PAIS DE SOULE. CAHIER Des plaintes, doléances et très-humbles remontrances que le clergé du pays et vicomté de Soûle remet à son député pour être présenté au Roi dans l'assemblée nationale du royaume, à Versailles (1). Le clergé du pays de Soûle remercie très-humblement le Roi de la bonté qu’il a eue de rendre aux curés de son royaume le droit que leur accordait leur antique institution, en les appelant aux assemblées générales du royaume; plus près de la classe malheureuse des sujets de Sa Majesté et toujours occupés de leurs maux, ils les feront mieux connaître au Roi et à la nation qui s’empresseront d’y porter remède. Ce sera un moyen pour augmenter la confiance des peuples en leurs pasteurs, et la religion, qui est le plus solide appui du trône, reprendra tous ses droits dans les cœurs des fidèles. Nous chargeons notre député de faire nos représentations au Roi et à la nation assemblée : 1° Sur l’intérêt de la religion et du clergé de France ; 2° Sur l’intérêt général du royaume; 3° Sur l’intérêt particulier du pays et du clergé de Soûle. INTÉRÊT DE LA RELIGION ET DU CLERGÉ DE FRANCE. Art. 1er. Que la religion catholique, quia donné de si grands princes à la France et procuré tant de bien à l’Etat, soit la seule professée publiquement dans tout le royaume. Art. 2. Que comme sans bonnes mœurs, l’homme ne peut être fidèle ni à son Dieu ni à son souverain, il soit ordonné à tous les officiers chargés de la police, de poursuivre avec toute la sévérité des lois les personnes qui mènent publiquement une conduite scandaleuse. Art. 3. Que rien ne contribuant plus à la corruption des mœurs et n’entraînant à de plus grands désordres que la passion du jeu, les anciennes ordonnances contre les jeux défendus soient renouvelées, et qu’il soit ordonné à tous les officiers chargés de la police de veiller à leur exécution sous peine de 1,000 livres d’amende contre ceux desdits officiers qui seront convaincus de négligence sur cette partie essentielle de leurs devoirs. Art. 4. Qu’il y aura des conciles provinciaux tous les cinq ans, où la loi, bien interprétée, mieux entendue, deviendra plus utile, et que la discipline ecclésiastique du diocèse d’Oleron sera réglée dans un synode tenu à cette fin, dans le plus court délai possible, pour mettre de Tuniformité dans la conduite des ministres, et qu’on ne pourra jamais y faire aucun changement que dans un synode subséquent (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. Art. 5. Qu’il soit ordonné aux officiers de police de redoubler de vigilance pour faire respecter les ordonnances qui nous promettent le silence et la tranquillité aux cabarets pendant les dimanches et fêtes, même les jours ouvrables, et que le jeu de cartes y soit défendu, comme préjudiciable à l’intérêt public. Art. 6. Que le droit de prévention ne puisse être exercé que deux mois après la vacance des bénéfices. Art. 7. Que l’article 14 de l’édit de 1768, qui prive les curés des dîmes novales, soit révoqué. Art. 8. Que tout corps ayant essentiellement le droit de s’assembler pour s’occuper de ses intérêts, celui des curés puisse le faire quand il le croira nécessaire, sous la présidence de l’évêque diocésain, et sur son refus constaté, sous celle du plus ancien d’entre eux. Art. 9. Que la déclaration du Roi du 15 décembre 1695 qui autorise les évêques dans le cours de leurs visites, et sur les procès-verbaux qu’ils en dressent, à envoyer au séminaire, pour l’espace de trois mois, les curés pour descausesgra-ves, mais qui ne méritent pas une instruction judiciaire, soit retirée. Art. 10. Qu’ils ne puissent pas non plus s’enquérir publiquement de la conduite des curés et des prêtres desservants. Art. 11. Que, conformément à la déclaration du Roi du 24 mai 1724, il y ait dans chaque paroisse un ou deux maîtres d’école ; que leurs gages soient payés par les communautés et qu’ils ne puissent jamais exercer leurs fonctions sans l’approbation ecclésiastique, ni être maintenus en vertu de l’autorité séculière. Art. 12. Que les fondations pieuses ne soient plus assujetties au droit d’amortissement. Art. 13. Que cette règle de la chancellerie : Re-gularia regularibus, soit supprimée. Art. 14. Qu’étant dangereux que le droit de nommer à des bénéfices ne puisse être exploité par les protestants, qu’au détriment de la religion, il soit ordonné que tous les titres qui appartiendront aux non catholiques rentrent dans la collation des ordinaires. Art. 15. Qu’en conformité de ce qui fut déeidé dans le concile de Trente, on ne puisse faire décerner des monitoires que pour des matières graves et trouvées telles par l’évêque. Art. 16. Que les curés soient en droit de demander une maison presbytérale , avec grange et jardin. Art. 17. Que toute stipulation d’intérêt soit défendue comme usuraire, lorsque c’est un pur prêt et que cela ne soit permis que lorsqu’il y aura aliénation du principal. INTÉRÊT GÉNÉRAL DU ROYAUME. Art. 18. Que les Etats généraux fassent rédiger un code national où toutes les lois de la constitution soient rapportées et rendues publiques. Art. 19. Que l’ordre qui vient d’être établi pour 775 [États gén. 4789. Cahiére,} ARCHIVES les assemblées nationales soit consacré par «ne loi à jamais inviolable. Art. 20. Que, sous aucun prétexte, il ne soit porté atteinte au droit de propriété. Art. 21. Qu’il y ait une répartition égale de toutes les charges entre les trois ordres en proportion de leurs revenus. Art. 22. Que toutes les impositions du Roi soient directement versées au trésor royal pour qu’elles y paraissent sans diminution. Art, 23. Que rien ne paraissant plus propre à alimenter l’esprit du commerce qu’une circulation libre de toute espèce de marchandises, dans l’intérieur du royaume, on ne puisse établir les bureaux de la ferme qu’aux frontières. Art 24. Que la dette nationale soit consolidée et que le compte des finances soit chaque année rendu public. Art. 25. Que la liberté individuelle soit sous la protection des lois, et que l’usage des lettres de cachet ne soit permis que dans des cas privilégiés ; qu’à cet effet toutes prisons et maisons de force soient ouvertes aux officiers de tribunaux pour se les faire représenter. Art. 26. Que les agents généraux, comme étant les défenseurs exercés des droits du clergé, aient voix délibérative à l’assemblée des trois ordres de l’Etat, et que l’un d’eux soit du nombre des curés. Art. 27. Que l’administration des hôpitaux soit principalement confiée au clergé. Art. 28. Que les formes judiciaires tant du civil que du criminel soient simplifiées, et qu’il soit ordonné que toute affaire criminelle sera jugée pour le plus tard dans l’espace d’un an, à peine contre les officiers chargés de l’expédition, passé ce délai, de répondre en propre et solidairement des frais de l’instruction et de la nourriture des prisonniers. Art. 29. Que le droit de contrôle soit fixé, et que l’arrêt du 2 septembre 1760 concernant les baux des biens et revenus des bénéficiers et autres gens de mainmorte, soit retiré. Art. 30. Que la tranquillité du royaume demandant que la puissance souveraine soit toujours et en tous temps et lieux, en activité, les parlements continuent à être les dépositaires des lois et de leur exécution. INTÉRÊTS PARTICULIERS DU PAYS ET CLERGÉ DE SOULE. Art. 31. Après avoir manifesté son vœu pour l’établissement d’un ordre fixe dans tout le royaume, le clergé du pays de Soûle doit s’occuper de l’intérêt particulier des trois ordres de la province. Nous sommes pays de franc-alleu naturel et d’origine, et nous chargeons notre député de réclamer avec instance de la justice du Roi la confirmation de tous les privilèges, franchises et immunités du pays de Soûle. Art. 32. Nous demandons que, suivant la constitution, toutes les causes civiles et criminelles soient portées en première instance devant les juges naturels du pays. Art. 33. Il sera encore représenté à Sa Majesté que cette petite province, abandonnée pour ainsi dire à ses propres forces, a plus de besoin que toute autre partie du royaume de protection et de secours pour améliorer son sort. Art. 34. Que nous la supplions d’accorder à notre tribunal, avec trois juges en activité, le droit de juger souverainement jusqu’à concurrence de 100 livres. Art. 35. Que cette faveur et la conservation de PARLEMENTAIRES [Pays de Soute.] ses anciennes franchises contribueront au bien du pays, qu’elles encourageront l’agriculture, réveilleront l’industrie et vivifieront ce district isolé, dénué aujourd’hui des moyens d’opérer cette heureuse révolution. Art 36. Que les jurats du pays de Soûle aient la police, même le droit de permettre l’enterrement des cadavres que l’on pourrait trouver, après en avoir constaté le genre de mort, assisté d’un chirurgien, et qu’ils puissent procéder à l’apposition des scellés, à l’ouverture des successions et autres cas urgents. Art. 37. Que, dans le chapitre d’Oleron, il y ait deux prébendes canoniales affectées pour les prêtres de Soûle qui auront travaillé au moins dix ans dans le ministère. Art. 38. Que le droit de vacat soit supprimé. Art. 39. Que le curé qui fait la desserte d’une paroisse, en ait tout le temporel. Art. 40. La prémice est un droit qui fut établi lors de l’inféodalité des dîmes pour la