[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. � 205 tielles ont élevé l’adjudication définitive à 13,520 livres. « Les biens vendus sont ceux, à Chablis, de l’émigré Chamont; mes concitoyens sont acqué¬ reurs, et sont, comme tu le vois, au pas. « Signé : Rathier, 'procureur syndic. Pour copie conforme : « Delaporte. » La Convention nationale a également décrété l’insertion au « Bulletin « et la mention honorable des six adresses dont l’extrait suit : 1° Des administrateurs composant le conseil général du département du Doubs, qui invitent la Convention nationale à rester à son poste, et lui annoncent que la commune de Besançon a célébré la fête de la raison dans son église métro¬ politaine, en présence du représentant du peuple Bassal. Ils vont îaire enlever des églises toute l’argenterie, pour être envoyée à la Convention, avec la guenille du saint suaire, qui passait au¬ trefois pour îaire des miracles (1). Adresse des administrateurs composant le conseil général du département du Doubs (2). « A Besançon, le 6 frimaire, l’an II de la République, une et indivisible. « Législateurs, « Enfin le fanatisme expire, la philosophie triomphe, la morale est dégagée de toutes les erreurs et pratiques superstitieuses, et bientôt tous les Français n’auront plus qu’un culte, celui de la liberté et de l’égalité. « Législateurs, les citoyens de notre départe¬ ment ne seront pas les derniers à secouer le joug des prêtres. La fête de la Maison a été célébrée le 30 brumaire dans la ci-devant église métropo¬ litaine; la foule était immense, le peuple a ap¬ plaudi à cette cérémonie patriotique et a maudit les prêtres qui, jusqu’à ce jour, avaient abusé de sa bonne foi et de sa simplicité. Le représentant du peuple Bassal, présent à cette cérémonie, l’a embellie par un discours relatif et qui a été couvert d’applaudissements. Dès le 27 précé¬ dent, les citoyens Marrelier, maire, Dormoy, notable et Lambert, procureur de la commune de Besançon, avaient renoncé à leur qualité de prêtre, et déposé leurs lettres de prêtrise pour être brûlées. Les citoyens Lacombe et Mozer, curés, ont déclaré avoir induit le peuple en er¬ reur et ne vouloir plus exercer les fonctions ec¬ clésiastiques. Nous espérons que leur exemple sera bientôt suivi par d’autres prêtres qui ne manqueront sûrement pas de saisir cette occa¬ sion pour donner une preuve éclatante de leur patriotisme. « Mais ce n’était pas assez, législateurs, d’a¬ battre le fanatisme, il fallait également mettre à la raison ces riches marchands, ces riches égoïstes, ces agioteurs qui, jusqu’à présent, se sont engraissés de la substance du peuple. Le (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 79. (2) Archives nationales, carton C 284, dossier 824. comité de surveillance des trois corps adminis¬ tratifs, réuni à celui de la Société populaire, s’est occupé, pendant une nuit entière, d’une taxe sur ces messieurs; elle s’est portée provi¬ soirement à 1,233,000 livres qui doivent être payées sur-le-champ. Elle a été approuvée par le représentant du peuple Bassal. « Nous allons également faire enlever, des églises et sacristies, l’argenterie; elle vous sera adressée avec la guenille dite du saint suaire qui, autrefois, passait pour faire des miracles et délivrer les possédés. Les dévots y avaient grande foi ; ils se pourvoyaient surtout d’un livre qui leur était vendu par les ci-devant chanoines, intitulé : La vie et les miracles du bienheureux bénit saint suaire, lequel rapportait tout au long les miracles de ce grand saint et rendait à ces ci-devant chanoines des sommes considé¬ rables. « Législateurs, après avoir éteint le fanatisme et taxé les riches, il faut aussi vaincre les es¬ claves des despotes et leur faire évacuer le sol de la liberté qu’ils souillent par leur présence; il faut des