423 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 mai 1790.] Art. 6. « Si le premier scrutin ne donne à personne la pluralité du quart des suffrages, on procédera à un second, dans lequel chacun écrira encore deux noms sur son bulletin. Art. 7. « Si aucun citoyen n’obtient la pluralité du quart des suffrages, on procédera à un troisième et dernier scrutin : dans ce dernier scrutin, on ne pourra choisir que parmi les quatre personnes qui auront eu le plus de voix au scrutin précédent; on écrira deux noms sur les bulletins, et les deux citoyens qui obtiendront le plus de suffrages seront nommés substituts du procureur de la commune. Art. 8. « Si, au premier scrutin, un des citoyens a obtenu la pluralité du quart des suffrages, et accepté, on n’écrira plus qu’un nom au second scrutin, et au troisième on choisira entre les deux citoyens qui auront eu le plus de voix. » M. l’abbé Maury demande la parole avant de passer aux articles suivants. La parole est accordée. M. l’abbé Maury. Je demande que les élections soient définitivement achevées par chaque section. Les membres des districts doivent déterminer leur confiance à leur gré : vous n’avez pas décrété que l’élection d’une ville serait jugée par la ville voisine. Quel est le principe fondamental de la divisionde la ville de Paris en districts? C’est la supposition que les citoyens de tel ou tel quartier ne peuvent connaître ceux qui habitent un quartier opposé; en reconnaissant la nécessité de les séparer par classes, vous avez aussi reconnu la nécessité de les rendre indépendantes les unes des autres. Personne ne connaît mieux que moi l’homme digne de ma confiance, etje ne vois pas pourquoi vous y mettriez des bornes. Je demande donc, pour l’intérêt de la liberté, que l’élection des districts soit définitive. M. Moreau de Saint-Méry. Si le préopinant avait eu, comme moi, l’expérience des inconvénients qui résultent de la faculté d’avoir à la commune des représentants immédiats, il ne soutiendrait pas plus longtemps son opinion. Dans son système, il faudrait, pour conduire les quarante-huit sections, quarante-huit maires. Les officiers municipaux ne sont pas représentants d’une section, mais de la ville entière ; ce principe est consacré : et cependant, si les districts nommaient des représentants immédiats, il s’ensuivrait qu’ils ne devraient stipuler les intérêts que de leur section. (La discussion est fermée sur cet article.) M. l’abbé Maury. Vous compromettez l’autorité de l’Assemblée, car elle ne sera pas obéie si vous maintenez l’article 16. M. Camus. Je demande qu’on rappelle à l’ordre M. l’abbé Maury, pour avoir calomnié la ville de Paris. M. l’abbé Maury. Mettez-moi à l’ordre; inscrivez mon nom sur le procès-verbal; censurez-moi, je le demande. (L’Assemblée rappelle à l’ordre M. l’abbé Maury ; il applaudit lui-même au décret.) M. Dupont (de Nemours). J’observesurce même article 16 que, pour faire de Paris une unité politique, il faudrait considérer les sections comme les bureaux de l’Assemblée nationale; par suite, il ne faudrait pas examiner la majorité dans chaque section, mais la majorité des suffrages de toutes les sections collectivement prises. M. Démeunier, rapporteur. Le principe invoqué par M. Dupont n’est pas applicable au cas présent, parce que chacune des sections ne conclut point par elle seule ; mais elle concourt à un résultat unique. J’ajoute une seule observation, c’est que le dépouillement d’un scrutin individuel serait impraticable dans le cas de l’article 16. (On demande à aller aux voix.) M. le Président consulte l’Assemblée, qui ferme la discussion. Les art. 9 à 44 sont successivement mis aux voix et adoptés ainsi qu’il suit : Art. 9. « Lors de la première formation de la municipalité, chacune des quarante-huit sections élira parmi les citoyens éligibes, de sa section seulement, trois membres destinés à faire partie du corps municipal, ou du conseil général de la commune. Art. 10. « L’élection se fera au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages. Art. 11. « Si, au premier scrutin, la pluralité absolue n’est pas acquise, il sera procédé à un second ; si