108 [Assemblée nationale,] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |16 mai 1791.] fâchés de ne plus trouver aujourd’hui l’occasion de faire des consultations. (Rires.) Messieurs, je dirai tout parce que je suis très naïf. ( Nouveaux rires.) Dans ce département on trouve 2 frères d’un honorable membre de cette Assemblée, et voilà à quoi les membres de cette Assemblée emploient le faible crédit qu’ils peuvent avoir à faire placer leurs parents. ( Applaudissements ) Si vous ne tenez pas la main à l’exécution de votre décret du mois de mars, vous allez vous trouver chargés de 20 ou 30,000 pensionnaires, vous serez obligés de donner des secours, de fournir du pain à ceux qui se présenteront avec des preuves de travail, avec des preuves d’expérience; eh bien! Messieurs, ces gens-là sont repoussés par des hommes qui se donnent des airs de protecteurs. Ce sont pourtant des pères de famille, ce sont des hommes dans l’esprit de la Révolution qui ne demandent qu’à travailler, et qui sont ici autour de nous à mourir de faim. Je ne rappellerai pas la motion que je fis au mois de décembre, mais je demande qu’avec toute la sévérité possible, l’effet de la loi que vous allez prononcer porte jusqu’au 8 du mois de mars, et queious ceux qui, ayant été étrangers à la chose à cette époque-là, auront été placés soient à l’instant destitués et remplacés par des gens capables. (Applaudissements.) (Aux voix ! aux voix !) M. Defermon, rapporteur. Comme je ne veux pas plus que les préopinants que l’intrigue et la protection aient leur effet, j’adopte le surplus de l’amendement. Voici en conséquence comment je rédige l’article: Art. 17. « Les commissaires administrateurs exerceront une surveillance active sur tous les préposés de la régie; dirigeront leurs mouvements; nommeront à tous les emplois, en se conformant aux règles prescrites, notamment en conformité du décret du 8 mars, les commis des fermes, régies et administrations supprimées; et dans le cas où quelques-uns des employés déjà nommés sans réunir les qualités ci-dessus, ne l’auraient pas été avant ledit jour 8 mars, ils seront remplacés de suite par des sujets ayant les conditions requises par le décret du 8 mars; ordonneront les changements d’employés d’un département à un autre', ou d’un bureau à un autre; feront descendre à un grade inférieur ceux qui ne se trouveraient pus avoir les talents nécessaires pour exercer les emplois à eux confiés; destitueront le& employés qui se seront écartés de leurs devoirs, ou n’auront pas rempli avec fidélité et exactitude leurs obligations, feront poursuivre les comptables reliquataires par les voies de droit; ordonneront les payements des achats faits pour le compte de la régie; fourniront, par chaque quartier, un bordereau des recettes et dépenses; vérifieront, cloront et arrêteront leur compte général des produits et dépenses de l’année précédente, auquel compte ils joindront toutes les pièces de recettes et de dépenses, à peine de perte, par chaque mois de retard, d’un sixième sur leur remise. Ces comptes et susdits bordereaux de quartier seront remis au pouvoir exécutif, et des doubles déposés aux archives nationales . » (Adopté.) M. Defermon, rapporteur. Nous passons maintenant au titre III. M. Regnantl (de Saint-Jean-d' Angêly). Je demande la permission de faire une observation à l’Assemblée sur les divers articles qui viennent d’êire décrétés. Vous aviez décrété jusqu’ici 9 administrateurs; ces 9 administrateurs ont fait tout ce qu’il y avait à faire, c’est-à-dire l’établissement de ces deux parties d’impôts dans tout le royaume, c’est-à-dire dans des pays où le travail était absolument nouveau; c’est-à-dire que, depuis le moment de leur administration, ils ont eu 4 fois à faire ce qu’ils auront à faire à l’avenir; et cependant le pouvoir exécutif n’en avait nommé que 9, ce qui prouvait que le nombre de 10 était au moins suffisant. Je vous avoue que ce n’est pas sans quelque étonnement que je vois ce rapport fait au commencement dé la séance, et que par ce rapport on nous demande à augmenter les administrateurs de 3. M. Martineau. J’interromps l’opinant, et je demande qu’on passe