armes, il faut en fabriquer; chaque citoyen doit avoir un fusil; il faut pourvoir aux besoins de nos braves défenseurs. Ces objets nous occupent sans cesse; nous avons des ate¬ liers d’armes, des magasins d’habillement, et nous ne sommes pas les moins utiles à la Répu¬ blique sur ces objets. « Nous finissons cette adresse, déjà trop lon¬ gue; mais peut-on abandonner la plume quand on parle à des législateurs qui assurent le bon¬ heur du peuple par des lois révolutionnaires, capables de faire trembler les tyrans de l’Europe? « Législateurs, restez à votre poste, ne le quittez que lorsqu’ils seront exterminés, et que la liberté et l’ égalité auront un triomphe assuré. « Les administrateurs composant le conseil général du département du Doubs. « P. -H. Roland, vice-président; Hannico, secrétaire général. » 2° Des sous-officiers et volontaires du détache¬ ment du 4e bataillon de l’Oise, en garnison à Bouchain, qui invitent la Convention à rester à son poste; ils jurent de s’ensevelir sous les dé¬ bris de la République plutôt que de souffrir que les tyrans viennent s’y réfugier (1). Adresse à la Convention nationale par les sous-officiers et volontaires du détachement du 4e ba¬ taillon de VOise pour les inviter à rester à leur poste jusqu'à la paix (2). « Vous venez de frapper le dernier coup sur la tête du tyran, continuez vos travaux, célèbres législateurs, et vous verrez la France donner l’exemple à l’univers; déjà cette Constitution que vous nous avez donnée et dont nous vous en félicitons et qui est le bonheur de la Répu¬ blique, a pris racine chez nous, et ses branches commencent à s’étendre chez les despotes. « Restez fermes à votre poste, hommes vertueux, jusqu’à ce que les esclaves des tyrans ne souillent plus le sol de la liberté, et qu’ils (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 79. (2) Archives nationales, carton C 286, dossier 835, 206 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j *§ aéSrc�liæ nous demandent la paix ! Faites voir à l’ univers entier qu’il n’est qu’un peuple libre pour donner des lois; déjà les despotes vous demandent des leçons. Continuez, et bientôt vous les verrez venir les copier. Nous avons juré de ne vous abandonner qu’à la mort. Nous vous adressons encore notre serment pour vous prouver que nous aimons mieux la mort et que nous nous ensevelirons plutôt sous les débris de la Répu¬ blique, que de souffrir que les tyrans s’y réfu¬ gient. « Les sous-officiers et volontaires du détache¬ ment du 4e bataiUcn de VOise en garnison à Bouchain. » ( Suivent 14 signatures.) 3° Des membres de la Société populaire de Fruges, qui font la même invitation à la Con¬ vention nationale; ils envoient les détails de la fête civique qui a été célébrée dans cette com¬ mune, et annoncent que les saints de bois qui sont dans leur commune chaufferont désormais les corps de garde (1). Suit la lettre d’envoi de l’adresse (2). La Société populaire montagnarde de Fruges , au Président de la Convention. « Citoyen Président, « Nous te prions de vouloir bien communiquer à la Convention l’adresse ci-jointe, persuadés que tu vois du même œil le pauvre et le riche, le capitaliste et le villageois. Nous ne doutons pas que tu ne te rendes à nos vœux. « Les membres du comité de correspondance, « Demond; Lacoedaire. » « A Fruges, le primidi de frimaire, 2e année de la République française, une et indivisible. » Adresse (3). La Société populaire et montagnarde de Fruges, département du Pas-de-Calais, à la Convention nationale. « Représentants, « Nous croyons devoir vous instruire de la fête qui a eu lieu en notre bourg la veille et le jour de la dernière décade de brumaire, sachant avec quel intérêt vous apprenez les progrès de la raison. « Le nonidi de la troisième décade de bru¬ maire, il a été fait une souscription