[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 décembre 1789.] 753 nale, de son parfait dévouement pour en maintenir l’exécution, ainsi que de son amour et de son inviolable fidélité envers la personne sacrée du meilleur des rois. Adresse des gardes nationales de quatre-vingt-sept communautés du Dauphiné, de la Provence et du Vivarais, qui, autorisées par leurs munici-alités, se sont réunies au nombre de six mille ommes sous les murs de la ville de Montéli-mart; là elles ont formé un acte fédératif, par lequel, voulant assurer la circulation des grains, à laquelle s’opposent des projets dangereux, et voulant prouver aux ennemis du bien public qu’il ne leur reste aucune ressource pour diviser des citoyens unis par la confiance en l’Assemblée nationale, elles ont prêté ce serment solennel : « Nous, Français, jurons à Dieu et à la patrie de veiller, jusqu’à la mort, à l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale, et de nous porter, à cet effet, tous les secours nécessaires. » Ce serment prêté les officiers de tous les détachements s’étant réunis dans l’église des Récolets de Montélimart, ont procédé à la nomination de douze commissaires de la fédération. Adresse de félicitations, remerciements et adhésion de la ville de Bellesme en Perche ; elle porte plainte contre l’intendant de la province et le subdélégué de cette ville. Adresse du même genre des officiers de la juridiction des monnaies de la ville de Nantes. Adresse du même genre des communautés de Bostrogier en Combraiiles, Saint-Sylvain-Belle-garde, et Saint-Avit-de-Tardes; elles demandent l’établissement d’un siège royal dans la ville de Bellegarde, capitale du Franc-Alleu en Auvergne. Adresse du même genre de la communauté de Baucbaud en Bourbonnais; elle demande qu’on arrête le payement des pensions et autres bienfaits de l’Etat, comme aussi qu’on séquestre les revenus des bénéfices de tous ceux qui se sont expatriés sans aucune cause légitime. Adresse du même genre de la ville de Condrieu en Forez ; elle réclame contre la qualification de campagne que lui a donnée l’assemblée de département de Saint-Etienne, attendu qu’elle est murée, qu’elle paye des droits d’entrée, et qu’elle contient plus de six mille habitants. Adresse du même genre de la communauté de Roddes en Bourbonnais; elle demande que chaque paroisse de la campagne jouisse d’une municipalité. Adresse du même genre de la ville d’Aubanton en Thiérache; elle demande une justice royale. Adresse du même genre de la commune des paroisses d’Éffendic, Saint-Gonlay, Saint-Malon, Saint-Maugan et Bleruais; elle demande l’établissement d’une assemblée de district, et d’une justice royale dans son territoire. Adresse du même genre de la ville d’Issoudun en Berri; elle demande un tribunal supérieur, et une assemblée de département. Adresse de la ville de Saint-Paul-Trois-Châ-teaux en Dauphiné, et de celle d’Aubenas en Vivarais, contenant un renouvellement de respect et d’ahdésion à tous les décrets de . l’Assemblée nationale. Adresse de la ville de Massevaux et dépendances en Alsace, et de treize communautés composant la seigneurie, qui se récrient contre l’imputation qui leur a été faite, de vouloir conserver leur régime municipal et l’ancienne administration, et adhèrent, de la manière la plusformelle, à to us les décrets rendus et à rendre par l’Assemblée nationale. i,e Série, T. X. Adresse d’adhésion de la communauté de Con-naux en Languedoc ; elle demande que la ville de Bagnols soit le siège d’une justice royale et d’une assemblée de district. Adresse du même genre de la communauté d’ünzem en ..... , qui n’étant composée que de pauvres laboureurs, supplie l’Assemblée nationale de lui permettre de faire l’imposition de la somme de 360 livres, pour tenir lieu de leur part de la contribution patriotique, portée par le décret du 6 octobre dernier. Adresse du même genre de la communauté de Daillecourt, près Chaumont-en-Bassigny, souffrant encore des suites d’une grêle qui détruisit ses récoltes en 1788 ; elle se départ de l’indemnité qui lui avait été promise, et offre en outre, pour son tribut patriotique, le montant de la contribution qui doit être supportée les six derniers mois de cette année par les ci-devant privilégiés. M. Gossin, fait ensuite, au nom de l’abbé Major, professeur au collège de Bar-le-Duc, l’offre d’un planétaire qui est exposé sur le bureau, avec un mémoire explicatif de sa composition. Il est décrété que M. le président témoignera par une lettre à Ë. l’abbé Major la satisfaction de l’Assemblée. M. Gossin présente, au nom de plusieurs communautés du Barrois, une offrande patriotique; savoir, au nom de la communauté de Laheycourt, d’une somme de 3,000 livres ; au nom de la communauté de Gheligny-le-Petit, d’une somme de 264 livres; au nom de la communauté de Loisey, d’une somme de 600 livres; et au nom delà communauté de Marson, d’une somme de 800 livres. L’Assemblée a été très-satisfaite des sentiments qui avaient dicté ces offres. Les de’putes du district de Saint-Lazare ont fait le don du produit des boucles d’argent des habitants de ce district, et présentent l'assurance de leur dévouement le plus absolu aux décrets de l’Assemblée nationale. M. le président leur répond que l’Assemblée agrée leur offrande patriotique et que le zèle des bons citoyens pour la cause publique est pour l’Assemblée nationale la récompense la plus douce de ses travaux. L’Assemblée leur permet d’assister à sa séance. M. Boiiteville-Dumetz présente au comité. de la ville de Roye, l’offre des boucles d’argent d’un grand nombre de citoyens de cette ville, et l’offre particulière, faite par quelques autres, de quelques bijoux d’or et pièces d’argenterie pour servir à leur contribution patriotique; il remet sur le bureau l’expédition d’une délibération du comité de la même ville en date du 18 du présent mois, par laquelle ce comité donne les assurances d’un dévouement parfait de la ville de Roye, et présente ses vœux pour le succès des travaux de l’Assemblée nationale, travaux auxquels ils attachent la prospérité de la nation. Il est fait ensuite lecture du procès-verbal de la séance d’hier au soir. On remet sur le bureau dix-huit paires de grandes boucles d’argent et quatre paires de petites, de la part de quelques habitants de la ville de Magny en Vexin, Il est présenté une adresse de la communauté des protestants de la ville de Landau en Basse-Alsace, qui, après avoir témoigné sa profonde reconnaissance pour les travaux de l’Assemblée nationale, lui présente l’offrande dune somme de 1,200 livres, et ses regrets de ce que la modicité 48 754 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 décembre 1T89.J [Assemblée nationale.] de ses facultés et la détresse occasionnée par une année désastrueuse, ne lui permettent pas d'offrir une somme plus considérable. On donne lecture d’une adresse des loueurs de carrosses de place de la ville de Paris, par laquelle ils demandent la liberté d’exercer leur état sans autre rétribution que celle nécessaire au maintien du bon ordre, de la police, et pour l’acquit des dettes qui peuvent être à la charge de leur communauté : l’Assemblée décrète le rem-voi de cette adresse au comité des rapports. M. Morel, député de Chaumonl-en-Bassigny, ayant donné sa démission, se trouve remplacé par M. Gombert. M. Gombert, dont les pouvoirs ont été vérifiés, est admis. On allait pa ser à l’ordre du jour, lorsqu’un membre a demandé que les personnse qui avaient desséché des marais, fussent maintenues dans les exemptions accordées par plusieurs règlements, malgré l’abolition de tous les autres privilèges : il est observé que cette question a déjà été renvoyée au comité d’agriculture. Enfin l’ordre du jour est repris sur la modification concernant V admission des non catholiques , à toutes les fonctions municipales et provinciales , et à tous les emplois civils et militaires , comme tous les autres citoyens. M. le comte de Clermont-Tonnerre, député de Paris (1). Messieurs, dans Ja déclaration que vous avez cru devoir mettre à la tète de la constitution française, vous avez établi, consacré, les droits de l’homme et du citoyen. Dans le travail constitutionnel que vous avez arrêté, relativement à l’organisation des municipalités, travail accepté par le Roi, vous avez fixé les conditions d’éligibilité que l’on pouvait demander aux citoyens. Il semblerait, Messieurs, qu’il n’y eût plus rien à faire et que les préjuges dussent se taire devant la langage de la loi ; mais un honorable membre nous a appris que les non catholiques de quelques provinces éprouvaient encore des vexations fondées sur les lois anciennes, et se voyaient écartés des élections et des emplois publics, un autre honorable membre a réclamé contre l’effet du préjugé qui poursuit quelques professions. Ce préjugé , ces lois, vous forcent à vous expliquer ; j’ai eu l’honneur de vous présenter la rédaction d’un décret, c’est cette rédaction que je défends. J’y établis en principe que les professions et les cultes ne peuvent jamais devenir