SÉANCE DU 23 FRUCTIDOR AN II (9 SEPTEMBRE 1794) - N° 62 35 tements, qui le sont à leur tour par la commission des domaines nationaux; et à Paris, où la masse en est plus considérable que partout ailleurs, il n’ y aurait d’autre surveillance que celle de la commission. Je conclus pour l’adoption du projet (126). La Convention nationale décrète que les comités examineront s’il convient de laisser des commissions exécutives intermédiaires entre les agences et la Convention nationale; ou s’il faut supprimer les diverses agences qui ont été créées (127). 62 CAMBON : [Il y a deux jours que] (128) les commissaires civils des sections de Paris réclament l’indemnité qui leur a été accordée, et qui aurait dû leur être payée par la municipalité de Paris, puisqu’un décret du 6 floréal porte : «La Convention nationale, après avoir entendu son comité des Finances sur la pétition des commissaires des sections de Paris, concernant l’indemnité qui leur est due, à raison du travail extraordinaire dont ils sont chargés, décrète que la municipalité de Paris est autorisée à comprendre au nom de ses charges locales, et à payer sur les sous additionnels, la somme de 3 livres à chaque commissaire civil de section par chaque journée qu’il justifiera avoir employée au service public des citoyens de cette commune, dès l’origine de l’établissement de ces commissions.» Les commissaires civils des sections de Paris sollicitent auprès de la commission des revenus nationaux le payement de cette indemnité. Elle ne parait pas devoir leur être refusée, d’après les dispositions précises du décret du 6 floréal; mais l’exécution de ce décret présente plusieurs difficultés. 1° L’indemnité est accordée dès l’origine de l’établissement des comités civils. Des sections en font remonter l’époque à celle de la révolution, c’est à dire au 12 juillet 1789, et d’autres au 10 août 1792. 2° Il est dit par ce décret qu’il sera payé 3 livres à chaque commissaire civil des sections de Paris par chaque journée qu’il justifiera avoir employé au service public. Les extraits des procès-verbaux des assemblées générales des sections prouveront bien la nomination des commissaires; mais comment justifieront-ils de l’emploi de leurs journées au service public? (126) Moniteur, XXI, 715-716. Mentionné par Débats, n° 719, 390; Gazette Fr., n°983; J. Mont., n° 133; Ann. R.F., n° 282; Le J.Perlet, n° 717 omet de citer les deux interventions de Barère. Rép., n° 264; M. U., XLIII, 382; F. de la Républ., n° 430; Mess. Soir, n° 752; J. Fr., n° 715. J. Paris, n° 618. (127) P. V., XLV, 185. C 318, pl. 1285, p. 14. Décret n° 10 825 de la main de Cambon. (128) Mess. Soir, n° 752. 3° Le décret porte aussi que les 3 livres d’indemnité seront comprises dans les charges locales et payées sur les sous additionnels. Il n’a pu en être imposé pour cet objet dans les rôles de 1789, 1790, 1791 et 1792, et les rôles de 1793 ne sont pas même encore entièrement en recouvrement. Pour l’exécution littérale de ce décret, il est indispensable de déterminer; 1° Depuis quelle époque précise cette indemnité doit être payée; 2° De quelle manière les commissaires civils justifieront des journées par eux employées au service des citoyens; Et enfin, attendu qu’il n’a pas été imposé de sous additionnels dans les rôles des années antérieures à 1793, et que le recouvrement de ceux qui ont du être compris dans les rôles de cette dernière année n’a pas encore eu lieu, si c’est sur les fonds du trésor public que le payement réclamé doit être ordonné. Votre comité des Finances a pensé que la loi ne pouvait avoir un effet rétroactif; cependant il a cru que l’époque de l’établissement de la République, qui a exigé le renouvellement de presque tous les fonctionnaires, pouvait s’accorder avec l’exécution du décret du 6 floréal. Depuis cette époque les fonctions publiques ont été très multipliées; ainsi il y a lieu de croire que tous ceux qui en ont été chargés sont restés en permanence à leur poste; cependant il faut prendre des précautions, afin d’éviter que ceux qui n’auraient pas rempli leur devoir reçoivent une indemnité qui ne leur serait pas due. Votre comité a pensé que la présence des commissaires devait être prouvée par leur signature aux registres des délibérations ou dans leurs fonctions. Enfin cette dépense doit être provisoirement payée par le trésor public, jusqu’à ce que vous ayez réglé le mode pour subvenir aux dépenses municipales de Paris. Voici le projet que je suis chargé de vous présenter (129) : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Cambon, au nom de] son comité des Finances, décrète : Article premier. - L’indemnité accordée aux commissaires civils des sections de Paris, par la loi du 6 floréal, ne sera payée qu’à ceux qui sont actuellement en exercice ou qui seront nommés à l’avenir; elle ne sera payée que depuis l’époque du décret qui a déclaré que la France se constituoit en République; Art. II. - Cette indemnité n’aura lieu que pour les journées qui auront été employées au service public; Les membres qui la réclameront, prouveront leur service par la signature aux registres des délibérations ou dans leurs fonctions. (129) Moniteur, XXI, 714-715. Résumé par Débats, n° 719, 389-390; Mentionné J. Mont., n° 133; Ann. R.F., n° 282; J. Perlet, n° 717; J. Fr., n° 715; J. Paris, n° 618; Gazette Fr., n° 983. 