o'64 I Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I frimaire an 11 (12 décembre 1793 Le ministre de l'intérieur au citoyen Président de la Convention nationale. « Paris, ce 21 frimaire, l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. « Citoyen Président, « Le procureur général syndic du départe¬ ment de l’Aude, me demande, par sa lettre du 2 de ce mois, dont copie est ci-jointe, si l’article 13 de la loi du 25 août 1792 qui autorise les fermiers à se faire restituer les sommes qu’ils auront payées aux ci-devant seigneurs pour raison des droits féodaux supprimés et échus depuis le 4 août 1789 au prorata du montant desdits droits dont ils n’auront pas été payés eux-mêmes par les redevables, peut s’appliquer aux fermiers de biens aujourd’hui nationaux, dont la ferme était finie et devait être liquidée antérieurement à la loi du 25 août 1792. « Je pense bien que la condition de la nation ne doit pas être dans ce cas plus favorable que celle du fermier, qui ne peut répéter contre les redevables les droits féodaux supprimés; mais comme on objecte en faveur de la nation que la loi ne porte que sur les fermiers en exercice lors de sa publication, et qu’il s’agit dans cette circonstance de l’interpréter, je ne puis, citoyen Président, que m’en rapporter à la sagesse de la Convention nationale. « Paré. » Copie de la lettre écrite par le procureur général syndic du département de l'Aude, au ministre de l'intérieur ( 1 ). En 1785, Mandoul se rendit fermier par con¬ trat de la ci-devant seigneurie de Pornas et dépendances appartenant à l’émigrée Poulpry. Le bail expira en 1791, Mandoul donna en sous-ferme une partie des droits féodaux. A la fin du bail il se trouva débiteur envers l’émigrée d’environ 5,000 livres et à la même époque les redevables et les sous -fermiers lui devaient une somme à peu près égale dont il n’a pu suivre le paiement par rapport aux disposi¬ tions de la loi qui défend toutes poursuites à cet égard. Cette même loi accorde aux fermiers qui ont payé le montant du bail, le recours contre le ci-devant seigneur qui l’a perçu, et défend, comme on vient de le dire, les poursuites contre les redevables. Fondé sur cette loi, Mandoul demande que les 5,000 livres qui lui sont dues par ceux-ci ou par les sous-fermiers, lui soient tenues en compte sur les 5,000 livres qu’il doit encore. On lui oppose que la loi qui accorde le recours sur les ci-devant seigneurs, n’est pas applicable à sa prétention puisqu’elle a été rendue un an après l’expiration de son bail, et qu’elle ne peut être favorable qu’aux fermiers qui l’étaient à l’époque de la loi. Il réplique que cette loi qui inhibe toutes poursuites contre les redevables en accordant le recours contre le ci-devant seigneur a pourvu à l’indemnité du fermier qu’on doit considérer comme tel, surtout lorsqu’il se trouve reliqua-(1) Archives nationales, carton F7 30525, n° GG. taire et que toute poursuite lui est interdite contre les redevables, et notamment contre les sous -fermiers qui refusent de payer sur le fon¬ dement qu’ils ne peuvent percevoir le montant de leur sous -ferme. ;,-d Nous vous prions, citoyen ministre, de nous donner votre décision sur cette espèce qui n’a pas été prévue par la loi. Vive la Montagne ! Vive la République, une et indivisible et impérissable ! II. PÉTITION DE LA COMMUNE D’ISSY-LA-MON-TAGNE, DÉPARTEMENT DE SAÔNE-ET-LOIRE, POUR DEMANDER LA CONFIRMATION DE L’ARRÊTÉ DES REPRÉSENTANTS DU PEUPLE, COMMISSAIRES A L’ARMÉE DES ALPES, QUI A SUPPRIMÉ LE DISTRICT DE BELLE VUE-LES-BAINS, MÊME DÉPARTEMENT, ET POUR SOLLI¬ CITER LE RÉTABLISSEMENT PROVISOIRE DE LA MUNICIPALITÉ D’ISSY-LA-MONTAGNE DANS SES FONCTIONS (1). Suit le texte de la pétition de la commune d'Issy -la-Montagne et de l'arrêté \ du repré¬ sentant Claude Javogues d'après les originaux qui existent aux Archives nationales (2). « Paris 21 frimaire, l’an II de la Répu¬ blique française une et indivisible. A