592 [Convention nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES, f 44 £hnaire J i 4 décembre 1793 Le citoyen Laumonier, chirurgien-major de l’hospice de l’Humanité, s’exprime ainsi : « Je n’ai point attendu, citoyens, le mouve¬ ment révolutionnaire qui vous anime aujour¬ d’hui pour rendre quelques hommages aux restes précieux des deux premiers martyrs de la liberté; j’ai recueilli les têtes de ces deux vic¬ times, dans lesquelles les grands principes révo¬ lutionnaires avaient déjà fait de rapides pro¬ grès, quand vous étiez encore engourdis au sein de l’esclavage et enchaînés par tous les préjugés. « Il en coûta à ma sensibilité de ne pouvoir appliquer à leurs têtes les ressources d’un art au moyen duquel j’aurais conservé en eux l’ap¬ parence de la vie. « Réduit à ne présenter que leurs têtes sèches, je suis cependant jaloux de les voir figurer sous le bonnet de la liberté qu’ils étaient venus vous offrir trop tôt pour eux. « Je joins ici les cheveux de Bordier, à l’effet qu’il soit fait un médaillon qui sera conservé dans le temple où. la Société républicaine de Rouen tiendra ses séances, et j’en fais la motion expresse. » Ces discours, qui ont été entendus dans le plus profond silence, ont été accueillis par des acclamations de la joie la plus vive; par des cris répétés de : Vive la République une et indi¬ visible ! vive la Montagne! et par l’élévation des bonnets de la liberté dont presque tous les assistants étaient couverts. Des hymnes à la liberté ont été chantés; la musique a joué les airs favoris des patriotes. Cette cérémonie s’est terminée par le dépôt sur l’autel des mannettes de fleurs qui étaient portées par des citoyennes attachées aux deux spectacles, et par celui des branches de cyprès qui étaient portées par tous les citoyens invités. Le cortège a fait son retour en la maison com¬ mune à quatre heures, au son de la musique et en chantant les hymnes des Marseillais, de la Montagne, et autres. Collationné : Signé : Havard. La Société populaire de Toulon-sur-Arroux fait hommage à la Convention de quelques pièces d’argent à l’effigie du tyran, et d’une petite pièce d’or : elle la félicite sur ses travaux; elle de¬ mande à changer son nom en celui de Bel-Air-sur-Arroux. Mention honorable» insertion au « Bulletin » et renvoi au comité de division (1). Suit la lettre de la Société populaire de Toulon-sur-Arroux (2). Les vrais sans-culottes formant la Société répu¬ blicaine de Toulon-sur-Arroux, au républicain Président de la Convention nationale. « Citoyen, « Nous t’envoyons 25 livres portant l’effigie du tyran des Francs qui voulait non seulement envahir peut-être le globe, mais non, que dis-je, il était trop lâche, il ne voulait régner que sur des esclaves : dès lors il ne devait pas compter sur les Français. « Nous ajoutons une petite pièce d’or pouvant valoir environ douze livres; c’est le premier en¬ voi que nous te faisons, nous espérons sous peu récidiver car le républicanisme domine dans notre commune et surtout dans notre Société, car tous ont l’esprit du républicanisme et, dès lors, ils méprisent l’or, ce vil métal qu’em¬ ploient journellement les tyrans pour faire égorger des milliers d’esclaves. « Salut et fraternité. « Les membres composant la Société. (Suivent 27 signatures.) « P. S. Nous avions demandé à changer le nom de notre commune, qui est celui de Tou¬ lon; des républicains ne doivent porter ni nom, ni rien qui approche des traîtres qui ont livré un des plus beaux ports de la République; pourquoi nous t’invitons à faire rendre une loi qui nous autorise à porter celui de Bel-Air-sur-Arroux, que nous avons réclamé auprès de votre comité de division. « Toulon, le 4 frimaire, l’an II de la Républi¬ que, une, indivisible et démocratique. » Les administrateurs du district de Compïègne font part à la Convention nationale qu’on ne connaît plus dans leur district d’autre divinité que la patrie, d’autre culte que l’obéissance à la loi, et que les enfants ne lisent plus que les Droit» imprescriptibles de l’homme et notre Constitu¬ tion républicaine; ils annoncent que le citoyen Couvert, employé dans les bureaux, fait don d’une somme de 138 livres, et que le citoyen Tartenson, déprêtrisé, fait hommage de son traitement. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1)* Suit la lettre des administrateurs du district de Compiègne (2). Les administrateurs du district de Compiègne à ta Convention nationale. « Compiègne, le 12 frimaire de l’an II de la République française une et indivi¬ sible. « Représentants du peuple français, « Nous vous prévenons que Nicolas Pamphile Couvert, employé dans nos bureaux, remet à la patrie la somme de 138 livres restant de la gratification à lui accordée par l’Assemblée constituante comme ayant été commis de la ci-devant régie des aides. « Que François Tartenson, ci-devant chapelain (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 339. - (2) Archivés nationales, carton C 283, dossier 810. (1) Procès-verbaux de la Convention , t. 26, p. 339. (2) Archivés rtaïionale'é, carton C 283, dossier 810. