587 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 avril 1790.] M. Garat, l'aîné prend ensuite la parole. J’ai déjà combattu le plan des jurés; ou m’a répondu que j’étais avocat, et j’ai répondu à mon tour : et vous , vous ne l'êtes pas ? Je vais cependant discuter ces divers plans, et j’espère que l’avocat ne l’emportera pas sur le législateur. En attaquant le plan de M. Duport, je crois combattre pour la patrie et lui faire le plus grand sacrifice. Il semble que M. Duport ait pressenti qu’en nous lisant ce plan seul, il se serait élevé un sentiment général de défiance : aussi, il l’a fait précéder de généralités et de précautions oratoires qui ne s’adaptent pas mieux à son plan qu’à celui du comité ! On dit que la France attend de nous une régénération complète de l’ordre judiciaire ; mais ce serait plutôt une résurrection de l’ordre gothique et barbare de nos pères, sortant des forêts de la Germanie. Si je n’avais toujours vu M. Duport dans de bons principes et donner des preuves multipliées de patriotisme je serais tenté de soupçonner que son plan n’est que celui d’un parlementaire très subtil. (M. Garat attaque successivement les divers plans proposés et annonce qu’il n’adopte aucune espèce de jurés, ni en matière civile ni en matière criminelle. — L’Assemblée devient très impatiente. — ( L'orateur est souvent interrompu). M. Garat continue. Quant au plan qui traite de la nomination des juges, au sort, je préférerais les dés sortis du cornet du président Bridoye. Je pourrais, si l’Assemblée était moins impatiente, vous présenter le tableau des injustices légales, qui, en Angleterre, ont été le fruit de la procédure par jurés, du nombre immense des tribunaux de tous les genres, même en matière criminelle, et des abus que ces tribunaux ont fait de la liberté civile. Quant au civil, les objets des contestations en Angleterre y sont abandonnés à la licence de la preuve testimoniale; mais parmi nous cet usage funeste a été aboli à la demande des Etats généraux, par l’ordonnance faite par L’Hôpital, qui, je crois, était un législateur. Eh bien! pour les jurés, il faudrait détruire cette loi sage à laquelle lient la liberté civile. Or, dans presque toutes les matières de testament, de donation, de répudiation et de contrats, les preuves sont contenues dans les actes. Gomment les jurés pourraient-ils en connaître? Vous n’avez pas d’ailleurs les motifs de l’Angleterre pour avoir des jurés, car le roi y nomme les juges et le peuple les nommera parmi nous ; pourquoi donc des jurés ? Plus on approfondira les résultats de cet établissement, plus on en trouvera l’inconséquence. Mais, dit-on créons des jurés, nous ferons ensuite des lois ; c’est-à-dire qu’on veut nous délier les mains avant d’avoir forgé les instruments dont nous devons nous servir. Vous avez beau faire, vous ne rendrez jamais les hommes de loi inutiles ; ils vivront des passions des hommes et de la multiplicité inévitable de nos propriétés et de nos droits. M. le comte Stanislas de Clermont-Tonnerre (1). Messieurs, au moment où j’ai entendu l’opinion de M. Buzot, opinion dans laquelle il (1) Le Moniteur ne donne qu’une analyse du discours de M. de Clermont-Tonnerre. me paraît vous avoir démontré que vous discutiez une question insoluble, en ce qu’elle était mal posée, et dans laquelle il a reporté votre attention sur le plan de M. l’abbé Sieyès, il m’a sans doute été permis d’espérer que la délibération allait changer de nature; mais, puisque les honorables membres qui l’ont suivi dans la tribune, et l’Assemblée nationale ellermême n’en ont pas moins persisté dans l’ordre de la délibération établi, vous me permettrez, peut-être, de vous représenter les mêmes idées, parce que je les crois justes, et d’arriver au même résultat, parce que ]e les crois raisonnables. Depuis six jours vous discutez une question simple, et vous ne la discutez si longtemps, que parce qu’elle a des points de contact avec les autres parties de l’ordre judiciaire, et qu’il se présente une foule d’idées auxquelles les préopinants se sont plus ou moins livrés. Votre comité de Constitution, par exemple, ou plutôt un de ses membres, vous a présenté avant-hier une suite de nouveaux articles tendant à rapprocher son plan des principes qui vous avaient été développés dans les séances précédentes. La marche que nous suivons ne nous rapproche pas du but, et une analyse des divers plans proposés nous y sût plus promptement et plus sûrement conduits que la solution de plusieurs questions successives; cette méthode ingénieuse, de poser ainsi une série de questions, vous a été présentée dans d’autres circonstances, et elle vous a réussi, parce qu’alors vous n’aviez pas une machine à organiser, mais des vérités fondamentales à établir : elle réussirait encore aujourd'hui, car toute organisation est fondée sur des principes, si la liaison qui existe entre les différentes questions ne portait pas les opinants à les enchaîner les unes aux autres, et si les difficultés d’exécution ne forçaient pas souvent à soumettre à un nouvel examen les vérités de théorie, quand on veut en faire des vérités de pratique. Plusieurs plans vous sont soumis, ou plutôt plusieurs membres vous ont présenté des vues plus ou moins complètes sur l'ordre judiciaire. M. Bergasse, le nouveau comité de Constitution, M. l’abbé Siéyès, M. Chabroud et M. Duport vous ont successivement soumis leurs plans. Une longue méditation vous a mis à même de juger les deux premiers. Les changements qu’a proposés hier M. Thouret et qui semblent plutôt un hommage au sentiment présumé de l’Assemblée, qu’une conséquence de ses premières idées, ont besoin d’être examinés sous deux points de vue, leur mérite réel et leur cohérence avec l’ensemble de son plan. Il est vrai de dire qu’en général, trop d’appels, trop de tribunaux, trop de juges, trop d’imitations des anciennes formes, sont des reproches faits avec quelque justice, au plan du comité de Constitution. M. Chabroud, dans une opinion qui a obtenu des suffrages, établit comme principes : 1° Que les juges doivent être nommés par le peuple et la partie publique par le roi ; 2° Que si l’inamovibilité des juges nommés par le roi était utile, celle des juges nommés par le peuple est inutile et dangereuse; 3° Que les degrés de juridiction doivent être abolis ; 4° Qu’il ne doit y avoir aucun tribunal d’exception ; 5° 11 adopte l’établissement des jurés et des juges d’assises. M. Duport a ainsi posé le problème qu’il se donnait à résoudre. 588 [Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 avril 1790.1 Trouver un mode dans lequel la justice soit facile, prompte et impartiale, et où les juges soient respectés, sans être craints, et ne puissent jamais mettre en danger la. liberté publique. II me paraît établir comme principes : 1° Qu’il y a des lois politiques et des lois civiles ; 2° Que les secondes sont seules l’objet du pouvoir judiciaire ; 3° Que le jugement est l’application simple et précise de la loi, à un fait tant au civil qu’au criminel ; 4° Que cette application ne peut avoir lieu que sur un fait constaté ; 5° Que le fait et le droit ne peuvent être jugés par les mêmes individus, ni par les membres d’un même corps ; 6° Que le peuple ne devant déléguer que les pouvoirs qu’il né peut exercer, il peut et doit se réserver le jugement du fait ; 7° Qu’il doit nommer les juges du droit ; 8° Que si l’inamovibilité des juges nommés par le roi est nécessaire, celle des juges nommés par le peuple est inutile ; 9°Que la permanence des tribunaux tend à fortifier l’esprit de corps ; 10° Que les degrés de la hiérarchie judiciaire sont réprouvés par la raison et la nature des devoirs du juge ; 11° Que la nature et l’unité du pouvoir monarchique exigent que l’exécution des jugements soit confiée à des agents du pouvoir exécutif : qu’un corps judiciaire central maintienne une jurisprudence uniforme dans tout l’Empire, et établisse dans cette branche du pouvoir public une correspondance et une dépendance entre les départements ; 12° Qu’aucune distinction, ne doit être établie ni contre les justiciables, ni entre les contestations ; 13° Enfin que les agents et les éléments du pou ¬ voir judiciaire doivent être soigneusement écartés des nabitantsde la campagne, auxquels un simple arbitrage suffit ordinairement. Il propose, en conséquence, d’établir : 1° Que les juges de paix établis dans les cantons décident, sommairement et du consentement des parties, les contestations qui seront portées de-van t eux ; 2° Que des juges de police, placés de même, soient chargés des opérations de tutelle, curatelle, scellés, etc.; 3° Que pour le jugement des contestations portées en instance, il soit établi des jurés pour prononcer sur le fait, et des juges pour prononcer sur le droit; 4» Que les juges choisis par le peuple, le soient pour un temps et ne puissent être révoqués pendant ce temps, que pour forfaiture jugée ; 5° Qu’il y ait dans chaque district deux officiers de justice, par mis lesquels seront pris et les juges et ceux qui doivent diriger le travail d’instruction des jurés ; 6° Que les juges soient ambulants et ne tiennent jamais leurs assises dans le lieu de leur résidence ; 7° Qu’auprès de chaque justice, il y ait un solliciteur ou partie publique, chargé de réclamer sans cesse l’observation de la loi ; 8° Qu’il y ait un officier de la couronne, nommé par le roi et chargé de faire exécuter les jugements prononcés ; 9° Qu’il y ait 48 grands juges, dont 8 resteront auprès de la législature ; et les 40 autres divisés en 20 sections de 2 chacune, reverront les causes d’appel dans les chefs-lieux désignés. La rapide et profonde impression qu’a faite la lecture de ce recueil d’idées, de vues patriotiques et de conceptions brillantes, en est le plus bel éloge; mais les détails d’exécution seraient, sans doute, susceptibles d’une longue et profonde discussion; l’auteur en a offert le