SÉANCE DU 3 FRUCTIDOR AN II (20 AOÛT 1794) - N° 37 323 Cent élèves de l’école de Mars étaient accourus; à 11 heures le feu a augmenté, et c’est le moment où de nouveaux secours sont arrivés du camp de l’école de Mars. Ces jeunes citoyens devaient donner un exemple de dévouement à la cité commune, en même temps qu’ils en recevaient eux-mêmes la leçon par le spectacle laborieux et touchant que donnaient les citoyens de Paris. Les administrateurs du département sont venus nous donner divers détails à 2 heures après minuit. Je ne peux m’empêcher de vous lire les détails renfermés dans les pièces et les procès-verbaux qui nous ont été remis dans la nuit par les diverses autorités constituées. Le commandant des pompiers était malade; le commandant en second a donné les ordres les plus prompts; le commandant de tour de la garde nationale, Cartier, n’a cessé de circuler dans Paris, et de porter, toutes les demi-heures, des détails de ce qui se passait à la maison de l’Unité. Les canonniers, chargés par leur état d’incendier les ennemis, ont montré le même zèle à arrêter l’incendie qui consumait le patrimoine de la République et les salpêtres dont il font un si utile usage. Les agents de la poudrerie de Grenelle s’y sont tous transportés. Il faudrait nommer tous les citoyens, célébrer le zèle de toutes les sections, si nous voulions parler de tous les secours, de tous les moyens, de tous les encouragements qui ont été prodigués en cette fâcheuse circonstance. La presque totalité des salpêtres est sauvée. La perte ne s’élèvera pas à plus de 15 milliers; mais les salpêtriers réparent déjà cette perte en redoublant de zèle, et déjà ce matin tous les ateliers étaient rétablis, et les travaux ont repris une plus grande activité. Les magasins de fusils, les magasins de charbons, et les manuscrits de la bibliothèque sont conservés; une partie de la bibliothèque est brûlée. Les sciences et les lettres regretteront des collections intéressantes; mais les bibliothèques des émigrés dédommageront la République. Les informations faites par Frecine, représentant du peuple, chargé de la raffinerie des salpêtres, ne nous présentent dans cet événement incendiaire qu’un accident naturel, et non pas la main du crime. C’est au zèle des citoyens à réparer les pertes du salpêtre; c’est à la bienfaisance de la Convention nationale à faire oublier aux citoyens qui ont éprouvé quelque perte les maux inséparables des événements de ce genre. Voici le projet de décret (1) : Il présente un projet de décret qui, après avoir été discuté et mis aux voix, est adopté dans les termes suivans : (1) Moniteur (réimpr.), XXI, 542-543; Bm , 3 fruct.; Débats, n°699, 32-35; J. univ., n° 1732; J. Perlet, n°697; J. Fr., n08 695 et 696; Rép. , n° 244; Ann. R.F., n° 262; J. S.-Culottes , n 08 552, 553; J. Mont., n° 113; J. Paris, n° 598; F. de la République, n°413; Gazette fr** , n° 963; M.U., n° XLIII, 62; Ann. pair. , n° DXCVII; C. Eg. , n° 732. La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités de salut public et des sûreté générale, décrète : ARTICLE Ier' Il sera fait mention honorable du zèle que les citoyens et citoyennes de Paris et les élèves de l’école de Mars ont apporté cette nuit pour éteindre l’incendie de la maison de l’Unité. ARTICLE IL La commission des travaux publics fera dresser, de concert avec un commissaire du département et un commissaire de la section de l’Unité, un état estimatif des pertes causées aux citoyens par cet incendie. Le comité des Secours publics est chargé de faire incessamment un rapport à la Convention nationale sur les secours et les indemnités à accorder. Le rapport sera inséré au bulletin (1). La séance est levée à 4 heures. Signé , Merlin (de Thionville), président, Bentabole, Guffroy, L. Lecointre (de Versailles), P. Barras, Frêron, Collombel, secrétaires (2). Affaire non mentionnée AU PROCÈS-VERBAL 37 RICORD : J’arrive de l’armée d’Italie, et je croyais que la Convention avait eu connaissance d’une lettre que je lui ai écrite, en date du 19 thermidor, et d’une adresse de la société populaire de Nice. J’ai inutilement cherché l’une et l’autre dans les différents bulletins, et je ne les ai pas trouvées. Je dois dire à la Convention que l’armée d’Italie idolâtre la République, mais qu’elle n’idolâtre aucun homme : elle a juré de nouveau, en apprenant la chute des nouveaux conspirateurs, d’être fidèlement attachée à la patrie, et de combattre tous les tyrans, de quelque espèce qu’ils soient. La société populaire et les administrations ont toutes répété le même serment. Je désire que l’assemblée se fasse représenter ces pièces. J’ai fait cette déclaration, d’abord pour remplir le devoir que m’imposait mon cœur, et ensuite pour détruire des bruits semés dans Paris par la méchanceté. On a répandu que j’étais émigré, tandis que je suis toujours resté à mon poste; et je réponds, à ceux qui m’ont accusé de l’avoir abandonné, que j’y serai jusqu’à la mort (3). (1) P.-V., XLIV, 33-34. Décret n° 10 474. Rapporteur Barère. Repris par Bm, 3 fruct. (2) P.-V., XLIV, 34. (3) Moniteur (réimpr.), XXI, 547; Débats, n° 699,30; Gazette frs*e , n°963; J. Paris, n°598; Ann. patr., n° DXCVII; J. Perlet , n° 697 (cette gazette introduit la protestation du représentant Ricord aussitôt après la pétition du citoyen Gagnebin (ci-dessus, n° 33) : « Ricord saisit cette occasion pour repousser les calomnies dirigées par des malveillans contre lui et contre l’armée d’Italie»); Ann. R.F., n°261; J. Fr., n° 695; F. de la Républ., n° 412.