le second scrutin ne fournit pas non plus la pluralité absolue, il sera procédé à un troisième, entre les deux citoyens seulement qui auront eu le plus de voix au second. Art. 12. « En cas d’égalité de suffrages au second et au troisième scrutin, entre plusieurs citoyens ayant le nombre de voix exigé, la préférence sera accordée à l’âge. Art. 13. « Les nominations étant faites dans les quarante-huit sections, il sera envoyé par chacune d’elles à rHôtel-de-Ville un extrait du procès-verbal, contenant tes noms des trois citoyens élus. Art. 14. « Il sera dressé une liste des cent quarante-quatre citoyens ainsi nommés; cette liste, désignant leurs demeures et qualités, sera im-rimée, affichée et envoyée dans les quarante-uit sections. Art. 15. « Les sections seront tenues de s’assembler le lendemain de cet envoi, et elles procéderont à la lecture de la liste imprimée, à l’effet d’accepter la nomination des citoyens qui y seront compris, ou de s’y refuser. On recueillera les voix par assis et levé, et sans aucune discussion, sur chacune des cent quarante-quatre personnes comprises dans la liste, mais une section ne soumettra point à cette épreuve les trois qu’elle aura nommées. Art. 16. « Les résultats de la présentation de la liste dans chaque section seront envoyés à l’Hô-tel-de-Ville, et les citoyens qui n’auront pas été acceptés par plus de la moitié des sections, seront retranchés de la liste, sans autre information. Art. 17. « Les sections respectives procéderont, dès le lendemain de l’avis qui leur en aura été donné par le corps municipal, au remplacement des membres retranchés de la première liste. Art. 18. « Les noms des citoyens ainsi élus en remplacement, seront envoyés dans les sections pour y être acceptés ou refusés dans le jour, de la même manière que les premiers. Art. 19. « La liste des cent quarante-quatre élus étant définitivement arrêtée, les quarante-huit sections procéderont, de la manière suivante, à l’élection des quarante-huit membres du corps municipal. 424 [Assemblée nationale.] Art. 20. » Le scrutin se fera eu chaque section pas bulletin de liste de dix noms choisis parmi ceux de la liste im primée. Art. 21. « Les bulletins qui contiendront plus ou moins de dix noms, ou des noms qui ne seraient pas compris dans la liste imprimée, seront rejetés. Art. 22. « Le résultat du scrutin de chaque section sera envoyé à PHôtel-de-Yille ; et ceux qui, après le recensement général, se trouveront avoir la pluralité du quart des suffrages, seront membres du corps municipal. Art. 23. « Pour compléter le nombre des quarante-huit membres du corps municipal, comme aussi dans le cas où aucun citoyen n’aurait eu une pluralité relative du quart des suffrages, il sera procédé dans les quarante-huit sections à un second scrutin. Art. 24. « Ce scrutin sera fait, ainsi que le précédent, par bulletin de liste de dix noms choisis parmi les noms de la liste imprimée, moins ceux qui se trouveront élus par le précédent scrutin. Art. 25. « Tous ceux qui, par l’événement de ce second scru lin, réuniront une pluralité relative du quart des suffrages, seront membres du corps municipal. Art. 26. « Si le nombre des quarante-huit membres n’est pas rempli, ou si le second scrutin n’a donné à personne la pluralité du quart des suffrages, il sera procédé dans les quarante-huit sections à un dernier scrutin. Art. 27. « Ce dernier scrutin sera fait également par liste de dix noms choisis parmi les noms de la liste imprimée, moins ceux qui auront été élus. Art. 28. « La simple pluralité des suffrages sera suffisante à ce dernier scrutin; et ceux qui, par le rencensement général, l’auront obtenue, seront membres du corps municipal, jusqu’à concurrence de quarante-huit membres dont il doit être formé. Art. 29. « En cas de refus d’un ou de plusieurs citoyens élus aux deux premiers scrutins, il en sera usé comme s’ils n’avaient pas eu la pluralité requise pour l’élection, et leurs noms ne concourront pas dans les scrutins suivants. Art. 30. « Si un ou plusieurs citoyens élus au dernier scrutin ne veulent point accepter, ils seront remplacés par ceux qui suivront dans l’ordre