[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 juin 1791. J Vos comités ont donc pensé qu’il fallait préférer une mesure uniforme et générale, qui présentât le double avantage et d’accélérer la liquidation, et de procurer aux perruquiers une équitable indemnité. Ils ont yu d’autant moins de difficulté à vous proposer ce parti, que l’évaluation rectifiée par classe n’a été admise par vous que pour les seuls procureurs, entre tous les offices ministériels. La mesure que vos comités vous indiquent est d’accorder à tous les propriétaires d’offices ou places de perruquiers, en sus de l’évaluation qu’ils ont faite, le tiers du prix de leurs contrats. Par là, tous, à la vérité, n’obtiendront pas un dédommagement complet, mais le plus grand nombre sera, à peu près, indemnisé et les autres en recevront au moins un grand adoucissement. Le tiers du prix de leurs contrats doit leur être assigné à titre d’indemnité, tant des évaluations trop faibles, que de la pratique qu’ils perdent, et qui généralement est entrée en grande considération, lorsqu’on a fixé le prix de ces contrats. On opposera peut-être que les perruquiers ne perdent pas cette pratique, puisque la loi qui supprime leurs offices ou places, ne leur ôte point le droit de continuer librement leur travail. Gela est vrai; mais si elle le laisse aux ci-devant maîtres, elle l’accorde aussi à tous leurs garçons; or, il est bien clair que les premiers auront extrêmement à souffrir d’une pareille concurrence. En effet, ce n’est guère que dans la jeunesse qu’on peut exercer la profession de perruquier avec quelques succès; les garçons ont en général sur les maîtres ce précieux avantage; il ne faut donc pas douter que ceux-là ne trouvent aisément le moyen d’enlever à ceux-ci, et le plus grand nombre et les meilleures de leurs pratiques. C’est surtout d’après cette considération, que vos comités ont pensé qu’il fallait porter au tiers du prix des contrats l’indemnité des perruquiers, quoiqu’elle ne l’ait été qu’au sixième pour d’autres classes d’officiers ministériels. Car il y a entre les uns et les autres cette différence frappante, qu’en général l’âge pour les autres officiers ministériels est un titre de plus à la confiance publique, au lieu que pour le perruquier il est presque toujours le triste signal de la défection des pratiques. Comme ce sont les perruquiers qui souffriront le plus, il a donc paru juste à vos comités que leur indemnité fût aussi plus forte, surtout si l’on considère qu’avec de bien plus grandes ressources pour continuer l’exercice de leurs professions, les officiers ministériels sont en général moins maltraités de la fortune que ne le sont les perruquiers. Après vous avoir proposé cette mesure générale pour opérer le remboursement des propriétaires d’offices ou places qui ont évalués, il reste à vous proposer aussi quelques mesures particulières pour le complément de votre décret. Il vous faut observer d’abord que, parmi les propriétaires soumis à l’évaluation, il en est un assez grand nombre qui n’ont point déféré à cette loi bursale ; vos comités ont cru qu’à l’égard de ceux-là, le prix de la finance devrait tenir lieu de l’évaluation, et qu’au cas qu’ils eussent des contrats, il fallait aussi leur adjuger le tiers de leur prix à titre d’indemnité. Mais, dans tous les cas, vos comités vous proposent de décréter que l’évaluation ou la finance, avec l’indemnité qui y sera jointe, ne pourront jamais excéder le prit total du contrat. Il vous faut observer ensuite que dans quelques ci-devant provinces, telles que la Flandre, le Hai-nault et autres, les places des perruquiers n’ont point été soumises à l’évaluation; ainsi celles-là doivent être remboursées sur le pied des contrats d’acquisition ; c’est le vœu de vos décrets de septembre et décembre 1790. Enfin, il en est quelques-uns qui sont premiers pourvus ou qui ont levé aux parties casuelles, et d’après les mêmes décrets; ceux-là doivent être remboursés sur le pied de la finance. Vos comités réunis vous proposent le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de ses comités de judicature et