542 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE les débiteurs des ouvriers qu’ils ont employés à la culture de leurs terres ou dans leurs manufactures. Ces citoyens ne peuvent être payés tout de suite, parce qu’il y a des formalités à remplir. Le Comité vous propose de les dispenser des ces formalités. Voici en conséquence le décret que je suis chargé de vous proposer (1). Adopté. « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [CAMBON, au nom de] son Comité des finances, décrète : » Les ouvriers des fabriques ou manufactures confisquées au profit de la nation après l’émigration ou condamnation des propriétaires, seront payés de leurs salaires arriérés et courants sur les premiers deniers provenant desdites manufactures et fabriques, sans être assujétis aux formalités perscrites par la loi du 25 juillet 1793, pourvu qu’ils ne discontinuent pas leur travail ordinaire » (2). 64 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [COLLOMBEL, au nom de] son Comité des secours publics sur la pétition de la citoyenne Marie Savonneau, de Calais-sur-Anille, département de la Sarthe, qui a fait la campagne dernière dans le 1er bataillon de la Meurthe, qui s’est trouvée à cinq batailles, et notamment à l’affaire de Coussaux, où elle a été renversée et blessée par la cavalerie ennemie; » Décrète que, sur la présentation du présent décret, qui ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance, la trésorerie nationale paiera, à titre de gratification, la somme de 500 liv. à la citoyenne Marie Savonneau » (3). 65 Trois citoyens de la commune d’Avignon se présentent à la barre. L’un d’eux s’exprime en ces termes : Les patriotes de la commune d’Avignon nous ont députés auprès de vous pour venir vous exprimer leur reconnoissance sur votre décret du 18 floréal, qui donne l’immortalité à cet illustre et vertueux enfant à qui Avignon se félicite d’avoir donné le jour, que la rébellion et l’ingratitude avoient mis et laissé dans le tombeau. (1) Mon., XX, 535. (2) P.V., XXXVIII, 64. Minute de la main de Cambon, C 304, pl. 1121, p. 32. Décret n° 9254. Reproduit dans Bin, 3 prair.; M.U., XL, 72; Ann. R.F., n° 174; Débats, n° 610, p. 35; Rép., n° 154; J. Matin, n° 671 (sic); J. Mont., n° 27; J. Sablier, n° 1334; J. Fr., n° 606; J. Paris, nos 508 et 509; Mess, soir, n° 643; Audit, nat., n° 607; J. Perlet, n° 609; S.-Culottes, n° 463; J. Lois, n° 602; Feuille Rép., n° 324; C. Eg., n° 643. (3) P.V., XXXVIII, 65. Minute de la main de Collombel, C 304, pl. 1121, p. 31. Décret n° 9255. Reproduit dans Bln, 3 prair. (1er suppl1) ; mention dans Ann. R.F., n° 174; J. Sablier, n° 1334; J. Fr., n° 506; C. Univ., 4 prair.; Feuille Rép., n° 324; Mess. soir, n° 643. Représentans, nous l’avons vu, ce jeune héros, se présenter à la demande d’un homme de bonne volonté; s’indigner d’être refusé; s’avancer hardiment, armé d’une hache et de son petit mousquet, pour couper le cable qui retenoit le bac dans lequel les Marseillais rebelles se disposoient à passer la Durance, pour venir égorger les patriotes Avignonais; nous l’avons vu trois fois charger et décharger son arme sur l’ennemi qu’il avoit devant lui; et de sa hache, qui étoit restée suspendue à sa ceinture, asséner les deux coups qui lui ont valu la mort glorieuse que vous avez honorée de vos regrets. Nous vous rapportons ses dernières paroles dans le langage du pays : M’an pas mancat, s’écria-t-il, aco es égaou; mori per la libertat. L’orateur présente ensuite à la Convention un citoyen, témoin de ce fait mémorable, qui voulut venger la mort du jeune Viala et achever de couper le cable qui étoit encore attaché : mais le canon qu’on tire sur lui le couvre de poussière, de gravier, le renverse, et le force d’abandonner aux rebelles victorieux les restes précieux de cet illustre enfant. L’orateur continue : Le père et la mère qui, dans cette journée, se montrèrent si dignes de leur fils, ont recommandé à mes collègues, à leur départ, de vous dire qu’il leur restoit encore quatre