ANNEXES RAPPORT fait au nom des comités des contributions publiques et des monnaies et projet de décret sur la vente et fabrication des matières d’or et d’argent, et sur les moyens de vérification du titre de ces matières, par M. d’ Attardé, député du département de la Nièvre. Messieurs, Le droit de travailler, de vendre ou d’acheter ce qu’il lui plaît, est un des droits naturels de l’homme en société. La liberté uu commerce et de l’industrie n’est autre chose que la liberté d’êire égale pour tous. Un jour les hommes sensés refuseront de croire qu'il ait existé des gouvernements assez absurdes pour vendre aux citoyens la faculté de se servir de leurs bras, et de lairevaldr leurs talents. Vous avez bien senti ces vérités, lor-que, par votre decret du 2 mars, vous avez positivement prononcé l’abulition des jurandes et des maîtrises, déjà votéedans la laineuse nuit du 4 août, et déjà implicitement décidée par votre déclaration des bruits. S’il est vrai que le monopole des j urandes, le plus immoral par sa légalité même, le plus étendu dans ses effets, étau une des causes les plus fécondes de la misère des peuples et de cette triste mendicité, la honte des sociétés modernes, comme la servitude était le crime des anciens gouvernements; si celte vérité est démontrée, l’abolition des maîtrises est un des plus grands bienfaits que vos travaux aient répandu sur la France. Cependant, quelque év.dent que soit oans la généralité ce principe, que le commerce a plus besoin de liberté que de lois, « il est quelques professions dout l’exercice peut donner lieu à des abus qui intéressent la foi publique, ou la police générale de l’Etat, ou même la sûreté de la vie des hommes. Ces professions exigent une surveillance et des précautions particulières de la part de l’autorité publ que ». Telles sont les expressions de l’édit de 1776, rédigé par Turgot, l’immortel précurseur de vos sages institutions. L’orfèvrerie est une de ces professions dont l’exercice est susceptible, non pasd’une moindre liberté, mais de ces précautions réglementaires inutiles pour les autres. C’est aussi ce qui a déterminé votre décret du 31 mars 1791, par lequel vous avez chargé vos comi és de vous proposer un règlement général sur la police de l’orlèvrerie dans le royaume. C’est c.j projet qui est aujourd’hui soumis à votre délibération. Concilier la sûreté avec la liberté, c’est le grand problème de l’art social et de la science législative. La solution de ce problème, en ce qui concerne le débit des ouvrages d’or et d’argent, pié ente des dilficultés d’autant plus grandes que ces métaux sont plus précieux, et que leurs rapports avec le système monétaiie paraissent rendre leur altéraiiou susceptible de quelques inconvénients politiques. Avant d’entrer dans l’examen de ces difficultés, et des moyens pur lesquels nous vous proposons de les résoudre, nous devons exposer les motifs qui ont oicté les premières dispositions de notre décret. Nous parlerons d'abord de la suppression du contrôle ou de la marque d’or et d’argent, ainsi que des droits qui en provenaient. La nation tire souvent un revenu d’un service public, institué pour l’utilité com mune. L’étendue des besoins, nés dépenses publiques, justifie ce sys ème, dont l'établissement des dioits d’enregistrement et d’hypothèque sont des conséquences légitimes. Mais, lorsqu’on n’établit un service public que comme le prétexte d’une taxe particulière, lorsqu’on déguise des exacteurs sous la forme et le litre de fonctionnaii es, c’est un abus de la fiscalité qui ne convient qu’au despotisme, c’est une inconséquence qui déshonorerait les législateurs d’un peuple libre. Le contrôle que nous vous proposons de supprimer est de cette nature. On a cru jusqu’ici, sans aucun fondement, qu’il était utile pour assurer la légalité du litre des ouvrages, et garantir aux consommateurs la valeur intrinsèque de la marchandise. 11 est démontré que ce préjugé vulgaire n’est qu’un mensonge financier. Les deux poinçons nommés, le premier, poinçon de charge, et le second, poinçon de décharge, qui étaient successivement apposés par le contrôle r sur les pièces d’o'fèvrerie commencées ou terminées, ne pouvaient rien, sinon que l’ouvrage avait acquitté la taxe. Le poinçon appliqué par les orfèvres ap ès l’essai de la matière, était la seule attestation réelle de la fidélité du titre. Il est même notoire que le contrôleur chargé par la loi de surveiller l’apposition du poinçon commun, négligeait toujours cette partie de sa surveillance; indifférence naturelle à tout fermier qui ne songe qu’à grossir sa recelte. D'ailleurs, la mesure de cet impôt-était sans proportion avec la matière imposable. De mè ne que pour la contribution territoriale, le produit net de la terre est la seule partie du revenu qu’on puisse imposer avec fruit et justice, il semble que, si l’on peut faire contribuer les revenus industriels, c’est dans la proportion de leurs bénéfices que le marchand et l’ouviier peuvent êire taxés. Or, le droit de contrôle établi au mépris de ces principes, avait été mesuré en raison de la va'eur intrinsèque de la matière premièie. Les bénéfices sur la fabrication de toute espèce d’argenterie s’élèvent au plus de 1 à 4 1/2 0/0, tandis que la taxe était de 10 0/0 sur ces mêmes fabrications. Quels étaient les effets de cette exaction impolitique? 1° Li s profits de la contrebande étant énormes, (die devenait inévitable. Elle était même lorçée en ce sens, que le marchand contrebandier se trouvait, par les produits de sa fraude, en état de baisser d’autant le prix de ses marchandises et d’attirer, par le bon marché, la foule des consommateurs; d’où il arrivait que le marçhapd fidèle et scrupuleux voyait son débit apnulé p࣠cette concurrence, et se trouvait sans cesse près- 704 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Annexes. ~\ sé entre l’alternative de la ruine ou delà fraude. 2° La contrebande de la taxe produisait nécessairement l’altération du titre. Tout contrebandier calcule ses bénéfices en raison de ses risques. Le profit de fraude du droit n’eût point compensé la chance des amendes et ries peines pottées contre elle, si le marchand n’y eûtajouté le profit coupable du faux titre, d’autant plus propre à le tenter, que ce genre de fraude s’opéra t et se déguisait par les mêmes moyens qui servaient à cacher le premier, c’es -à-dire, la contrefaçon d*s poinçons, et la corruption des agents de la surveillance. C’est ainsi que l’abus engendre l’abus; ch�t ainsi que, depuis quelques années, l’accroissement excessif des droits rie contrôle avait ruiné l’orfèvt er e,