SÉANCE DU 30 THERMIDOR AN II (17 AOÛT 1794) - N° 8 209 Antoine Riscle, cy-devant juge de paix J’ai été mis sous les veroux de la part des représentans Hentz et Bourbotte le 12 thermidor. Le motif de ma détention est une procédure formalisée par le citoyen Renouard, l’un de mes assesseurs, le 6 . prairial dernier contre Pierre Charon, de Volemerange, de laquelle je ne me suis pas mellé ny de près ny de loin, lequel a été condamné par jugement du tribunal de la police correctionele en 500 livres d’amande envers la République et à une détention de 6 mois pour avoir attaqué quatre femme sur une grande routte, avoir couru sur une avec son couteau à la main et sur les autres avec son sabre, et les avoir molestées, etc. : c’est ce qu’il résulte de l’information et audition des témoins. Pouvais-je, moi, m’opposer à ce jugement ? Ne me serais-je pas rendus coupable et criminel si je m’étois opposé à l’information d’un délit rendu public et commis sur une grande routte envers des femmes ? Ma femme n’étoit pas la seule. Je n’avois rien à commander aux autres. Ma femme seule est mise en arrestation parce quelle étoit du nombre des femmes attaquées et parce que Charon, pour autoriser ses voyes de faits, a dit qu’elles parloient de l’ancien dimanche, fait qui n’a été déposé par aucun des témoins parce qu’en effet c’étoit une fauceté. Je suis destitué de mon état et Nicolas, mon secrétaire-greffier-commis, par ce qu’a dit le représentant Hentz j’avois été huissier et record. Je luy ay observé que je n’avois été ny l’un ny l’autre; ce ne sont point les états qui avilissent les hommes. J’ai fait, jusqu’au moment que j’ai été nommé juge de paix, le service de la garde nationale. Riscle, Nicolas. N° 6 Déclarations du comité révolutionnaire des sections. 3 pièces. Les pièces cy-incluses attestent les violences caractéristiques de Hentz, qui n’en a pas même épargné les autorités constituées et les patriotes les plus fermes avant le 9 thermidor. Faits qui se sont passés lors de la visitte qu’ont rendus les membres composant le comité révolutionnaire de la commune de Thionville aux représentans du peuple François Hintz et Bourbot [sic] le 12 thermidor an II de la République françoise une et indivisible. Lesdits membres ayant été introduits, ils se seroient annoncés comme formants le comité révolutionnaire. Le représentant Hentz leur dit : Vous n’êtes pas un comité révolutionnaire, mais un comité contre-[ré]volutionnaire. Lesdits membres ayant observés qu’ils ne croyoient pas avoir mérités une pareille épitette, il leurs a répondu que s’ils avoient voulus recueillir des preuves contre les membres de l’ancien district, qu’il y auroit longtems qu’aucun d’eux n’existe-roit plus et qu’ils seroient tous guillotiné. Ensuite, adressant la parole au citoyen Vigneron, un desdit membres, il lui demandât pourquoi, en sa qualité de procureur, il avoit accepté la place de membre dudit comité; ce dernier lui ayant observé qu’il ne l’étoit pas, qu’il avoit renoncé à cet état au commencement de la révolution pour en embrasser un autre, il lui répondit qu’il l’avoit été et que les procureurs de l’ancien régime étoient tous des coquin et des voleurs. Ledit Vigneron lui répliqua qu’il le connoissoit et qu’il ne pouvoit pas lui faire un pareil reproche. Ledit représentant lui dit : Ha, tu étoit toujours comme les autres. Ledit citoyen Vigneron répliquant derechef en lui disant : Informe-toi dans Thionville, on rendra un meilleur témoignage de moi que tu n’en rend, en tout cas qu’il ne pouvoit rien lui reprocher contre son patriotisme. Ledit représentant Hentz lui dit : Tu est agent de l’administration forestière et membre du comité révolutionnaire. Tu ne conservera aucune de[s] dittes place, je te destiturai, nous ne voulons plus de procureur ni d’huissier en place. Ensuite, s’adressant à tous les membres, il leur dit pourquoi ils n’avoient pas pris les intérêts du nommé