577 [Assemblée aationale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juin 1791.] sabilité emporte aussi la précaution nécessaire de laisser au choix de celui qui est responsable la nomination de ceux qui sont autour de lui. En conséquence, je conclus, comme M. Lavie, à ce qu’il soit fait mention expresse du droit qui appartiendra au gouverneur responsable de choisir, comme il le voudra, tous ceux qui agiront sous lui. M. Goupil-Préfeln. Les observations qu’on vient de faire sont extrêmement importantes; je demande le renvoi de l’article au comité. Plusieurs membres: Aux voix l’amendement! M. d’André. J’appuie le renvoi. Il est impossible que, sur une simple proposition qui n’a pas reçu tous les développements convenables, nous puissions prendre une détermination fixe dans un moment où il ne s’agit pas moins, d’un côté, que de rendre illusoire la responsabilité d’un gouverneur, s’il n’a pas le choix des agents secondaires; et de l’autre, d’ôter à un père toute espèce d’autorité et de relation avec les personnes qui environnent son fils. 11 y a, sans doute, peu de membres de cette Assemblée qui n’aient le bonheur d’être père. 11 n’y en a pas un seul peut-être qui voulût, pour toutes les couronnes de l’univers, perdre toute espèce de communication avec ses enfants; et pour l’enfant aussi, est-il possible d’imaginer... Plusieurs membres à gauche : Bah ! bah ! M. d’André. Mais, Messieurs... M. le Président. Parlez à l’Assemblée. M. d’André. J’ai droit de répondre à ceux qui m’interrompent, et je dis à l’Assemblée que je suis fâché pour celui qui m’a interrompu que ces sentiments-là ne fassent pas d’impression sur son cœur. ( Applaudissements .) Je dis, ue plus, que pour l’enfant il y a peut-être de la barbarie à retirer sur-le-cliamp un enfant de six ans des mains de ceux qui l’ont environné, pour le remettre entre des mains toutes nouvelles. Je ne prétends pas, pour cela, que ces motifs de sensibilité doivent entraîner l’Assemblée dans sa décision; mais je prétends que la question doit être examinée mûrement. Je demande donc l’ajournement. (L’Assemblée, consultée, décrète l’ajournement et le renvoi au comité de Constitution de la question de savoir si les personnes attachées au service de l’héritier présomptif seront au choix du gouverneur.) (L’article 5 est ensuite mis aux voix et adopté.) M. Démeunier, rapporteur. Voici le dernier article : Art. 6. « Le droit de déterminer le système d’éducation morale, civile et politique qui sera suivi à l’égard de l’héritier présomptif, ayant été réservé aux représentants de la nation par un décret antérieur, l’Assemblée nationale s’occupera incessamment de cet objet. » {Adopté.) M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de ce soir. l’Assemblée qu’il doit se présenter ce soir une députation de Givet qui annonce que les troupes de ligne en garnison dans cetie ville, inquiètes de la manière dont ce poste était défendu et apprenant que les travaux nécessaires à la mettre en état de défense étaient arrêtés faute de fonds, ont avancé une somme de 12,000 livres pour payer les retranchements et pour faire travailler. ( Applaudissements .) Ces régiments, qui sont ceux de Foix et d’Alsace infanterie, ont donné pour faire cette somme leur masse de linge et chaussure; ils se sont mis, eu outre, sur-le-champ à l’ouvrage, et ont dit qu’ils travailleraient jusqu’à ce que la place fût dans le meilleur état de défense possible. {Vifs applaudissements.) M. le Président fait donner lecture, par un de MM. les secrétaires, d’une lettre du ministre de la justice ainsi conçue : Monsieur le Président, « Je reçois dans l’instant une lettre de M. Du-veyrier, datée de Worms le 21 de ce mois, par laquelle il m’appren 1 son arrivée dans cette ville. Il a été reçu par M. de Condé et toutes les personnes qui l’environnent avec tous les