développement, et en fait de machine politique ou matérielle, les détails d’exécution entrent pour beaucoup dans le jugement. M. l’abbé Siéyès nous donne une suite d’articles qui ne précèdent aueun développement de théorie ; et qu’il me soit permis de me plaindre à M. l’abbé Sieyès de cette manièrede nous présenter ses idées, comme on se plaignait de Newton qui présentait sans démonstration des théorèmes qui n’ont été démontrés que bien longtemps après lui. Je crois que s’il nous avait donné l’exposition de ses principes, que s’il nous avait appuyé son plan de toute la force de sa logique, il aurait obtenu plus tôt dans cette Assemblée une attention qu’on ne lui a pas donnée universellement. Je remarque de plus dans le court avertissement qui le précède, des traces de découragement; qu’il me permette de m’en plaindre publiquement, et de m’affliger des circonstances qui l’ont causé. Il est des hommes qui sont le patrimoine de leur siècle et de leur pays, et l’honorable membre dont je parle est (du moins dans mon opinion) l’un de ceux qu’il nous est important de ne pas perdre. M. l’abbé Sieyès me parait avoir pensé que prévenir et décider les contestations, devait être le but de son travail ; il me paraît avoir posé comme principes : 1° Que la police est distincte de la justice, que leurs fonctions doivent être séparées ; 2° Qu’à la police appartient toutes les fonctions antijudiciaires tendant à prévenir les contestations ; 3° Que les fonctions extra judiciaires, telle» que scellés, curatelles, etc..., doivent être séparées de la justice et confiées à l’administration; 4° Que l’action delà justice commence où finit celle de la police ; 5° Que la justice ou police primaire doit être gratuite et à la portée de tous les justiciables et avoir le caractère de l’arbitrage ; 6° Que les juges primaires doivent être élus à terme et pour un temps suffisant, afin que l’exercice de leurs fonctions n’en souffre pas ; 7° Qu’il doit y avoir des juges d’instance, pour juger rigoureusement et dans les formes les contestations que n’ont pu arbitrer les officiers de police ou de justice primaire, mais que l’abord en doit être rendu plus difficile et plus dispendieux, puisqu’ils sont moins rigoureusement une dette de la société, et que dans un Etat moins corrompu, les premiers pourraient suffire; 8°Queces juges doivent être soumis à l’influence de l’opinion publique réfléchie, et assujettie à des formes ; 9° Qu’il est des causes dont l’appel peut, d’après leur nature, et doit être plus sûrement et plus promptement décidée, dans un lieu voisin de celui où s’est rendu le premier jugement ; 10° Queîes juges doiventêtre réduitsàla fonction de procurateurs de justice, et que la justice elle-même doit être conférée au ministère des jurés ; 11° Que dans les causes où la recherche des faits est difficile, il est important que cette recherche ne soit pas faite par ceux qui doivent ensuite décider ; 12° Que pour rendre possible le passage de l’or- [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 avril 1790.] ggû dre ancien à l’ordre nouveau, il faut, pendant quelque temps, confier une partie des places de jurés, aux anciens gens de loi ; 13° Qu’il ne doit point y avoir de juges d’exception ; mais que pour des considérations morales et politiques, les causes domestiques, consulaires, politiques ou fiscales, doivent être assujetties à des formes particulières ; 14° Qu’il importe à l’unité de la monarchie, qu’il existe un centre général de police et de justice pour tout le royaume ; 15° Que c’est à ce centre que doivent être placés la grande cour nationale, et le jugement des crimes d’Etat. Vous voyez, Messieurs, qu’en laissant à part le plan du comité de Constitution, dans lequel il y a peu d’idées premières, il existe entre les trois opinions dont je viens de vous parler, des opinions communes et des opinions divergentes. Leur comparaison serait utile: c’est de leur comparaison, que, quant à moi, en rendant justice aux vues de MM. Duport et Chabroud, je n’ai vu de travail complet et entier que dans l’ouvrage de M. l’abbé Siéyès. Appuyé sur ses principes, M. l’abbé Siéyès propose, non pas quelques articles constitutionnels, mais un plan total d’organisation pour le pouvoir judiciaire, un plan exécutable dès le 1er juin 1790, dans lequel le passage de l’ordre ancien à l’ordre nouveau est proposé, dans lequel j’ose dire que tout m’a paru possible, que tout m’a paru raisonnable. Si vous adoptiez, article par article, le plan de M. l’abbé Siéyès, vous auriez au mois de juin un ordre judiciaire, vous auriez un ordre auquel pourraient être faits, par les législatures suivantes, tous les changements jugés raisonnables ; un ordre qui déconcerterait toutes les espérances dangereuses, étoufferait toutes les mauvaises intentions, placerait convenablement, en les attachant à la chose publique, cette légion d’hommes de loi qui ont bien mérité de la patrie, mais dont il faut que le nombre