36 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Art. III. - Cette dépense sera vérifiée et ordonnancée par la commission des administrations civiles, police et tribunaux; elle sera payée provisoirement, comme les autres dépenses concernant la commune de Paris. Art. IV. - Le présent décret ne sera imprimé que dans le bulletin de correspondance (130). Ce projet de décret est adopté (131). 63 [Conformément au décret d’avant hier] (132) Cambacérès donne lecture de son travail relatif au code civil. Il contient beaucoup de nouvelles vues qui sont vivement applaudies (133). La Convention nationale décrète que le projet de code civil qui lui a été présenté par son comité de Législation et le discours du rapporteur seront imprimés et distribués; elle ajourne la discussion sur le projet jusqu’après la distribution (134). [ Rapport sur le Code Civil fait au nom du comité de Législation, dans la séance du 23 fructidor an II, par CAMBACERES, député du département de l’Hérault ] (135) Représentans du Peuple, L’exercice des droits politiques est le principe de la liberté. L’exercice des droits civils est le principe du bonheur social et la sauve-garde de la morale publique. Régler les relations des citoyens avec la société, c’est établir l’ordre politique, régler les rapports des citoyens entr’eux, c’est établir l’ordre civil et fonder l’ordre moral. Combien grande est donc la mission du législateur! Investi par le peuple souverain de l’exercice du pouvoir suprême, tenant dans sa main tous les élémens sociaux, il les dispose, les arrange, les combine, les ordonne; et tel que l’esprit créateur, après avoir donné l’être (130) P.-V., XLV, 185-186. C 318, pl. 1285, p. 15. Débats, n° 726, 503-504; Moniteur , XXI, 715; J. Mont., n° 133; Mess. Soir, n° 752; M. U., XLIIÏ, 381-382. Partiellement reproduit dans Rép., n° 264; J. Fr., n° 715 présente les deux premiers articles du décret, le troisième est reproduit dans J. Fr., n° 716. Mentionné dans J. Perlet, n° 717. Décret n° 10 826 de la main de Cambon, rapporteur. (131) Moniteur, XXI, 715. (132) F. de la Républ., n° 430. (133) J. de Perlet, 719. (134) P.-V., XL V, 186. C 318, pl. 1285, p. 16. Le décret n° 10 810 est de la main de Cambacérès. Rapporteur : Cordier d’après C* II 20, p. 290. (135) Débats, n° 719, 390-1-10 et n° 726, 496-503. Moniteur, XXI, 716-719. Mentionné J. Mont., n° 133; Ann. R. F., n° 282; J. Perlet, n° 717; F. de la Républ., n° 430; Rép., n° 264; J. Fr., n° 715; Ann. Patr., n° 617; Mess. Soir, n° 752; C. Eg., n° 752; M. U., XLIII, 382; Gazette Fr., n° 983; J. Paris, n° 618. Selon la presse unanime, ce discours a été vivement applaudi. et la vie au corps politique, il lui imprime la sagesse qui en est comme la santé morale, et en assure la durée en dirigeant ses forces et ses mouvemens. Citoyens, vous avez rempli en grande partie la tâche honorable qui vous étoit imposée. Une constitution toute populaire est sortie de vos mains, et le gouvernement révolutionnaire, dirigeant toujours dans le même sens et vers le même but les efforts du peuple, est venu préparer les moyens de jouir de la liberté conquise et affermie. Hâtez vous d’achever votre ouvrage; élevez le grand édifice de la législation civile; et après avoir étabb et assuré les droits de la société, établissez et assurez les droits de chacun de ses membres. Trois choses sont nécessaires et suffisent à l’homme en société : Etre maître de sa personne; Avoir des biens pour remplir ses besoins; Pouvoir disposer, pour son plus grand intérêt, de sa personne et de ses biens. Tous les droits civils se réduisent donc aux droits de liberté, de propriété et de contracter. Ainsi, les personnes, les propriétés et les conventions sont les trois objets de la législation civile. Au moment où l’homme voit le jour, la société le signale; c’est un nouvel élément ajouté au corps politique; elle l’inscrit au registre des âges, et le désigne par les deux relations qu’il apporte en naissant, celle qu’il a avec les auteurs de ses jours. Il a donc fallu d’abord fixer les caractères auxquels la loi reconnoit un père et un fils; et après avoir posé le principe de ce lien, quand c’est la nature qui le forme, on a dû parler de cette paternité civile que crée la bienfaisante adoption. Ici, nous vous devons quelques éclaicisse-mens sur les points principaux de notre projet, en ce qui concerne l’état des personnes. Il existe une règle d’autant plus sacrée, qu’elle n’a d’autre origine que l’origine même de la société; d’autant plus respectable, que tous les peuples l’ont respectée; et d’autant plus nécessaire, qu’elle assure la tranquillité et la perpétuité des familles : c’est la loi qui veut que le mariage indique le père; mais en plaçant cette règle parmi les bases de notre législation civile, nous vous proposons de faire tomber d’un seul mot toutes les questions sur les posthumes; questions ridicules, que l’ignorance et le préjugé ont tant de fois décidées au mépris de la nature et de l’expérience. Une loi sage a déjà fait disparoitre toute la différence entre ceux dont la condition de-voit être la même. Nous n’avons eu qu’à rappeler cet acte de justice; mais, en mettant au même rang tous les enfans qui sont reconnus par leur père, il faut bannir de la législation française l’odieuse recherche de la paternité. Cependant il est juste de réserver à l’enfant la preuve de la filiation contre sa mère; car le fait de l’enfantement n’est pas comme celui de la conception, couvert d’un voile impénétrable. Enfin, nous avons organisé l’adoption; institution morale, ressource contre la stérilité, nouvelle nature qui supplée au défaut de la