subsistance des curés : on a contrarié l’objet de son institution chaque fois qu’on l’a appliquée à d’autres usages, comme pour des sacristains et des fabriques ; ainsi il est demandé qu’elle soit rendue aux curés-Art. 41. Que la construction d’un quai dans le quartier du Pont, de la ville de Mauléon, projeté, et autres établissements, n’aient point lieu, à cause de la grande dépense que cela occasionnerait et l’impossibilité où se trouve le pays d’y contribuer. Art. 42. Que l’on déroge à l’article 1er de la coutume, titre des indications , qui introduit la répudiation, et que le délai de la prescription soit fixé à l’instar de la Navarre. Art. 43. Que le pays ne paye plus les gages du gouverneur. Art. 44. Sa Majesté sera suppliée d’abolir encore un abus d’autant plus intolérable, qu’il ne peut devoir son origine qu’à l’adulation et à la complaisance de quelques curés des siècles passés, celui d’encenser dans les églises paroissiales et de donner l’eau bénite au patron et à sa famille. Art. 45. Que la communauté des Capucins de Mauléon, comme étant très-utile et la seule de la province, soit maintenue. Art. 4fi. Se plaindre de ce que les curés ni les vicaires ne jouissent pas de la congrue fixée par la déclaration de 1782, pour les premiers, à 700 livres, et pour les vicaires, à 350, cette loi étant demeurée sans exécution, on ne sait par quelle fatalité. Art. 47. Demander une nouvelle augmentation de leur congrue conforme à celle qui sera fixée pour le reste du royaume, attendu que ce qui leur est attribué par cette loi n’est pas suffisant pour leur entretien. Art. 48. Depuis l’établissement des communes, on distingue dans le royaume trois ordres : le clergé, la noblesse et le tiers ; par un abus dangereux, les Etats de Soûle qui, pour leur province, sont l’image et la représentation des Etats généraux du royaume, ne sont formés que de deux ordres, la noblesse et le tiers. Le clergé, quoique le premier ordre de l’Etat, n’y assiste point faute d’un règlement pour le rang qui devrait lui appartenir, et cet abus qui contrarie la constitution de la monarchie, doit nécessairement être réformé; en conséquence, nous supplions Sa Majesté d’ordonner qu’à l’avenir, le clergé du pays de Soûle sera en droit d’assister à Rassemblée générale dudit pays, et qu’en conformité de la rubr. 5 de la coutume, il y formera une chambre particulière. 776 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES Art. 49. Si, aux Etats généraux, on propose de voter par tête ou par ordre, le député est invité à peser les avantages ou les inconvénients de cette forme de délibérer, le clergé s’en rapportant à son honneur et à sa prudence sur le parti qu’il devra adopter. Art. 50. Et après que dans l’assemblée de la nation il aura été statué sur les articles ci-dessus, notre député pourra voter pour les impôts qui seront jugés nécessaires et concourir à l’amélioration de toutes les parties d’administration et à la réforme de tous les abus : nous lui donnons tous les pouvoirs nécessaires à cet égard; cependant, si l’on propose de porter quelque atteinte aux propriétés territoriales du clergé ou à ses privilèges, notre député sera tenu de nous en donner avis pour recevoir nos instructions ultérieures. Et le présent cahier a été arrêté par l’assemblée du clergé dudit pays de Soûle le 1er juillet 1789. Ainsi signé ne varietur, J. -B. -A., évêque d’Ole-ron ; Etchegouhen, commissaire; Darches, commissaire ; Chuhando, commissaire ; Doilher, commissaire; Jaureguiberry, commissaire; Sibas, commissaire ; Garricaburu, prieur-curé ; d’Or-diarp ; d’Etcheverry, prêtre, commissaire, et Ep-plierre, curé de Cherante, secrétaire. Collationné. Signé Epplierre, secrétaire, curé de Cherante. Signé Meharon de Maytier. CAHIER Des doléances de la noblesse du pays et vicomté de Soûle (1). Un Roi, le père de son peuple, préfère à toute autre gloire celle d’être le restaurateur de l’Etat ; il nous appelle au secours de la patrie. Pour répondre à des vues si dignes de notre amour et de notre reconnaissance, les sacrifices ne nous coûteront pas ; nous contribuerons autant que nos forces pourront le permettre au rétablissement des finances. Nous déclarons que nous renonçons à tout privilège, à toute exemption pécuniaire pour la contribution aux charges de l’État, bien persuadés que les autres corps privilégiés en useront de même; nous déclarons en même temps que nous bornons à cela nos sacrifices, et que nous prétendons nous maintenir dans toutes les exemptions et privilèges pécuniaires que doit nous assurer une possession immémoriale et fondée sur les causes les plus légitimes. Nous demandons : Art. 1er. Que les Etats généraux soient convoqués tous les cinq ans. Art. 2. Qu’aucune loi, qu’aucun impôt ne puissent être établis qu’après le consentement des Etats généraux, et que l’enregistrement en soit fait dans les cours. Art. 3. Que, dans chaque assemblée, on commence par examiner si les lois portées dans le assemblées précédentes ont été exécutées; si, dans l’exécution il s’est présenté des inconvénients qui exigent une réforme ; s’il en était résulté l’utilité qu’on s’était promise. Art. 4. Que les Etats provinciaux déjà établis ou ceux qui le seront ne puissent, sous aucun prétexte, sous aucune dénomination, payer de nouveaux impôts, accepter des augmentations (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire, PARLEMENTAIRES > [Pays de Soute.] sur ceux établis, qu’après que les Etats généraux auront consenti pour tout le royaume. Art. 5. Que les impôts soient simplifiés le plus possible. Art. 6. Que l’état de dépense qu’exige chaque département, celui des sommes destinées à la splendeur du trône, celui des sommes nécessaires pour éteindre la dette nationale, soient fixés. Art. 7. Qu’il soit fait des fonds pour récompenser par des pensions le mérite et les talents dans tous les ordres ; qu’on réduise ou qu’on réforme celles qui ne sont qu’un encouragement au luxe ou le prix de la faveur. Art. 8. Que chaque ministre soit responsable à la nation de son administration. Art. 9. Que chaque année il soit rendu un compte public de l’état des finances comme celui de 1781, afin que chaque citoyen puisse y voir ce qu’il doit espérer ou craindre. Art. 10. Que les exactions ou les prévarications dans la perception des impôts soient poursuivies devant les tribunaux ordinaires, sans qu’aucun , tribunal d’attribution puisse les dérober aux lois. Art. 11. Que Sa Majesté soit suppliée d’établir une commission composée de magistrats et de jurisconsultes célèbres pris dans tous les tribunaux du royaume, et cette commission débarrassant et simplifiant les lois civiles, formera un code assez clair pour que chacun puisse prévenir l’application de la loi ; elle réformera le code criminel contre lequel l’humanité réclame ; elle rapprochera les justiciables de leurs juges en restreignant les ressorts trop étendus, en ajoutant à ceux qui ne le sont pas assez, en en créant de nouveaux s’il est nécessaire. Art. 12. Les frais de justice, haussés dans le peu de temps qu’elle a été gratuite, devenus une surcharge accablante depuis qu’elle ne l’est plus, seront réduits. Art. 13. Un supprimera les tribunaux d’exception, et toutes les causes, de quelque nature qu’elles soient, seront portées devant les tribunaux ordinaires. Art. 14. Les suppôts de justice multipliés d’une manière effrayante seront réduits au nombre nécessaire pour le service des tribunaux auxquels ils sont attachés, afin que le repos public ne soit plus troublé. Art. 15. Les salaires seront fixés par des tarifs clairs et précis qui soient à la portée de tout le monde, et leurs exactions sévèrement punies. Art. 16. La liberté de chaque citoyen sera respectée et ne dépendra plus des ordres arbitraires. Art. 17. Chaque citoyen sera sûr de son état ; un militaire ne redoutera plus qu’un ordre arbitraire d’un ministre l’en d épouille ; aucun citoyen n’aura plus à craindre de châtiments que ceux que la loi inflige. Art. 18. L’éducation publique sera perfectionnée et on y maintiendra avec la plus grande attention les principes des mœurs et de la religion. DOLÉANCES PARTICULIÈRES AU PAYS DE SOULE. Art. 1er. La Soûle est un pays de franc-alleu ; cette franchise, établie, dans le premier article de la coutume, appuyée sur plusieurs autres, est le fondement de la constitution quelquefois menacée, mais toujours respectée; cette franchise, nous la mettons sous la sauvegarde des lois, sous la protection du Roi et des Etats généraux, de même que nos privilèges. Art. 2. Ils nous exemptent de quelques-uns des impôts établis dans tout le reste de la France; ils 776 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES Art. 49. Si, aux Etats généraux, on propose de voter par tête ou par ordre, le député est invité à peser les avantages ou les inconvénients de cette forme de délibérer, le clergé s’en rapportant à son honneur et à sa prudence sur le parti qu’il devra adopter. Art. 50. Et après que dans l’assemblée de la nation il aura été statué sur les articles ci-dessus, notre député pourra voter pour les impôts qui seront jugés nécessaires et concourir à l’amélioration de toutes les parties d’administration et à la réforme de tous les abus : nous lui donnons tous les