SÉANCE DU 3 THERMIDOR AN II (21 JUILLET 1794) - NHS 62-63 395 62 MENUAU, au nom du comité des secours : Citoyens, je viens présenter à la Convention nationale un nouvel exemple de la valeur et du courage qu’inspire toujours l’amour de la patrie dans le cœur des vrais républicains. Nicolas Pillet, menuisier et maire de la commune de Nueil, district de Vihiers, département de Maine-et-Loire, pendant tout le temps qu’a duré la cruelle guerre de la Vendée, a toujours su, par son exemple et ses discours simples et pleins d’énergie, préserver ses concitoyens de la contagion fanatique qui désolait les communes voisines. Les habitants de Nueil, ayant toujours leur maire à leur tête, tantôt servaient de guides aux armées de la république, pour aller combattre les brigands; tantôt ils les repoussaient eux-mêmes, lorsque ces scélérats cherchaient à pénétrer et se répandre dans la commune de Nueil; et, à force de valeur et de prévoyance, ces bons citoyens avaient vu cette infernale guerre terminée, et leur pays n’en avait presque pas souffert. Les représentants du peuple prirent un arrêté bien rigoureux, mais qu’ils crurent juste et utile; ils ordonnèrent que tous les habitants des différentes communes dont le sol avait été souillé par la présence des brigands seraient désarmés. La commune de Nueil rendit, sans murmurer, des armes qu’elle avait employées si souvent, et avec tant de succès, contre les fanatiques Vendéens; mais elle prévit dès lors tous les maux dont elle pourrait devenir la victime. En effet, citoyens, le 8 floréal dernier, les brigands, sachant les habitants de Nueil sans armes, vinrent en force attaquer cette commune. Quelques vieillards et quelques femmes se sont sauvés. Pillet seul, ce maire intéressant, rassemble quatorze braves comme lui, et, avec quelques mauvais fusils de chasse, et très-peu de poudre et de balles, ils montent dans le clocher, s’y retranchent; et là, pendant sept à huit heures, ils essuient un feu continuel, auquel ils répondent par quelques coups bien ajustés, et ils tuent dix brigands. Ceux-ci ramassent bois et paille, portent le tout dans l’église, y mettent le feu, et cherchent ainsi à forcer le maire et ses concitoyens à descendre du clocher. Mais c’est en vain; nos braves supportent tout avec courage. Les coups de fusil redoublent, le maire est atteint d’une balle. Le coup est mortel, il le sent; il encourage d’une voix expirante ses concitoyens à périr plutôt que de se rendre. Le danger devient plus pressant, et c’en était fait de ces bons citoyens, si une portion de notre armée, instruite du danger que couraient les habitants de Nueil, n’était promptement accourue à leur secours. Les brigands se sauvent, les assiégés descendent de leur clocher; leur premier soin est de visiter les blessures du brave maire. Il n’y a point d’espérance, il meurt au bout de deux à trois heures, et laisse une femme et cinq enfants sans aucune ressource. Mais que dis-je, sans ressource ! il en reste une grande à cette famille infortunée dans votre justice et votre humanité. Voici le projet de décret [adopté] (l) : (l) Mon., XXI, 281. La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [MENUAU, au nom de] son comité des secours publics sur la pétition de Marie Chicotteau, veuve de Nicolas Pillet, menuisier, et maire de la commune de Nueil, district de Vihiers, département de Maine-et-Loire, mort des blessures qu’il a reçues en combattant les brigands de la Vendée, décrète ce qui suit : Art. I. - La trésorerie nationale fera passer dans le plus bref délai à l’agent national provisoire du district de Vihiers, réfugié à Angers, la somme de 6001., pour être remise, à titre de secours provisoire, à la citoyenne Marie Chicotteau, veuve de Nicolas Pillet, maire de la commune de Nueil, district de Vihiers, mort des blessures qu’il a reçues en combattant, à la tête des braves patriotes de la commune, les brigands de la Vendée. Art. IL - La Convention nationale renvoie la pétition et les pièces jointes au comité de liquidation pour le règlement de la pension, s’il y a lieu. Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance (l). 63 MENUAU : Citoyens, vous avez renvoyé à votre comité des secours publics la pétition de la citoyenne veuve Gobin, dont le mari est mort à la suite des blessures qu’il a reçues par l’explosion de la matière d’un canon coulé à la fonderie établie à Breteuil, département de l’Eure. Cette citoyenne ne vivait que des travaux de son mari. Chargée d’un enfant en bas âge, elle se trouve plongée dans une grande misère, si vous ne vous hâtez de venir à son secours. Votre comité, toujours interprète de vos sentiments, n’a pas balancé à lui accorder 300 livres de secours provisoire. En conséquence, voici le projet de décret que je suis chargé de vous présenter : [adopté] (2). « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Menuau au nom de] son comité des secours publics sur la pétition de la citoyenne veuve Gobin, dont le mari, employé à la fabrique des canons, est mort à la suite des blessures et des coups de feu qu’il a reçus le 12 prairial par l’explosion de la matière d’un canon à la fonderie de Breteuil, département de l’Eure, décrète ce qui suit : Art. I. - La trésorerie nationale paiera, sur le vu du présent décret, à la citoyenne veuve Gobin la somme de 300 liv. à titre de secours provisoire. Art. IL - La Convention nationale renvoie la pétition et les pièces jointes au comité de (l) P.V., XLII, 98. Minute de la main de Menuau. Décret n° 10 022. Bm, 5 Therm.; Ann. patr., n° DLXVII; J. Fr., n° 665 (sic pour 666); J. Sablier, n° 1452; C. Eg., n° 702 (avec des erreurs dans les noms propres pour ces deux dernières gazettes); J. Perlet, n° 668. (2) Mon., XXI, 