122 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [MÉAULLE, DUHEM et GOUJON, ce dernier sur-tout ont insisté long-tems pour être entendus contre ce rapport.] (105) [BOURDON (de l’Oise) dit que la question a été traitée par les comités, et le projet de décret arrêté à l’unanimité; mais que le rapport de Merlin n’a pas été lu à ces comités. TREILHARD observe que les comités ne se sont séparés qu’à deux heures du matin, et que Merlin n’a pu faire son rapport que d’une manière très hâtive : si donc il y avoit, dit-il, quelqu’ expression à reprendre, ce n’est que celui d’entre nous à qui il n’est jamais arrivé de dire plus ou moins qu’il ne vouloit, qui auroit droit de blâmer notre collègue dont personne ne peut suspecter les intentions. Après quelques débats l’Assemblée décide qu’elle entendra le rapport jusqu’au bout.] (106) [BENTABOLE : Ce projet est de la plus haute importance. J’y trouve de grands in-convéniens. [Il est persuadé que la patrie n’a été sauvée que par les représentans du peuple envoyés dans les départemens; qu’elle n’a été sauvée que par les pouvoirs indépendans et illimités dont ils sont investis, qu’elle seroit encore sauvée par les mêmes moyens si les mêmes crises se renouvelloient.] (107) Vos commmissaires seront absolument paralysés, et il leur sera impossible de faire le bien. Comment vos comités pourront-ils juger de la bonté d’un arrêté, sans connoître les circonstances qui les ont déterminés. Il faudra donc joindre à chaque arrêté un nombre infini de pièces; et tout celà ne fera qu’apporter du retard, dans l’exécution de la mesure. D’ailleurs, les arrêtés ne seront pas respectés, parce que l’on pourra toujours croire qu’ils seront cassés par les comités. Je demande l’ajournement et l’impression.] (108) [DUHEM appuie cette proposition en observant au surplus que si la mesure prise d’envoyer des représentans en mission a été accompagnée de quelques abus, comme le sont les plus sages institutions, il est dumoins une vérité constante, c’est qu’il en est résulté le salut de la République] (109). [On demande aussi l’impression du rapport; plusieurs membres s’y opposent : elle n’est pas décrétée. [BOURDON (de l’Oise) et DUHEM partagent cet avis : mais ils demandent l’impression du projet de décret seulement parce que le rapport n’est pas l’ouvrage des comités et qu’il ne leur a pas été soumis] (110). LEGENDRE demande qu’aucun rapport ne puisse être fait, au nom d’un ou de plusieurs (105) Mess. Soir,. n° 756. (106) Débats, n° 722, 441. (107) J. Paris, n° 621. (108) J. Perlet, n° 720. (109) Rép., n° 267. (110) J. Perlet, n° 720. comités, sans avoir été communiqués à ces comités. Adopté] (111). La séance est levée à quatre heures (112). Signé, Bernard (de Saintes), président ; L. Louchet, Borie, Cordier, Guffroy, Bentabole, Reynaud, secrétaires. AFFAIRES NON MENTIONNEÉS AU PROCÈS-VERBAL. 60 [La société populaire d’Auxerre (département de lYonne) à la Convention nationale, s. d.] (113) La société populaire d’Auxerre annonce que la mise en liberté d’une foule d’individus contre-révolutionnaires par théorie et par pratique afflige les vrais patriotes; elle pense que la religion de ceux qui ont ordonné ces mises en liberté a été sans doute trompée, qu’ils auront été circonvenus, et que les importunités auront fait violence à leur sagesse. Elle ajoute que, si l’on continue de mettre en liberté les contre-révolutionnaires, la patrie est perdue. Elle termine en disant qu’elle va faire connaître à la Convention les noms des contre-révolutionnaires du district d’Auxerre qui ont obtenu leur liberté, et