pouvoirs nécessaires à cet égard; cependant, si l’on propose de porter quelque atteinte aux propriétés territoriales du clergé ou à ses privilèges, notre député sera tenu de nous en donner avis pour recevoir nos instructions ultérieures. Et le présent cahier a été arrêté par l’assemblée du clergé dudit pays de Soûle le 1er juillet 1789. Ainsi signé ne varietur, J. -B. -A., évêque d’Ole-ron ; Etchegouhen, commissaire; Darches, commissaire ; Chuhando, commissaire ; Doilher, commissaire; Jaureguiberry, commissaire; Sibas, commissaire ; Garricaburu, prieur-curé ; d’Or-diarp ; d’Etcheverry, prêtre, commissaire, et Ep-plierre, curé de Cherante, secrétaire. Collationné. Signé Epplierre, secrétaire, curé de Cherante. Signé Meharon de Maytier. CAHIER Des doléances de la noblesse du pays et vicomté de Soûle (1). Un Roi, le père de son peuple, préfère à toute autre gloire celle d’être le restaurateur de l’Etat ; il nous appelle au secours de la patrie. Pour répondre à des vues si dignes de notre amour et de notre reconnaissance, les sacrifices ne nous coûteront pas ; nous contribuerons autant que nos forces pourront le permettre au rétablissement des finances. Nous déclarons que nous renonçons à tout privilège, à toute exemption pécuniaire pour la contribution aux charges de l’État, bien persuadés que les autres corps privilégiés en useront de même; nous déclarons en même temps que nous bornons à cela nos sacrifices, et que nous prétendons nous maintenir dans toutes les exemptions et privilèges pécuniaires que doit nous assurer une possession immémoriale et fondée sur les causes les plus légitimes. Nous demandons : Art. 1er. Que les Etats généraux soient convoqués tous les cinq ans. Art. 2. Qu’aucune loi, qu’aucun impôt ne puissent être établis qu’après le consentement des Etats généraux, et que l’enregistrement en soit fait dans les cours. Art. 3. Que, dans chaque assemblée, on commence par examiner si les lois portées dans le assemblées précédentes ont été exécutées; si, dans l’exécution il s’est présenté des inconvénients qui exigent une réforme ; s’il en était résulté l’utilité qu’on s’était promise. Art. 4. Que les Etats provinciaux déjà établis ou ceux qui le seront ne puissent, sous aucun prétexte, sous aucune dénomination, payer de nouveaux impôts, accepter des augmentations (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire, PARLEMENTAIRES > [Pays de Soute.] sur ceux établis, qu’après que les Etats généraux auront consenti pour tout le royaume. Art. 5. Que les impôts soient simplifiés le plus possible. Art. 6. Que l’état de dépense qu’exige chaque département, celui des sommes destinées à la splendeur du trône, celui des sommes nécessaires pour éteindre la dette nationale, soient fixés. Art. 7. Qu’il soit fait des fonds pour récompenser par des pensions le mérite et les talents dans tous les ordres ; qu’on réduise ou qu’on réforme celles qui ne sont qu’un encouragement au luxe ou le prix de la faveur. Art. 8. Que chaque ministre soit responsable à la nation de son administration. Art. 9. Que chaque année il soit rendu un compte public de l’état des finances comme celui de 1781, afin que chaque citoyen puisse y voir ce qu’il doit espérer ou craindre. Art. 10. Que les exactions ou les prévarications dans la perception des impôts soient poursuivies devant les tribunaux ordinaires, sans qu’aucun , tribunal d’attribution puisse les dérober aux lois. Art. 11. Que Sa Majesté soit suppliée d’établir une commission composée de magistrats et de jurisconsultes célèbres pris dans tous les tribunaux du royaume, et cette commission débarrassant et simplifiant les lois civiles, formera un code assez clair pour que chacun puisse prévenir l’application de la loi ; elle réformera le code criminel contre lequel l’humanité réclame ; elle rapprochera les justiciables de leurs juges en restreignant les ressorts trop étendus, en ajoutant à ceux qui ne le sont pas assez, en en créant de nouveaux s’il est nécessaire. Art. 12. Les frais de justice, haussés dans le peu de temps qu’elle a été gratuite, devenus une surcharge accablante depuis qu’elle ne l’est plus, seront réduits. Art. 13. Un supprimera les tribunaux d’exception, et toutes les causes, de quelque nature qu’elles soient, seront portées devant les tribunaux ordinaires. Art. 14. Les suppôts de justice multipliés d’une manière effrayante seront réduits au nombre nécessaire pour le service des tribunaux auxquels ils sont attachés, afin que le repos public ne soit plus troublé. Art. 15. Les salaires seront fixés par des tarifs clairs et précis qui soient à la portée de tout le monde, et leurs exactions sévèrement punies. Art. 16. La liberté de chaque citoyen sera respectée et ne dépendra plus des ordres arbitraires. Art. 17. Chaque citoyen sera sûr de son état ; un militaire ne redoutera plus qu’un ordre arbitraire d’un ministre l’en d épouille ; aucun citoyen n’aura plus à craindre de châtiments que ceux que la loi inflige. Art. 18. L’éducation publique sera perfectionnée et on y maintiendra avec la plus grande attention les principes des mœurs et de la religion. DOLÉANCES PARTICULIÈRES AU PAYS DE SOULE. Art. 1er. La Soûle est un pays de franc-alleu ; cette franchise, établie, dans le premier article de la coutume, appuyée sur plusieurs autres, est le fondement de la constitution quelquefois menacée, mais toujours respectée; cette franchise, nous la mettons sous la sauvegarde des lois, sous la protection du Roi et des Etats généraux, de même que nos privilèges. Art. 2. Ils nous exemptent de quelques-uns des impôts établis dans tout le reste de la France; ils [États gén. 1789. Cahiers.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Pays de Soûle.] 777 sont la récompense de notre fidélité, conservée dans le temps même que nous étions entourés de puissances ennemies ; ils ont encore une cause plus respectable ( res sacra miser), c’est notre pauvreté. Art. 3. La Soûle, située au pied des Pyrénées, n’a qu’une seule ville, Mauléon, sa capitale, qui ne contient que cent cinquante feux et environ 1,000 habitants; elle n a pas une seule manufacture ; son sol est assez fertile, mais chaque année une partie de ses récoltes est enlevée par un torrent qui la traverse; les grêles, les gelées, les brouillards, l’inclémence de l’air détruisent souvent ses espérances; le commerce des bestiaux, presque entièrement détruit en 1774, et pas encore rétabli, est sa seule ressource. Elle veut concourir cependant à la libération de l’Etat dans la proportion de ce qu’elle paye d’impôts, comparé avec ce que payent les “autres provinces du royaume. Elle demande que cette base soit maintenue. Art. 4. La Soûle paye une infinité de petits impôts qui ne paraissent pas être destinés au trésor royal; nous en ignorons l’établissement, l’objet et le terme; ils multiplient les moyens d’exaction; les Etats en ont demandé la suppression â Sa Majesté, leurs plaintes n’ont jamais été répondues. Nous la supplions d’enjoindre à ses ministres de ne pas oublier dans la poussière des bureaux les justes réclamations des provinces, comme leurs prédécesseurs l’ont fait. Art. 5. Notre commerce souffre par les bureaux de péage dont le pays est hérissé ; nous demandons qu’ils soient reculés aux frontières du royaume. Art. 6. Les frais de collecte sont une nouvelle charge ; nous démandons que les sommes levées soient directement versées des mains de notre trésorier au trésor royal. CONTROLE. Art. 7. Le contrôle, sagement établi pour la sûreté des actes, est devenu l’impôt le plus accablant; les tarifs en sont inconnus, ils dépendent uniquement des explications des contrôleurs; nous demandons qu’un tarif clair et précis instruise chacun de ce qu’il doit faire et le dérobe aux interprétations arbitraires et à l’avidité des contrôleurs. Art. 8. Au droit de contrôle on joint celui d’en-saisinement, droit inutile et qui ne peut avoir d’autre objet que d’aggraver le con trôle lui-même; nous en demandons la suppression Art. 9. Les employés, pour prévenir la contrebande, sont peut-être la plus grande surcharge; leur paye entretiendrait une partie considérable de l’armée nationale. Ce corps est le refuge des hommes que l’oisiveté dérobe aux travaux de l’agriculture ou d’autres professions; quelques-uns y cherchent l’impunité; on n’y pas idée des manœuvres qu’ils emploient pour effrayer et rançonner le citoyen, sans respect pour aucune condition; ils ne se soumettent dans leur visite à aucune des règles qui leur sont prescrites ; dérobés aux tribunaux ordinaires par leurs attributions, ils ne redoutent pas que la justice les punisse, et cette, sécurité les rend capables de tout ; ce serait le plus grand bien que quelques expédients sages en débarrassassent la province et la nation. Nous demandons que si ces expédients ne se présentent pas, ils soient soumis, dans l’exercice de leurs fonctions, aux tribunaux ordinaires. Art. 10. Le Roi a des censives et des droits seigneuriaux en Soûle; ils sont encore un prétexte aux exactions de ses fermiers. Le temps de percevoir ces censives est fixé, les fermiers laissent ce temps s’écouler, le grain est consommé, le censitaire n’a plus de quoi les payer en nature, ce fermier exige le prix en argent sur le plus