diminue successivement et à mesure que l’on démolira le labyrinthe gothique dans lequel ils nous servent de guide. Plus j’ai réfléchi sur le plan de M. l’abbé Siéyès et plus je lui trouve les avantages des autres projets sans eu avoir les inconvénients. On vous demande aujourd’hui, voulez-vous des jurés, oui ou non ? M. l’abbé Siéyès veut des jurés. On vous demande, les voulez-vous au civil et au criminel? A cette question sur laquelle l’opinion publique est faite en avril 1790, M. l’abbé Siéyès répondait comme elle et avant elle, en septembre 1789 : il faut des jurés au civil comme au criminel. On vous demande, voulez-vous des assises ou des tribunaux permanents? M. l’abbé Siéyès veut des assises, lorsque cela est praticable, et des tribunaux lorsque l’assise ne se peut pas. Sur l’inamovibilité, sa réponse est encore celle du principe ; et en conservant à l’opinion publique un'grand empire sur les juges, il assujettit cependant cette opinion à des formes qui rendent ses jugements d’autant plus respectables, que la précipitation et l’errreur en sont plus facilement écartées : et remarquez, je vous prie, Messieurs, que dans la machine politique que vous présente M. Siéyès, il a sévèrement combiné toutes les pièces, calculé tous les frottements, et que l’application de chacun de ses principes est réglé, modifié par la nature des choses, approprié aux hommes et aux temps. Son ouvrage, sans rien perdre de la justice, n’a pas, si je puis parier ainsi, cette précision, scrupuleuse de métaphysique dont un écolier se détache avec peine, mais qu’un maître sait écarter de ses résultats, parce qu’il en a tenu compte dans ses principes. Je me crois donc autorisé, Messieurs, et j’en fais la motion expresse, à vous proposer de donner la priorité au plan de M. l’abbé Siéyès; et ce n’est que pour revenir à l’ordre du jour, tel qu’il est établi, que je vais répondre à quelques-unes des observations qui ont été faites contre les jurés en général. Mon avis est d’admettre cette institution tant au civil qu’au criminel ; mais, en me décidant à en consacrer le principe, je me crois en droit de vous observer, encore une fois, que la question, en elle-même, est évidemment mal posée. Un honorable membre n’a cessé de vous demander ce que c’était que des jurés : cet honorable membre avait raison ; car le sens de ce mot est si peu déterminé, que, dans trois opinions différentes, les jurés se trouvaient être trois choses distinctes. M. Démeunier vous a défini les jurés anglais, et ce juré a de nombreuses imperfections. M. Duport réduit les jurés à prononcer sur le fait, et leur usage a certainement quelques difficultés quant à la procédure civile. M. l’abbé Siéyès, réduisant les juges à la qualité de procurateur de la justice, confie la totalité du jugement aux jurés, et cet ordre de choses n’est aucun de deux précédents. Or, Messieurs, quand d’après ces trois définitions, on vous dit, voulez-vous des jurés? ou n’en voulez-vous pas ? on vous pose une question insoluble pour un grand nombre de membres. Il y a plusieurs opinions possibles, l’un peut dire : Je veux des jurés anglais, dont l’expérience me prouve la possibilité, mais, si on ne les veut pas, j’aime mieux qu’il n’y en ait pas du tout, que de voir essayer les deux autres méthodes proposées. Un autre peut dire : Je veux le juré de M. Duport, qui me paraît fondé sur une idée vraie, la distinction du fait et du droit; mais j’aime mieux qu’il n’y en ait pas, que de voir adopter l’un dps deux autres. Un troisième, enfin, peut dire : Je ne vois de possible, de praticable, de bon, que le jury de M. l’abbé Siéyès, et j’aime mieux qu’il n’y en ait pas, que de voir décréter le jury de M. Duport, dont l’usage me paraît impossible, ou le jury anglais, dont l’usage me paraît vicieux. Or, aucun de ces trois opinants ne peut dire ni oui ni non ; car s’il dit oui, et qu’en définitive on adopte un des jurys, à l’adoption duquel il préférerait qu’il n’y en eût pas, il vote contre son avis, car il voulait un jury. On sent l’évidence de ce raisonnement, qui vous a déjà été présenté dans une autre thèse par M. Duport. Cependant, Messieurs, comme je ne suis dans aucune des hypothèses précédentes, parce que le plus mauvais jury me paraît encore meilleur au civil et au criminel, que la réjection des jurés, je vais répondre aux objections, et ce qu’on dit des préopicants me permettra d’être bref. Les adversaires des jurés en matière civile se réduisent, pour la plupart, à soutenir que leur usage est impraticable. M. Duport a fait à cette objection des réponses que je ne répéterai pas. M. l’abbé Siéyès me' paraît y avoir encore mieux répondu, en exposant dans ses articles le mode d’organisation et l’emploi de son jury. On vous oppose l’obscurité des lois : cette objection, qui ne paraît pas insoluble à M. Duport est absolument nulle contre le jury de M. l’abbé Siéyès. On remarque que l’on trouve difficilement des ÿQQ [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 