548 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 novembre 1790.] « Casse et annule les sentences, délibérations ou arrêtés de la municipalité de Troyes, des 14 et 20 octobre dernier, 7 et 11 novembre présent mois, et lui fait défense de récidiver, sous peine d’être poursuivie extraordinairement ; « Décrète, en outre, que la suspension provisoirement prononcée par le conseil général du département de l’Aube, de l’exécution de la sentence rendue le 5 novembre présent mois, contre les deux compagnies de grenadiers et de chasseurs, tiendra jusqu’à l’organisation constitutionnelle des gardes nationales. » M. Bouche. Je propose de demander à la barre la municipalité de Troyes pour qu’elle rende compte de sa conduite. M. l’abbé Fatyl. Vos comités ont pensé que vous pouviez user de modération en cette circonstance et c’est en leur nom que j’insiste sur l’adoption pure et simple du décret. (Le projet de décret est mis aux voix et adopté.) Un jeune homme entre dans la salle et indique du geste qu’il veut remettre une lettre à M. le président. — On apprend que c’est un élève de M. l’abbé Sicard, instituteur des sourds et muets. — Il remet la lettre à M. le président, et l’Assemblée décide que son comité des rapports lui en rendra compte à l’ouverture de la séance de demain. M. Fanjuinals secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier. M. Fe Chapelier. Le huitième des articles adoptés hier sur le tribunal de cassation, contient une faute de rédaction sur les qualités que les parties pourront prendre dans les jugements, il faut ajouter les mots : et celle de leurs jonctions ou de leur profession. (Cette addition est décrétée.) M. le Président fait donner lecture d’une adresse du sieur Trouard de Riolles, présentée par madame sa. fille, admise à la barre. Le sieur de Riolles, détenu depuis cinq mois aux prisons de l’abbaye Saint-Germain, se plaint de la rigueur de cette détention ainsi que des maux qu’il éprouve ; il expose que les papiers qu’on a saisis chez lui on tété altérés et falsifiés ; que ses notes en tous cas étaient secrètes et destinées à ne jamais voir le jour. Il finit par demander que, vu qu’il n’y a pas de tribunaux pour le juger, il soit mis en simple état d’arrestation et confié, à Pont-à-Mousson, sa patrie, à la surveillance de la garde nationale, ou gardé ici, à ses frais, dans une maison particulière. M. Buquesnoy. Le sieur de Riolles ne demande point une liberté entière. II sent que les circonstances ne permettent pas de la lui accorder ; mais la longueur de sa détention a appelé ici sa famille que vous voyez devant vous à la barre. Il n’est point en état de supporter les grands frais que ce déplacement exige. 11 demande à être en état d’arrestation, Je vous observe, en appuyant cette pétition, qu’il n’est pas même décrété. M. Fucas. Je demande l’exécution du décret qui porte que M. Riolles sera conduit dans les prisons de l’Abbaye; je ne m’oppose pas cependant à ce qu’on prenne à son égard toutes les mesures que l’bumanilé prescrit. Plusieurs voix demandent l’ordre du jour. M. Frétéau. Vous ne pouvez pas passer à l’ordre du jour puisqu’il n’y a pas de juges pour juger cet accusé. Vous avez décrété qu’il y aurait des jurés, il doit donc y avoir aussi des maisons d’arrestation. Je suis d’avis qu’il soit gardé chez lui à ses frais puisqu’il le demande. Je crois même que, si sa fortune ne le lui permettait pas, ce serait à la nation à faire cette dépense. M. Tuant de Fa Bouverie. J’observe que la liberté sous caution juraloire est adoptée par toutes les législations. M. Prieur. Craignez d’annoncer par un décret imprudent que vous relâchez, que vous ne voulez pas punir, ou bien attendez-vous aux mouvements, aux entreprises de ceux qui compteront sur l’impunité. Que l’accusé soit transféré dans une prison salubre, à la bonne heure; mais vous avez ordonné par un décret qu’il sera arrêté et conduit dans les prisons de l’Abbaye ; je demande l’exécution du décret. M. Fe Chapelier. L’Abbaye est une véritable prison d’arrestation, quand il n’y a point de décret. Je demande seulement qu’il soit préparé au sieur de Riolles un appartement convenable. M. Moreau de Saint-Méry. Si cette motion était adoptée, je demanderais par amendement que les administrateurs de Paris fussent chargés du soin de donner à M. de Riolles un appartement sain et convenable. Divers membres à gauche demandent la priorité pour la motion de M. Le Chapelier, amendée par M. Moreau de Saint-Méry. D'autres membres à droite réclament la priorité pour la motion de M. Duquesnoy. Une première épreuve est douteuse. A la seconde épreuve, la priorité est donné à la motion de M. Le Chapelier. Le décret est rendu en ces termes, sauf rédaction : DÉCRET. « L’Assemblée nationale enjoint aux administrateurs chargés du département de la police de Paris de faire préparer, dans le plus court délai et dans telle prison qu’ils trouveront convenable, un appartement commode pour le sieur de Riolles. » M. Barrère ( ci-devant de Yieu%ac), rapporteur du comité des domaines. Ce n’est qu’avec un sentiment douloureux que le législateur s’occupe des lois pénales et de prison; mais la voix du l’humanité vous crie du fond des cachots de ne pas laisser ainsi des accusés entassés dans les lieux que la loi ne destine qu’à leur détention. Il y a deux jours que le maire de Paris vous disait à la barre que la maladie était près de prononcer des arrêts de mort dans fi s prisons de Paris. C’est dans ces Iristes circonstances que la municipalité vous adresse une pétition instante à ce sujet. Elle a fait transférer cinquaDte-trois prisonniers des prisons du Châtelet dans celles