[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 mars 1191 .J 694 M. de IVoailles, président , quitte le fauteuil et est remplacé par M. Treilhard, ex-président. L’ordre du jour est un rapport du comité diplomatique sur le sort de 3 prisonniers détenus à Huningue, prévenus de crimes de faux commis dans les Etats de V empereur , et réclamés par le ministre impérial. M. du Châtelet, au nom du comité diplomatique. Messieurs, vous avez chargé vos comités de Constitution et diplomatique de vous présenter un projet de loi sur le cas où un étranger prévenu de crime devrait être renvoyé à ses juges naturels, d’après la réquisition d’une puissance étrangère, et principalement sur h forme de cette réquisition. Ce travail n’a pas encore pu être fait, parce que d’un côté le comité diplomatique n’a pas eu le temps de se procurer la collection de tous les traités et conventions qui doivent déterminer son opinion ; et que d’un autre côté, le comité de Constitution, consulté par votre comité diplomatique, n’a encore qu’un aperçu de son travail. Cependant les instances du chargé d’affaires de Vienne, relativement à 3 individus arrêtés à Huningue, sont d’autant plus intérecsantes, qu’il a fait remettre au comité des pièces de conviction sur la procédure intentée au tribunal criminel de Vienne. Ces 3 particuliers ont été arrêtés sur la réquisition du ministre de la cour de Vienne, et leur extradation est réclamée conformément aux piocédés et usages réciproques subsistants de tout temps entre les Etats d’Autriche, les autres Etats de l’Empire et la France. Je vous ai dit dans mon premier rapport (1) que le ministre de France avait ordonné leur extradation; mais que le tribunal d’Altkirch fit défense à la municipalité d’Huningue d’obéir aux ordres du ministre, jusqu’à ce que l’Assemblée nationale eût prononcé sur cette question de droit public. D’après la vérification faite des usages constamment suivis entre les deux nations, nous vous proposions de condescendre à la demande de la cour de Vienne; ce qui était d’autant plus intéressant, que nous mus trouvons dans une circonstance où l’impunité de ces sortes de crimes serait très alarmante et très préjudiciable. Vous avez suspendu votre décision : 1° parce que nous ne vous présentions aucune preuve légale qui constatât que les particuliers réclamés ministé-riellement fussent effectivement prévenus du crime dont ils sont accusés ; 2° par. e qu’il s’éle-Vaii des doutes sur l’usage de la rédptocité entre les 2 nations, à l’occasion du refus que faisait le tribunal d� Bruxelles de délivrer un faux-mon-nayeur réclamé par le tribunal de Charleville. Sur le prem er point, nous pouvons dissiper vos méfiances, par la leciure d’une pièce signée par le bourgmestie et par 1* s magistrats de Vienne, et certifiée par le chargé d’affaires, pièce qui constate que d’après l’information judiciaire laite au tribunal criminel de Vienne, il résulte que l’un des part iculiers, directeur de la banque, a fait circuler de faus-es lettres de change, et qn’ü existe les plus fortes préventions de complicité contre son coaccusé. Cet acte est dressé dans la forme usitée pour la [irise de corps, et équivaut à un décret. La cour de Vienne appuie ses réclamations sur les usages conventionnels observés pour l’extradation des criminels transit) Voyez ci-dessus, séance du 49 février 1791, p. 281, le premier rapport de M. du Châtelet sur cet objet. fuges ; elle cite, entre autres, l’exemple de la délivrance d’un voleur, faite par la France sur la simple réquisition du canton de Bâte. Nous pensons (jonc que les lois du bon voisinage, autant que l’intérêt des circonstances doiveni vous engager à accéder à cette réclamation. Une seule chose pourrait vous arrêter : le refus du tribunal de Bruxelles. Nous avons à cet égard un éclair-cbsement à vous donner. Les provinces belgiques ont toujours élé des Etats distincts des autres possessions de la maison d’Autriche, soit en Allemagne, soit en Italie; ils ont loujours été gouvernés par des lois particulières ; lois par lesquelles le tribunal de Bruxelles est autorisé à refuser l’extradation des transfuges réclamés. Il y a donc une grande différence entre les deux cas qu’on a comparés, puisqu’ici il s’agit d'un délit commis à Vienne, d’un criminel que le tribunal de Vienne réclame, et que nous avons constaté des usages de réciprocité entre l’Autriche et la France. Ce n’est pas comme duc de Brabant ; c’est comme archiduc d’Autriche que Léopold fait réclamer par son ministre, et par la voie juridique et légale, les 3 particuliers détenus à Huningue. Si donc vous pensez que la preuve de la prévention légale est sultisamment établie par l’acte judiciaire dont nous avons l’original entre nos mains, vous n’attendrez pas que vous ayez pu combiner la loi générale que vous vous proposez fie porier; et ne consultant que les lois d’usages actueilemeut existants, et l’intérêt pressant des circonstances, vous vous déterminerez à ordonner l’extradition demandée. C’est à quoi se réduit le projet de décret que le comité diplomatique m’a chargé de vous présenter et qui est ainsi conçu ; « L’Assemblée nationale, après avoir entendu ie rapport de son comité diplomatique, qui en a conféré avec son comité de Constitution, sur l’arrestation des sieurs Henning, Burgou et Schwartz, à Huningue, et sur la réclamation faite desdits prisonniers par le chargé d’affaires de la cour de Vienne, en conséquence de la procédure criminelle intentée contre tux, aux tribu -aux de Vienne en Autriche, lieu où le crime a été commis ; le délit grave dont ils sont prévenus, ainsi qu’il est constaté par la piè< e juridique, produite par ledit chargé d’affaires et dûment légalisée par la signature du chargé d’affaires de France à la cour impériale et royale; décrète qu’en vertu des usages et de la réciprocité constamment observée en pareilles circonstances, entre la nation française et les Etats germaniques, le roi sera prié ue donner les ordres nécessaires, pour quelesdits prisonniers soient remis, suivant la réclamation du ministre impérial, pour être renvoyés à leurs juges naturels, l’Assemblée nationale se réservant, d’après le rapport de ses comités de Consibution et diplomatique, de faire incei-samment une loi générale sur cette matière, laquelle sera notifiée à toutes les nations de l'Europe. » (La discussion est ouverte sur ce projet de décret.) M. Rewhell. Le préopinant vous propose un décret qui, non seulement est contraire aux décrets que vous avez déjà rendus, mais qui désho-n rerait l’Assemblée nationale. 11 vous propose l’extradation de 2 et même de 3 particuliers d'après les usages et conventions réciproques. Qr, je nie que ces usages et conventions aient jamais existé. Pour le prouver, on vous a dit que la France a récemment accordé i’extradation d’un voleur réclamé par le canton de Bâle. Ne sait-op