110 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 novembre 1190.] cer à consacrer, par notre adhésion, cette usurpation inouïe, criminelle, elle-même, et effrayante dans ses conséquences. Je sais ce que je dois à Dieu. Soumis à la puissance temporelle dans tout ce qui est temporel, je dois l’être à la puissance spirituelle dans tout ce qui est spirituel. Pour régler ma conduite, j’attends la décision du souverain pontife et des évêques; ils sont mes guides et mes oracles dans tout ce qui regarde la religion. En les suivant, je ne puis errer : Ego cathedrœ Pétri consocior : super illam Petrani œaificalam esse ec-clesiam scio (Suint Jérôme, ép. xiv.) Je suis, etc. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. ALEXANDRE DE LAMETH. Séance du dimanche 28 novembre 1790. La séance est ouverte à onze heures et demie du matin, par la lecture des procès-verbaux des deux séances d’hier. Ces procès-verbaux sont adoptés. M. Pezous, député du département du Tarn, demande et obtient un congé de six semaines pour vaquer à des affaires de famille. M. Vieillard, député de Coutances, membre du comité des rapports , rend compte d’une pétition des administrateurs du département du Lot, tendant à obtenir que les six commissaires nommés pour exercer provisoirement les fonctions municipales dans la ville de Montauban, soient chargés des dites fonctions, et la ville autorisée à renouveler la moitié des officiers municipaux, conformément aux décrets de l’Assemblée nationale. Il propose, en conséquence, un projet de décret, qui est adopté dans les termes suivants: « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports sur la pétition des au-ministrateurs du département du Lot; « Considérant que lorsque, par son décret du 26 juillet dernier, elle a auturisé le directoire du département à nommer six commissaires pour remplir provisoirement les fonctions municipales dans la ville de Montauban, elle n’a pas entendu priver cette ville des avantages accordés par la Constitution aux municipalités, de procéder à l’époque indiquée par la loi, au renouvellement de la moitié des membres qui doivent les composer, ni proroger les fonctions desdits commissaires au delà du temps auquel la commune de Montauban pourrait être représentée par des membres qu elle aurait élus, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Aussitôt après la notification du présent décret, les commissaires exerçant à Montauban les fonctions municipales, feront, en leur présence, tirer au sort, et indiqueront ensuite ceux des anciens officiers municipaux et notables que le sort aura désigné devoir être remplacés. Art. 2. « Celui desdits commissaires, chargé des fonctions de procureur de la commune, fera aussitôt convoquer la communauté des habitants pour procéder, le dimanche d’après la convocation, au renouvellement de la moitié des officiers municipaux et notables, et à la nomination d’un substitut du procureur de la commune. Art. 3. « Lors de l’élection, aucun des membres suspendus de leurs fonctions par le décret du 26 juillet dernier, ne pourra être élu. Art. 4. « La nomination faite, le pouvoir attribué aux commissaires par le directoire du département du Lot, cessera. Art. 5. « Les officiers municipaux nouvellement élus, remplaceront lesdits commissaires; le premier nommé fera provisoirement les fonctions de maire. Art. 6. « Les notables qui auront été élus formeront provisoirement le conseil de la commune, sans le concours d’un plus grand nombre. Art. 7. « Le substitut du procureur de la commune exercera aussi provisoirement les fonctions de procureur de la commune. » M. le Président. L’ordre du jour est un rapport du comité de judicature sur les précautions à prendre pour ce qui regarde la liquidation des offices. M. Gossin, rapporteur. Le comité de judicature, constamment animé du désir de répondre à la confiance dont vous l’avez honoré, s’occupe sans relâche des mesures nécessaires pour remplir la tâche que vous lui avez imposée. Vous avez adopté pour la liquidation des offices des hases qui assurent sa marche ; mais il est essentiel aussi que vous daigniez prendre des précautions pour épargner aux officiers et à leurs créanciers tous les frais qui ne seront pas indispensablement nécessaires pour que la liquidation soit légalement et irrévocablement consommée. Tel est l’objet des observations sommaires et du projet de decret que nous allons avoir l’honneur de vous soumettre. Vous avez confié au garde des rôles, par votre décret du 30 octobre, le soin de recevoir les oppositions qui seraient formées au remboursement des offices, et quoique, relativement à une situation nouvelle et imprévue, vous