avril 1790.] adjoints, que l’on ne trouvait pas anciennement des syndics et on en conclut que l’on ne trouvera pas de jurés. L’honorable fonction d’adjoint n’acependant au premier coup d’œil, ni pour l’amour-propre, ni pour l’intérêt personnel, l’attrait et l’importance de l’état de juré. Quant aux anciens syndics, instruments aveugles et passifs des subdélégués, ils ne sont comparables en rien aux jurés dont il est question. On voit la résurrection des ordres, dans l'expression des pairs. Les pairs j de l'accusé, dit M. l’abbé Sieyès, sont les citoyens qui sont dans une position semblable ou analogue de devoirs et de relations , de fortune et de société. On vous menace de l’aristocratie des jurés, et on vous cite à ce sujet une loi anglaise qui livre leurs décisions à l’arbitraire. Rejetez cette loi, et faites en une qui soumette leurs décisions à la loi. En Angleterre, vous dit-on, on enferme et on affame les jurés pour les rendre unanimes. Hé bien que prouve cette objection contre des jurés français, que l’on ne nous propose ni de renfermer, ni d’affamer. En Angleterre, vous dit-on, l’établissement des jurés a nécessité l’établissement du tribunal du banc du roi, les évocations arbitraires et les remèdes de loi dont le vice est si connu. En France, vous répondrai-je, vous vous passerez de ce tribunal, qui doit sa naissance, non pas précisément aux jurés, mais aux vices des lois anglaises. Vouz aurez un Corps législatif permanent, qui fera des lois, et vous n’aurez nul besoin d’un tribunal pour faire des formules nouvelles. Je vois dans votre Constitution tout ce qui est bon dans l’établissement du banc du roi et je vois que tout ce qu’il y a de dangereux, vous est parfaitement étranger. On vous oppose ftos habitudes : je crois que c’est résoudre la question, que de vous demander quelle est l’habitude que vous avez cru devoir respecter dans une régénération totale? Appuierait-on la nécessité de rapprocher ce que l’on fera de ce qui existait, sur la convenance et l’utilité de replacer les débris de notre ordre judiciaire actuel ? D’abord, cette objection n’est point facile pour ceux qui en auraient l’intérêt. Leur patriotisme n’a vu que l’intérêt public, mais à cette objection et à toutes celles qui s’appuieraient sur la même idée, il est une réponse générale : il est juste, il est convenable que la nation, pour qui sont institués tous les pouvoirs publics, n’ait d’agents que selon ses besoins ; elle ne doit pas se piquer d’une fausse grandeur, et dire comme le duc de Guise, iis ont besoin de moi, si je n’ai pas besoin d’eux. C’est en rendant la condition d’homme privé, tranquille, respectable et libre, que vous répondrez à tous ceux qui regretteront les emplois publics. Quand le peuple existait pour le gouvernement, il était simple de vouloir être le gouvernement : aujourd’hui que l’ordre naturel est revenu, il faut savoir cultiver un champ, prendre une possession, être citoyen, être peuple, être celui pour qui le Gouvernement existe. Pour prouver que le jury, en matière civile, n’était point constitutionnel, on vous a demandé si la Constitution serait détruite, parce qu’il y aurait un mode de jugement vicieux; je réponds que du moment où le peuple se dépouille d’un des droits qu’il peut garder sans danger, la Constitution n’est pasbonne, et je soutiens, avec M. Duport, que le droit de participer à la reddition de la justice, par les jurés, est un droit qu’il peut exercer sans danger. Hâtons-nous donc de consacrer le principe, et n’en différons l’application que le temps néces saire pour en rédiger les articles. Donnons la priorité au plan qui seul présente une maehine-complètement organisée, àun plan que la majorité de votre comité de Constitution vous a déclaré qu’il adopte. Cette marche vous paraît la plus prompte, la plus sûre, et il faut ici marcher sûrement et promptement : vous le sentez comme moi, Messieurs, il faut enfin consommer l’organisation du pouvoir judiciaire : il le faut pour la patrie, il lo faut pour une multitude de citoyens auxquels il doit être pénible de se voir l’objet d’un grand nombre d’inquiétudes, et qui doivent attendre la suppression de leur existence politique avec autant d’impatience que votre patriotisme même. Je vous propose le décret suivant. L’Assemblée nationale décrète : 1° Qu’elle accorde la priorité pour être discuté au plan de M. l’abbé Siéyès, adopté par le comité de Constitution; 2° Qu’elle adopte l’établissement des jurés pour le civil et le criminel, sauf aux amendements de détail, qui pourront être présentés dans la discussion des articles ; 3° Que le comité de Constitution présentera lundi sur le pouvoir judiciaire, l’ordre de discussion qui lui paraîtra convenable. M. Malouet (1). Messieurs, l’attention de l’Assemblée étant fatiguée, je ne traiterai la question qui vous occupe que sous un seul rapport, celui qu’elle doit avoir avec les autres parties de la Constitution; et