les notes sur leurs crimes envers la patrie. On demande le renvoi au comité de Sûreté générale et l’insertion au bulletin. [Cette adresse, dit [DELAUNAY (jeune)] (114) est une censure injurieuse du gouvernement et de la Convention nationale, elle tend à jeter l’alarme pour empêcher les effets bienfaisants de la dernière révolution et remettre la terreur à l’ordre du jour. Si des contre-révolutionnaires ont été élargis, il est juste qu’ils soient réintégrés dans les prisons, le devoir de votre comité de Sûreté générale est de les y remettre. Renvoyez-lui cette adresse.] (115) [DU ROY appuie ce renvoi. [(Il) parle au long sur la définition, ce que c’est que les mal-veillans. Les malveillans, dit-il, sont les ci-de-(111) Les débats qui ont accompagné le rapport de Merlin (de Douai) sont inégalement rapportés dans la presse, une partie de ceux-ci accompagnent le rapport lui-même; nous avons suivi l’ordre des Débats, n° 722, 441. dans lequel nous avons inséré les variantes majeures; J. Perlet, n° 720; Moniteur, XXI, 744. Mess. Soir,. n° 756; M. U., XLIII, 430; Rép., n° 267; J. Mont., n° 136; C. Eg., n° 755; Ann. R. F., n° 285; F. de la Républ., n° 433; Gazette Fr., n° 986; Ann. Patr., n° 620; J. Paris. n° 621; Orateur P., n°2. (112) P.-V., XLV, 232. Moniteur, XXI, 744; J. Perlet, n° 720; M. U., XLIII, 430. (113) Moniteur, XXI, 741. (114) Ann. R. F., n° 285. (115) J. Perlet. n° 720. SÉANCE DU 26 FRUCTIDOR AN II ( 12 SEPTEMBRE 1794) - N° 60 123 vant avocats, procureurs, et ceux qui depuis la révolution se sont enrichis de la substance du peuple] (116). Mais il dit aussi qu’on doit bien surveiller les manœuvres de l’aristocratie. Les continuateurs de Robespierre sont les prêtres; il a en beaucoup vu à Vesoul, autorisés par Robespierre jeune à porter leurs ci-de-vants habits sacerdotaux. Ces continuateurs sont des fripons couverts de bonnets rouges et qui craignent la lumière] (117). [LOUCHET partage cet avis : J’observe dit-il que l’adresse de la société populaire d’Auxerre ne contient rien d’injurieux; il est dit seulement que la rehgion de ceux qui ont ordonné les mises en liberté peut avoir été trompée; j’en demande aussi la mention honorable et le renvoi] (118). André DUMONT : J’appuie le renvoi au comité de Sûreté générale, et s’il était nécessaire d’ajouter de nouveaux motifs à ceux déjà donnés, je vous dirais : Gardez vous d’accueillir trop favorablement les Adresses que vous recevrez; apprenez si quelqu’un de vous en doute encore, que le système actuel de vos ennemis est l’avillissement de la Convention nationale, le découragement des bons citoyens, et l’accroissement des rebelles de la Vendée. On veut tout décourager, tout anéantir, commerce, agriculture, arts; c’est sur vos débris et sur ceux du crédit public qu’on veut, sous le masque du patriotisme, anéantir la République. Quels sont vos ennemis? Ce sont ceux qui vous proposent le discrédit des assignats, qui en attaquent l’hypothèque, parce que l’Anglais leur a dit : C’est le seul moyen d’opérer la contre-révolution. On ose tout attaquer parce que c’est le moyen de sauver le crime et de déchirer la patrie. Sans doute on a pu mettre dans plusieurs départements des aristocrates en liberté; mais qui les y a mis? qui l’a provoqué? C’est là ce qu’il faut savoir. Rappelez-vous ce que disait sans cesse Robespierre : « On opprime les patriotes ! » et il les faisait assassiner; il caressait le peuple, et il le trahissait; il parlait contre la ci-devant noblesse, et il en était le secret partisan, il accusait les fanatiques, et il créait le fanatisme; il parlait