fussiez strictement les maîtres de choisir, vous avez été déterminés par la considération que les gardes des rôles étaient déjà dépositaires d’un grand nombre d’oppositions; que l’article 18 deVédit de 1771 les appelait en première ligne pour les recevoir, et que par conséquent il était naturel de leur en accorder la suite. Mais l'intérêt de ces officiers n’a pas été le seul motif de votre détermination, et vutre objet essentiel, en indiquant les gardes des rôles et en leur attribuant le droit spécial de recevoir les oppositions, avait été de faire que les créanciers sur offices n’eussent qu’une seule opposition à former, et les titulaires liquidés qu’un seul certifh at à présenter au Trésor public pour toucher leurs remboursements. Cette décision, en contrariant l’ancien état des choses, a donné heu à des difficultés que nous avons cherché à concilier ; nous nous flattons [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 novembre 1790.] 111 d’y être parvenus. Nous allons vous rendre compte de nos vues et de nos démarches. Avant la suppression de la vénalité des offices, l’opposition se formait au sceau des provisions; les gardes des rôles la recevaient. Son effet était d’amener aux parties casuelles le dépôt du prix de l’office vendu, pour être partagé entre les opposants; c’est là ce qui nous avait paru appeler les gardes des rôles, par préférence, à la réception des oppositions; mais cette forme, qui suffisait tant que le prix d’an office était rapporté par un acquéreur particulier, cessait d’être suffisante quand l’office était acheté ou supprimé par l’Etat et remboursé par le Trésor public . D’autres officiers, connus sous lenom de conservateurs des finances surleTrésor public, recevaient des oppositionsqui, formées dans leurs mains, frappaient indistinctement sur tous les capitaux ou arrérages payables au Trésor royal; en sorte que, toutes les fois qu’il était chargé du remboursement d’un office, ce remboursement ne s’y faisait qu’en rapportant, outre le certificat du garde des rôles, celui des conservateurs des finances. Cette double formalité, onéreuse pour le public, était cependant fondée en raison ; il fallait constater, par le certificat du garde des rôles, que, lors de la suppression de i’oflice, il n’y avait pas d’opposition formée au sceau. On constatait par le certificat du conservateur que, depuis que l’office avait cessé d’étre pour deveair une somme exigible au Trésor royal, il n’était pas survenu d’opposition à sou remboursement. U résultait dans le droit, de cet état de choses, que l’attributiou faite aux gardes des rôles par votre décret du 30 uctobre n’anéantissait pas les droits des conservateurs, sur lesquels vous n’aviez pas prononcé. Il en résultait, dans le fait, que le public, accou ¬ tumé à connaître les conservateurs pour tout ce qui se payait au Trésor public, avait porté le plus grand nombre des oppositions dans les mains de ces officiers; en telle sorte que l’intention que vous aviez eue de ne commettre qu’un seul dépôt des oppositions devenait illusoire, mais qu’il suffisait d’une seule opposition formée dans chacun des établissements, avant votre décret, et même de la possibilité qu’on en eût lormé quelqu’une, pour que le Trésor public fût autorisé à ne payer que sur le vu des deux certificats à la fois. Il est donc devenu nécessaire de parer à cette double formalité et à l’augmentation de dépense qui en devenait la suite. Un autre objet avait en même temps attiré notre attention, parce qu’il était la suite de votre décret. Le tarif des gardes des rôles avait é.é fixé pour les oppositions d’une manière avantageuse, à raison du nombre borné de ces actes qu’ils recevaient, année commune, dans l’état ancien, et ces oppositions étalent sujettes à un renouvellement annuel. Dans un moment où elles vont tout à coup se multiplier considérablement, et où la liquidation va successivement anéantir tous les offices, il n’est pas juste que ces oppositions restent au même taux et que leur durée soit aussi restreinte. Nous étions au moment de vous proposer à cet égard uu règlement, quand nous avons découvert la nécessité d’en solliciter un de votre sagesse, non seulement sur le tarif des oppositions, mais encore sur l’unité du dépôt où elles devaient être portées. Nous n’avons vu à cet égard qu’un seul moyen praticable, et ce moyen est simple et remédie à tout sans inconvénient et sans contradiction : il consiste à ordonner la réunion des üeux établis-semenis en un seul, pour opérer en commun et délivrer un seul certificat sur les oppositions déjà respectivement reçues, et sur celtes qui le seront conjointement, à compter de leur réunion. Cet