à l’ordre du jour. M. Regnand (de Saint-d' Angêly). Je demande, pour l’intérêt du peuple, qu’on ne paye point des hommes inutiles. (Applaudissements.) M. Martineau. A l’ordre du jour! à l’ordre du jour 1 M. Regnand (de Saint-Jean-d’ Angêly). Puisqu’on réclame l’ordre du jour, et qu’on ne veut pas entendre mes réclamations je demande à faire une observation sur le règlement. Je réclame l’exécution du règlement, qui porte qu’on ne délibérera pas à moins de 200. (Murmures.) M. de Dienzie. Je demande que tous ceux qui ne se trouveront pas au commencement de la séance soient privés de leurs appointements. (L’ordre du jour ! l’ordre du jour!) M. Regnand (de Saint-Jean-d' Angêly). Je veux dire à l’Assemblée quelles sont les intrigues qui ont préparé cela, et, si un décret me ferme la bouche, je me tairai. Messieurs, je répète que, si le projet de décret qu’on vous propose avait été à Tordre du jour, j’aurais été très exact à me trouver au commencement de la séance, parce que j’avais des réflexions à présenter à l’Assemblée; je répète que l’établissement s’est fait avec 9 administrateurs; qu’on a cru que ces 9 places suffisaient, puisqu’on n’en a pas nommé d’autres; mais qu’est-il arrivé? Ce que vous disait M. Bouche, c’est que des gens qui n’ont pas de places, qui veulent en avoir, qui veulent être payés aux dépens du peuple, soit que le peuple ait besoin ou non de leurs services, sollicitent pour avoir des places : c’est que tout le monde sait que des hommes, que j’indiquerai, s’il est besoin, se sont agités pour faire créer des places, afin de les avoir. Par exemple, les commis dès anciens bureaux de M. Desforges, squs prétexte de la réunion des domaines incorporels, sous prétexte de talents vrais ou faux , je ne l’examine point, se sont remués pour être placés... Quel danger y a-t-il? Le voici. C’est que ces gens viendront dans une administration bien établie, zélée, bien d’accord, semer le trouble, la division peut-être, et empêcher la perception de l’impôt; c’est que toutes les économies sont un devoir sacré pour vous. C’est ce sentiment-là qui m’a fait prendre le parti de réclamer si fortement la parole ; et je répète que, comme le décret n’é- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 mai 1791.] 409 r tait pas à l’ordre du jour, comme lès membres qui avaient envie de parler n’étaient pas présents!; comme j’aurais pu réclamer demain sur le procès-verbal si j’avais eu des doutes, j’ai mieux aimé réclamer aujourd’hui. Je vous fais juge de . cet objet; ma conscience est acquittée, vous ferez ensuite ce que vous voudrez. ( Applaudissements .) M. Martineau. Si vous étiez venu assez tôt, vous auriez su les motifs qui nous ont déterminé. M. Parent. La réunion des différents objets à cette régie a nécessité un nombre d’administrateurs au-dessus de celui d’abord fixé. M. Merlin. Je ne sais si les prétendants aux trois nouvelles places, dont vous avez décrété ce matin la création, se sont agités autour de plusieurs membres de cette Assemblée pour les engager en faveur d’une augmentation de places ; mais ce que je sais, c’est que les 9 administrateurs actuels se sont prodigieusement agités pour s’opposer à cette augmentation. Et cela parce qu’il est de leur très grand intérêt que cette augmentation n’ait pas lieu, parce qu’alors les remises se partageront. M. Kegnaud (de Saint-d* Angély). Eh bien, il faut diminuer les remises. M. Merlin. Sans contredit. Messieurs, nous devons être économes des deniers publics ; mais gardons-nous surtout d’une économie qui nous coûterait 2 ou 3 millions, peut-être; car il est évident que 9 administrateurs ne pourront pas embrasser l’immensité d’opérations que leur offrent et les droits d’enregistrement, et les droits de timbre, et les droits d’hypothèques, et les domaines nationaux dont le tout forme une machine si compliquée, que véritablement elle effraye l’imagination. La régie des domaines nationaux, cette régie qui ne rapportera pas 2 millions, vous y avez consacré 8 places d’administrateurs, et vous en refuseriez 12 à une régie, dont l’objet est plus que décuple de celle-là 1 Je demande donc, Messieurs, qu’en maintenant votre décret