœurs par l’opinion et la vigueur du corps par le travail. C’est par vos soins, législateurs, que les erreurs passeront et que la vérité restera. « Les sans-culottes de la Société républicaine de Nantes. Thomas, président; C. IIoudet, secrétaire; Michel Samuel, secrétaire; Quicque, secrétaire. » (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 132. (2) Archives nationales, carton F’7 1010r, dos¬ sier 2453.