SÉANCE DU 14 VENDÉMIAIRE AN III (5 OCTOBRE 1794) - N° 45 309 La Convention nationale, après avoir entendu son comité des Secours publics, Décrète que, sur le vu du présent décret, la Trésorerie nationale paiera au citoyen Nicolas Finet, de la commune de Beaufort, canton de Maubeuge, district d’Avesnes, département du Nord, carabinier au deuxième régiment, la somme de 300 L, par forme de reconnoissance nationale, et non imputable, pour avoir eu le courage et la fermeté de ramener trois chevaux au bivouac, assez loin du champ de bataille et du ravin dans lequel, en chargeant l’ennemi avec son escadron, le 27 brumaire dernier, sous Bri-castel, il avoit été précipité par la chute de son cheval, où il resta enveloppé et accablé sous le poids de plusieurs chevaux, depuis quatre heures et demie du soir jusqu’au lendemain deux heures du matin, et d’où il ne parvint de se retirer qu’à la longue, épuisé de fatigue, ayant tout le corps froissé et le bras gauche entièrement paralysé; Approuve au surplus la gratification de cent livres à lui faite par le général Hoche, et renvoie la pétition du brave Finet, avec les quatre pièces y jointes, pour déterminer, le plus promptement possible, les secours et la pension que la loi lui assure par sa retraite honorable (53). 45 Un secrétaire donne lecture d’une adresse des incendiés de Nouvion, district de Vervins [Aisne], où ils se plaignent de ce qu’on ne les a pas fait participer aux secours accordés par la Convention (54). Les citoyens incendiés de Nouvion, département du Nord, et victimes du brigandage des Autrichiens, se plaignent de ce que les secours que la nation a décrétés en leur faveur ne leur sont pas distribués. GOSSUIN : Depuis la guerre de la Révolution, les départemens du Nord en ont été le théâtre : vous n’ignorez pas que les brigands coalisés ont pillé les citoyens, égorgé des vieillards, des enfans, enlevé des bestiaux; que des communes entières furent en proie aux flammes : non citoyens, il n’est pas de cruautés et de privations auxquelles les malheureux ha-bitans de ces contrées n’aient été exposés : ils ont payé le pain excessivement cher, et souvent ils en manquaient. Des cabanes de terre qu’ils ont dû construire à la hâte sur les débris de leurs habitations incendiées, ne les garantiront pas des rigueurs de l’hiver, d’autres sans ressource et dénués de tout, ont dû isolément promener leurs lambeaux et leurs enfans en bas âge dans les départemens où la rage autri-(53) P.-V., XLVI, 287-288. C 321, pl. 1331, p. 3, minute de la main de Sallengros, rapporteur. Moniteur, XXII, 163; Bull., 16 vend, (suppl.); J. Fr., n’ 742; M. U., XLIV, 247. (54) P.-V., XLVI, 288. chienne ne puisse les atteindre : eh bien! citoyens, croirez-vous que, malgré vos lois bienfaisantes et les arrêtés pris depuis six mois en faveur de ces infortunés, ils n’ont pas encore reçu les secours et les indemnités auxquelles ils ont droit, et que vous leur avez assurées? Deux millions avoient été destinés pour leur être distribués à titre de secours provisoire : nos collègues en mission, qui ont du suivre les armées triomphantes et les approvisionner, ont manqué de temps pour terminer cet objet. Est-il concevable que cette somme envoyée il y a six mois par la Trésorerie nationale, soit, à ce qu’on m’assure, encore intacte dans la caisse du receveur du district de Vervins? Votre justice, votre humanité vous commandent, et il entre dans vos coeurs, de prendre des mesures promptes pour remédier à un pareil retard. Prenons-y garde, citoyens, l’ennemi se prévaut de cela : toujours attentif sur vos opérations, il tâche de se faire des partisans. Des lois existent, dit-il; on ne les exécute pas : nous vous avons incendiés, pillés ; vous ne réparerez pas vos pertes... mais leurs efforts seront vains et ils le savent; ils savent aussi que tous les coeurs chez nous sont à la patrie; ils ne parviendront pas à nous faire prendre le change sur le voeu bien prononcé de la Convention nationale, de ne faire que des heureux. Fixez donc de nouveau vos regards sur des citoyens vertueux et pauvres. Les représentans du peuple en mission ne peuvent embrasser tout à la fois tant de branches d’administration : autorisez le comité des Secours publics qui a connoissance d’une partie des réclamations que je vous retrace ici, de vous proposer demain un de ses membres pour parcourir avec soin les commîmes ravagées des départemens du Nord et de l’Aisne, y distribuer des secours, et y porter en votre nom des paroles de consolation : jamais mission ne fut plus utile. La Convention applaudit à cette proposition ; Gossuin rédige ensuite le projet de décret suivant, qui est adopté (55) : Sur la motion d’un membre, La Convention nationale décrète que le comité des Secours publics lui proposera demain un membre pris dans son sein, pour se rendre sur-le-champ dans les départements du Nord et de l’Aisne, entendre les réclamations des citoyens pillés ou incendiés par l’ennemi. Ce représentant veillera à ce que les lois qui leur assurent des indemnités soient promptement mises à exécution. H est autorisé à leur distribuer des secours provisoires sur les deux millions qui ont été mis à cet effet, dans le mois floréal, par le comité de Salut public, à la disposition du représentant du peuple Laurent alors en mission (56). (55) Débats, n° 749, 303-304; Moniteur, XXII, 161. (56) P.-V., XLVI, 288. C 321, pl. 1331, p. 2, minute de la main de Gossuin. Décret anonyme selon C* II 21, p. 5. Bull., 14 vend, (suppl. 1); Débats, n° 745, 249; Ann. Patr., n 643; Ann. R. F., n° 14; C. Eg., n“ 778; F. de la Républ., n” 15; J. Fr., n° 740; J. Mont., n" 159; J. Paris, n° 15; J. Perlet, n°742; Mess. Soir, n° 778; M. U., XLIV, 217; Rép., n’ 15.