Charon, de Volmerange et du nommé Fichtin; les membres lui ayant observés qu’ils l’avoient fait pour le citoyen Charon en écrivant en sa faveur au comité de salut public, ledit représentant répondit : Pourquoi n’en avés-vous pas fait autant pour Fichtin ? Le citoyen Arnoult, un desdits membres, lui ayant observé que ledit Fichtin étoit en arrestation par ordre d’un représentant du peuple, le citoyen Cusset, et que l’on étoit persuadés qu’un représentant n’étoit pas assé injuste pour mettre quelqu’un en arrestation sans motifs, ledit représentant lui demandât qui il étoit. Il répondit qu’il étoit membre du comité révolutionaire. - Ton nom ! lui répliquat-il avec emportement. Il répondit : Je me nomme Arnoult. Ledit représentant lui dit : C’est justement contre tois que j’ai des nottes. Tu est un aristocrate, un contre-révolutionnaire déterminé, un patriote de sircons-tance et du moment, tu est un gueux et un célérat. Ledit Arnoult lui répondit qu’on l’avoit déservi dans son esprit mais qu’il ne craignoit rien parce que sa conduite étoit connue de tous ses concitoyens et qu’il avoit la conscience nette; que d’ailleur il désirait que tous les contre-révolutionnaires lui ressemblât. Ledit représentant Hentz lui dit : Ta conduite est si connue que si on la scrutait bien tu n’est pas loin de la guilliotine, et lui dit avec humeure et un grand geste de bras : Va-t’en ! Adressant ensuite la parolle à tous les membres, ainsi que le représentant Bourbotte, ils leur dirent que Thionville n’étoit composé que d’une masse de contre-révolutionaires et que, si l’ennemy se présentait devant nos murs, les portes lui seroient bientôt ouvertes. Sur quoi lesdits membres leur ont dits qu’ils ne connoissoient pas l’esprit républicain des citoyens de Thionville; que, s’ils le connoissoient, ils leur rendroient plus de justice et ne les traiteraient pas de la sorte. Le représentant Hentz, en leur montrant la porte, leur dit d’un ton aigre et avec un mouvement de bras qui annonçait tout le mépris : Allez ! Cette réception ignomineuse fut faite en présence des généraux, du nombre desquels étoient les citoyens Moreaux et Ambert; les faits cy-dessus sont attestés par les membres du 210 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE comité révolutionaire soussignés présents à cette réception. Wagner, Arnoult, Vigneron, Audenelle, Li-bre-Granthy, Cuvillier, Leclerc. Raport fait par le citoyen Cuvilliê, membres du comité révolutionaire de la commune de Thionville, ainssy conçue : Les membres du comité révolutionaire ayant nommé les citoyens Cuvilliê et Albert pour commissaire pour se transporter chez le citoyen Bourbotte, représentent du peuple, avec le procès-verbal par nous dressé ci-joint, à seul fin de nous donnés une décharge, et lui ayant présenté ledit procès-verbal et les loix relatif aux faux assignats trouvé sur l’officier autrichien, et en ayant fait lecture, il trouva une somme de 5 775 livres. Sur quoi, ledit représentent lui dit avec emportement : Comment ! Une somme de 5 775 livres, et toi tu me dit qu’il y en avez pour 50 000 livres ! Sur quoi, ledit Cuvilliê lui répondit que ce n’étoit pas lui qui lui avoit dit mais que c’étoit un autre membres; mais, par le procè-verbal cy-joint, il y a apa-rence que ledit officier l’a ditte puisqu’il y a des témoins quil l’ont affirmée dans leurs dépositions. Ledit représentent lui dit : Que me veut-tu encore ? Ledit Cuvilliê lui répondit : Le comité te demande une décharge. Ledit représentant lui dit avec un ton : A-tu peur de ta tête ? Ledit Cuvilliê lui répondit : Non, je n’en et pas peur. Nous avons seulement peur de manquer aux loix. Ledit représentent lui dit en rejettent les loix et le procès-verbal : Va t’ant ! Je t’arenge-roit, toi et ton comité et je demande acte de la demande que tu me fait, et je ne suis pas fait pour te donné de décharge par écrit. Cuvillier. Extrait des registre des