d’imposition, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les titulaires d’offices de barbiers, perruquiers, baigneurs et étuvistes qui ont évalué lesdits offices en exécution de l’édit de février 1771, et de l’arrêt du conseil du 18 mars 1774, en seront remboursés sur le pied de l’évaluation. Art. 2. <> Indépendamment du prix de l’évaluation, ceux qui ont des contrats authentiques d’acqui-sitioQ seront, en outre, remboursés à titre d’indemnité du tiers du prix de ces contrats. Art. 3. « A l’égard de ceux qui, quoique soumis à l’évaluation, n’ont pas évalué en effet, ils seront remboursés sur le pied de la finance, avec pareille indemnité que ci-dessus, s’ils ont des contrats, sans qu’en aucun cas le prix de l’évaluation ou de la finance puisse, avec l’indemnité accordée, excéder le prix total des contrats. Art. 4. « Les barbiers, perruquiers, baigneurs et étuvistes, qui n’ont point été soumis à l’évaluation, seront remboursés sur le pied du dernier contrat authentique d’acquisition. Art. 5. « Ceux qui seront premiers pourvus, ou qui ont levé aux parties casuelles, seront remboursés sur le pied de la finance. Art. 6. « L’article 26 des décrets de décembre 1790 sera exécuté relativement aux dettes contractées par les barbiers, perruquiers, baigneurs et étuvistes. » M. Castellanet propose par amendement que les titulaires d’offices de perruquier soient remboursés sur le pied du prix commun des 10 dernières ventes. M. Régnier, rapporteur, répond que l’adoption de ce mode de remboursement renverserait les bases générales de l’évaluation des offices. (L’Assemblée, consultée, adopte sans changement le projet de décret des comités.) L’ordre du jour est un rapport des comités des finances et des contributions sur le recouvrement des contributions de la ville de Paris. M. Anson, au nom des comités des finances et des contributions. Messieurs, l’Assemblée natio- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. J 17 juin 1791. J OB'! nale, par son décret (lu 3 novembre 1790, s’est réservé, dans l'article 9, de statuer, par un règlement particulier, sur le mode de recouvrement et de perception des contributions directes de la ville de Paris, d’après le rapport de son comité des finances. Ce comité, après avoir pris le vœu unanime du conseil général du département de Paris, et après s’être concerté avec le comité des contributions, a rédigé le projet de décret très court que je vais vous soumettre; il ne s’éloigne des lois générales, qu’en ce qu’il a été impossible d’appliquer à la capitale. Je dois faire précéder cette lecture de quelques observations qui préviendront et résoudront toutes les objections. Nous avons pensé que Paris étant divisé depuis longtemps en 6 arrondissements, pour la recette des deniers publics, il était naturel de laisser subsister cette division qui a été adoptée, il y a 2 ans, pour la garde nationale, et que l’Assemblée nationale a depuis confirmée pour le ressort des tribunaux de justice. Nous avons pensé aussi que la nomination d’un seul trésorier de district à Paris, serait dangereuse et inutile ; dangereuse parce qu’il faudrait lui confier 20 ou 25 millions de recouvrement ; inutile parce qu’il serait obligé d’avoir des recettes intermédiaires entre les contribuables et lui ; et que c’est prodiguer en vain des taxations à ce trésorier de surérogation, lorsque les receveurs particuliers peuvent verser directement à la trésorerie nationale, les contributions : ils les y ont toujours versées. Nous avons cru qu’environnés de difficultés pour recouvrer tout à la fois l’arriéré et le courant des contributions, il ne fallait pas les multiplier, en changeant les individus qui connaissent les contribuables de leur arrondissement ; ces connaissances de localité ne sont point indifférentes dans une ville où la population est si considérable. D’ailleurs, il n’y a point à Paris d’administration de district qui puisse nommir les receveurs conformément à la Constitution. Toutes ces circonstances nous ont conduits à ne point faire verser dans leur caisse les contributions indirectes, qui se verseront aisément à Paris dans la