la Convention nationale. « Citoyens législateurs, « La commune d’Issy-la-Montagne dénonça, dans le mois de juin dernier, à la Convention nationale, les administrateurs coupables du district de Bellevue-les-Bains; vous renvoyâtes l’examen de leur conduite à votre comité de sûreté générale, qui n’a encore pu, jusqu’à ce jour, vous en faire son rapport (3). « Les représentants du peuple envoyés près l’armée des Alpes et dans les départements, après avoir recueilli sur les lieux toutes les connais¬ sances et les renseignements nécessaires, vien¬ nent de supprimer le district de B elle vue et do mettre en état d’arrestation les administrateurs. « La commune d’Issy-la-Montagne qui fai¬ sait partie de ce district se félicite de sa sup¬ pression; elle m’a fait passer un exemplaire de l’arrêté qui le supprime; je viens en demander la confirmation et vous exposer en peu de mots les motifs de cette suppression. « Le premier est la faiblesse de la population et de l’étendue de ce district qui n’était com¬ posé que de quinze mille âmes. Les frais de l’administration de ce district étaient absolu-(1) La pétition de la commune d’Issy-la-Mon¬ tagne n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 22 frimaire an II; mais en marge du docu¬ ment original qui existe aux Archives nationales on lit la note suivante : « Renvoyé au comité de divi¬ sion, le 22 frimaire an IL Reverchon, secrétaire. » (2) Archives nationales, carton Div bis 89 ( Saône-et-Loire ). (3) Voy. Archives parlementaires, lre série, t. LXVII, séance du 28 juin 1793, p. 612. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. « d~brei793 365 ment superflus, on a donc dû en décharger le peuple; et ce à titre de justice. « Le second motif non moins pressant que le premier, c’est qu’on ne pouvait former une bonne administration dans le district. « Les sujets capables de remplir les places y manquaient à un tel point, qu’on avait été obligé d’en prendre dans les districts et dépar¬ tements voisins, et de nommer trois prêtres au directoire; l’un était le président, l’autre le procureur syndic et le troisième un des premiers administrateurs; c’était trois ignorants, on peut juger après cela de la capacité des autres. « Une autre raison qui empêchait encore que l’administration du district de Bellevue ne put être bien composée, c’est que dans ce pays, toutes les familles, où l’on sait lire et écrire, sont parentes ou alliées les unes aux autres, et qu’ ainsi les différents pouvoirs partagés entre les municipaux, les juges et les administrateurs, se trouvaient toujours réunis et confondus dans les mêmes mains; ajoutez à cela, législateurs, que toutes les familles ne contenaient dans leur sein que des aristocrates gangrenés, des acca¬ pareurs endurcis et des gens enfin élevés et nourris dans la chicane; avec de tels hommes, il était impossible de former à Bellevue-les-Bains un bon district; il ne pouvait qu’être opposé au bien général et funeste aux bons citoyens tandis qu’il protégeait les mauvais, sous ce second rapport, il a donc dû encore être supprimé. « Vous pouvez juger, législateurs, quel devait être le patriotisme de tous les fonctionnaires publics du district de Bellevue-les-Bains par le patriotisme des députés qu’il a fournis aux trois Assemblées nationales. Êepoux, député à l’As¬ semblée constituante, fut feuillant ; Bijou, député à l’Assemblée législative, vota pour Lafayette et fut brissotin. Quant à Mortgilbert, député à la Convention, nous ne savons ni s’il a voté pour la mort du tyran, ni s’il a habité la Mon¬ tagne. Nous savons cependant qu’il était le meilleur patriote de Bellevue-les-Bains. Voilà les hommes que ce district mettait en place, et les trois que je viens de nommer étaient encore les moins mauvais. « Nous avons toujours vu, législateurs, que l’aristocratie domine plus facilement dans les petits districts et dans les petites communes, que dans ceux qui ont une population