arrangement, si utile pour les créanciers et pour les officiers debiteurs, présente encore la plus grande facilité pour la réduction du tarif. Les oppositions reçues par ies conservateurs duraient trois ans et ne coûtaient que 30 sous. Mais les certificats donnés par les gardes des rôles n’étaient payés que 4 livres, et ceux des conservateurs, gradués d’après les sommes remboursables, variaient depuis 1 livre jusqu’à 30 livres. Nous avons vu dans la réunion des deux établissements l’occasion la pins naturelle et la plus juste de ramener les frais à une diminution avantageuse pour le public, soit parce qu’un seul acte tiendrait la place de deux, soit parce qu’on pouvait prendre, dans chacun des tarifs particuliers, la fixation la moins forte en les réduisant en un seul. Mais, avant de vous proposer cet arrangement, Messieurs, nous avons dû prévoir les difficultés et les réclamations qu’il pouvait exciter de la part des officiers qu’il s’agissait de réunir et de réduire. Il fallait, en vous soumettant nos projets, pouvoir vous répondre qu’ils ne seraient pas contrariés. Nous avons pris, en conséquence, la précaution d’entendre les parties intéressées, et de leur faire connaître les vues d’utilité publique qui détermineraient nos plans. Nous leur devons la justice de déclarer que, quelque rigoureuses qu’aient pu leur paraître les réductions, considérables en elles-mêmes et accrues encore par la nécessité de partager entre deux établissements le quart au plus de ce qu’un seul obtenait dans l’état ancien, iis u’ont pas hésité à s’imposer ces sacrifices et à en faire l’hommage à la patrie. Nous n’avons eu qu’à donner des éloges aux vues de conciliation et de désintéressement qu’ils ont manifestées et qui les rendent dignes de toute votre bienveillance. G’est d’après la possibilité reconnue de cette réunion et l’examen attentif des effets qu’elle doit produire, que nous avons rédigé ies premiers articles du décret qui va vous être présenté; mais il est encore plusieurs objets digues de votre prévoyance, et qui seront utilement réunis à celui dont nous venons de vous entretenir. Le premier a rapport aux quittances notariées qu’il sera nécessaire d’exiger pour la sûreté des payements, la validité des décharges et le bon ordre de la liquidation. Après y avoir mûrement rélléchi, nous nous sommes d’abord convaincus qu’il était impossible d’épargner aux officiers liquidés la formalité d’une quittance devant notaires. L’avantage de l’authenticité, celui d’une minute soigneusement conservée, presque toujours la uécesilé d’annexer à la quittance un pouvoir spécial dont le dépôt doit être préalablement fait à Paris, si l’on veut éviter les surprises, tout enfin semble se rénair pour exiger impérieusement cette quittance solennelle et attestée par un officier public. Il s’agit seulement de faire qu’elle n’expose aucun des titulaires à des frais trop considérables, ni même à une dépense telle qu’elle forme un objet digne d’attention. Nous avons ensuite pensé que le véritable moment pour recevoir cette quittance était celui où l’officier liquidé, recevant sa reconnaissance de liqui- 112 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 novembre 1790.] dation, consommerait lui-même sa destitution pour commencer à n’être qu’un créancier du Trésor public en vertu du titre qu’il reconnaîtrait avoir reçu. Attacher la quittance au moment de la conversion de ce titre en assignats, ce serait d’une part augmenter la dépense, puisque, les titulaires ayant la faculté de faire diviser leur reconnaissance de liquidation, il faudrait alors multiplier les quitiances notariées par le nombre des coupons qu’ou aurait mis en circulation. Il faudrait d’ailleurs que cette négociation, si Utile pour l’officier qui voudra se libérer, si utile pour la nation, lorsque l’emploi dirrct des reconnaissances en acquisition de domaines nationaux doit diminuer l’émission des assignats, il faudrait, disons-nous, que cette négociation se surchargeât d’entraves et de formalités dispendieuses, au lieu qu’un simple transport, avec la formalité de la saisie, suffira dans tous les cas. Enfin, ce serait s’écarter des règles de l’uniformité, si essentielle dans une grande comptabilité; car une partie des reconnaissances directement employées à payer des domaines nationaux ne pourraient être quittancées que dans les provinces, et la caisse de l’extraordinaire, dispensée de la conversion eu assignats, perdrait avec cette obligation le moyen de suivre elle-même, et d’une manière uniforme, la formalité des quittances. Or, elle se trouvera constamment remplie en exigeant ces quittances au moment même de la remise de la reconnaissance