trésorerie nationale directement. Plusieurs obstacles ont retardé le recouvrement des contributions de Paris depuis la Révolution : 1° l’épuisement de ses moyens, qui demandait des ménagements ; 2° l’encombrement des demandes en modération que la municipalité provisoire avait laissées se former, et que le directoire contentieux déblaye journellement avec assiduité ; 3° il fallait constituer les receveurs. EnfiD, depuis quelques mois la crainte de faire l’avance onéreuse, et difficile à recouvrer, des droits d’enregistrement et de timbre sur les commandements, avait suspendu leur envoi. Vous venez de lever ce dernier obstacle en exemptant de ces droits les recouvrements des années antérieures à 1791. Le département de Paris, de son côté, a fait cesser enfin plusieurs entraves qui retardaient la marche de la perception des années antérieures à 1791. Elle va reprendre la célérité que l’on a droit d’espérer du patriotisme des citoyens de la capitale. On a cité hier le directoire du département de Paris comme ayant autorisé à ne rapporter, pour obtenir des patentes, que la quittance de 1788. Le directoire n’a été pour rien dans cette mesure. L’afîiche de la municipalité ne parle que de l’autorisation du comité central de liquidation de l’Assemblée nationale, et uniquement pour le remboursement des droits de maîtrises. Mais il faut observer que les contributions de 1789 et de 1790 se trouveront acquittées par la déduction qui en sera faite sur le prix de la liquidation. Cette mesure a eu un tel succès, que suivant une lettre de la municipalité au département, dès le lendemain de l’affiche, en un seul jour, il avait été expédié 171 patentes et 79 billets de liquidation. Le directoire et la municipalité sont en mesure pour l’année présente ; car les rôles de la contribution foncière sont prêts; ils pourront commencer à être mis en recouvrement dès le mois prochain. Ceux de la contribution mobilière, plus susceptibles de détails, ne tarderont pas à l’être. Dès le mois prochain, les bons citoyens peuvent donner des preuves de zèle, en commençant à offrir à l’Etat des acomptes sur le tribut de 1791, dont la rentrée est si intéressante ; c’est de son activité que dépend maintenant le sort de l’Empire et le succès de la Constitution. Voici le projet de décret que vos comités vous proposent : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport fait au nom des comités des finances et des contributions, décrète ce qui suit : Art. 1er. « La ville de Paris continuera d’être divisée en 6 recettes distinctes, auxquelles seront versées les contributions foncière et mobilière, la contribution patriotique et le droit de patentes. Art. 2. « Chacune de ces 6 recettes continuera aussi d’être provisoirement exercée par le receveur actuel de l’arrondissement qui la compose. Art. 3. « Les receveurs n’auront qu’un denier de taxation pour tous émoluments et frais généralement quelconques, sur la contribution foncière et mobilière et sur le droit de patentes. Art. 4. « Le cautionnement des 6 receveurs sera au total de 2,400,000 livres en immeubles : cette somme sera divisée entre eux dans la proportion de la recette de leur arrondissement ; ils fourniront ce cautionnement dans les deux mois, qui suivront la publication du présent décret. Art. 5. « Les contributions indirectes de la ville de Paris seront versées directement dans la caisse de la trésorerie nationale, sans passer par celle desdits receveurs des contributions directes. » M. Gaultier-Biauzat. Je crois qu’il conviendrait, dès que vous adoptez 6 divisions, qu’elles fussent absolument les mêmes pour la démarcation que celles des 6 tribunaux. M. Anson, rapporteur . C’est l’intention de le faire pour 1792 ; voilà pourquoi nous avons mis le mot provisoirement dans l’article 2. Si nous changions les arrondissements cette année, ce serait un obstacle de plus; mais notre intention est bien que, dans une année plus tranquille, les tribunaux et les recettes soient les mêmes absolument, de manière que les sections se trouvent bien partagées. (L’Assemblée, consultée, adopte sans changement le décret des comités.)