des voix ou de l’âge. Art. 31. « Les citoyens compris sur laliste imprimée, qui n’auront pas été élus membres du corps municipal, ou qui auront refusé, resteront membres du conseil général, en qualité de notables. Art. 32. « Dans les scrutins pour l’élection des seize administrateurs dont il est parlé à l’article 27 du titre premier, on commencera par nommer les administrateurs au département des subsistances ; on passera ensuite à l’élection des administrateurs au département de la police, et ainsi successivement, jusqu’à l’élection des administrateurs au département des travaux publics, conformément à la division qui sera indiquée au titre III. Art. 33. « Le secrétaire-greffier, le trésorier, les adjoints du secrétaire-greffier, le garde des archives et le bibliothécaire seront élus par le conseil énéral de la commune, parmi les citoyens éligi-les de Paris ; leur élection se fera au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages; mais, sur chaque bulletin, on écrira deux noms. Art. 34. « Les deux secrétaires-greffiers adjoints seront élus de la même manière et l’un après l’autre. Art. 35. « On suivra, pour ces divers scrutins, les règles établies aux articles 11 et 12 ci-dessus. [7 mai 1790.] Art. 36. « Le maire, président de l’assemblée, aura droit de suffrage pour les élections. Art. 37. « On fera les premières élections aussitôt que la division de la ville de Paris en quarante-huit sections sera terminée. Art. 38. « Les assemblées des quarante-huit sections seront convoquées à cet effet au nom du maire en exercice et de la municipalité provisoire. Art. 39. < Toutes les opérations attribuées au corps municipal, relativement aux élections, appartiendront, pour cette première fois, au maire et aux soixante administrateurs actuels. Art. 40. « L’assemblée de chacune des quarante-huit sections sera ouverte par un de ces administrateurs, qui exposera l’objet de la convocation, et dont les fonctions cesseront après l’élection d’un président et d’un secrétaire. Art. 41. « Les comptables actuels, soit de gestion, soit de finance, rendront leurs comptes définitifs au nouveau corps municipal; ces comptes seront revus et vérifiés par le conseil général. Art. 42. « lisseront, de plus, imprimés, et tout citoyen actif pourra en prendre communication, ainsi que des pièces justificatives, au greffe de la ville, sans se déplacer et sans frais. Art. 43. «Le premier renouvellement des membres du corps municipal, des notables, ou autres personnes attachées à la municipalité, se fera le dimanche d’après la Saint-Martin 1791, et le sort déterminera ceux qui sortiront. On combinera les tirages de manière à ce qu’il sorte au moins une, et à ce qu’il ne sorte pas plus de deux des trois personnes nommées par chaque section. Art. 44. « Pour l’exécution de l’article 34 du titre premier, les élections, lors des renouvellements annuels, nommeront alternativement un ou deux des soixante-douze citoyens qui doivent entrer dans le corps municipal ou le conseil général de la commune. » M. le Président. La délibération du titre II est terminée. La séance est renvoyée à demain dimanche à l’heure ordinaire. (La séance est levée à neuf heures et demie.) ANNEXE à la séance de l'Assemblée nationale du 7 mai 1790. Opinion de M. le comte Stanislas de Clermont-Tonnerre (1) sur V influence que le mo-narque doit avoir sur la nomination des juges (2). Messieurs, quelle que soit la manière dont on ait posé la question, tous les hommes de bonne foi conviendront, sans doute, que nous savons respectivement, et ce sur quoi nous sommes d’accord, et ce en quoi nos opinions sont divergentes. Je profiterai donc de la liberté que l’Assemblée n’a point enlevé au préopinant, et qu’elle m’accordera, sans doute, de traiter la question dans son (]) L’opinion de M. de Clermont-Tonnerre n’a pas été insérée au Moniteur. (2) Écarté delà tribune par l’impatience de l’Assemblée à décider une question qui tient, selon moi, aux principes fondamentaux de la monarchie française et de la Constitution décrétée, je me dois d’imprimer mon opinion. ( Note de M. le comte de Clermont-Tonnerre .) ARCHIVES PARLEMENTAIRES.