[Convention national#.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 35i Suit la lettre de la Société populaire de Blois (1). Les sans-culottes composant la Société populaire de Blois, aux représentants du peuple -fran¬ çais. « Citoyens législateurs, « Enfin le voile de la superstition se déchire après vingt siècles d’épaisses ténèbres, le soleil de la vérité luit sur notre horizon, et la France renaît à la raison et à la justice. « Le peuple commence à sentir que la religion n’est autre chose qu’un amas de sottises et d’absurdités • et que son aveugle crédulité fut toute la science des prêtres qui ont si longtemps égaré son esprit. Cette révolution qui s’opère dans les idées religieuses, est le complément de la révolution politique que vous avez con¬ sommée, elle en est le résultat nécessaire. . « Un vrai républicain ne peut être supersti¬ tieux, il ne fléchit le genou devant d’autres idoles que celle de la liberté; il ne connaît d’autre culte que celui de l’amour de là patrie et des lois. « La destruction du fanatisme, de la supers¬ tition est à peine chez nous, depuis deux dé¬ cades, à l’ordre du jour, et déjà la philosophie a fait des progrès jusqu’au sein des campagnes; les saints s’y lèvent en masse pour venir au secours de la patrie. « Les cloches se fondent en canons, les con-fessionaux se changent en guérites et les croix en arbres de la liberté. « Nous votons aujourd’hui au sein de la ville de Blois, pour la destruction totale des signes extérieurs d’un culte quelconque; nous ne vou¬ lons plus ni processions et autres cérémonies publiques du culte catholique. « Nous ne voulons plus de clochers ni de croix; nous ne voulons plus de prêtres dans les autorités civiles et révolutionnaires qu’ils n’aient abjuré publiquement le préjugé reli¬ gieux et déposé leurs lettres de prêtrise sur l’autel de la patrie. « Le jour de la prochaine décade nous inau¬ gurons un temple à la Raison, un autre à la Mberté et à l’égahté, où la Société populaire tiendra ses séances. « Dans ce jour solennel nous brûlerons tous les livres de la superstition et du fanatisme, et nous en ferons un sacrifice expiatoire à la Bai¬ son sur l’autel que nous lui avons élevé. « Mais, hélas ! nous n’expierons pas tous les maux que la religion a faits à l’humanité; les autodafés d’Espagne, les crimes de la Sainte-Inquisition, le massacre de la Saint-Barthélemy et les horreurs de la Vendée. « Comment pourrait -on respecter des erreurs qui ont fait verser le sang des hommes par torrents? « La croix est devenue, aux yeux du philo¬ sophe sensible et de l’ami de l’humanité, un signe contre-révolutionnaire, elle a été de tous temps l’instrument des despotes pour asser¬ vir les peuples. Aujourd’hui même, le roi de Prusse s’empare de la Pologne au nom de la Très Sainte Trinité. « Citoyens législateurs, vous voulez la pros-érité de la Bépublique française; hâtez-vous e l’établir sur les bases immuables de la raison, de la justice, de la vérité. Poursuivez la supers¬ tition jusque dans ses derniers retranchements, il n’y a point d’erreur salutaire, surtout par rapport aux idées religieuses. « Pour achever ce grand ouvrage, nous vous invitons à nommer ou à faire nommer des com¬ missaires patriotes et éclairés pour aller porter la lumière de la vérité dans les départements, et surtout dans ceux qui ont servi de théâtre à la guerre de la Vendée. « Et comme le peuple est encore retenu dans ses préjugés par les prêtres qui n’y croient rien, mais qui en ont besoin pour vivre, nous vous engageons à décréter que tout prêtre qui re¬ noncera à son état et n’a pas d’autre ressource, jouira de sa pension. » ( Suivent 57 signatures.) Les citoyens Garnier, Cornihère et Dubuisson, juges réélus au tribunal du district de Jussey, département de la Haute-Saône, envoient leurs patentes de juges de l’établissement de 1790, qui rappelleraient le souvenir d’un tyran, pour en faire, avec celles qu’adresseront sans doute tous les autres juges de la République, un autodafé général. Renvoyé au comité des finances (1). Les officiers municipaux de la commune de Castel-Sagrat ont déposé une croix de Saint-Louis; ils invitent la Convention nationale à res¬ ter à son poste jusqu’à la fin de la guerre, et de¬ mandent que le nom de leur commune soit changé en celui de la Montagne-de-Traverse. Mention honorable, insertion au « Bulletin » et renvoi aux comités de division et d’instruc¬ tion publique pour le changement de nom (2). Le citoyen Toussaint envoie deux brevets de privilège, avec 6 morceaux d’argent (3). Suit la lettre du citoyen Toussaint (4). « Lannion, 2 frimaire, l’an II de la Bépu¬ blique une et indivisible. « Républicain Président, « Au mois de mars dernier (vieux style), j’ai fait déposer à la Convention une médaille des écoles vétérinaires, j’avais conservé les deux morceaux de parchemin ci-joints dans l’inten¬ tion d’en faire deux gargousses pour envoyer aux fanatiques ou aux satellites des tyrans quelques boulets ou boîtes à mitraille, l’occasion ne s’est pas présentée. Je te les envoie pour en (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 225. (2) Ibid. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 225. (4) Archives nationales, carton C 285, dossier 830, (11 Archives nationales , carton G 285, dossier 830. 