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j frimaire an II 593 ( 4 décembre 1793 de Saint -Clément, et l’un des premiers déprê-trisés, remet à la patrie son traitement annuel de 495 liv. 17 s. 1 d. « La commune de Compiègne a fermé les temples de la superstition dès le mois dernier; les municipalités des campagnes se sont toutes empressées de suivre cet exemple; le fanatisme a fui quand il a vu ses flambeaux éteints, et dans tout notre ressort on ne connaît d’autre divinité que la patrie, d’autre culte que l’obéis¬ sance à la loi. Les enfants ne lisent plus que les Droits imprescriptibles de l’homme et notre Constitution républicaine. « Un bûcher nous a fait justice de tous les livres absurdes qui empoisonnaient autrefois de jeunes cœurs, et ne laissaient dans l’esprit que des sottises et des préjugés. « Restez à votre poste, législateurs, et nous ne cesserons de vous adresser ce vœu parce que le bonheur de la patrie en dépend. « Quinquet, président; Bertrand, procureur syndic, député suppléant à la Convention nationale; Bertin; Morin, J. -B. Biré; Lefebvre; Mottet; Lambin. » « Je soussigné Nicolas -Pamphile Couvert, l’un des commis de l’Administration du district de Compiègne, donne volontairement pour le soulagement des veuves et des orphelins des défenseurs de la patrie, 138 livres restant de la gratification à moi accordée par l’Assemblée constituante, comme ayant été commis de la ci-devant régie générale des aides. « A Compiègne, ce 5 frimaire, 2e année de la République française. « Couvert. » Le citoyen Lepointe, de Montagne-sur-Aisne, fait don à la patrie de 98 jetons d’argent. Mention honorable, insertion au « Bulletin » 1). Suit la lettre du citoyen Le Pointe (2). « Lagrange-aux-Bois, municipalité de Mon¬ tagne-sur-Aisne, ce 22 brumaire, l’an II de la République, une et indivisible. « Citoyen Président, « Le républicain Léger, directeur de la poste aux lettres et membre du comité de surveil¬ lance de notre commune, veut bien se charger de te faire passer les 98 jetons d’argent que je t’ai annoncés par ma lettre du 8 de ce mois, qui renfermait une copie de celle que nous avions adressée, au nombre de 10 signataires, le mois précédent, à notre représentant Drouet. « Ces jetons sont tout ce qui nous reste, à ma femme et à moi, de l’ancien régime, et nous pouvons dire que la République nous a régénérés. Puissent tous les bons Français l’être de même. Notre peu de fortune, nos cœurs (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 340. (2) Archives nationales, carton C 283, dossier 810. lre SÉRIE. T. LXXX. et tout notre sang sont au service de la Répu¬ blique, elle peut en disposer à sa volonté : prêcher par l’exemple la soumission à ses lois et mourir pour les défendre, voilà ma devise. « Citoyen Président, salut et fraternité è tous les braves Montagnards. » « Le Pointe, républicain. » La Société populaire de Châtellerault félicite la Convention nationale sur ses travaux, et l’in¬ vite à rester à son poste; elle lui fait part qu’elle a ouvert une souscription pour procurer des che¬ mises à nos frères d’armes, qu’une quantité con¬ sidérable est déjà déposée sur l’autel de la pa¬ trie. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1) Compte rendu du Bulletin de la Convention (2). La Société républicaine de Châtellerault fait passer à la Convention nationale une adresse à la date du 5 frimaire dont voici l’extrait : « Citoyens représentants, « Connaissez votre force et votre dignité : vous pouvez concevoir un orgueil légitime. Applaudissez-vous, non seulement d’avoir ané¬ anti la royauté et abattu les coupables idoles devant qui le monde était prosterné, mais sur¬ tout de l’avoir étonné par un acte de justice dont il n’avait jamais vu d’exemple : celui d’a¬ voir promené le glaive de la loi sur les têtes cri¬ minelles *qui s’élevaient au milieu de vous, celui enfin d’avoir écrasé jusqu’ici toutes les factions sous le poids du niveau national. « Que la Montagne, assise sur sa base iné¬ branlable, soit éternelle, si les ennemis de la République peuvent être éternels : voilà le cri unanime de tous les républicains et le vœu le plus ardent des membres de la Société popu¬ laire de Châtellerault. « Une souscription, pour donner des chemises à nos frères qui sont sur les frontières, vient d’être ouverte depuis quelques jours, et une quantité considérable de chemises ont été déposées sur l’autel de la patrie. « La Convention nationale a manifesté le désir d’établir une manufacture de lances, de sabres dans notre commune, et de toutes parts les assignats ont tombé entre les mains de la Société pour l’encouragement des artistes. Yoilà ce que nous avons fait et ce que peuvent faire des hommes régénérés. « Mais notre régénération ne serait qu’impar¬ faite si nous laissions subsister parmi nous des noms odieux, des dénominations féodales. « Nous vous prions, à cet effet, de changer le nom de Châtellerault pour celui de Pont -sur¬ vienne. « Nous ne voulons plus de nom de saints; (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 340. (2) Supplément au Bulletin de la Convention du 4e jour de la 2e décade du 3e mois de l’an II (mer¬ credi 4 décembre 1793). 38