enfans qu’ils idolâtroient, mais qu’ils ai-moient encore plus la patrie. Ce jeune héros étoit de mon sang, et ce dont je me félicite le plus, ce n’est pas que le sein de ma sœur l’ait conçu, mais de ce qu’il a tenu le serment que je lui fis prêter à la face de l’Etre Suprême, et sous les drapeaux du 2e bataillon de Vaucluse, de savoir mourir pour l’unité de la République. (La salle retentit d’applaudissements ) . La petite garde nationale, connue sous le nom d’Espérance de la Patrie, dont le jeune Agricole Viala était commandant, nous a chargés de vous transmettre le serment qu’elle a fait de venger la mort de son chef ou de le suivre au Panthéon. (On applaudit ). Vous connaissez encore, représentants, la mort tragique du patriote Lécuyer assassiné par le fanatisme aux marches de l’autel; c’est lui qui, le premier, souleva le peuple avignonnais contre l’oppression de l’Italie, qui lui fit sentir qu’il ne pouvait être heureux que lorsqu’il serait rentré dans la grande famille d’où les forfaits des rois l’avaient arraché. Ce grand homme fut mutilé par les partisans du papisme, par les ennemis du nom français, et puisqu’il est mort pour la France, la France ne lui doit-elle pas l’immortalité ? Si Avignon a produit beaucoup de traitres dont la plupart ont péri sur l’échafaud, où ceux qui restent encore ne tarderont pas à monter, elle compte encore plus de martyrs de la cause du peuple. Les noms de ceux qui sont morts aux salines de Sarian, sous les murs de Carpentras, les noms de ceux qui ont scellé de leur sang l’unité et l’indivisibilité de la République, ne doivent pas rester sans honneur. Nous demandons qu’il soit élevé une colonne sur une de nos places publiques, qui transmette à la postérité leurs noms et leurs exemples. Représentants, notre mission a encore un autre objet. Par quelle fatalité ou par quelle ingratitude se fait-il que vos décrets en faveur des patriotes, qui ont tant souffert dans nos contrées, soient restés jusqu’à ce jour sans exécution ? Si 542 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE les débiteurs des ouvriers qu’ils ont employés à la culture de leurs terres ou dans leurs manufactures. Ces citoyens ne peuvent être payés tout de suite, parce qu’il y a des formalités à remplir. Le Comité vous propose de les dispenser des ces formalités. Voici en conséquence le décret que je suis chargé de vous proposer (1). Adopté. « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [CAMBON, au nom de] son Comité des finances, décrète : » Les ouvriers des fabriques ou manufactures confisquées au profit de la nation après l’émigration ou condamnation des propriétaires, seront payés de leurs salaires arriérés et courants sur les premiers deniers provenant desdites manufactures et fabriques, sans être assujétis aux formalités perscrites par la loi du 25 juillet 1793, pourvu qu’ils ne discontinuent pas leur travail ordinaire » (2). 64 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [COLLOMBEL, au nom de] son Comité des secours publics sur la pétition de la citoyenne Marie Savonneau, de Calais-sur-Anille, département de la Sarthe, qui a fait la campagne dernière dans le 1er bataillon de la Meurthe, qui s’est trouvée à cinq batailles, et notamment à l’affaire de Coussaux, où elle a été renversée et blessée par la cavalerie ennemie; » Décrète que, sur la présentation du présent décret, qui ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance, la trésorerie nationale paiera, à titre de gratification, la somme de 500 liv. à la citoyenne Marie Savonneau » (3). 65 Trois citoyens de la commune d’Avignon se présentent à la barre. L’un d’eux s’exprime en ces termes : Les patriotes de la commune d’Avignon nous ont députés auprès de vous pour venir vous exprimer leur reconnoissance sur votre décret du 18 floréal, qui donne l’immortalité à cet illustre et vertueux enfant à qui Avignon se félicite d’avoir donné le jour, que la rébellion et l’ingratitude avoient mis et laissé dans le tombeau. (1) Mon., XX, 535. (2) P.V., XXXVIII, 64. Minute de la main de Cambon, C 304, pl. 1121, p. 32. Décret n° 9254. Reproduit dans Bin, 3 prair.; M.U., XL, 72; Ann. R.F., n° 174; Débats, n° 610, p. 35; Rép., n° 154; J. Matin, n° 671 (sic); J. Mont., n° 27; J. Sablier, n° 1334; J. Fr., n° 606; J. Paris, nos 508 et 509; Mess, soir, n° 643; Audit, nat., n° 607; J. Perlet, n° 609; S.