égards dus à la mission dont il était honoré. « M. de Condé partait pour Mayence, d’où il devait se rendre à Coblentz et revenir ensuite à Worms. Il a laissé à M. Duveyrier la liberté de l’attendre à Worms ou de le suivre à Coblentz, en lui laissant apercevoir qu’en prenant ce dernier parti, il aurait plus tôt sa réponse. « M. Duveyrier s’est empressé en conséquence de partir pour Coblentz. « J’ai cru, Monsieur le Président, devoir m’empresser de donner à l’Assemblée nationale cette communication. « Je suis, etc. « Signé : DüPORT. » M. le Président fait donner lecture, par un de MM. les secrétaires, d’une lettre de M. Baudouin, imprimeur de l'Assemblée nationale , ainsi conçue : « Paris, le 28 juin 1791. « Monsieur le Président, « On vient de publier dans Paris un prétendu interrogatoire du roi et de la reine imprimé au nom et par ordre de l’Assemblée nationale. Il porte le cachet de l’Assemblée et le type de son imprimerie. « Il est de mon devoir de désapprouver le plus tôt possible l’impression de cet écrit; sa lecture est d’ailleurs plus que suffisante pour détourner l’Assemblée nationale de l’idée que cette production pourrait sortir de l’imprimerie nationale. « Je prends la liberté de demander à l’Assemblée nationale que mon désaveu soit consigne dans son procès-verbal. « Je suis, avec respect, etc. « Signé : BAUDOUIN. » M. Martineau. Je demande que l’accusateur public soit à l’instant chargé de faire informer contre les auteurs de cet imprimé... {Applaudissements.) Plusieurs membres : Oui ! oui ! c’est un faux î 37 M. de Aoailles. J’ai l’honneur de prévenir 1* Série. T. XXVII. 578 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juin 1791.] M. Martineau. . . il n’y a que les ennemis de l’Etat qui puissent concourir à la fabrication de cet écrit. (Applaudissements.) M. Buzot. Je demande que le décret porte ces mots : « Attendu qu'il s'agit d'un faux. » (Assentiment.) (L’Assemblée, consultée, ordonne qu’il sera fait mention du désaveu de son imprimeur dans le procès-verbal, et, attendu qu’il s’agit d’un faux, décrète que l’imprimé joint à la lettre de M. Baudouin, portant pour titre : Interrogatoire du roi et de la reine et leur déclaration aux commissaires nommés par l'Assemblée nationale, imprimés par ordre de l'Assemblée, avec un cachet portant ces mots : Assemblée nationale, la loi et le roi, 1789, et au bas du frontispice, ces mots : de l'imprimerie nationale, sera remis, après avoir été paraphé par le président et les secrétaires de l’Assemblée, à l’accusateur public de l’arrondissement, qui sera chargé de faire toutes poursuites nécessaires.) M. le Président lève la séance à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIbENCE DE M. ALEXANDRE DE BEAUHARNAIS. Séance du mardi 28 juin 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. M. le Président. M. d’Aumont, officier général, qui est sur le point de partir, demande à prêter le serment. ( Oui ! oui.) (11 lit la formule du serment.) M. d’Anmont. Je le jure! ( Applaudissements .) M. Merlin. Voici une lettre datée de Dunkerque du 25 de ce mois ; on y raconte d’abord la première sensation qu’a produite dans cette ville la nouvelle de l’évasion et de l’arrestation du roi et l’on continue ainsi : « Ce matin, à 4 heures, on apprit que tous les of li ciers de Goio u el-Générul, régim en t dont M.Con dé était colonel, avaient disparu, et avaient passé à Fûmes, ville autrichienne distante de 5 lieues. Us ont emporté avec eux les drapeaux, et n’en ont laissé que les bâtons. 