comme c’est en Angleterre, en Amérique que nous puisons nos exemples et nos motifs pour l’établissement des jurés, j’examinerai si les pouvoirs législatif et exécutif étant constitués en Angleterre et en Amérique tout autrement qu’ils ne le sont parmi nous, nous devons constituer, comme en Angleterre, le pouvoir judiciaire. Je sais que lahiérarchie des tribunaux actuellement subsistants ne saurait trouver place dans le nouvel ordre de choses qui s’établit ; il ne s’agit plus d’un ordre judiciaire tel qu’il devait être pour défendre les intérêts du prince contre les grands vassaux, ou les intérêts du peuple contre l’autorité absolue. — Il s’agit de trouver l’ordre le plus pur, le plus impartial pour l’administration de la justice, celui où l’application de la loi est le moins arbitraire, et l'établissement des jurés semble remplir toutes ces conditions. A quelque distance que nous soyons du premier âge des sociétés politiques, on ne peut nous en présenter les institutions dans toute leur pureté, sans qu’un charme involontaire n’y arrête nos vœux et nos regards. — De là, l’intérêt avec lequel vous avez écouté les orateurs qui ont défendu cet usage antique de nos pères, considéré encore aujourd’hui par les Anglais comme le plus sûr rempart de leur liberté. J’avoue cependant que j’avais toujours été frappé d’une réflexion profonde de Montesquieu, en parlant de la différence de nos tribunaux à ceux d’Angleterre; il remarque que les Anglais, étant privés de ces grands corps de magistrature qui servaient parmi nous de barrière au, despotisme, ont grand raison d’être très jaloux de leur liberté; car, ajoute-t-il, s’ils venaient à la perdre, ce serait le peuple le plus esclave de la terre. Et cependant leur Chambre haute, composée de (1) Le Moniteur ne donne qu’un court sommaire du discours de M. Malouet. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 avril 1790.] K91 pairs inamovibles héréditaires, p eut être assimilée aces cours souveraines que nous allons détruire. Pour nous, dont Je Corps législatif est composé d’une seule Chambre fréqüemmentrenouvelée, qui avons brisé ces grandes masses qui subsistaient encore sous le nom d’Etats dans quelques provinces, qui avons multiplié les assemblées du peuple et de ses représentants, nous convient-il également de transporter dans tous les cas à des jurés la principale autorité des jugements? Dans une constitution mixte, où des prérogatives et des pouvoirs héréditaires s’élèvent au-dessus des autres classes de citoyens, il est très important que cette influence soit balancée par celle du pouvoir judiciaire, et qu’il soit alors très rapproché du peuple (1); mais dans une constitution où il n’y a plus rien de grand, rien de fort que la loi, il faut qu’elle ait une force irrésistible, et que ses ministres participent à sa dignité ; — car lorsque l’influence du peuple est prépondérante, lorsqu’il agit perpétuellement sur la chose publique par ses représentants, lorsqu’il les tient dans sa dépendance par de fréquentes élections, il doit y avoir une force quelconque indépendante de ses passions et de ses erreurs, et comme de tous les pouvoirs celui des tribunaux peut le moins s’élever au-dessus de la constitution, il doit être le plus réprimant et le plus redoutable. Le pouvoir législatif peut altérer la Constitution, le pouvoir exécutif peut l’enfreindre; de là la nécessité de préserver le peuple des excès de l’un et de l’autre; mais comme la liberté ne peut exister, si on ne la préserve aussi des excès de la multitude, il faut lui montrer une force imposante dans l’autorité et la majesté des jugements. Or, voyons comment l’établissement des jurés peut remplir cette fin dans notre Constitution, et comparons surtout ses effets en Angleterre, à ce qu’ils peuvent être parmi nous. En France comme en Angleterre, le jugement par jurés défendra un citoyen de l’oppression des grands et de l’influence du prince, de la volonté arbitraire des magistrats; cet avantage est incontestable : mais il ne me suffit pas pour être libre, d’être à l’abri des caprices et du despotisme d’un seul; il faut aussi que je sois efficacement protégé comme particulier et comme magistrat contre les violences, les ressentiments, les passions de la multitude. —Or, ce genre de protection ne m’est point assuré en certain cas par les jurés; car ils sont trop habituellement dans la dépendance du peuple ; ils sont trop près de ses mouvements, et c’est avec peine que j’ai entendu regretter dans cette tribune, qu’au moment de la Révolution les jurés ne soient pas établis. Je demande si un homme soupçonné d’accaparements de grains, ou exposé même par ses opinions à l’inimitié du peu pie, serait en sûreté, lorsque poursuivi par la calomnie, par la fureur de ses accusateurs, il serait traduit devant des jurés prévenus des mêmes impressions? Ainsi, dans le cas dont parlait hier M. Thouret, de cette insurrection redoutable de l’opinion publique en cas