-Culottes, n° 463; J. Lois, n° 602; Feuille Rép., n° 324; C. Eg., n° 643. (3) P.V., XXXVIII, 65. Minute de la main de Collombel, C 304, pl. 1121, p. 31. Décret n° 9255. Reproduit dans Bln, 3 prair. (1er suppl1) ; mention dans Ann. R.F., n° 174; J. Sablier, n° 1334; J. Fr., n° 506; C. Univ., 4 prair.; Feuille Rép., n° 324; Mess. soir, n° 643. Représentans, nous l’avons vu, ce jeune héros, se présenter à la demande d’un homme de bonne volonté; s’indigner d’être refusé; s’avancer hardiment, armé d’une hache et de son petit mousquet, pour couper le cable qui retenoit le bac dans lequel les Marseillais rebelles se disposoient à passer la Durance, pour venir égorger les patriotes Avignonais; nous l’avons vu trois fois charger et décharger son arme sur l’ennemi qu’il avoit devant lui; et de sa hache, qui étoit restée suspendue à sa ceinture, asséner les deux coups qui lui ont valu la mort glorieuse que vous avez honorée de vos regrets. Nous vous rapportons ses dernières paroles dans le langage du pays : M’an pas mancat, s’écria-t-il, aco es égaou; mori per la libertat. L’orateur présente ensuite à la Convention un citoyen, témoin de ce fait mémorable, qui voulut venger la mort du jeune Viala et achever de couper le cable qui étoit encore attaché : mais le canon qu’on tire sur lui le couvre de poussière, de gravier, le renverse, et le force d’abandonner aux rebelles victorieux les restes précieux de cet illustre enfant. L’orateur continue : Le père et la mère qui, dans cette journée, se montrèrent si dignes de leur fils, ont recommandé à mes collègues, à leur départ, de vous dire qu’il leur restoit encore quatre enfans qu’ils idolâtroient, mais qu’ils ai-moient encore plus la patrie. Ce jeune héros étoit de mon sang, et ce dont je me félicite le plus, ce n’est pas que le sein de ma sœur l’ait conçu, mais de ce qu’il a tenu le serment que je lui fis prêter à la face de l’Etre Suprême, et sous les drapeaux du 2e bataillon de Vaucluse, de savoir mourir pour l’unité de la République. (La salle retentit d’applaudissements ) . La petite garde nationale, connue sous le nom d’Espérance de la Patrie, dont le jeune Agricole Viala était commandant, nous a chargés de vous transmettre le serment qu’elle a fait de venger la mort de son chef ou de le suivre au Panthéon. (On applaudit ). Vous connaissez encore, représentants, la mort tragique du patriote Lécuyer assassiné par le fanatisme aux marches de l’autel; c’est lui qui, le premier, souleva le peuple avignonnais contre l’oppression de l’Italie, qui lui fit sentir qu’il ne pouvait être heureux que lorsqu’il serait rentré dans la grande famille d’où les forfaits des rois l’avaient arraché. Ce grand homme fut mutilé par les partisans du papisme, par les ennemis du nom français, et puisqu’il est mort pour la France, la France ne lui doit-elle pas l’immortalité ? Si Avignon a produit beaucoup de traitres dont la plupart ont péri sur l’échafaud, où ceux qui restent encore ne tarderont pas à monter, elle compte encore plus de martyrs de la cause du peuple. Les noms de ceux qui sont morts aux salines de Sarian, sous les murs de Carpentras, les noms de ceux qui ont scellé de leur sang l’unité et l’indivisibilité de la République, ne doivent pas rester sans honneur. Nous demandons qu’il soit élevé une colonne sur une de nos places publiques, qui transmette à la postérité leurs noms et leurs exemples. Représentants, notre mission a encore un autre objet. Par quelle fatalité ou par quelle ingratitude se fait-il que vos décrets en faveur des patriotes, qui ont tant souffert dans nos contrées, soient restés jusqu’à ce jour sans exécution ? Si