8 officiers du régiment de Viennois ont aussi pris la fuite, après avoir tous essayé de débaucher quelques soldats de leurs régiments, dont aucun n’a consenti à les suivre. ( Applaudissements .) Une lettre qu’a laissée M. Téon, major du régiment, pour être communiquée à son régiment, et dont vous trouverez ci-après copie, vous prouvera que l’empereur était pour quelque chose dans cette petite espièglerie. Des détachements de dragons ont couru, mais trop tard, après les fugitifs. Des deux drapeaux qu’avait la garde nationale, elle en a donné un au régimeut de Colonel-Général, qui l’a accepté avec transport et reconnaissance. Des lettres suspectes interceptées ayant prouvé que M. Téon avait des intelligences avec un tri-nitaire, aumônier du régiment, qui avait refusé le serment, et qu’il l’avait laissé ici pour emporter la caisse, les soldats ont été chez cet ecclésiastique, où ils ont trouvé la caisse, contenant (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 50,000 livres, et de suite M. l’aumônier a été conduit en prison. « Les soldats et les citoyens sont dans l’union la plus intime; ces derniers ont tous pris les armes. Nous brûlons tous, non pas absolument de nous battre, mais de nous défendre jusqu’à extinction. ( Applaudissements .) La garde nationale et les militaires de ligne sont dans le même corps de garde. Tous les passants sont interrogés, toutes les voitures fouillées, ainsi que les navires. On a saisi 200,000 livres que des négociants faisaient passer chez l’étranger; on a saisi depuis les malles des officiers fugitifs, en sorte qu’il faut espérer que sous huit jours ces Messieurs seront sans chemises. ( Pares .) La lettre de M. Téon est un peu longue; je n’en lirai que quelques phrases : « Soldats, votre roi est dans les fers ! « La nouvelle de son arrestation est fausse; ainsi le premier régiment ne peut se dispenser d’aller le joindre pour former sa garde et le dérober au fer des assassins que l’on a pas manqué d’envoyer à sa poursuite : dépositaires de vos enseignes, nous verrons tous les boas français, les vrais patriotes et ceux mêmes qui en prennent le nom pour le souiller se rallier à nos drapeaux. Croyez que le parti royaliste qui est très nombreux va se déclarer quand il verra qu’il peut, sans compromettre les jours de son souverain, arborer la cocarde blanche. Reprenons le symbole de l’honneur français, et rejetons loin de nous la couleur d’un prince factieux, l’approche d’un nom qu’il déshonore et d’une famille qu’il déchire. « Vos officiers, vos vrais amis vous attendent à Furnes où l’auguste frère de notre reine a fait donner des ordres ainsi que dans toutes les frontières pour y recevoir les fidèles serviteurs du malheureux Louis XVI qui viendront à sou secours. C’est là que sera le noyau formé du premier régiment d’infanterie; c’est là que vos officiers vous attendent. Venez vous y rallier, venez y renouveler votre premier serment de fidélité au plus juste et au meilleur des rois ; mais que ces troupes qui sont infeelées des maximes des clubs qui se croient patriotes, quoiqu’ils n’aient ni foi, ni loi, ni honneur (Rires.) restent dans leur pays pour perpétuer l’anarchie. Souvenez-vous que vous êtes Français et que tout Français qui porte ce nom sans l’avilir doit obéir au roi et accourir pour avoir l’honneur de le recevoir. « Vive le roi ! « Signé : TÉON. »> Je demande que la lettre et la copie de lettre dont je viens de donner lecture soient renvoyées aux comités des rapports et des recherches et que ces comités soient autorisés à requérir l’envoi de l’originul de la lettre de M. Téon. (Gette motion est décrétée.) M. Merlin fait lecture d’une adresse du conseil général du département du Nord, qui fait part à l’Assemblée des mesures qu’il a prises pour assurer la tranquillité publique et la sûrete des frontières, après le départ du roi.; elle annonce le succès de ces mesures, et contient ia protestation de recevoir toujours avec une soumission sans bornes et d’exécuter avec la plus ponctuelle exactitude les lois des représentants du peuple. Une députation des officiers, sous-officiers et gendarmes nationaux de la première division est admise à la barre