d’attroupement, de sédition, de violence commise par un corps armé, ou par un corps administratif, je rejette le jugement par jurés, comme pouvant favoriser l’oppression et je sens le besoin d’un tribunal supérieur, indéfi) De là rien de plus impolitique et de plus injuste, dans une monarchie, que de n’admettre que des nobles dans les cours souveraines. pendant, et dont l’autorité ne puisse être bravée impunément. En Angleterre, l’étendue de la prérogative royale, l’indépendance de la Chambre haute, la non-existence des assemblées de département et de district, la nomination par le roi des officiers de justice, l’action immédiate du gouvernement royal, qui n’a d’autre intermède que les officiers delà couronne, toutes les causes réprimantes pour le peuple sont tenus en équilibre par l’influence du peuple sur le pouvoir judiciaire. En France, toutes nos dispositions, dirigées jusqu’à présent contre le despotisme, ne doivent pas nous fairç abandonner celles nécessaires pour entretenir la paix publique, pour prévenir l’anarchie. Or, le pouvoir législatif étant le seul que le peuple ne puisse aliéner sans danger, celui-là et tous les autres doivent être combinés de manière qu’ils se balancent sans s’effacer, et qu’ils protèr gent la liberté en assurant l’obéissance à la loi. Ainsi, plus le peuple jouira dans son intégrité du pouvoir législatif, moins il doit avoir part au pouvoir exécutif. — Mais s’il n’a aucune influence par ses représentants, sur l’administration, c’est par l’établissement des jurés qu’il pourra se défendre de tout excès d’autorité de la part de ceux qui le gouvernent. Si, au contraire, le peuple, exerçant par ses représentants son droit législatif, se réserve une influence égale sur l’administration ; s’il dirige aussi par ses officiers l’emploi de la force armée; et qu’il garde enfin, par l’élection des juges et des jurés, une part principale dans le pouvoir judiciaire, je vois entre les mains du peuple l’exercice effectif de tous les pouvoirs publics, je n’y trouve plus d’équilibre, je crains qu’un tel peuple ne soit plus occupé de ses droits que de ses devoirs, qu’il ne s’accoutume plus facilement à commander qu’à obéir; je crains que ses passions ne soient, plus souvent que ses intérêts, la règle du gouvernement, et que la liberté publique et individuelle ne soit compromise dans un tel ordre de choses. Et remarquez, Messieurs, combien dans vos décrets constitutifs prononcés et dans ceux qui se préparent, plusieurs causes peuvent concourir à affaiblir la considération et l’autorité des juges. Vous les avez exclus pendant leur exercice des fonctions administratives et législatives. Il est question de les rendre amovibles ou de les soumettre annuellement à un scrutin d’épreuve. Quels hommes pourraient donc se dévouer à un état aussi précaire, tandis qu’il serait si essentiel de ne voir assis sur les tribunaux que les hommes les plus intègres et les plus éclairés? Si à des juges médiocres vous associez des jurés inhabiles, dans l’intelligence et l’application des lois et des coutumes diverses qui régissent la France, comment obtiendront-ils la confiance des peuples dans cette multitude de questions obscures qui naissent de nos lois sur les substitutions, les communautés, les testaments, les partages et successions, et de l’influence de nos lois fiscales sur toutes nos transactions? — On propose de composer des jurés de gens de loi; mais cet expédient est-il praticable dans les districts? Ce n’est que dans les capitales qu’on trouverait une assez grande quantité de légistes pour que les récusations de droit et leur service alternatif comme jurés pussent avoir lieu sans leur interdire toute autre fonction. L’intervention des jurés dans les affaires civiles me paraît donc impossible jusqu’à ce que nous ayons changé, simplifié nos lois, et établi une 592 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 avril 1790. jurisprudence uniforme dans tout le royaume, telle qu’elle existe en Angleterre et en Amérique. Dans les affaires criminelles, j’ai déjà dit, et je me plais à le répéter, que dans tous les délits communs, le jugement par jurés est la sauvegarde de l’innocent accusé, et cette considération doit suffire pour le faire adopter; mais si je considère la liberté et l’ordre public dans les atteintes qu’ils peuvent recevoir des passions, des violences, des préventions, des mouvements impétueux du peuple, je ne vois plus, en certains cas, une garantie suffisante contre l’oppression par le jugement des jurés; et je sens alors le besoin d’un tribunal supérieur indépendant, responsable au Corps législatif, mais plus fort que ses justiciables. Je ne m’explique point dans cette séance sur l’organisation d’un tel tribunal, parce qu’il fait partie d’un système complet de l’ordre judiciaire, dont je ne prétends point analyser aujourd’hui tous les plans. En me bornant donc à la seule question des jurés d’après les considérations que je vous ai