haut pied. Nous demandons que le fermier se présente pour l’échéance de la censive, et dans le cas qu’il ne se présente pas, qu’il n’en puisse exiger le prix que sur le pied des Frelaux aux termes du payement. Art. 11. Les pasteurs de cette province ont des établissements qu’on appelle cayolars aux hautes montagnes; il y a plusieurs siècles que chacun des pasteurs qui avaient de ces établissements fournissait pour la table du châtelain chacun un mouton harrary, et le châtelain payait chaque mouton 6 sous 6 deniers, ce qui, dans ce temps reculé, était la valeur d’un mouton;! aujourd’hui les fermiers exigent ce mouton pour le même prix, à moins que le pasteur ne veuille retenir lemou-ton en donnant souvent 12 ou 15 livres; les fermiers ont fait un droit de ce qui anciennement n’était qu’une simple fourniture. Nous demandons que nos pasteurs soient déchargés de ce mouton harrary et que les cayolars appartenant au tiers-état n’y soient pas plus assujettis que les cayolars appartenant originairement à la noblesse, qui en sont exempts. Art. 12. La Soûle est du gouvernement de Guyenne, le tribunal de la châtellenie royale de Mauléon, et à sa tête un châtelain, dans les temps fort reculés, rendait la justice à Mauléon; ses fonctions alors étaient d’y maintenir le bon ordre et de pourvoir à la défense du pays ; il obtint alors qu’il fût établi un impôt de 3,0Ü0 livres pour son traitement. Get établissement fut accordé au crédit du châtelain de ce temps ; ce châtelain est aujourd’hui sans fonction, il n’est venu qu’un seul instant enSoule; cependant on continue de lever pour lui une somme considérable sans aucun objet. Nous demandons que cet impôt soit supprimé, attendu que, dans tout le reste du royaume, les sénéchaux, châtelains, baillis, etc., n’ont pas de pareils traitements, attendu que leur état n’est qu’un simple titre d’honneur, sans fonction. Art. 13. Chaque année les débordements enlèvent en Soûle non-seulement une partie des récoltes, mais même le sol où elles croissent; quelques travaux pourraient prévenir ces malheurs, mais nous ne sommes pas en état de les faire. Cependant nous payons pour les canaux de Bourgogne et de Picardie, le port de Saint-Jean-de-Luz, et nous accordons des secours que notre situation nous rendrait bien plus nécessaires. Nous demandons d’être déchargés de ces impôts. justice. Art. 14. Nous demandons que le tribunal national appelé la châtellenie royale de Soûle, soit conservé sous le dernier ressort du parlement de Pau, dont l’équité et le désintéressement nous rendent la juridiction précieuse. Nous demandons pour 1a, châtellenie la souveraineté jusqu’à 100 livres, à condition que les jugements seront rendus par trois juges, et le droit que la constitution donne à la noblesse, réservé. Art. 15. De tous les tribunaux d’exception, celui dont l’abolition est la plus demandée dans le royaume, est celui des eaux et forêts ; il est parfaitement inutile en Soûle pour la partie économique qui lui est confiée, c’est une surcharge pour la Soûle, où il établit trois degrés de juridiction pour les causes qui le regardent : 778 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Pays de Soute.] 1° La gruerie unie à la châtellenie royale; %° La chambre des eaux et forêts séante à Pau; 3° Le parlement, chambre des finances; Ce qui triple les frais des procès et viole les privilèges du pays. D’ailleurs les causes attribuées aux eaux et forêts doivent être portées en première instance devant ie juge gruyer, qui est le même que le juge ordinaire. Mais sa juridiction en ces deux ualités n’étant pas la même, le temps des au-iences étant différent, tout cela jette dans les affaires une confusion qui entraîné à gros frais des discussions et des incidents sur la compétence. Nous demandons que le tribunal des eaux et forêts, et par conséquent la gruerie, soient supprimés et que la juridiction ordinaire de la châtellenie rentre dans la connaissance de cette matière ; enfin que le régime des forêts soit attribué aux Etats du pays. Art. 16. Le plus grand bien du peuple est la diminution de procès; de très-petits intérêts, accrus par de très-gros frais, amènent souvent la ruine et les inimitiés des familles. Nous demandons que dans chaque village il soit établi un tribunal domestique, composé de nobles qui y résident et sous la présidence de celui qui a la plus grande directe, du curé et de six habitants choisis parmi les plus capables, lesquels, au nombre de quatre au moins dans les grands villages, et de deux dans les petits, jugeront, les dimanches, après vêpres, toutes les affaires jusqu’à 6 livres et les injures verbales entre gens du commun, toujours sans appel, sans écritures et sans frais. Art. 17. Le pays de Soûle est désolé dans ses juridictions par une foule de praticiens, de suppôts de justice, qui préfèrent cette pernicieuse profession à d’autres professions utiles. Nous demandons que, sur des mémoires des Etats, éclairés par des instructions de MM. les magistrats, le nombre en soit réduit, les salaires modérés par un tarif qui prévienne les perceptions arbitraires ; enfin qu’on diminue cette calamité publique. Art. 18. Les fonctions délicates des arpenteurs exigent la confiance publique, par conséquent la liberté du choix ; plusieurs arpenteurs méritent cette confiance et par leurs capacités, et par la modération de leur taxe. Deux particuliers ont fait créer, il y a quelques années, deux charges d’arpenteurs royaux, offices jusqu’alors inconnus ; ils exigent qu’on s’adresse à eux par préférence dans tout ce qui appartient à leurs fonctions, ils maîtrisent l’opinion publique et gênent la confiance, ils abusent de la nécessité de s’adresser à eux pour fixer à leurs travaux des salaires excessifs. Nous demandons que ces dangereux offices soient supprimés. Art. 19. Les députés ou consuls de nos villages n’ont pas de juridiction ; il faut recourir, à gros frais, aux juges en titre pour la constatation des délits. Nous demandons qu’on donne à ces députés le droit de faire des procédures de constatation et d’arrêter les délinquants. Art. 20. Les malfaiteurs sont presque impunis; ceux qui sont condamnés aux galères en échappent presque toujours et reviennent, par de nouveaux crimes, mériter de nouveaux supplices ; ceux qui sont bannis ne font que changer de théâtre ; ceux qui sont condamnés au fouet perdent le souvenir du châtiment, en même temps que le sentiment de la douleur; dans tous les cas, les peines qu’on leur inflige sont inutiles au bien public et peuvent très-peu pour l’exemple. Nous demandons que tous les condamnés à quelques peines au-dessous de la mort, le soient au travaux publics du pays, un temps proportionné à leur crime. Art. 21. Une disposition de notre coutume accorde au lignager quarante et un ans pour retraite des propres appelées avitins; cette disposition gêne la liberté, nuit au commerce et à l’agriculture. fl y a quelques années que la proposition de corriger ces dispositions fut portée aux Etats, acceptée par la noblesse et rebutée par le tiers; les mémoires respectifs furent envoyés à M. le garde des sceaux ; ils n’ont pas encore été répondus. Nous demandons qu’il y soit statué. ADMINISTRATION. Art. 1er. Nous demandons que les Etats soient autorisés à faire, pour l’amélioration de la chose publique, tels règlements qu’ils jugeront convenables sous l’autorité du Roi, et que ce règlement soit exécuté par provision. Art. 2. Les chevaux en Soûle étaient autrefois connus et estimés sous le nom général de chevaux navarrais ; depuis l’établissement des haras, la race en est presque perdue. Nous demandons que la direction et le régime en soient donnés uniquement aux Etats, dont le règlement, dirigé par les connaissances locales des propriétés, du terrain, des herbages, des facultés, des moyens économiques, opéreront infiniment plus de bien que les connaissances incertaines et les moyens dispendieux de l’administration actuelle. M. de Ruthie, commissaire*inspecteur, a déclaré qu’il n'opinait pas sur cet article. Art. 3. Dans tous les temps ies hautes montagnes ont appartenu au pays ; elles en sont la principale richesse par le nourrissage des bestiaux. Le souverain et ses officiers, comme chefs d’administration, avaient la possession et non pas le droit d’y faire des accensements, de même que dans les communaux de chaque village, pour étendre la population et l’agriculture ; de nouveaux établissements nuiraient à ceux déjà formés et réduiraient le nourrissage des bestiaux. Nous demandons à Sa Majesté de ne plus accorder des accensements. Art. 4. Il y a environ vingt ans que le Roi accorda, à la demande de quelques particuliers dans plusieurs villages, des droits de concessions qui alarmèrent le pays ; il crut y voir ses franchises et ses libertés compromises, il se hâta sans examen d’offrir une rente de 100 livres que le conseil se hâta d’accepter; cette redevance n’avait pas d’objet, et son établissement est une surprise. Nous en demandons la décharge. Art. 5. Par un arrêt du 13 décembre 1781, le Roi fit des règlements tant pour les forêts dépendantes de son domaine de Soûle, que pour les montagnes et communaux du pays. Ges règlements confondent la propriété de ses domaines particuliers avec celle des