des motifs d’inéligibilité : je commence par les professions. Elles sont nuisibles, ou elles ne le sont pas : si elles sont nuisibles, elles sont un délit habituel , et la loi ne peut pas les souffrir : si elles ne sont pas nuisibles, la loi ne peut pas les frapper de proscription, et si le préjugé a rendu nécessaire le prononcé de la loi, il faut qu’elle prononce selon la justice. Des professions peuvent, il est vrai, par des circonstances accessoires, avoir armé l’opinion contre ceux qui les exercent : que doit alors faire le législateur? il doit les ramener à leur véritable but. Il doit corriger les abus ; il ne doit pas arracher l’arbre qu’il est possible de redresser ou de greffer. Je viens à l’application de ces principes : les professions que les adversaires de mon opinion prétendent frapper d’infamie, se réduisent à deux ; l’exécution des arrêts criminels, et les (1) L’opinion de M. le comte de Clermont-Tonnerre est incomplète au Moniteur. acteurs qui occupent nos divers théâtres. Je rougis de rapprocher les enfants des arts de l’instrument des lois pénales; mais les objections m’y forcent ; d’ailleurs, tout ce qui est vrai doit être dit; toutes les conséquences d’un principe juste doivent être adoptées, et je dois suivre mes adversaires dans la route qu’ils m’ont tracée (1). Les lois principales existant, leur exécution est nécessaire. Il est de l’humanité et peut-être de la politique et d’une saine législation de trouver des moyens d’exécution qui ne répandent pas sur l’agent du pouvoir judiciaire, sur l’homme de la loi, une infamie que la loi désapprouve. Un honorable membre (M. Guillotin) a fait à ce sujet une motion qui est ajournée ; un comité de législation criminelle peut nous présenter d’autres moyens d’arriver au même but. Il est, Messieurs, de la nature du préjugé de s’attacher à des formes, à des apparences. Il est porté sur les nuages, et souvent il disparaît, si ces nuages se dissipent. Il ne s’agit, pour arracher l’exéculeur à l’infamie, que de le rendre un agent moins immédiat, que de changer le genre des peines. Vous vous rappelez l’ancien supplice des déserteurs, nous avons encore le supplice militaire des verges et des courroies ; flétrissant pour celui qui l’endure, il ne flétrit point les soldats qui sont les agents de la loi. Mais, quand tous ces moyens seraient illusoires, il faudrait encore être vrai : ce que la loi ordonne est bien ; la loi ordonne la mort du coupable, l’exécuteur n’obéit qu’à la loi : il est contre la justice que la loi lui inflige une punition légale; il est contre la raison qu’elle lui dise: Fais cela, et si tu le fais tu seras infâme (2). Je passe à la discussion de ce qui regarde les acteurs, et j’aurai certainement moins de peine à désarmer un préjugé affaibli dès longtemps par l’influence des lumières, l’amour des arts et la raison : je ne vous dirai pas, Messieurs, ce qu’ils ont été et tout ce qu’ils peuvent être. Plusieurs causes ont influé sur l’opinion qui les attaque : la licence de mœurs, et n’oublions pas , Messieurs, qu’un gouvernement qui n’a jamais eu d’autre but que de faire obéir, a dû souvent prendre les moyens de corrompre , et que les spectacles, par leur influence, et sur les mœurs et sur les opinions ont été dirigés vers ce but par la police, l’une des branches les plus corrompues de l’ancienne administration, et à l’influence de laquelle ils ont toujours été livrés. La dépendance absolue où les acteurs sont de l’opinion publique , qu’il était dans l’esprit de l’ancien régime de présenter comme une honte, et qui présentée sous un point de vue plus noble, fait à présent notre gloire. Une troisième cause est la frivolité et souvent (1) Au moment où j’ai articulé la veille que les professions ne devraient point rendre inéligibles, et où M. de Rœderer a réclamé pour les comédiens, on s’est hâté de crier: Et le bourreau... Ce mot m’a affligé, mais raisonnant juste, et suivant mon principe il a fallu parler du bourreau, et j’ai dit : Oui, et le bourreau. (2) M. l’abbé Maury m’a répondu, que le métier de bourreau étant involontaire, ce langage de la loi ne s’adressait à personne en particulier ; lui paraît-il plus raisonnable que la loi dise : je veux que l’on exécute ma disposition, celui qui l’exécutera sera infâme, et je le reconnaîtrai pour mon agent. Ce langage ne paraît pas plus raisonnable. Le fait est, ou qu’il faut se passer du bourreau, ce qui se peut, et accorder la raison et l’humanité, ou qu’il ne faut pas proscrire l’agent nécessaire de la loi.