contre les spectacles, il y allait sans cesse. Eh bien, Robespierre n’est plus, et son système est encore. On a voulu discréditer vos assignats, on a voulu la guerre civile, on la veut encore. Vous avez été trompés : défiez-vous en ce moment; vos trois comités vous diront la vérité; ils vous montreront la plaie et vous donneront les moyens de la guérir. Des adresses qui vous arrivent, plusieurs ne font que revenir; elles ont été faites à Paris : c’est ici que part le coup qu’on veut vous porter; parez-le. Les principes, voilà le pivot sur lequel doivent reposer vos délibérations. (116) M. U., XLIII, 427-428. (117) F. de la Republ., n° 433. (118) J. Perlet, n° 720. BECKER : Ces adresses ne sont que l’ouvrage des intrigants, je vais vous donner lecture d’une pareille lettre que j’ai reçue de l’agent national de Saint-Avold, département de la Moselle, et de la réponse que je lui ai faite; je désirerai que tous mes collègues en fissent autant. Je ne m’étendrai pas sur le contenu de la lettre, sur lequel j’aurais beaucoup à dire : voici l’article. Je lis : « Tous nos détenus sont mis en liberté, excepté Amelon et sa femme. Je crains bien que la tranquilité commune ne s’en ressente. L’aristocratie et le fanatisme y relèvent la tête d’une manière alarmante. » Sur quoi il y a en réponse : « tu me dis que nos détenus sont mis en liberté et que l’aristocratie y relève la tête d’une manière alarmante. Telles sont tes expressions; j’y réponds : Quand une municipalité, une société populaire, un comité révolutionnaire a favorisé l’aristocratie et n’a sévi que contre les sans-culottes, ce n’est alors que l’ouvrage de leurs mains. Je m’en suis plaint hautement. Je t’ai dans le temps vivement reproché que les lois n’étaient pas mises à exécution dans notre commune notamment celle sur la différence entre le numéraire et les assignats, et particulièrement celle du 17 septembre 1793; la Convention aujourd’hui qui veut une stricte éxécution, a passé à Tordre du jour motivé sur ce qu’elle a toujours dû l’être. » BECKER donne un détail de tout ce qui s’est passé à Saint-Avold, et prouve que les cordonniers, vitriers, maréchaux-ferrants, voituriers et manouvriers ont été mis en arrestation comme suspects, tandis que les ex-nobles, les riches, et les égoïstes sont restés en liberté’ à Saint-Avold. Voilà citoyens ceux qui osent aujourd’hui se plaindre. [Un membre demande pourquoi on lit à l’Assemblée vingt-cinq adresses dans le même sens et qu’on n’en lit pas dans un autre] (119). [ISORÉ : Ce n’est pas ainsi que Ton conduit l’esprit public. C’est en vous disant aujourd’hui blanc et demain noir que Ton veut parvenir à nous diviser. Quand donc cesserons-nous de fournir à l’aristocratie des armes contre nous? Je demande que toutes les adresses et motions de cette nature soient renvoyées à l’examen des trois comités qui ont la confiance de l’Assemblée et aux-quels nous avons demandé un rapport sur la situation politique de la République] (120). Le renvoi pur et simple au comité de Sûreté générale est décrété (121). (119) Ann. Patr., n° 620. (120) J. Perlet, n° 620. (121) Moniteur, XXI, 741-742. Mentionné dans Débats, n° 722, 438; Mess. Soir, n° 755; C. Eg„ n° 755; J. Paris, n° 621; Orateur P., n° 2; M. U., XLIII, 427-428; F. de la Répub., n° 433; J. Fr., n° 718; J. Mont., n° 136; Rép., n° 267; Ann. R. F., n° 285; Ann. Patr., n° 620 et Gazette Fr., n° 986; J. Perlet, n° 720. Ces trois derniers journaux rattachent l’intervention de Dumont à un débat plus large concernant la réorganisation des comités de Surveillance. Voir ci-dessus n° 53.