[Assemblée nationale.] de cela, il sera nécessaire à l’Assemblée actuelle ou, si ses travaux ne le lui permettent pas, à la législature suivante, de lixer ses regards sur cette grande question, que l’opinion publique a longtemps débattue, et qu’il est aisé de décider quand on a en recours aux principes, à la justice. Cependant, je lavoue, il peut y avoir quelques difficultés dans les détails d’une loi sur le divorce : n’entamons donc point cette matière; ne décidons rien prématurément; remettons la discussion des articles qui nous sont présentés-au moment où le divorce sera l’objet de notre délibération ou de celle de nos successeurs. Sans doute ces articles sont importants, mais n’oublions pas que nous devons nous occuper un jour, sous un point de vue général, du sort des familles, des ménages, et ne considérons pas isolément les droits des hommes dans cette question où nous sommes tous intéressés personnellement jusqu’à un certain point : n’encourageons pas le reproche que l’on pourrait nous faire de n’avoir songé qu’à nos intérêts. (L’Assemblée décrète le renvoi des articles 13 et 14 au comité.) M. Démeunier, rapporteur, donne lecture de l’article 15, ainsi conçu : « Ceux qui auront outragé les objets d’un culte quelconque dans les lieux destinés à l’exercice de ce culte, ou ses ministres en fonctions, on interrompu par un trouble public les cérémonies religieuses de quelque cuite que ce soit, seront condamnés à une amende de 100 livres à 500 livres, et à un emprisonnement d’un an, 18 mois ou 2 ans. L’amende sera toujours de 500 livies, et l’emprisonnement de 2 ans, en cas de récidive. » M. le Pel’etier-Saint-Fargeau. Ce n’est pas sur la rédaction que j'ai une observation à faire. L’article est rédigé de telle manière qu’il semblerait que la moindre faute ne pourrait être punie d’une peine moindre que d’un emprisonnement d’un an; or, certainement ii y a des troubles apportés dans les lieux où l’on exerce un culte quelconque et qui cependant peuvent être punis par une peine de 1, 2, 3 ou 4 jours. Ainsi, je crois qu’il faud; ait rédiger l’article de telle manière que les délits qui y sont spécifiés fassent punis d’une amende qui ne pourra pas excéder 500 livres et d’un emprnonnement qui ne pourra pas dépasser un an. (Cet amendement est adopté.) M. Lanjiibais. La paix publique exige que les objets du culte salarié soient respectés dans tous 1- s endroits publics. Je propose donc de commencer ainsi l’article ; « ceux qui auront outrage les objets du culte salarié ... » (Murmures.) Car on ne peut pas appliquer aux cultes étrangers ce que dit l’article; car on ne peut pas me forcer à respecter le mahométisme par exemple. M. Garat aîné. Lorsque l’on a décrété la liberté des cultes comme une loi constitutionnelle de l’Etat, comment est-il possible que M. Lanjuinais propo.-e un amendement qui est marqué d'un caractère d’intolérance? Il veut que l’on ne respecte que les objets du cuite catholique : il veut donc que les aubes objets du culte soient livrés au mépris ! ( Applaudissements .) C’est vouloir aboi r ou détruire la lot de la liberté des cultes. L’amendement qu’il nous propose est inconstitutionnel. Je [7 juillet 1791] demande doue la question préalable sur cet am endement. M. Merlin. Il m’a paru que M, Lanjuinais voulait dire que ceux qui outrageaient les objets du culte catholique hors des lieux destinés à l’exercice de ce culte devaient être punis, et que ceux qui pourraient outrager les objets d’un autre culte hors des lieux destinés à son exercice ne devraient pas être punis. (Murmures.) Voici comme je propose de rédiger l’article : « Ceux qui auront outragé les objets du culte cahotique en quelque lieu que ce soit, ceux qui auront outragé les objets d’un autre culte, dans les lieux destinés à son service; ceux qui auront insulté dans leurs fonctions, ou interrompu, dans h s lieux publics, le3 cérémonies religieuses de quelque culte que ce soit, etc... » (Applaudissements.) M. Chabroud. Je suis parfaitement de l’avis de M. Carat et je crois qu’il e.