de ce matin vous passiez sur-le-champ à l’ordre du jour. (L’Assemblée décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) L’ordre du jour-est la discussion du projet de décret du comité de Constitution sur l'organisation du Corps législatif , ses fonctions et ses rapports avec le-roi. M. Thouret, au nom du comité de Constitution (1). Dans le rapport que je vais vous faire, je ne me livrerai point aux développements auxquels pourraient donner lieu les articles que vous présente votre comité de Constitution (2). J’avais commencé la composition de ce rapport, lorsque, frappé de l’étendue qu'il acquérait, j’ai remarqué qu’il deviendrait impossible d’éviter le double inconvénient, de traiter, sans fruit peut-être, plusieurs questions qui pourraient bien ne pas être soulevées , ou qui se termineraient par un simple éclaircissement, et d’en négliger quel-(1) Ce rapport est incomplet au Moniteur. (2) Yoy. ci-après, aux annexes de la séance, les articles proposés par le comité de Constitution sur l’or-ganisation du Corps législatif, p. 127* ques autres auxquelles quelques membres pour ront attacher plus d’importance que moi. J’ai reconnu aussi que les objets contenus dans les articles tiennent à des notions devenues familières à cette Assemblée, et dérivent des principes fondamentaux dont elle est depuis longtemps pénétrée, de manière qu’il m’a paru aussi inutile que peu séant de lui rappeler ici positivement tout ce qu’elle fait pour ne manquer d’aucun des éléments nécessaires à la discussion. Je me réserve seulement, en suivant les progrès de la délibération, de développer quelques-unes des questions qui paraîtront le mériter spécialement. Mon objet est de vous donner, sur l’ensemble de notre travail et sur les parties dont il est composé des aperçus généraux que je crois propres à fixer l’ordre et à accélérer, par là, la marche de la discussion. Nous avons éprouvé souvent combien il est entravant, et en général peu utile, d’ouvrir sur un projet composé de nombreux articles, une discussion plutôt vague que générale, pour laquelle on réunit d’abord, dans un même décret, toutes les objections, toutes les modifications qui s’appliquent à des parties très différentes du projet. Il résulte de là plus d’embarras ou de facilités, plus d’incertitudes ou de lumières ; et comme il est impossible de décréter en cet état, il faut en revenir à démêler et à classer toutes ces objections, dont aucune cependant n’eût manqué d’être amenée à son tour dans l’ordre du projet; car le travail du comité est composé de 99 articles, dont 25, à la vérité, sont formés par des décrets déjà rendus; mais il y en a encore 74 à décréter. Ces 74 articles renferment des objets très différents, dont on peut former des divisions distinctes. Chaque division peut établir une discussion particulière, parce qu’elle se rapporte à des vœux et à des considérations qui lui sont propres. Ce sont ces divisions que je veux vous indiquer. Par les décrets constitutionnels, rendus en septembre 1789, vous avez décrété que le pouvoir législatif résiderait dans l’Assemblée nationale permanente, et qu’elle ne serait composée que d’une Chambre renouvelable tous les 2 ans. Par votre décret du 22 décembre de la même année, vous avez établi les principes de la représentation, le mode des élections, les conditions d’éligibilité, et le nombre de députés dontchaque législature sera composée. Pour compléter ces premières bases, il reste à résoudre deux questions. La première est celle de savoir si les membres de cette Assemblée seront, éligibles à la prochaine législature. Un grand nombre de membres de toutes les parties de la salle : Non 1 non 1 non 1 ( Applaudissements et mouvement prolongés.) M. Tuaut de la Bouverie. Il serait bien honorable pour l’Assemblée de décréter cet article par acclamation. M. Bourdon (du pays de Caux). Tout ce que l’on décrète par acclamation n’est jamais honorable. M. Thouret, rapporteur. J’observe à l’Assemblée qu’il est impossible d’ouvrir la discussion sur les 99 articles du projet de décret que je vous propose, sans lui exposer les éléments des matières qui sont à agiter. Il est impossible qu’elle