communaux en général, qui appartiennent au pays. Nous demandons que cet arrêt soit rétracté dans les dispositions qui confondent l’une et l’autre propriété. Art. 6. Ges forêts du Roi n’en conservent que le nom ; ce sont des landes, et les frais de garde et de conservation une charge inutile. Il serait avantageux à Sa Majesté de les vendre ou accen-ser, et les habitants en profiteraient. Et c’est ce que nous demandons. Art. 7. L’expérience nous a appris que l’ancien m (États gén. 4789. Cahiers.) ARCHIVES régime pour les routes était préférable au nouveau établi par l’arrêt du conseil du 6 novembre 1786. Nous demandons que les corvées soient rétablies suivant l’ancien régime, et attendu notre pauvreté, qu’il ne soit ordonné an-cuns travaux publics de pur embellissement ou agrément, que sur la demande des Etats, et que s’il en était ordonné quelques-uns, l’exécution en soit suspendue. Art. 8. On a établi un dépôt de mendicité à Pau ; la Soûle contribue aux frais de cet établissement. Nous demandcms d’en être déchargés, attendu que la mendicité n’en existe pas moins. La sagesse des Etats généraux viendra au secours de l’humanité par des règlements généraux. Artr 9. L’hôpital de Mauléon est établi en faveur des pauvres du pays ; cependant les Etats n’entrent pour rien dans celte administration. Nous demandons que trois administrateurs pris lors des Etats dans la noblesse, le tiers et le clergé s’il y entre, soient ajoutés aux administrateurs actuels. Art. 10. Le port de Bayonne est le plus voisin de la Soûle et le seul dont elle tire des approvisionnements ; depuis que ce port est franc, nous éprouvons une gêne extrême dans l’extraction des marchandises, et notre commerce en souffre. Nous demandons que les choses soient rétablies dans le même état où elles étaient avant l’établissement de la franchise dans ce port. CONSERVATION DES DROITS DE LA NOBLESSE. Art. 1er. En renonçant à quelques-uns de ces privilèges, nous n’avons pas renoncé à nos droits. La coutume de Soûle établit en faveur des censitaires un droit de banalité le plus modéré qui existe dans le royaume; le tiers-état, exalté par les circonstances et sans nous tenir compte de nos sacrifices, au mépris des droits sacrés de la propriété, demande la suppression de ce droit. Nous demandons à y être maintenus de même que dans tous les autres qui appartiennent essentiellement à notre état. Art. 2. Les dîmes sont la possession la plus ancienne et la plus précieuse de la noblesse de Soûle ; elles tiennent pour ainsi dire à la constitution. La noblesse est très-pauvre et ne jouit que de très-peu des droits qui appartiennent à la noblesse dans le reste du royaume. Cette possession a été respectée dans tous les âges jusqu’en l’année 1688; alors elle fut dépouillée des novales; c’était une injustice, elle ne put obtenir qu’elle fût réparée, elle l’a été par l’édit de 1768; cependant aujourd’hui on ose attaquer cette propriété consacrée par tant de siècles. Nous nous bornerons à demander que les dispositions de l’édit du mois de mai 1768 qui regardent les novales aux gros décimateurs, soient maintenues. Art. 3. Il est très-juste que les curés aient de quoi soutenir leur état et que leurs revenus soient proportionnés à leurs travaux vraiment utiles. Mais nous demandons que ce ne soit point aux dépens de nos propriétés; on peut y pourvoir par d’autres moyens souvent proposés, tels que les réunions des cures. Sa Majesté est suppliée de diminuer les frais qui les rendent si difficiles et si dispendieuses, en étendant les pouvoirs de MM. les évêques. Art. 4. L’édit du mois d’août 1768 augmente de 200 livres la portion congrue des curés, et cette augmentation doit être prise sur de très-petites dîmes appartenant à la noblesse et dont elles sont la principale ressource ; la noblesse de Soûle est très-pauvre, et dans les proportions, plus que les PARLEMENTAIRES. (Pays de Soûle.] curés qui ont dans leur état des ressources que la noblesse n’a pas. Nous supplions sa Majesté de ne pas diminuer le médiocre moyen qui nous reste pour son service et celui de la patrie. Les présentes doléances ont été arrêtées définitivement par tous les membres de la noblesse présents, à la pluralité des voix. Ainsi signé : Baron Duhart, président; Iluthie ; Larun ; Sunhary-Gorritepé ; Domeq ; Domeq-Golard; d’Arrogain ; Jaureguiberry ; Menditte; Carrère; d’Arthez la Salle de Sibas; de Saldun; Ha-gon; Jaureguicahar ; d’Abense; Caro; Suhare; d’Arhes ; La Salle; de Lissague-Dubarbier; d’Olhas-sary; Goyheneché-Harismendy ; Duhalt-Irigaray ; Jaurgain; d’Arraing; Roger-d’Espés ; Chuhandô ; Ghuhando de Valin Etchebarne, et le baron de Gherante, secrétaire. Notre député votera par ordre, et, outre les objets compris dans le présent cahier, aura des pouvoirs généraux et suffisants pour proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner les besoins de l’État, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, la prospérité générale du royaume et le bien de tous et chacun des sujets dû Roi ; il ne sera borné que pour ce qui pourrait compromettre les franchises et libertés des pays en général, et les droits et privilèges de la noblesse en particulier. Ainsi signé : D’Abense, secrétaire. Ne varietur, signé Meharon de Maytier. Collationné. Signé d’Abense, secrétaire CAHIER Des plaintes et demandes du tiers-état de Soûle, réduit conformément au règlement de Sa Majesté du 21 janvier 1789, pour être remis aux députés de cet ordre et par eux porté aux États généraux convoqués à Versailles par lettre du Roi du 19 février 1789 (J). Art. 1er. Nous voulons que nos députés opinent aux Etats généraux par tête et non par ordre ; nous leur recommandons néanmoins de se soumettre à l’opinion contraire, si elle prévaut. Art. 2. Que la liberté individuelle des citoyens soit sous la sauvegarde de la loi et de la justice. Art. 3. Que l’usage des lettres de cachet soit aboli comme contraire à la liberté naturelle, et que s’il est des cas d’exception dans l’intérêt de la famille, ou de la sûreté publique, ces fcas soient exjDrimés par une loi d’une manière claire et précise. Art. 4. Que dans tous les cas toute personne qui aura été privée de sa liberté soit remise dans les vingt-quatre heures à ses juges naturels, et qu’il soit permis de prendre à partie celui qui aura donné ordre de l’arrêter. Art. 5. Que les États généraux soient priés de donner l’attention la plus sérieuse pour connaître l’état des finances, les causes qui ont amené la dette nationale les moyens d’y remédier, sans charger le peuple d’aucun nouvel impôt, et ceux qui sont les plus efficaces pour prévenir un désordre de l’espèce. Art. 6. Que tout nouvel impôt ne pourra être établi qu’avec le consentement de la nation et pour un terme limité, et qu’il cessera d’être levé à l’extinction de la dette nationale. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives dé l’Empire. m (États gén. 4789. Cahiers.) ARCHIVES régime pour les routes était préférable au nouveau établi par l’arrêt du conseil du 6 novembre 1786. Nous demandons que les corvées soient rétablies suivant l’ancien régime, et attendu notre pauvreté, qu’il ne soit ordonné an-cuns travaux publics de pur embellissement ou agrément, que sur la demande des Etats, et que s’il en était ordonné quelques-uns, l’exécution en soit suspendue. Art. 8. On a établi un dépôt de mendicité à Pau ; la Soûle contribue aux frais de cet établissement. Nous demandcms d’en être déchargés, attendu que la mendicité n’en existe pas moins. La sagesse des Etats généraux viendra au secours de l’humanité par des règlements généraux. Artr 9. L’hôpital de Mauléon est établi en faveur des pauvres du pays ; cependant les Etats n’entrent pour rien dans celte administration. Nous demandons que trois administrateurs pris lors des Etats dans la noblesse, le tiers et le clergé s’il y entre, soient ajoutés aux administrateurs actuels. Art. 10. Le port de Bayonne est le plus voisin de la Soûle et le seul dont elle tire des approvisionnements ; depuis que ce port est franc, nous éprouvons une gêne extrême dans l’extraction des marchandises, et notre commerce en souffre. Nous demandons que les choses soient rétablies dans le même état où elles étaient avant l’établissement de la franchise dans ce port. CONSERVATION DES DROITS DE LA NOBLESSE. Art. 1er. En renonçant à quelques-uns de ces privilèges, nous n’avons pas renoncé à nos droits. La coutume de Soûle établit en faveur des censitaires un droit de banalité le plus modéré qui existe dans le royaume; le tiers-état, exalté par les circonstances et sans nous tenir compte de nos sacrifices, au mépris des droits sacrés de la propriété, demande la suppression de ce droit. Nous demandons à y être maintenus de même que dans tous les autres qui appartiennent essentiellement à notre état. Art. 2. Les dîmes sont la possession la plus ancienne et la plus précieuse de la noblesse de Soûle ; elles tiennent pour ainsi dire à la constitution. La noblesse est très-pauvre et ne jouit que de très-peu des droits qui appartiennent à la noblesse dans le reste du royaume. Cette possession a été respectée dans tous les âges jusqu’en l’année 1688; alors elle fut dépouillée des novales; c’était une injustice, elle ne put obtenir