-t facile de le justifier contre celui du dernier opinant. L’Assemblée a voulu, la Constitution veut que tous les cultes soient libres. Toute liberté autorisée par la loi doit être protégée par la loi. Je dis que cette protection ne comporte aucune distinction, aucune différence, ou bien Légalité des droits serait anéantie. En effet, il est évident que, si je suis libre d’insulter au culte de mon voisin, la loi m’autorise à provoquer sans cesse mon voisin, et dès lors la peine ne sera jamais encourue. L’Assemblée ne doit avoir qu’une volonté, c’est que le calme soit dans l’Etat, c’est que la tranquillité règne entre tous les citoyens, quels que soient leur culte et leurs croyances, et il est évi lentque la loi n’alleiodiait pas ce but, si elle laissait, en quelque lieu que ce fût, les citoyens et leurculte, et les objets de leur croyance, livrés à la merci des insultes de tout le monde. ü’apiès cela, Monsieur le Président, il me paraît évident que toute distinction est choquante, a uu caractère abominable d’intolérance, et qu’il résulterait déjà que ceux qui appartiennent au culte salarié, auraient le droit consacré par la loi d’insulter les autres citoyens, de les tracasser, et qu’ainsi, il n’y aurait plus de liberté du culte. (Applaudissements .) Je demande en conséquence que l’amendement de M. Lanjuinais soit rejeté. M. Démeunicr, rapporteur. 11 est bien entendu que vous ne pouvez établir aucune distinction daus l’article. Ainsi, loin d’y retrancher, il faut y ajouter; car il s’ensuivrait, de la rédaction actuelle, que les citoyens pourraient outrager, sans être punis, le convoi d’un protestant, attendu que ce convoi, traversant, la rue, ne se trouve point dans le li u destiné à l’exercice du culte. Il faut donc aussi que les citoyens ne puissent pas outrager, dans les lieux publics, les cérémonies d’un culte quelconque. Voici comme je rédigerais l’article : Art. 15. « Ceux qui auront outragé les objets d’un culte quelconque dans les lieux publics, ou dans les lieux destinés à l’exercice de ce culte, ou ses ministres en fonction, ou interrompu, par un trouble public, les cérémonies religieuses de quelque culte que ce soit, seront condamnés en une amende qui ne pourra excéder 500 livres, et à archives parlement amies. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 juillet 1791.] 31 un emprisonnement qui ne pourra excéder un an. L’amende sera toujours de 500 livres, et l’emprisonnement de deux années, en cas de récidive. » M. Lanjuinais. Je ne demandais que cela; je l'applaudis solennellement. (L’article 15 est mis aux voix et adopté.) Art. 16. « Les auteurs de ces délits pourront être saisis sur-le-champ et conduits devant!- juge de paix.» (Adopté.) M. le Président donne lecture d’une lettre des électeurs de la ville de Paris en 1789, ainsi conçue : 4 Monsieur le Président, « Les électeurs de la capitale de l’année 1789, ces hommes dont le patriotisme et les travaux ont si heureusement secondé la Révolution française, ont obtenu l’année dernière que les représentants de la nation assistassent au Te Deum annuel qu’ils ont consacré jusqu’au décès du dernier d’entre eux, pour célébrer l’immortelle journée du 14 juillet. « Ce! te députation, en donnant en quelque sorte un caractère national àun serment, tout à la fois civil et militaire, a rappelé le jour où un grand nombie de membres de l’Assemblée nationale étaient venus applaudir au succès de la ville de Paris pour la conquête de la liberté, « De semblables souvenirs sont on même temps et si utiles et si doux à retracer que les électeurs de 89 sollicitent et espèrent la même bienveillance dans le moment où la France entière montre le même esprit qui nous animait alors. a Nous sommes avec respect, etc. (L’Assemblée décide qu’une députation assistera à cette cérémonie.) M. le Président lève la séance à huit heures et demie. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CHARLES DE LAMETH. Séance du jeudi 7 juillet 1791, au soir (l). La séance est ouverte à six heures du soir. M. le Président. J’ai l’honneur d’annoncer à l’Assemblée la prestation de serment des officiers du 10e régiment de chasseurs en garnison à Vienne, qui, sur la notice du décret de l’Assemblée et avant que ce décret ait été légalement et officiellement envoyé, se sont présentés aux corps administrants. Ce fait est attesté par un procès-verbal de la municipalité de Vienne du 1er de ce mois, envoyé à l’Assemblée nationale. (L’Assemblée ordonne qu’il eu sera fait mention au procès-verbal. Une députation de la commune , des corps administratifs et judiciaires, des citoyens armés de Saint-Germain-en-Laye et des corps militaires qui y résident est admise à la barre. L’orateur de la députation s’exprime ainsi : « Messieurs, « Vous avezdonrié au peuple français une Constitution qui lui assure sa liberté; vous avez fait plus, vous lui avez donné l’exemple de la fermeté, du courage et de la sagesse, qui, seuls, pouvaient en consolider les bases. Que de combats n’avez-vous pas eu à soutenir pour défendre ce superbe monument, que nos ennemis attaquaient de toutes parts! Deux fois, Messieurs, vous avez sauvé la patrie ; et les époques eu seront à jamais mémorables. Animé par un si bel exemple, quel est celui d’entre nous qui ne trouve pas dans son cœur la résolution bien décidée de mourir sous les drapeaux de la liberté, plutôt que de retomber dans le honteux esclavage d’où vous nous avez tirés? « Nous venons, Messieurs, au nom de la commune de Samt-Germain-en-Laye, au nom des corps administratifs et judiciaires, au nom de tous les citoyens armés, au nom des corps militaires qui résident au milieu de nous, renouveler dans le sanctuaire delà liberté, le serment d’être tidèle à la nation et à la loi. Nous venons aussi, au nom de la commune de Saint-Germain, offrir à la nation, que vous représentez, l’élite de la jeunesse, qui se dévoue à la défense de la patrie. Votre décret du 21 juin dernier fut pour eux le cri de la patrie en danger; et, dès le lendemain, nous comptions deux cents bras armés pour sa défen e : ils n’attendent que le signal du départ. Vous voyez devant vous ceux qu’ils ont choisis pour venir jurer, en leur nom, que tant qu’il existera un ennemi de la nation et de la liberté. ils ne connaîtront que l’alternative ou de mourir, ou de ne po-er les armes qu’après les avoir-rendues victorieuses. » M. le Président répond : « Messieurs, le courage, le dévouement, et surtout l’union de tous les Français dans le moment de crise où s’e-t trouvé l’Etat, sont une grande et terrible leçon pour les ennemis de notre liberté : puissent-ils en profiter, et sentir qu’un peuple immense, animé des mêmes sentiments, qui regarde la liberté comme le premier des biens, est et sera toujours invincible 1 La nation a bien prouvé, par sa modération dans cette circonstance, qu’elle est puissante et libre; car elle a été généreuse. L’Assemblée nationale s’applaudit de votre confiance; elle est le gage le plus certain de l’heureux achèvement, du maintien et de la durée de la Constitution : elle me charge de vous assurer que c’est avec le même sentiment qu’elle reçoit vos serments. « Elle vous invite à assister à sa. séance ». (. Applaudissements .) M. le Président fait ensuite lectuie de la formule du serment. Les membres de la députation prêtent ce serment au milieu des applaudissements; ils sont ensuite admis à la séance. (L’Assemblée décrète l’impression du discours de la députation et de la réponse du président ainsi que leur insertion dans le procès-verbal.) Une députation des artistes composant le bureau (1) Celle séance est incomplète au Moniteur.