282. SÉANCE DU 3 THERMIDOR AN II (21 JUILLET 1794) - NHS 62-63 395 62 MENUAU, au nom du comité des secours : Citoyens, je viens présenter à la Convention nationale un nouvel exemple de la valeur et du courage qu’inspire toujours l’amour de la patrie dans le cœur des vrais républicains. Nicolas Pillet, menuisier et maire de la commune de Nueil, district de Vihiers, département de Maine-et-Loire, pendant tout le temps qu’a duré la cruelle guerre de la Vendée, a toujours su, par son exemple et ses discours simples et pleins d’énergie, préserver ses concitoyens de la contagion fanatique qui désolait les communes voisines. Les habitants de Nueil, ayant toujours leur maire à leur tête, tantôt servaient de guides aux armées de la république, pour aller combattre les brigands; tantôt ils les repoussaient eux-mêmes, lorsque ces scélérats cherchaient à pénétrer et se répandre dans la commune de Nueil; et, à force de valeur et de prévoyance, ces bons citoyens avaient vu cette infernale guerre terminée, et leur pays n’en avait presque pas souffert. Les représentants du peuple prirent un arrêté bien rigoureux, mais qu’ils crurent juste et utile; ils ordonnèrent que tous les habitants des différentes communes dont le sol avait été souillé par la présence des brigands seraient désarmés. La commune de Nueil rendit, sans murmurer, des armes qu’elle avait employées si souvent, et avec tant de succès, contre les fanatiques Vendéens; mais elle prévit dès lors tous les maux dont elle pourrait devenir la victime. En effet, citoyens, le 8 floréal dernier, les brigands, sachant les habitants de Nueil sans armes, vinrent en force attaquer cette commune. Quelques vieillards et quelques femmes se sont sauvés. Pillet seul, ce maire intéressant, rassemble quatorze braves comme lui, et, avec quelques mauvais fusils de chasse, et très-peu de poudre et de balles, ils montent dans le clocher, s’y retranchent; et là, pendant sept à huit heures, ils essuient un feu continuel, auquel ils répondent par quelques coups bien ajustés, et ils tuent dix brigands. Ceux-ci ramassent bois et paille, portent le tout dans l’église, y mettent le feu, et cherchent ainsi à forcer le maire et ses concitoyens à descendre du clocher. Mais c’est en vain; nos braves supportent tout avec courage. Les coups de fusil redoublent, le maire est atteint d’une balle. Le coup est mortel, il le sent; il encourage d’une voix expirante ses concitoyens à périr plutôt que de se rendre. Le danger devient plus pressant, et c’en était fait de ces bons citoyens, si une portion de notre armée, instruite du danger que couraient les habitants de Nueil, n’était promptement accourue à leur secours. Les brigands se sauvent, les assiégés descendent de leur clocher; leur premier soin est de visiter les blessures du brave maire. Il n’y a point d’espérance, il meurt au bout de deux à trois heures, et laisse une femme et cinq enfants sans aucune ressource. Mais que dis-je, sans ressource ! il en reste une grande à cette famille infortunée dans votre justice et votre humanité. Voici le projet de décret [adopté] (l) : (l) Mon., XXI, 281. La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [MENUAU, au nom de] son comité des secours publics sur la pétition de Marie Chicotteau, veuve de Nicolas Pillet, menuisier, et maire de la commune de Nueil, district de Vihiers, département de Maine-et-Loire, mort des blessures qu’il a reçues en combattant les brigands de la Vendée, décrète ce qui suit : Art. I. - La trésorerie nationale fera passer dans le plus bref délai à l’agent national provisoire du district de Vihiers, réfugié à Angers, la somme de 6001., pour être remise, à titre de secours provisoire, à la citoyenne Marie Chicotteau, veuve de Nicolas Pillet, maire de la commune de Nueil, district de Vihiers, mort des blessures qu’il a reçues en combattant, à la tête des braves patriotes de la commune, les brigands de la Vendée. Art. IL - La Convention nationale renvoie la pétition et les pièces jointes au comité de liquidation pour le règlement de la pension, s’il y a lieu. Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance (l). 63 MENUAU : Citoyens, vous avez renvoyé à votre comité des secours publics la pétition de la citoyenne veuve Gobin, dont le mari est mort à la suite des blessures qu’il a reçues par l’explosion de la matière d’un canon coulé à la fonderie établie à Breteuil, département de l’Eure. Cette citoyenne ne vivait que des travaux de son mari. Chargée d’un enfant en bas âge, elle se trouve plongée dans une grande misère, si vous ne vous hâtez de venir à son secours. Votre comité, toujours interprète de vos sentiments, n’a pas balancé à lui accorder 300 livres de secours provisoire. En conséquence, voici le projet de décret que je suis chargé de vous présenter : [adopté] (2). « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Menuau au nom de] son comité des secours publics sur la pétition de la citoyenne veuve Gobin, dont le mari, employé à la fabrique des canons, est mort à la suite des blessures et des coups de feu qu’il a reçus le 12 prairial par l’explosion de la matière d’un canon à la fonderie de Breteuil, département de l’Eure, décrète ce qui suit : Art. I. - La trésorerie nationale paiera, sur le vu du présent décret, à la citoyenne veuve Gobin la somme de 300 liv. à titre de secours provisoire. Art. IL - La Convention nationale renvoie la pétition et les pièces jointes au comité de (l) P.V., XLII, 98. Minute de la main de Menuau. Décret n° 10 022. Bm, 5 Therm.; Ann. patr., n° DLXVII; J. Fr., n° 665 (sic pour 666); J. Sablier, n° 1452; C. Eg., n° 702 (avec des erreurs dans les noms propres pour ces deux dernières gazettes); J. Perlet, n° 668. (2) Mon., XXI, 282.