Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juin 1791.] 576 que l’on ne peut pas dire, avec quelque fondement, qu'un membre peut même, par l’autorisation de l’Assemb'ée, abdiquer ses fonctions, et que nous puissions priver, je ne dis pas l’Assemblée, mais la nation, d’un membre qui a été investi de la confiance de ses commettants. Nous ne sommes pas les maîtres de le délier du serment qu’il a prêté à ceux qui l’ont élu. M. le Président. La question est ainsi posée: « Les membres de l’Assemblée seront-ils éligibles aux fonctions de gouverneur de l’héritier présomptif de la couronne, oui ou non? » Je consulte l’Assemblée. A droite : Point de voix. (L’Assemblée décrète, à une grande majorité, que ses membres ne seront pas éligibles.) M. Démeunier, rapporteur. La disposition que l’Assemblée vient de décréter trouvera sa place au troisième article ; elle ne change d’ailleurs rien au principe de notre projet, dont je vais donner une nouvelle lecture. « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Constitution, décrète ce qui suit: Art. 1er. « Avant de procéder à la nomination du gouverneur qui doit être provisoirement donné à l’héritier présomptif de la couronne en vertu du décret du 25 de ce mois, il sera formé une liste indicative des citoyens qui paraîtront propres à remplir cette fonction. » (Adopté.) Art. 2. « Pour former la liste, les membres de l’Assemblée nationale, répartis en bureaux, procéderont à un scrutin indicatif. Les scrutins de chaque bureau ayant été reçus par deux des secrétaires, la liste de tous ceux qui auront obtenu des voix, sera rapportée à l’Assemblée et ensuite imprimée. » (Adopté.) Art. 3. « L’élection sera faite au scrutin individuel et à la majorité absolue des suffrages. Les voix pourront porter non seulement sur ceux inscrits dans la liste, mais sur tous autres citoyens, à l’exception néanmoins des membres de l’Assemblée nationale. » (Adopté.) Art. 4. « Le gouverneur prêtera à la nation, dans le sein de l’Assemblée nationale, le serment « de « veiller religieusement à la conservation de la « vie et de la santé de l’héritier présomptif, et il « répondra de sa personne. » (Adopté.) Art. 5. « Toutes les personnes attachées au service de l’héritier présomptif seront sous la surveillance et sous les ordres du gouverneur. » M. Loys. Les circonstances étaient pressantes quand vous avez décrété que le gouverneur de l’héritier présomptif de la couronne serait nommé par l’Assemblée nationale. Ces circonstances n’existent plus. L’article qu’on vous propose exclut absolument le roi de la surveillance et de la nomination des personnes qui sont attachée� au service de son iils. Cependant je pense que la nomination du gouverneur de l’héritier présomptif de la couronne doit appartenir au Corps législatif et au roi, et non pas exclusivement à l’un ou à l’autre. (Murmures.) Il me semble que les circonstances actuelles ne doivent pas changer les règles générales. Je demande qu'on examine au moins s’il ne serait pas convenable de faire concourir le roi de quelque manière an choix que l’on va faire et à la surveillance des personnes attachées à son fils. Plusieurs membres : Aux voix I aux voix l’article ! M. Ijavle. Je demande, Monsieur le rapporteur, si l’article, qui dit que le gouverneur aura la surveillance des personnes qui élèveront l’héritier présomptif, signifie en même temps que le gouverneur en aura la nomination. Je demande que cela soit expliqué d’une manière claire. M. Démeunicr, rapporteur. J’ai eu l’honneur de dire que le comité n’a pas voulu traiter en ce moment toutes les questions relatives à l’éducation de l’héritier présomptif. Les droits de la paternité sont sacrés, mais cependant, l’héritier présomptif de la couronne est enfant de l’Etat. La nation doit faire surveiller la conservation de sa vie et de sa santé; elle doit nommer un gouverneur. Ou doit ajouter cependant que le choix de quelques individus, attachés à l’héritier présomptif de la couronne présente des questions d’une grande délicatesse. En Suède, lorsque les Etats établirent un système d’éducation, ils ordonnèrent que l’héritier présomptif de la couronne serait élevé d’après ce système ; et cependant ils eurent l’attention de conserver les droits de la paternité. Mais ce n’est pas ici encore Je temps de traiter cette question. Le comité l’a examinée et sa décision ne peut laisser des inquiétudes dans les circonstances actuelles. L’héritier présomptif de la couronne n’a que 6 ans ; il n’est pas nécessaire de lui attacher un grand nombre de personnes. Bientôt nous vous présenterons un système d’éducation ; c’est alors que vous statuerez sur l'intervention du roi et la part qu’il doit prendre à cette éducation. Le gouverneur que vous aurez nommé sera responsable de la personne de l’héritier présomptif ; il faut donc en ce moment qu’il ait le choix des personnes attachées à son éducation et que ces personnes soient soumises à ses ordres. Je demande qu’on mette l’article aux voix. Plusieurs membres demandent la parole. M. Delavigne. Lorsque l’Assemblée nationale a établi la responsabilité de celui qui sera gouverneur de 1 héritier présomptif, sans doute ce n’a pas été une responsabilité illusoire qu’elle a décrétée. Dans des occasions bien moins importantes, lorsqu’il n’a été question que de la conservation de l’argent, vous avez laissé à l’administrateur, responsable en chef, le choix de tous les agents subalternes qui opèrent sous ses ordres, et à plus forte raison, dans une circonstance plus délicate, dans celle où il s’agit de la responsabilité, de la vie et de la santé de l’héritier présomptif de la couronne. Vous ne pouvez laisser qu’au gouverneur seul le choix des personnes qui seront attachées à cet enfant, parce que l’effet nécessaire de la respou-