qu’elle fût réparée, elle l’a été par l’édit de 1768; cependant aujourd’hui on ose attaquer cette propriété consacrée par tant de siècles. Nous nous bornerons à demander que les dispositions de l’édit du mois de mai 1768 qui regardent les novales aux gros décimateurs, soient maintenues. Art. 3. Il est très-juste que les curés aient de quoi soutenir leur état et que leurs revenus soient proportionnés à leurs travaux vraiment utiles. Mais nous demandons que ce ne soit point aux dépens de nos propriétés; on peut y pourvoir par d’autres moyens souvent proposés, tels que les réunions des cures. Sa Majesté est suppliée de diminuer les frais qui les rendent si difficiles et si dispendieuses, en étendant les pouvoirs de MM. les évêques. Art. 4. L’édit du mois d’août 1768 augmente de 200 livres la portion congrue des curés, et cette augmentation doit être prise sur de très-petites dîmes appartenant à la noblesse et dont elles sont la principale ressource ; la noblesse de Soûle est très-pauvre, et dans les proportions, plus que les PARLEMENTAIRES. (Pays de Soûle.] curés qui ont dans leur état des ressources que la noblesse n’a pas. Nous supplions sa Majesté de ne pas diminuer le médiocre moyen qui nous reste pour son service et celui de la patrie. Les présentes doléances ont été arrêtées définitivement par tous les membres de la noblesse présents, à la pluralité des voix. Ainsi signé : Baron Duhart, président; Iluthie ; Larun ; Sunhary-Gorritepé ; Domeq ; Domeq-Golard; d’Arrogain ; Jaureguiberry ; Menditte; Carrère; d’Arthez la Salle de Sibas; de Saldun; Ha-gon; Jaureguicahar ; d’Abense; Caro; Suhare; d’Arhes ; La Salle; de Lissague-Dubarbier; d’Olhas-sary; Goyheneché-Harismendy ; Duhalt-Irigaray ; Jaurgain; d’Arraing; Roger-d’Espés ; Chuhandô ; Ghuhando de Valin Etchebarne, et le baron de Gherante, secrétaire. Notre député votera par ordre, et, outre les objets compris dans le présent cahier, aura des pouvoirs généraux et suffisants pour proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner les besoins de l’État, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, la prospérité générale du royaume et le bien de tous et chacun des sujets dû Roi ; il ne sera borné que pour ce qui pourrait compromettre les franchises et libertés des pays en général, et les droits et privilèges de la noblesse en particulier. Ainsi signé : D’Abense, secrétaire. Ne varietur, signé Meharon de Maytier. Collationné. Signé d’Abense, secrétaire CAHIER Des plaintes et demandes du tiers-état de Soûle, réduit conformément au règlement de Sa Majesté du 21 janvier 1789, pour être remis aux députés de cet ordre et par eux porté aux États généraux convoqués à Versailles par lettre du Roi du 19 février 1789 (J). Art. 1er. Nous voulons que nos députés opinent aux Etats généraux par tête et non par ordre ; nous leur recommandons néanmoins de se soumettre à l’opinion contraire, si elle prévaut. Art. 2. Que la liberté individuelle des citoyens soit sous la sauvegarde de la loi et de la justice. Art. 3. Que l’usage des lettres de cachet soit aboli comme contraire à la liberté naturelle, et que s’il est des cas d’exception dans l’intérêt de la famille, ou de la sûreté publique, ces fcas soient exjDrimés par une loi d’une manière claire et précise. Art. 4. Que dans tous les cas toute personne qui aura été privée de sa liberté soit remise dans les vingt-quatre heures à ses juges naturels, et qu’il soit permis de prendre à partie celui qui aura donné ordre de l’arrêter. Art. 5. Que les États généraux soient priés de donner l’attention la plus sérieuse pour connaître l’état des finances, les causes qui ont amené la dette nationale les moyens d’y remédier, sans charger le peuple d’aucun nouvel impôt, et ceux qui sont les plus efficaces pour prévenir un désordre de l’espèce. Art. 6. Que tout nouvel impôt ne pourra être établi qu’avec le consentement de la nation et pour un terme limité, et qu’il cessera d’être levé à l’extinction de la dette nationale. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives dé l’Empire. 780 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Pays de Soûle.] Art. 7. Qu’il y ait une égalité parfaite dans la répartition des impôts de toute espèce et de la corvée, entre les trois ordres, sans exception des privilégiés ou non privilégiés, et qu’ils soient payés dans les lieux où les biens sont situés, de quelque nature que ces biens puissent être. Art. 8. Que le compte des finances soit rendu public chaque année par la voie de l’impression, et adressé aux Etats ou assemblées de province. -Art. 9. Que Sa Majesté soit suppliée de conserver le directeur actuel des finances, que son mérite, ses vertus et ses talents ont rappelé à la confiance du plus auguste monarque. Art. 10. Qu’il ne soit accordé aucune pension de retraite aux ministres qu’après un examen de leur administration et lorsqu’ils ont bien et fidèlement servi le Roi et l’Etat, et que, dans le cas contraire, ils soient déclarés responsables de leur administration, poursuivis et jugés selon les lois. Art. 11. Que ce pays soit déchargé des impositions accessoires connues sous la dénomination des offices municipaux, canaux de Bourgogne et de Picardie, jaugeurs et inspecteurs aux boissons et boucheries, dont les causes n’existent plus. Art. 12. Que tous les impôts dont la province se trouve actuellement surchargée seront abolis à l’extinction de la dette nationale, attendu qu’elle est exempte de tous impôts, tailles et autres subsides, en vertu des lettres patentes du mois de novembre 1643, d’un arrêt du conseil d’Etat du 21 juin 1729 et des lettres patentes du 21 juillet suivant, confirmatives des anciens privilèges dont elle a joui. Art. 13. Que si, après la vérification de l’état des finances, les Etats généraux reconnaissent qu’il est nécessaire d’établir une augmentation d’im-ôts,nos députés sont chargés d’offrir une contri-ution proportionnelle à l’état, actuel de nos impositions. Art. 14. Que toutes les impositions soient versées directement au trésor royal par les trésoriers des provinces. Art. 15. Que les membres du tiers soient indistinctement admis aux emplois civils et militaires ainsi qu’aux dignités ecclésiastiques, et que le mérite et les talents soient la seule règle à suivre pour les récompenses et les promotions. Art. 16. Que tous les pacs et prémices sur la portion du propriétaire et du cultivateur soient abolis, sans préjudice aux possesseurs de la pré-mice d’en demander le remplacement sur la dîme. Art. 17. Que la semence des grains soit prélevée sur le total des fruits avant la perception de la dîme. Art. 18. Que la dîme des treilles et des hautes branches, dans la contenance d’un arpent de terre, ne pourra être demandée en conformité de la jurisprudence de Bordeaux, dont la Soûle a ressorti anciennement et n’a été réunie au parlement de Navarre qu’à condition qu’elle serait maintenue dans ses us et coutumes et privilèges, et que pareillement tout droit de dîme sur le eharnage soit aboli. Art. 19. Que la dîme des terres défrichées depuis la déclaration du 13 août 1766, après l’expiration des quinze années d’exemption, soit remise pour encourager les nouveaux cultivateurs, exciter le goût de tous les citoyens dans l’agriculture, procurer l’abondance des grains et faire cesser à jamais la faim cruelle qui dans ce moment ravage tout le royaume. Art. 20. Qu’il soit permis aux habitants de Soûle de semer du tabac, cette liberté leur ayant été interdite il y a environ soixante ans, contre le privilège dont ils avaient éternellement joui jusqu’alors, à l’exemple du pays deLabour,qui, à la même époque, reçut une pareille défense et qui postérieurement a été réintégré dans la première franchise. Art. 21 . Que la franchise du port de Bayonne soit abolie, parce qu’elle occasionne les plus grands maux aux pays circonvoisins, les habitants qui s’approvisionnaient dans cette ville devant tirer de Bordeaux et d’autres endroits ce que ce port leur fournissait avant la franchise. Art. 22. Que toutes les fermes générales soient mises en régie, les employés et tous les autres préposés renvoyés aux arts et emplois dont ils furent distraits, et les bureaux reculés aux frontières sous la garde des invalides. Art. 23. Que les foraines, péages et autres droits bursaux, qui mettent des entraves à la circulation des marchandises d’une province à l’autre, soient abolis, en maintenant spécialement les Souletins dans l’exemption de la foraine à eux accordée par des lettres patentes du 24 novembre 1554 et la réponse faite par Henri second, roi de Navarre, le 8 novembre 1552, àlasupplique des Etats de cette province. Art. 24. Que la marque des cuirs soit abolie, parce qu’elle tourne en surcharge sur le peuple, qu’elle gêne le commerce et que les préposés commettent souvent des fraudes pour rançonner les misérables. Art. 25. Que le droit de centième denier sur les immeubles soit supprimé et aboli. Art. 26. Que les droits de contrôle des actes de notaire soient abolis, et au cas que sa Majesté ne jugeât pas à propos d’accorder cette faveur, elle sera suppliée de les réduire au seul droit principal ; et comme ces droits sont plus grevants pour les pauvres, en ce qu’ils ne sont perçus au-dessus de 10,000 livres que sur le pied de vingt sous par 1,000 livres et que jusqu’à ce taux l’on perçoit 10 sous par 100 livres de principal, le droit d’insinuation, pour quelque objet que, ce soit, n’étant que de 50 livres, il soit établi une égalité parfaite dans la perception de ces droits; qu’enfin il y ait un tarif clair et précis qui fixe invariablement ces perceptions, et que toutes les contestations qui pourront naître à ce sujet soient portées devant les juges ordinaires. Art. 27. Que le droit d’ensaisinement soit supprimé. Art. 28. Que les archevêques et évêques, qui possèdent des revenus immenses, soient réduits à une rente honnête, telle que la décence et la dignité de leur état comporte ; que le surplus soit employé à l’extinction de la dette nationale, et ensuite à la diminution des impôts sur la partie la plus indigente du peuple, et qu’ils soient obligés de résider dans les lieux de leurs bénéfices. Art. 29. Que toutes les abbayes, les monastères rentés et les chapitres qui sont inutiles au Roi et à l’Etat soient supprimés, en réduisant chaque individu à une pension viagère telle que leur état exige, et les revenus qui écherront à leur décès, employés à suppléer le déficit, et ensuite à la diminution des impôts. Art. 30. Que les vêtés particuliers de la Soûle soient abolis, à moins qu’ils ne soient clos et fermés en conformité du procès-verbal de MM. .de Sève et de Froidour et de l’arrêt du conseil du 17 juillet 1677 qui l’a homologué. Art. 31. Que comme les vêtés d’Errexu, de Lam-bare et de Tibarrène sont des landes portant le nom de bois, sans qu’il y ait pour ainsi dire d’arbres, et qu’ils sont plus à charge qu’à profit ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Pays de Soûle. J 781 [États gén. 1789. Cahiers.] au Roi, les frais de garde absorbant au delà des revenus qu’ils rendent, et que la liberté du parcours est d’une nécessité absolue aux habitants du pays, Sa Majesté sera suppliée de vouloir les inféoder audit pays, sous telle redevance en argent que sa bonté fixera, à condition qu’ils demeureront ouverts et patents pour la dépaissance des bestiaux. Art. 32. Que l’imposition de mille écus, qui se lèvent sur le pays pour les gages du capitaine châtelain, sous le titre de gouverneur, soit à jamais supprimée et abolie, parce que le pays de Soûle fait partie du département de la (iuyenne; que le capitaine châtelain n’a d’autre pouvoir que d’administrer la justice suivant les l’arti clés 1er et 2 du titre II de la coutume, qu’il ne se mêle d’aucune administration politique, ni d’aucune affaire du pays, et qu’enfin le capitaine qui s’arrogea le premier la qualité de gouverneur, en imposa à ce peuple faible et crédule pour se faire créer des gages. Art. 33. Que les appointements du major des milices soient supprimés et abolis, un officier qui n’est pas en exercice ne devant' pas avoir de gages. Art. 34. Que le présent pays soit dispensé du payement de la somme de 600 livres qui se lèvent, en conséquence d’une lettre ministérielle, pour la table du lieutenant du Roi pendant la tenue des Etats. Art. 35. Qu’il ne soit plus permis au tiers-état de consentir aucune levée provinciale qu’au préalable chaque député n’ait consulté les bourgs et les déguéries sur les motifs déterminants de l’impôt à lever et reçu de leur part un mandat ad hoc suivant l’ancien usage. Art. 36. Que les charges de syndic et trésorier-receveur soient à jamais séparées comme incompatibles ; que chaque ordre nomme son syndic sans aucun concours mutuel pour un terme de trois ans. Art. 37. Que tous les haras du pays et les levées qui se font pour leur administration et entretien soient supprimés et abolis, une expérience funeste n’ayant que trop fait sentir que cet établissement a été le fléau destructeur des juments de cette province par la gêne et les difficultés qu’on essuie pour le saut, par la disette du foin qui oblige les propriétaires à les jeter, l’hiver aussi bien que Pété, dans les vacants, par la défectuosité de la nourriture qui n’est pas assez substantielle pour nourrir de grandes juments étrangères, et qu’enfm leurs productions, loin de correspondre à l’espèce qu’on a inutilement essayé de changer, se ressentent de la nature du soi et du climat et deviennent indigènes. Art. 38. Que les habitants de Soûle soient maintenus dans leurs privilèges et propriétés ; l’article 1er de la coutumeles déclare francs et de franche condition-, l’article 2 veut que si quelqu’un porte coup à ce privilège, le seigneur Roi doit les garder en franchise ; l’article 3 porte aue les habitants de Soûle ont le port d’armes ; �article 4 et l’article 5 portent que les habitants de chaque paroisse et des déguéries peuvent s’assembler toutes les fois qu’ils le jugeront convenable, pour traiter des affaires communes, disposer et régler la police de bois et de vacants, rendre des statuts et ordonnances tels qu’ils jugeront convenable pour l’avantage commun. Art. 39. Que la rente de 100 livres, à laquelle les habitants furent assujettis par arrêt du conseil du 8 août 1776 pour le rachat forcédes droits des seigneurs, que le Roi rendit à plusieurs particuliers, soit supprimée et abolie, comme une surcharge qui a aggravé le sort du peuple, tandis qu’avant il ne payait ni ne devait rien au Roi, à raison de la seigneurie, à cause de la nature de sa constitution franche et libre. Art. 40. Que Sa Majesté sera suppliée de maintenir les affiévemenls généraux des déguéries et communautés de ce pays. Art. 41. Que le Roi soit supplié de convertir en argent les redevances des différentes espèces qu’il a en Soûle, sur un pied modéré, à la charge par les redevables d’en payer le prix au receveur proposé qui enversera le montant au trésor royal. Art. 42. Que le pays soit déchargé du mouton harrary que le Roi perçoit sur chaque cayolar de haute montagne, cette perception n’étant fondée sur rien et n’ayant pour principe, suivant la tradition, qu’un pacte par lequel les pasteurs du pays s’obligèrent de vendre au châtelain un mouton par cabane, moyennant 6 sols 6 deniers, prix commun du mouton dans ce temps reculé; que cet accord peut si peu être mis en doute, que les cen-siers gothiques, celui de 1515 et celui de 1675, seuls et uniques titres où toutes les redevances dues au Roi sont rapportées, ne font aucune mention de mouton harrary, et que s’il eût été un droit domanial, les commissaires qui procédèrent à la rédaction des livres terriers du Roi n’auraient pas manqué de le dénombrer, et qu’enfin le retour ou payement de 6 sols 6 deniers que font encore aujourd’hui les fermiers de Sa Majesté, prouve le pacte. Art. 43. Que, comme le produit des bestiaux forme l’unique ressource des habitants du pays, ils soient maintenus dans leurs possessions dans la haute montagne ; qu’en outre Sa Majesté sera suppliée de les protéger contre les invasions des Espagnols, et de ne point consentir que la démarcation des deux royaumes ne soit faite que par le sommet des montagnes qui joignent F Aragon, auquel la coutume nous fait confronter, et de là vers l'occident suivant les plus anciens documents, jusqu’à Burdunsaquia et Leïcepia, situés sur la montagne Abodi, où deux anciens cayolars de Soûle ont existé anciennement et qui furent cédés aux Espagnols par provision, par des personnes sans qualité suffisante. Art. 44. Que l’ancien usage suivant lequel les bestiaux ne pouvaient être arrêtés comme épaves, sans qu’il apparût qu’ils avaient erré pendant un an et un jour, soit rétabli comme loi sacrée et inviolable, l’usage actuel qui permet de les arrêter aussitôt qu’on les voit errer, sans savoir à qui ils sont, couvrant une infinité d’abus qui oppriment les propriétaires. Art. 45. Que Sa Majesté soit suppliée d’interposer son autorité pour expulser certains particuliers qui ont usurpé des communaux dans le quartier de Soûle, s’y sont établis et s’y maintiennent à main armée. Art. 46. Qu’il soit loisible aux habitants de Soûle de prendre du sable et de la pierre pour bâtir sur Tés rives de la rivière Saizon, sans que les riverains puissent les en empêcher. Art. 47. Que les fonds destinés à l’établissement du collège de Mauléon, qui a pour objet Renseignement et l’instruction de la jeunesse, soient d’ores et déjà utilisés à réparer la maison, dont le pays a fait l’abandon en faveur de cette fondation et à mettre des éducateurs, et que Sa Majesté soit suppliée d’accorder des lettres patentes, en ordonnant que le collège soit desservi par des prêtres séculiers, et de nous accorder ces lettres gratis, attendu la pauvreté du pays. [États gén. 1789. Cahiers*! ARCHIVES PARLEMENTAIRES*, [Pays de Soute. j Art. 48. Que les prieurés d’Ainharp et de Saint-1 Blaise-de-Miséricorde, qui étaient anciennement des hôpitaux établis pour soulager les pauvres et les pèlerins et dont les revenus sont maintenant possédés par des ecclésiastiques appelés prieurs et commandeurs, qui ne sont d’aucune utilité à l’Etat, soient réunis à l’hôpital général de Mau-léon, suivant l’esprit et l’objet de leur fondation. Art. 49. Que comme les revenus du chapitre de Saint-Engrace, réunis au séminaire d’Oleron lors de la suppression dont il y a environ un siècle, moyennant deux places gratuites affectées pour deux sujets basques, ont plus que triplé