* 686 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES . 17 mai 1791.1 si votre sagesse n’arrête les complots de nos ennemis? Le sangacoulé de tontes parts, les sacrifices les plus généreux ont été offerts sur l’autel de la liberté, et l’on immolerait notre repos, noire vie même aux passions injustes de quelques hommes méchants : non, sans cloute, vous ne permettrez pas qu’on nous ravisse les biens les plus précieux. « Pères de la patrie, hâtez-vous de mettre fin à nos vives sollicitudes. Après l’éionnante révolution de Sparte, Lycurgue demande aux Lacédémoniens de garder religieusement le sacré dépôt des lois établies jusqu’à son retour dans une patrie qu’il ne doit plus revoir. « Semblables à ce génie bienfaisant, vous n’avez pas voulu, comme lui, donner une durée éternelle au sublime ouvrage que vous venez de construire; les mœurs et le caractère des nations sont sujets à des vicissitudes continuelles; et d’ailleurs, faibles et mortels, vous avez dû imprimer, sur tout ce qui vous environne le caractère de notre frugalité. A la divinité seule, il appartient d’être immuable. Mais pour étouffer les cris des ennemis du bien public, fixez dans l’avenir à l’époque où la France pourra changer sa Constitution. Alors les illusions de l’enthousiasme auront disparu, et les esprits aidés de l’expérience soumettront les différentes parties de notre système politique à l’examen de la froide raison. Maintenant, jouissez de la seule récompense dans vos pénibles travaux. Vos lois toutes éclatantes de sagesse et de beauté vont suivre la marche qui leur a été communiquée, et vous goûterez celte joie pure qu’éprouva l’Être suprême, quand il vit l’univers à peine sorti du chaos, exécuter ses divers mouvements avec tant d’harmonie et de régularité. » Adresse du sieur Bouriquin , homme de loi à Douarnenez, district de Pontevoix , au département du Finistère, qui envoie à l’Assemblée nationale la copie d’un mémoire des marins et pêcheurs de Douarnenez, sur le moyen de prévenir les accaparements des rogues. (Cette adresse est renvoyée au comité d’agriculture et du commerce.) Le sieur de Schant est admis à la barre. M. le Président. Messieurs, vous voyez devant vous à la barre M. le chevalier de Schant, Suédois, qui, lorsqu’il était au service de la France, a été exilé et éloigné par le despotisme ministériel, en vertu d’une lettre de cachet du 13 décembre 1779. Il présente à l’Assemblée nationale un mémoire pour lui témoigner sa reconnaissance et lui rendre grâce de ce qu’elle a bien voulu lui rendre par ses décrets la liberté de rentrer dans le royaume. Il fait également hommage à l'Assemblée d’un ouvrage sur l’invention d’un nouveau système de construction des vaisseaux de guerre, fruit des loisirs de son exil. J’espère que l’Assemblée ne me désapprouvera Bas en accordant les honneurs de la séance à [. de Schant. {Applaudissements.) (L’Assemblée accorde à M. de Schant les honneurs de la séance.) Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une lettre du sieur de Latude , qui prie l’Assemblée de vouloir bien réparer une erreur qui a été commise dans son sein même, erreur qui lui fait perdre la considération et l’estime publique. Cette lettre est ainsi conçue : « Monsieur le Président, « Un homme malheureux est de toutes les nations; il a des titres sacrés sur tous les cœurs vertueux. Je viens réclamer les droits que j’ai sur ceux des représentants du peuple le plus généreux de l’univers. Mon cœur reconnaissant n’oubliera jamais que les législateurs de la France avaient pris la défense de la plus malheureuse victime de l’injustice. Mais, dans l’instant même où vos bienfaits allaient mettre fin à toutes mes peines, une erreur inconcevable m’a fait perdre votre considération. Par cette erreur, mes maux sont parvenus à leur comble. Je ne puis me présenter nulle part. Je suis perdu sans ressource, si vous ne daignez être sensibles à mon humble prière. Le mal a été fait dans le sein de cette Assemblée : c’est dans ce lieu qu’il doit être réparé. Je viens vous supplier, au nom de la loi, de permettre que je me justifie sur cette inculpation, d’ordonner à votre comité de se faire remettre les papiers que, j’ai déposés au comité des pensions, pour les examiner et vous faire enfin un rapport fondé sur la vérité et sur l’exactitude des faits. Je suis citoyen français, et je suis malheureux. Au nom de la patrie, ne me refusez pas la justice que je demande, que 40 ans 3 mois et 4 jours de captivité, de souffrances et de gémissements implorent en ma faveur. Mes ennemis n’ont jamais réussi à entacher mon honneur. C’est le seul bien qui me restât. Il m’a été ôté en votre présence. Au nom de la nation, restituez-le-moi ou rendez-moi mes chaînes. J’en supporterai le poids avec plus de courage et de résignation, que la perte de mon honneur. « Je suis, avec un profond respect, etc... « Signé : de La Tude. » Plusieurs membres : A l’ordre du jour ! M. Prieur. Messieurs, il s’agit ici d’un infortuné. Plusieurs membres : Le décret est rendu. M. Prieur. Je demande le renvoi de son adresse au comité des rapports. Il ne vous demande rien {Murmures.)] il veut se justifier à vos yeux. Plusieurs membres : Il y a un décret. M. Gaultier-Biauzat. Un homme accusé a le droit de justifier sa conduite; on ne vous demande rien à juger. M. Prieur. Messieurs, vous ne connaissez pas les faits et vous refusez de les apprendre. Le despotisme ne lui a pas ravi l’honneur, et vous voulez le lui ravir. Ce n’est pas de l’argent qu’il demande, c’est son honneur. {Applaudissements.) 11 vous demande de ne pas ajouter au supplice de sa vie celui de la terminer dans un opprobre que par erreur vous avez imprimé à son nom. J’ai moi-même partagé l’autre jour l’opinion qui l’a fait condamner; mais, mieux instruit, je viens aujourd'hui réparer mon erreur : on a vu un crime là où il n’y a qu’une faute. Faites comme moi, instruisez-vous. {Murmures.) Comme l’Assemblée n’a pas entendu juger M. de La Tude, ce n’est pas un appel de son jugement, c’est une expression nouvelle de son affaire, renvoyée à un de vos comités ; je demande le renvoi au comité des rapports. {Applaudissements dans les tribunes.)