406 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [1er février 1790.] élection, méritassent véritablement les éloges de l’Assemblée nationale, parce qu’elle sait, comme tout le monde, que toute liste, que tout billet colporté flétrit également les électeurs et l’élu. Sous quelque face qu’il ait présenté l’affaire de la Tourette, quoiqu’il vous ait dit que la garde nationale n’y a trouvé que des enfants et quelques ouvriers qui travaillaient, il lui sera difficile d’empêcher que l’on ne trouve plus probable l’assertion de ceux qui disent qu’il y avait un attroupement considérable, attroupement indiqué et prévu par un placard ; que la garde nationale a été insultée ; qu’il y a eu des coupa de fusil de tirés de part et d’autre ; qu’il y a eu près de 40 hommes de blessés ; que des' gardes nationales ont été insultées et leurs uniformes arrachés; tous faits décidément improbables, s’il n’y avait eu que des enfants et quelques ouvriers sur la place. Messieurs, nous n’avons pas à juger les détenus et leurs délits ; nous avons à juger uniquement la conduite du prévôt général, et nous avons à décider s’il s’est rendu incapable ou indigne des fonctions dont il est chargé. J’ai détruit les reproches qu’on lui faisait ; je conclus qu’il ne mérite point d’être inculpé et qu’il faut lui laisser suivre la procédure qu’il a commencée. Mais ce parti n’a-t-il aucun inconvénient ? lui livrerons-nous la vie et les personnes des accusés ? La justice le permettrait sans doute, mais 'e ne vous proposeras même tout ce que permet a justice. Je sens de quel poids doivent être les (soupçons même mal fondés lorsqu'ils environnent un tribunal ; je veux désintéresser ceux qui se laissent entraîner à ces alarmes. II me suffit que les preuves ne dépérissent pas, que le cours de la procédure ne soit point interrompu, que nous puissions enfin savoir ce qu’il importe tant que l’on sache... Les délits de Marseille doivent être classés parmi les crimes de lèse-nation. Les flatteurs du peuple, les séducteurs du peuple, sont aussi ses ennemis ; ce sont même les ennemis les plus dangereux pour des Français. Ils n’ont plus à se défendre du despotisme avec lequel ils sont devenus incompatibles, mais ils ont encore à redouter les prestiges que leur présentent les apôtres de la licence, qui se couvrent du titre respectable d’amis de la liberté. On a dit dans la tribune de l’Assemblée .- Pourquoi le pouvoir exécutif avait-il nommé ce prévôt t que voulaient les ministres quand ils soutenaient, quand ils refusaient leur sanction aux décrets des souverains législateurs de la nation ? Nous répondons : Pourquoi dans un moment où les juges anciens ne sont plus, et où les juges nouveaux ne sont pas encore, s’obstine-t-on à attaquer la seule juridiction qui puisse réprimer les malfaiteurs ? Pourquoi, à l’occasion des prétendus délits d’un prévôt, vous proposait-on de confiance, de détruire toutes les juridictions pré-vôtales ? Qu’est-ce que la constitution, si se renfermant dans les bornes qu’elle lui a prescrites, le monarque ne peut pas refuser sa sanction à un décret dont l’effet immédiat aurait été l’introduction de l’anarchie dans Marseille, et la destruction de toutes les preuves qu’il est si important de conserver ? Enfin, qu’est-ce que cette harmonie, cette union qui doit subsister entre les pouvoirs constitutionnels, si l’on vous présente comme un tort la lenteur respectueuse des ministres qui ont pesé 15 jours les observations dilatoires ou négatives que leur conscience les forçait d’opposer à votre décret ? Je m’arrête et je conclus : il n’y a point lieu à inculper le prévôt ni à le dépouiller de son attribution. Il est utile, convenable, conséquent à vos décrets, d’ordonner qu’il soit sursis à l’exécution du jugement du prévôt de Marseille. Dans ces circonstances, je propose le décret suivant : L’Assemblée nationale décrète que le décret du 8 décembre sera rapporté. Que le prévôt général de Marseille sera tenu de se conformer scrupuleusement aux décrets de l’Assemblée nationale, sanctionnés par le Roi, et le déclare responsable de toutes les violations qui pourraient y être faites dans le cours de la procédure; lui enjoint de la poursuivre jusqu’à jugement définitif. Ordonne qu’il sera sursis à l’exécution desdits jugements, et que copie de la procédure et desdits jugements sera envoyée à M. le garde des sceaux, et remise au comité des rapports. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. TARGET Séance du lundi 1er février 1790 (1). M. le chevalier de Boufflers , l'un de MM. les secrétaires , donne lecture des procès-verbaux des deux séances du-samedi 30 janvier. M. Ulry représente, relativement au décret concernant la division du département du Bar-rois, qu’il ne doit pas être fait mention, dans le procès-verbal, de l’Ecole nationale en faveur de la ville de Lignv. L’Assemblée ordonne la rectification de cette erreur. Un membre demande d’ajouter à l’article 4 du décret sur les finances : « receveurs-généraux et particuliers. » Un autre, de mettre après le mot cautionnement « ou finances. » L’Assemblée admet ces deux propositions. M. le Président annonce que le résultat du scrutin, pour le nouveau président, n’a pas donné la pluralité absolue; que sur 694 votants, M. Bureaux de Pusy a réuni 331 suffrages; M. le baron de Menou, 328; et que 35 voix ont été données à d’autres membres de l’Assemblée. M. Target continue à présider l’Assemblée conformément au règlement. Les secrétaires choisis sont MM. Guillotin, de Marguerittes et de LaCoste. M. le Président rend compte à l’Assemblée que Sa Majesté sanctionne ; 1° Le décret du 23 janvier, concernant la contribution aux décimes pour les six derniers mois de 1789; 2° Le décret du 28 janvier sur le paiement des droits d’aides de toute nature, et autres droits y réunis, même pour les ci-devant privilégiés ; 3° Le décret du même jour, concernant les juifs portugais, espagnols ou avignonais; 4° Le décret du 26 janvier, portant renonce-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur.