ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 2 nivôse an II 22 décembre 1793 140 [Convention nationale.] de demander à être autorisés à pourvoir eux-mêmes à la culture de leurs terres, mais qu’il n’existe ni loi ni règlement, ni jurisprudence qui donne le même droit au fermier contre son bail¬ leur qui ne veut ni ensemencer lui-même, ni fournir sur les grains saisis de quoi ensemencer et que la raison de différence du droit à cet égard entre le bailleur et le fermier est que le droit du bailleur n’est qu’un droit de faculté auquel il est libre de renoncer sans qu’un autre puisse l’exercer à sa place, attendu qu’il ne peut le faire qu’en prenant sur le gage de ses créanciers échu et privilégié; qu’il y a, à la vérité, beaucoup de rigueur dans la résistance de l’intimé, qu’il a peut-être plus à perdre qu’à gagner dans le cours ordinaire des événements, mais qu’il n’appartient pas aux tribunaux de condamner l’exercice d’un droit rigoureux que la loi n’a point condamné, non plus que de for¬ cer le choix d’un créancier dans l’exercice de différents droits que la loi lui donne, même pour le réduire à celui qui paraît présenter le plus d’avantages pour lui dans le cours ordinaire des événements ; Qu’au surplus, on ne peut se prêter à la sup¬ position des appelants, que leur bailleur n’use d’autant de rigueur que pour consommer le projet qu’il a formé de demander la résiliation de leur bail après les avoir mis dans l’impuis¬ sance absolue de continuer leur exploitation; qu’on ne peut, en effet, se prêter à cette suppo¬ sition, quand on fait attention que l’intimé leur a laissé la libre disposition : 1° de la récolte de 24 arpents de prés; 2° de tous leurs grains et vivres restant de la récolte de 1792; 3° de tous leurs meubles et effets servant à leur usage, tous objets saisissables, et cependant non sai¬ sis; qu’il paraît aussi constant qu’il leur a été fourni, depuis la saisie, trois jallois de blé par semaine pour leur subsistance; Enfin, que la demande des appelants perd “beaucoup de sa valeur quand on fait attention qu’il s’est écoulé, depuis la saisie jusqu’à leur demande en provision, un intervalle de plus de six semaines, qu’ils auraient dû mettre à profit pour désintéresser l’intimé soit en provoquant eux-mêmes la vente des effets saisis, soit de toute manière, s’ils sont réellement jaloux de se libérer ; Le tribunal, faisant droit sur l’appel des par¬ ties de Devaulx, et jugeant en dernier ressort dit, sans s’arrêter ni avoir égard à leur requête et demande, qu’il a été bien jugé, mal et sans griefs appelé; ordonne que ce dont est appelé sortira son plein et entier effet, et condamne les appelants en l’amende et aux dépens des causes d’appel et demande. Fait et jugé audit tribunal le vendredi 11 janvier 1793, par Gabriel Louis, président, Richard Lebrun, Pierre Remi Partis, Charles-Antoine-Gabriel Huet et Louis-François Le¬ maître, juges dudit tribunal; Et de suite faisant droit sur la remontrance de l’avoué de l’intimé après la prononciation du présent jugement, tendant à ce qu’il lui fût donné acte en tant que de besoin de la réserve des droits de l’intimé relativement à des pré¬ tendus enlèvements faits par les appelants ou gens de leur part, de partie des effets saisis sur eux, contre laquelle réserve le citoyen Suin, avoué des appelants absout et substitué comme dessus par le citoyen Devaulx, avoué, pour entendre la prononciation du jugement sur l’appel et reprendre par les parties leurs conclu¬ sions avant ladite prononciation et depuis pré¬ sent lors de ladite remontrance, a fait poul¬ ies parties toutes réserves contraires desquelles il a pareillement demandé acte; Et ouï, sur ce, le commissaire national, le tri¬ bunal a donné acte à la partie de Carrière de ses réserves et à celle de Suin de ses réserves. Fait et jugé audit tribunal les jour et au que dessus, par Gabriel Louis, président, Richard Lebrun, Pierre-Remi Partis, Charles-Antoine-Gabriel Huet et Louis-François Lemaître, juges dudit tribunal, au nom de la nation. Il est ordonné à tous huissiers sur ce requis de mettre le présent jugement à exécution à tous comman¬ dants de prêter main-forte quand ils en seront requis et aux commissaires nationaux d’y tenir la main. En foi de quoi la minute du présent jugement est signée. Pour expédition conforme , Signé : Dumontier. « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de législation [Merlin (de Douai), rapport mr] (1) sur l’arrêté du tri¬ bunal criminel du département des Basses-Pyré¬ nées, en date du 9 brumaire, relatif à un juge¬ ment du 7 du même mois, par lequel Jean-Bap¬ tiste Bardou a été acquitté du crime de provoca¬ tion au rétablissement de la royauté, et néan¬ moins condamné, pour faits d’incivisme, à la déportation à vie avec confiscation de ses biens; considérant que, d’après le principe général et sacré qui est établi par l’article 3 du titre 8 de la séconde partie de la loi du 16 septembre 1791, sur la procédure criminelle, nul ne peut être jugé de nouveau pour raison d’un délit dont il a été acquitté par un jugement en dernier ressort; et que les jugements rendus par les tribunaux cri¬ minels, dans les formes prescrites par les lois des 19 mars et 7 avril 1793, sont, comme tous les autres, soumis à cette règle; « Déclare qu’il n’y a point lieu à délibérer. « Le présent décret ne sera point imprimé; il sera seulement inséré au « Bulletin », et le mi¬ nistre de la justice en adressera une expédition manuscrite au tribunal criminel du département des Basses-Pyrénées (2). » Suit la lettre d’envoi de l’arrêté du tribunal criminel du département des Basses-Pyrénées (3). Les juges du tribunal criminel du département des Basses-Pyrénées, aux citoyens représen¬ tants composant le comité de Salut public de la Convention nationale. Pau, le 10e jour du 2e mois de l’an II de la République. « Citoyens représentants, « Nous vous adressons copie d’un arrêté que nous avons pris, concernant la révision des (1) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton C 286, dossier 849. (2) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 28, p. 31. (3) Archives nationales, carton Dm 206, dossier Pau,