délibérations du comité révolutionnaire de la commune de Thionville. Séance du 19 thermidor l’an II de la République françoise une et indivisible et démocratique. En ladittes séance, deux de nos membres nous auroit raportoit que le jour d’hier, vers les 9 heure du soir, un officier autrichien se disant déserteur auroit, chez un d’eux, fait une dépense et donna pour payement un assignat de 50 sols qu’ils reconnu faux; un second qui lui est présenté et de même reconnu faux. Là dessus, ledit officier dit : Cy ces 2 son faux, qu’ils en avoit pour 50 000 livres de même et par conséquent tous faux. Ledit membre ayant demandé la présentation desdits assignat, il les auroient à l’instant présenté; de suite il se seroient transporté chès le cytoyen Tailleur, receveur du distric de cette commune pour les faire vérifier : il sans et trouvé 26 de 5 livres, 62 de 2 livres 10 s. ,189 de 10 livres, 6 de 400 livres et 24 de 50 livres, tous faux, formant ensemble la somme de 5 775 livres; qu’ayant fait part de cette découverte aux représentant du peuple envoyé près les armées de la Moselle et du Rhin présent à Thionville, ils leur auroit dit de se transporter à l’état-major général de l’armée de la Moselle pour lui rendre le même compte, ce qu’ils auroient fait; et à l’instant un des chef auroit demandé que lesdit assignat lui soit remis, ce qu’il auroit fait; et le tout derechef transporté vers lesdits représentent, a vu le susdit chef de l’état-major; il leur auroit dit que cela suffisoit et que, comme le susdit officier étoit nécessaire pour l’armé, et que nous dressions procès-verbal des fait, qu’il nous déchar-geroit. En conséquence, arrêtons que le[s] susdits fait seront relaté en notre registre et qu’expéditions de la présente arrêté leur sera présenté. Fait et arrêté en séance les susdits jour et an, et ont signé les di membres sen désemparer. Libre Granthil, Audenelle, Aupach, Leclerc, Arnoult, Vigneron, Wagner, Cuvillier, Albert Bréon, Ledeker. Pour copie conforme à l’original, Audenelle( secrétaire ). Séance du 22 thermidor l’an 2e de la République françoise une et indivisible et démocratique. En laditte séance, y nous a été renvoyé l’officier autrichien, de Sierck, où il avoit été conduit par ordre des représentant du peuple; et de suittes nous lui aurions fait paraffer avec nous les 5 775 livres de faux assignat dont ledit officier étoit porteur, et avons lâchez un mandat d’amener devant le directeur du juré pour être poursuivy comme au cas appartiendra. Fait et arrêté en ladittes séance les susdit jours et an, et ont signé lesdits membres sen désemparer. Libre-Granthil, Audenelle, Leclerc, Aupach, Breon, Cuvillier, Wagner et une signature illisible. N° 7 Pièces relatives à Bissy et Bricard détenus, ce dernier arbitrairement, par le représentant Hentz. Réclamations de détenus auquel la société croit devoir par justice accorder son intérêt et dont l’une est l’effet de l’impétuosité despotique de Hentz. Vérité, liberté, égalité, fraternité. La République ou la mort ! Frères, il est douloureux de trouver des coupables et il est malheureux d’avoir à se plaindre de l’abus de pouvoir d’un de ses mandataires. Se soumettre avec résignation à la tyrannie est l’action d’une âme basse et d’un esclave. Prévenir le mal et avoir le courage de résister à la force usurpatrice c’est le devoir de l’homme et du républicain. Après les vaines instances du comité de surveillance de cette commune pour obtenir l’exécution des lois contre lesquelles je suis incarcéré ici, je cru nécessaire de rappeller moi-même aux représentans Hentz, Bourbotte et Goujon les devoirs des fonctions sacrés dont la confiance publique les a revêtu. En conséquence, le 16 du courant je leur écrivit une lettre (qui n’étoit point cachetée) que le citoyen Antoine Bricard, gendarme de la Ie division organisée à Lunéville, compagnie de Mortier, au dépôt de Thionville, eut la complaisance de