exposées, je demande pour les affaires civiles que la question soit ajournée à dix années. Dans les affaires criminelles, j’admets le jugement parjurés pour tous les délits communs et dans toute plainte où il y aura moins de dix coaccusés, auquel cas et dans tous ceux qui résulteraient d’attroupements séditieux, violences commises par un corps armé (1) ou par un corps administratif, je demande que de tels délits soient poursuivis à la requête du ministère public par devant un tribunal supérieur, indépendant, aux ordres duquel serait la force armée pendant l’exercice de ses fonctions. C’est à ces conditions seulement que je vois la liberté publique et individuelle assurée par l’établissement des jurés. M. de Cussy, député de Caen, demande et obtient un congé de quinze jours pour cause d’affaires de famille. M. le garde des sceaux fait part à l’Assemblée que M. le président d’Augeard a reçu les ordres en vertu desquels il se rendra ce soir à la barre de l’Assemblée. Il annonce, par le même billet, que le roi a donné sa sanction : 1° Au décret du 30 mars concernant les coupes de bois pour le service des salines de Moyenvic ; 2° Au décret du 25 mars, qui ordonne le paiement des lettres de change expédiées pour le service de la marine et des colonies; Et son acceptation au décret du 23 janvier, qui prescrit que tous les citoyens sans distinction seront soumis au logement des gens de guerre. M. le Président lève la séance à trois heures et demie. (1) J’ai parlé à la fin de la séance, après six heures de discussion, ce qui m’a forcé d’abréger mon opinion et de m’interdire tous les développements qu’elle exigeait; mais je me reproche de n’avoir pas fait remarquer que si la France devait être toujours distribuée en corps armés, telle qu’elle l’est aujourd’hui, et si ces corps avaient le droit qu’ils exercent et que l’on parait confirmer de se confédérer, de délibérer, de requérir, d’avoir des comités dirigeants, non seulement le jugement par jurés serait dangereux et oppressif, mais on ne pourrait S rendre confiance dans aucune espèce de tribunal. — ï. Pitt a dit une grande vérité dont nous devrions profiter : Nous passons au travers de la liberté , où arriverons-nous ? ASSEMBLÉE NATIONALE. [PRÉSIDENCE DE M. LE BARON DE MENOU. Séance du jeudi 8 avril 1790, au soir (1). M. le Président ouvre la séance à 6 heures du soir. M. le marquis de Bonnay, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance du matin, il ne s’élève aucune réclamation. Il est donné lecture de plusieurs adresses dont la teneur suit : Adresse d’adhésion, de félicitation et de reconnaissance des maire el officiers municipaux de Trecon en Champagne. Adresse de la compagnie militaire nationale des arquebusiers royaux de la ville de Vertus en Champagne, lesquels, en adhérant avec dévouement à tous les décrets de l’Assemblée nationale, et en offrant de concourir à leur exécution, même au péril de leur vie, demandent à être conservés danslanouvelle organisation de lamilice nationale et compagnie d’arquebusiers, mise en corps avec tous les arquebusiers royaux et nationaux des autres provinces du royaume. Adresse des habitants de la paroisse de Flori-gnac en Angoumois, lesquels, par l’organe de leur maire, font, pour les besoins de l’Etat, le don patriotique de la contribution de leurs ci-devant privilégiés pour les six derniers mois de 1789; la dite contribution montant à 441 livres. Adresse des curé et marguilliers du village d’Odeuq en Bruy, diocèse de Beauvais, qui offrent un don patriotique de deux calices, deux patènes et deux burettes d’argent. Don patriotique fait par un enfant de quatre ans et demi, fils du sieur Caron du Goudray, négociant à Beauvais, d’une tasse d’argent qui est toute sa propriété. Un autre secrétaire donne ensuite lecture à l’Assemblée d’un extrait du registre de la municipalité de Joncy, département de Dijon, district a’Arnay-le-Due, qui annonce que l’Assemblée de la commune dudit lieu, après avoir prêté solennellement le serment civique, a résolu d’offrir à la patrie une somme de 500 livres sur celle de 5,500 livres qui lui reste due sur le prix d’un bois de haute futaie, vendu il y a huit ans, et qui sont déposés depuis cette époque dans la caisse du receveur des domaines de Dijon. Le village de Blangey , annexé à la même paroisse, offre aussi un don patriotique de 100 livres, et gémit de ce que sa pauvreté ne lui permet pas de faire un plus grand sacrifice. La communauté des boulangers de la ville d’Ar-nay, animée du même patriotisme, fait aussi un don patriotique d’une partie de finances de 640 livres, produisant 32 livres de gages annuels, ensemble tous les arrérages qui sont dus. Adresse de marchands , entrepreneurs , manufacturiers , ouvriers, etc., exposant les inconvénients fâcheux de l'établissement d'un papier-monnaie à intérêt . Cette adresse est ainsi conçue : En France, quoique la balance du commerce, (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.