un peu nombreuse; il faut de la force pour repousser l’oppression, et la force du peuple est dans le nombre des citoyens réunis. Nous pensons que pour affermir partout la liberté et l’égahté, il ne faut pas craindre de supprimer et de réunir les communes et les districts dont la population n’est pas assez nombreuse et qu’il serait avan¬ tageux à la République que chaque district renfermât au moins 40,000 habitants et chaque municipalité 2,000. « Législateurs, la commune d’Issy-la-Mon-tagne demande la confirmation de l’arrêté qui a supprimé le district de Bellevue-les-Bains, et elle demande qu’à l’instant vous rétablissiez provisoirement la municipalité d’Issy dans ses fonctions, attendu qu’il y a six mois qu’elle est destituée par les administrateurs coupables du district de Bellevue, qui ont anéanti totalement l’esprit public, l’exécution des lois et la liberté à Issy-la-Montagne. « Us ont enlevé les registres de la municipa¬ lité, du tribunal de police municipale, du comité révolutionnaire et de la Société populaire affi¬ liée à celle des Jacobins et Montagnards; ils ont enlevé les preuves par écrit qui existaient contre les gens suspects, ils les ont mis en liberté; ils ont vendu le blé confisqué aux accapareurs et enfin ils ont fait tout le mal possible à Issy; depuis six mois je suis à Paris sans pouvoir obtenir justice ; la municipalité ne la demande pas pour elle, mais la commune entière m’a envoyé pour la réclamer en son nom comme fai¬ sant portion du souverain qui a été offensé tout entier en elle. « Cari on, maire et député d’Issy -la-Mon* tagne. » Arrêté (1). Les représentants du peuple envoyés près l’armée des Alpes, et dans différents départe¬ ments de la République. D’après les renseignements et instructions qui leur ont été donnés, sur l’organisation des districts qui forment le département de Saône-et-Loire, ont vu avec douleur que d’infâmes constituants de l’assemblée nationale, loin de s’occuper de la chose publique, ne calculaient que sur des intérêts de localité et ne cher¬ chaient qu’à multiplier les établissements; Que le district de Bellevue-les-Bains est une preuve frappante de cette vérité; qu’il n’est composé que de 34 communes et au plus de 10,000 âmes; qui ont eu l’art de se soustraire aux contributions que la fertilité de ce pays aurait dû supporter, proportionnellement et compara¬ tivement avec des endroits stériles qui sont surchargés ; Qu’une autre vérité non moins évidente, et jusqu’ici le résultat d’une funeste expérience, atteste que les endroits les plus favorisés de la nature, et dont les productions sont les plus abondantes, sont le foyer et le séjour de l’aris¬ tocratie la plus gangrenée, de la cupidité et de toutes les passions qu’entraînent la richesse et l’égoïsme; Que le district de Bellevue-les-Bains, placé dans le plus heureux site, a été un de ceux qui a puissamment secondé les efforts de la malveil¬ lance et de la contre-révolution, que depuis la glorieuse époque de notre régénération, on n’y a vu aucun esprit public, aucunes lois exécu¬ tées ; on n’y a vu que des mandataires parjures, qui oubliaient toujours la classe indigente pour ne s’occuper que de complots liberticides et de manœuvres criminelles avec les ennemis de l’intérieur et les accapareurs ; Considérant que sous le double rapport de l’économie et de la justice, il importe, d’une part, de ne pas surcharger la République d’une dé¬ pense inutile, et de l’autre de punir des admi¬ nistrateurs infidèles, et des administrés riches, faibles, qui n’ont point eu assez d’énergie pour dénoncer les trahisons des autorités cons¬ tituées, après avoir consulté les patriotes et les républicains les plus prononcés, sur la nécessité de la suppression de l’établissement de Bellevue-les-Bains, et de la réunion des communes for¬ mant ce district, à ceux qui sont environnants, arrêtent ce qui suit : (1) Archives nationales, carton Div bis 89 (Saône-et-Loire). ;