352 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. j faire tel usage qu’il sera vu bon être et dont sont dignes ces restes des faveurs des tyrans. J’y joins quelques morceaux d’argent bons au creuset et que je voue au soulagement des veuves du 10 août. « Vive la République! « Salut et fraternité. « Toussaint, chef du bureau des contributions du district de Lannion, jadis médecin-vétérinaire des haras du ci-devant évêché de Léon dans la ci-devant province de Bretagne. » La commune des Vertus, district de Châlons, envoie trois décorations militaires, offre le reste de l’argenterie de son église et invite la Conven¬ tion nationale à rester à son poste (1). Suit la lettre du conseil général de la commune de Vertus (2). Le conseil général de la commune de Vertus, chef -lieu de canton, district de Châlons, dépar¬ tement de la Marne; les membres composant le comité de surveillance et la Société populaire, et rassemblée générale des citoyens de la com¬ mune de Vertus, à la Convention nationale. « Citoyens représentants, « La nation française, sous le joug du despo¬ tisme, touchait à la caducité de la vieillesse. Vous l’avez régénérée, vous en avez fait un peuple neuf, un peuple magnanime, plein de vigueur et d’énergie. « L’homme rendu à la liberté naturelle con¬ naît enfin la dignité de son être; il n’a plus, il ne voit plus autour de lui que des frères et des égaux; il rentre dans l’exercice de tous ses droits. En vain les tyrans se sont coalisés pour les lui ravir, il a brisé ses fers, il ne subira plus l’affront d’en porter de nouveaux. « Le Français qui a donné ce grand exemple à tous les peuples, désormais guidé par une raison éclairée, n’en sera que plus empressé à pratiquer les vertus sociales, non par l’effet d’une crainte pusillanime inspirée par les préceptes d’un ministre sacerdotal, mais parce que ce sentiment généreux est gravé dans son cœur par la main de l’Éternel, et qu’il sait que la justice et la vertu peuvent seules assurer son bonheur et celui de ses semblables. « Tel est, citoyens représentants, tel est votre ouvrage. Vous devez encore y mettre la dernière main en restant à votre poste jusqu’à ce que cet immortel édifice soit entière¬ ment achevé et consolidé. C’est le vœu de la nation, c’est celui de notre commune qui, en adhérant aux grandes mesures que vous avez prises pour le salut de la patrie, va aussi mettre sous vos yeux les actes des vrais républicains dont elle est composée. « Ainsi nous avons unanimement arrêté : « 1° D’offrir à la République le reste de l’argenterie de notre église paroissiale qui avait été réservée pour le culte. Privés de ces objets d’un vain luxe, nous n’en serons pas moins pé¬ nétrés de vénération pour l’Etre suprême, pour cet Etre dont le nom décore le frontispice de l’Acte constitutionnel, souverain modéra¬ teur de l’Univers, infiniment bon, infiniment juste, qui récompense la vertu et qui punit lés fautes avec indulgence ; « 2° De supprimer toutes les épitaphes qui désignent des titres tels (sic) qu’ils puissent être, parce qu’il ne faut pas laisser subsister de distinction entre les morts non plus qu’entre les vivants, et de donner à la patrie les planches de cuivre sur lesquelles sont gravés ces monu¬ ments de la vanité; « 3° De supprimer aussi et d’envoyer aux manufactures d’armes, les croix de fer éparses sur les cimetières et ailleurs et de mettre en réquisition les grilles et les portes qui peuvent être remplacées par des murailles et des portes de bois; « 4° De détruire tous les monuments de la féodalité, notamment les restes d’un édifice qui existe dans l’enceinte de notre commune sous la dénomination de Porte des foi et hom¬ mages, et qui présente encore les vestiges de l’entrée d’une ancienne forteresse; « 5° De biffer sur nos registres les adresses et les lettres écrites au ci-devant roi pour le féliciter sur les divers événements de sa vie et ceux de sa famille, ne voulant plus qu’il existe de traces de ces tributs d’adulation si peu méritée par celui qui les a reçus ; « 6° De brûler sur la place publique les titres de noblesse et ceux des droits féodaux que nous parviendrons à rassembler; « 7° Enfin, citoyens représentants, nous ter¬ minerons notre hommage en vous adressant trois croix du ci-devant ordre de Saint-Louis, qui nous ont été remises par les citoyens Ba¬ taille, Maupassant et Noël, anciens militaires, habitants de notre commune. « Vive la République ! vive la Liberté ! vive V Egalité ! « Vive la Montagne de la Convention natio¬ nale! (Suivent 71 signatures.) « La croix du ci-devant ordre de Saint-Louis remise sans brevet par le citoyen Noël qui, l’ayant eue en qualité d’ancien garde du ci-de¬ vant roi, n’a pas eu de brevet, n’étant pas d’usage de leur en accorder. » La municipalité de Saint-Nicolas-de-Grave, département de la Haute-Garonne, envoie trois assignats de 500 livres chacun, que le citoyen Ayral, chef du 3e bataillon de la Montagne, offre pour l’équipement et autres besoins des braves défenseurs de la patrie (1). (Il Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 225. (2} Archives nationales , carton C 283, dossier �808. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 226.