depuis lors, Sa Majesté sera suppliée de créer deux autres places gratuites en faveur de deux autres jeunes Souletins choisis par l’évêque diocésain parmi les sujets les plus indigents. Art. 50. Que comme le chapitre d’Oleron retire en fiefs et dîmes environ 80,000 livres de cette province, Sa Majesté, au cas où il ne lui plaise le supprimer comme un corps inutile à l’Etat, sera instamment suppliée d’affecter trois canonicats pour trois Basques souletins qui seront élus de préférence en plein chapitre, à la pluralité des suffrages, à mesure que les places vaqueront. Art. 51. Que tous les moulins soient mis au pied de tour, qu’il y soit établi des poids et mesures, et que la banalité soit abolie. Art. 52. Que tous les offices d’arpenteurs royaux soient supprimés comme grevant le peuple par le taux exorbitant de la taxe, et parce qu’ils lient les citoyens de recourir à un ministère forcé. Art. 53. Que Sa Majesté soit suppliée d’ériger la châtellenie royale de Soûle, sous telle autre dénomination qu’elle jugera convenable, avec la faculté de juger souverainement jusqu’à la somme qu’elle arbitrera, eu égard à l’étendue et à la population du pays. Art. 54. Que la maîtrise et la gruerie soient supprimées, comme une multiplication accablante des tribunaux qui oppriment le peuple, et les matières qu’on y traite portées au tribunal de Mau-léon pour y être jugées par appel, leur connaissance demeurant dévolue aux jurats de chaque communauté, en conformité du procès-verbal des sieurs de Sève et de Froidour et de l’arrêt du conseil d’homologation du 17 juillet 1677. Art. 55v Que tous les tribunaux d’exception, de commission, les intendances et subdélégations soient abolis et toutes les matières indistinctement portées devant les tribunaux ordinaires. Art. 56. Que Sa Majesté sera suppliée de donner au plus tôt à ses sujets uu nouveau code civil et criminel qui simplifie la forme de la procédure et rende les jugements plus prompts et plus faciles, en ordonnant que tous les procès tant civils que criminels seront jugés à tour de rôle, dans un délai moral qui sera fixé, et sans que les juges puissent, sous quelque prétexte que ce soit, s’écarter de cette règle. Art. 57. Qu’il soit fait un tarif clair et précis qui fixe les droits des juges, procureurs et avocats du Roi, greffiers, avocats, procureurs, huissiers, sergents et tous autres officiers de justice, et qu’il n’y ait aucune taxe arbitraire. Art. 58. Que l’usage des affirmations, qui a dégénéré en abus, soit aboli. Art.. 59. Que tous les transports de justice pour le compte du Roi, qui coûtent beaucoup à l’Etat, soient interdits aux juges, et que toutes les procédures soient instruites au lieu judicial, sans interprète, hors le cas marqué par l’ordonnance de 1670. Art. 60. Que tout droit de committimus soit aboli comme contraire au droit commun. Art. 61. Que la plupart des communautés n’ayant point de police, elle soit attribuée aux jurats de chaque lieu, avec le droit de porter la marque distinctive et la faculté de juger sommairement sans frais et sans appel jusqu’à 25 livres, avec prévention, et à condition que les jurats seront choisis par la pluralité des suffrages. Art. 62. Que comme les habitants du pays qui à peine récoltent le foin nécessaire pour le bétail de la charrue, sont forcés de livrer leurs bestiaux aussi bien l’hiver que l’été dans les landes, sur la voie publique; qu’il se commet une infinité de vols sur les bestiaux, et que la peine que l’on y décerne pour la première fois est le bannissement, qui, loin de les faire cesser, les multiplie, Sa Majesté sera suppliée d’aggraver la peine, en ordonnant que les coupables soient condamnés aux galères. Art. 63. Que la ville de Mauléon fera corps avec le pays et contribuera à l’avenir à tous les impôts et subsides. Art. 64. Que comme la province se trouve surchargée d’impôts pour les ponts et chaussées, gages des ingénieurs et piqueurs qui ne font rien depuis trois ans et dévorent les forces du pays déjà réduit dans un état de pauvreté et d’indigence par l’énorme fardeau des corvées, Sa Majesté sera suppliée d’abolir l’imposition de 5,000 livres qui se lève dans ce pays pour ces objets, en renvoyant les ingénieurs et conducteurs, sauf au pays de choisir un conducteur ou piqueur lorsqu’il sera nécessaire, d’abolir aussi la levée de 10,000 livres qui se fait chaque année pour la confection des routes, et d’ordonner que les contestations sur les ouvrages seront jugées par les Etats. Art. 65. Que comme les droits qui se aperçoivent entre les Français et les Espagnols, sur les frontières, ne sont pas égaux, les marchandises qui passent en Espagne devant payer au premier bureau un droit qu’on appelle tabla , ces mêmes marchandises converties en argent devant payer le vingtième; de plus, un cavalier ne pouvant passer en France que 15 livres sans s’exposer à la confiscation de son argent, ni un piéton au delà de 8 livres, au lieu que les Espagnols ne payent en France aucun pareil droit, le Roi sera supplié de faire attention à cette inégalité. Art. 66. Les habitants de ce pays ont un procès pendant au conseil avec ceux de Lanne en Béarn, au sujet de limites des communaux; ils sont dans des débats et querelles continuels. Le Roi est supplié d’ordonner qu’en attendant la décision du procès, tout carnallement de bêtes et hostilités cessent. Art. 67. Que les Etats généraux s’occupent des moyens d’arrêter la mendicité. Art. 68. Que le Roi soit supplié de permettre à chaque communauté de cette province d’impo-poser et lever à concurrence d’une somme dé 200 livres, pour pourvoir à ses besoins, sans recourir à aucune autorité supérieure, sur une délibération prise en assemblée générale des habi tants par pluralité de suffrages, à la charge par les jurats d’en rendre compte. Art. 69. Le bourg de Tardets, où il y a un marché, est autorisé par un prétendu arrêt du conseil à lever un droit de terrage sur les fruits et légumes exposés en vente au marché; ce droit, quoique modique, est fort gênant. Sa Majesté est priée de l’abolir. Art. 70. Le pays de Soûle, qui, en 1760, n’avait aucune grande route, a tout à l’heure sa petite [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Pays de Soûle.] 783 plaine, qui, dans sa plus grande largeur, n’a pas au delà d’un quart de lieue, traversée par quatre grandes routes ; les ingénieurs, qui cherchent à éterniser les ouvrages partout où ils se trouvent bien, donnèrent, il y a quelques années, l’idée d’en construire une cinquième vers Bayonne, et comme ce pays se trouve déjà fatigué par tous ces divers travaux, il fut délibéré aux Etats de 1788 défaire un emprunt de 30,000 livres pour la confection de cette dernière-, il futdélibéré en même temps que les 10,000 livres qui se perçoivent annuellement seraient employées à faire la traversée de ces routes, qui toutes aboutissent à un quartier de la ville deMauléon; les ingénieurs, pour embellir le quartier qui n’est composé que d’une quinzaine de maisons, ont proposé un plan magnifique qui tend à détruire cinq à six des plus belles maisons pour y former un quai. Ce plan a été présenté à MM. les commissaires des routes, et l’on a toujours eu soin de ne se servir que du mot de traversée; mais quel a été l’étonnement de nombre de commissaires, qui, par le nom de traversée, n’ont entendu autre chose que la réfaction des pavés, de voir qü’ils ont approuvé sans le savoir le plan d’un quai qui doit coûter au moins 60,000 livres? Cette nouvelle s’étant répandue, a jeté la désolation dans le pays. La ville de Mauléon, instruite par la voix publique et la réclamation des particuliers dont on veut abattre les maisons, s’est assemblée et a fait faire aux Etats du pays des représentations par des commissaires sur un projet aussi coûteux, aussi inutile et aussi préjudiciable à ses intérêts, puisqu’il tend à la priver d’un nombre d’habitants, ajoutant que ce plan doit avoir paru tel à ceux qui en ont eu l’idée, puisqu’on a soigneusement laissé ignorer le projet de cet ouvrage, non-seulement aux habitants, mais encore à ses représentants, qui n’ont eu aucune connaissance, même de la levée de ce plan; les Etats du pays, assemblés pour la nomination des députés aux Etats généraux, ont été étrangement surpris d’apprendre qu’il vient d’être donné un arrêt du conseil qui autorise l’emprunt de 30,000 livres pour être employées en conformité de la délibération. Sa Majesté est très-humblement suppliée de rétracter cet arrêt, d’ordonner qu’il ne soit fait aucun quai à Mauléon ni autres ouvrages, à moins que ce ne soit aux dépens de la ville même. Art. 71. Ce pays fut affligé en 1774 de l’épizootie qui enleva presque tout son bétail à cornes qui fait sa meilleure ressource. Le Roi, touché de sa situation, avait (dit-on) donné ordre de faire parvenir aux habitants quelques secours; ils n’en reçurent aucun. Ils ne savent pas ce que le prix des bêtes confisquées et les amendes prononcées et payées sont devenus. Le Roi est três-humble-ment supplié d’en faire raison aux habitants dé ce pays. Fait et arrêté en assemblée générale des députés du tiers-état du pays de Soûle, le 20 juin 1789. Signé sur l’original de tous les commissaires et députés. Collationné. Signé ü’Eteheberry, greffier en chef.