à la Société populaire pour subvenir aux besoins des défen¬ seurs de la patrie; la générosité est l’âme des vrais républicains, ils se font connaître en cet instant, tous souscrivent selon leurs facultés et bientôt il s’y trouve des chemises, des bas et des souliers pour au moins .3,500 livres (vous (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 79. (2) Archives nationales, carton.C 286, dossier 835. (3) Ibid. observerez que notre population n’excède pas 1,500 âmes et qu’il n’est pas une famille qui no vive de son travail). « Il est décidé, à la Société, que le lendemain,. jour de décade, il sera planté sur la place deux arbres vivaces, l’un pour nous représenter la liberté, l’autre la fraternité; le sapin et le chêne obtiennent la préférence, le premier comme devant, par sa hauteur, dominer l’univers et annoncer du plus loin aux tigres qui nous font la guerre, que cet arbre est le signe de notre ralliement et le pronostic certain de la chute des tyrans; le second, comme devant annoncer à nos neveux la victoire que leurs pères ont remportée sur l’esclavage; ils viendront se reposer sous ses rameaux; ils diront, pénétrés d’un saint en¬ thousiasme : « Ce chêne est planté pour nous, nos auteurs l’ont arrosé de leur sang. » Ils re¬ gretteront de n’être pas nés plus tôt pour par¬ tager nos glorieux travaux. Ces jours de décade nous nous rassemblerons sous son feuillage, nous y danserons et nous y chanterons le triomphe de la liberté. « Le lendemain, jour de la décade, nous sor¬ tons tous avec nos habits du dimanche jadis pour aller chercher nos arbres ; tous veulent avoir part à ce glorieux travail ; un moment voit leur cime à nos pieds, le moment qui suit la voit dans les nues. Nous revenons, glorieux de notre charge ; la garde nous attend, nous marchons au lieu indi¬ qué, tambour battant et drapeau déployé. « Nous apprenons en cet instant que nos prêtres ont déposé leurs lettres, reconnu publi¬ quement leur erreur et avaient juré de ne voir et de n’aimer que la Constitution; nous avons vu avec plaisir deux individus redevenir citoyens,. et, de passifs, devenir actifs : ils accompa¬ gnaient notre cortège la pique à la main. « On les plante enfin, ces arbres; c’était là le moment de plaisir. Ha, quel concert ! Ce n’était pas celui de l’Opéra, mais c’était celui de la nature; nous chantions tous ensemble tantôt l’hymne des Marseillais, tantôt les sans-culottes, etc., etc., car, grâce au génie de la liberté, nous en savons quelques-unes de ce genre, et si nous-n’en savions pas, nous en ferions, car nous som¬ mes poètes aussi, nous autres villageois. « Notre char de triomphe ne doit pas non plus être oublié, il portait notre musique et notre drapeau, mais que disons-nous notre drapeau! à l’instant même il ne l’est plus, on se rappelle avec horreur qu’il a été donné par un émigré, par un scélérat qui porte le poignard dans le sein de sa mère; les républicains, saisis d’une sainte horreur, le mettent à l’instant en lambeaux, le condamnent au feu; il subit son jugement au milieu des cris mille fois répétés de Vive la Bépublique ! vive la Montagne ! Ce drapeau est aussitôt remplacé par trois rubans tricolores (donnés par une républicaine, épouse de Courtois, président du district de la Montagne-sur-Mer), attachés à une pique surmontée du bonnet de la liberté, et reconnus par toutes les compagnies de la garde nationale qui lui ont juré fidélité. Cette journée s’est terminée par le banquet civique, où maintes rasades ont été bues à la santé de la sainte Montagne. Voilà notre journée et voici nos vœux : « C’est que vous n’abandonniez pas le gou¬ vernail que le vaisseau ne soit au port ; continuez vos glorieux travaux. Vous n’avez pas encore assez fait, l’enfant est exigeant et craint que son père ne l’abandonne dans le moment où il est