de liquidation. Cette reconnaissance deviendra dès fors un effet négociable, que le titulaire lui-même, ou son concessionnaire en vertu d’un transport, recevra au Trésor royal, sur son acquit, en représentant le certificat de non-opposition ou demain-levée. Ceux dont le payement sera arrêté par des oppositiuus seront les seuls qui aient une double formalité à remplir: la première, au moment du transport, s’ils en font un ; la seconde, au moment du remboursement effectif. Mais ils ne pourront s’en plaindre: il n’est pas juste que leurs créanciers puissent être déçus en recevant, comme libre, un titre qui ne léserait pas. Tout le monde connaît d’ailleurs la simplicité des formes pour les cessions ou transports de créances sur le Trésor royal; et quiconque usera de celle facilité n'a pas le droit de réclamer contre la charge imperceptible dont elle sera accompagnée. En partant de ces principes, notre but principal n’est donc que de fixer, pour les quittances que vous croyez devoir exiger, un tarif modéré, faible même, mais dont la faiblesse se trouve justiliée par la multiplicité des actes sur lesquels il doit porter. Nous vous soumettons ce tarif gradué pour toutes les sommes, et il s’expliquera suffisamment par lui-même sans que nous devions entrer ici uans de plus grands détails. Nous profiterons encore de cette occasion pour vous parler des moyens de réduire la dépense à laquelle les officiers sont exposes quand iis veulent fournir les expéditions en forme des titres nécessaires pour leur liquidation. Dans plusieurs endroits les contrôleurs ont été jusqu’à exiger, sur le simple vidimus d’un acte, le meme droit que sur la convention que cet acte renfermait. Partout le droit de contrôle est à cet égard trop considérable; il est de votre justice de le diminuer puur cette espèce de produit extraordinaire qui doit former au profit de l’administration un bénéfice inattendu. Votre comité vous propose, en conséquence, le décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de judicature, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Pour éviter aux créanciers sur offices et aux propriétaires des titres, les frais de deux oppositions, et aux officiers débiteurs ceux de deux certificats, les gardes des rôles auxquels le décret du 30 octobre dernier attribue la réception des oppositions sur offices, se réuniront aux con-simvaieurs des hypothèques et oppositions sur les finances, pour ne former, relaiivement à la partie des offices, qu’un seul et même établissement jusqu’à la lin de la liquidation des offices supprimés. Art. 2. « En conséquence, les registres et liasses des oppositions formées depuis un an ès-mains des gardes-rôles, seront rapportées et jointes à celles formées depuis trois ans, à compter de la publication du présent décret, ès-mains des conservateurs des finances; celles qui seront formées à compter de la même époque, seront reçues en commun; et pour les unes comme pour les autres, il ne sera délivré qu’un seul et même certificat, signé par les gardes des rôles et les conservateurs des finances en exercice. Art. 3. « Les oppositions reçues depuis un an par les gardes des rôles, celles reçues depuis trois ans par le conservateur des finances, ensemble celles qu’ils recevront à l’avenir en commun, dureront trois ans, à compter de leurs dates respectives. « Ces derniers et les certificats qui seront délivrés sur tout, seront assujettis à un seul et même tarif, ainsi qu’il va être expliqué. Art. 4. « L’ancien tarif du garde des rôles et celui des conservateurs des finances seront modifiés et réduits respectivement; en conséquence, il ne pourra être perçu pour l’enregistrement de chaque opposition que trente sols, et quatre francs pour chaque certificat, sans que lesdits officiers puissent se prévaloir des attributions plus fortes dont ils ont joui jusqu’à ce jour. Art. 5. <• Pour assurer l’exécution du présent tarif, il sera donné en marge des extraits d’opposition, de radiation ou mainlevée, ainsi que des certificats, un reçu de la somme payée. Art. 6. « Il ne sera payé qu’un seul droit par chaque opposition ou autre acte et certificat délivré par suite d’icelle, quel que soit le nombre des opposants ou propriétaires, toutes les fois que ladite opposition sera formée par même acte, et pour raison de la même créance. Art. 7. « Les oppositions ne seront pas assujetties au contrôle, et pourront être formées par tous huissiers royaux exerçant auprès des tribunaux. Art. 8. « Les cessions ou transports qui seront faits par les officiers liquidés de leur reconnaissance de liquidation, ou de quelqu’un des coupons d’icelle, seront assujettis pour la saisine aux for-