324 [Assemblée nationale,] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 décembre 1790.] des droits perçus sur les pêcheurs français; ils se refusèrent à l’exécution de cet arrêt et portèrent leurs plaintes à l’amirauté; mais l’arrêt fut confirmé. — Cependant les pêcheurs mar-sei'lais persistèrent dans leurs plaintes; lors— qu’après avoir servi glorieusement la patrie ils venaient reprendre leurs bateaux et leurs filets, ils voyaient avec peinedes étrangers jouir, au milieu de la guerre, des faveurs de la paix et s’exempter du service public... Le mémoire qui a été publié par les prud’hommes de Marseille, que vous avez admis à la barre, cont ent encore d’autres griefs. Iis prétendent que la pêche à la ligne, usitée par les Catalans, est préjudiciable à la reproduction des poissons ; qu’ils détruisent pour les appâts douze mi le quintaux de petits poissons qui serviraient à la nourriture des pauvres, pour ne tirer que huit mille quintaux de gros poissons pour les riches. Us ajoutent qu’ils facilitent la contrebande, qu’ils font passer chaque année dans leurs pays 600,000 livres de numéraire; enlin ils demandent qu’ils exécutent littéralement les traités, qu’ils se sou-metient à toutes les charges du régime local, ou qu’ils soient exclus du port de Marseille. Les Catalans répondent qu’ils sont utiles à la ville de Mai sei 1 le, en ce qu’ils établissent une concurrence qui fait diminuer le prix du poisson, qu’ils entretiennent l’émula ion, qu’ils consomment à Marseille la plus grande partie du produit de leur commerce. Quant à l’impôt auquel on vent les soumettre, ils prétendent que ce st une contribution injuste qui ne tourne point au prolit de l’Etat, et que, loin de les forcer de l’acquitter, elle doit être supprimée pour tous, et qu’on doit leur rendre compte des sommes qu’ils ont payées. — Les trois corps administratifs de Marseille sont d’avis que les pêcheurs français doivent obtenir de votre part la protection qu’ils réclament pour soutenir la concurrence avec les étrangers, et que, par conséquent, les Catalans doivent être soumis à toutes les charges locales. Quant au classement de c> s derniers, vos comités n ont pas cru devoir interpréter ni étendre le sens des traités; ils vous proposent le projet de décret suivant... (Le rapporteur donne lecture d’un projet de décret en huit articles.) MM. Mougins et Castellanet présentent des observations sur le projet de décret. M. Bouche. La juridiction des prud’hommes de Mar.-eille s’étend à quatorze lieues de côtes et à trente et même à quarante lieues en mer. Les pauvres pêcheurs sont onligés de chercher cette juridiction bon loin pour les contestations les plus minutieuses. Je demande que la juridiction des prud’hommes de Cassis soit rétablie ; les pêcheurs de ce port n’auront plus le désavantage d’être souvent jugés par leurs parties. M.Malouet. J’adopte cetle motion. Les corps administratifs de Marseille vous ont exposé la nécessité de réduire la juridiction trop étendue des prud’hommes de Marseille. Je vous propose de réd'ger le décret en ces termes : « L’Assemblée nationale s’étant fait rendre compte des pétitions et mémoires des patrons-pêcheurs de Marseille et autres pêcheurs etrangers établis dans cette ville et autres ports français de la Mrdiierrauée, ouï ses comités de marine, de commerce et diplomatique, a décrété ce qui suit : « Art. lor. « Toutes les lois, statuts et règlements sur la police et les procédés de la pêche, particulièrement les règlements sur les faits et procédés de la pèche en usage à Marseille, autres que ceux du 29 décembre 1786 et du 9 mars 1787, seront provisoirement exécutés, l’Assemblée se réservant, après la révision desdites lois, statuts et règlements, de former un nouveau code des pêches; et attendu qu’on a renouvelé, sur les côtes de Provence et de Languedoc, un procédé de pêche anciennement proscrit et sensiblement préjudiciable à l’industrie des pêcheurs et à la reproduction du poisson, ledit procédé connu sous le nom de la pêche aux bœufs, l’Assemblée nationale confirme les défenses prononcées par les précédentes lois, sous les peines y portées. Art. 2. « Les pêcheurs catalans continueront à jouir, d’après les conventions subsistantesentrelaFrance et l’Espagne, de la faculté de pêch r sur les côtes de France, et de vendre leur poisson dans les ports où ils aborderont, en se conformant aux lois et règlements qui régissent les pêcheurs nationaux; en conséquence, lesdits pécheurs catalans etautres étrangers domiciliés ou stationnaires à Marseille et sur les côtes de Provence, seront soumis comme les nationaux à la juridiction des prud’hommes dans les lieux où il y en a d'établies (celle de Marseille est maintenue) et obligés de se faire inscrire au bureau des classes où il leur sera délivré un rôle d’équipage contenant le nombre d’hommes dont sera armé chaque bateau pêcheur; ceux sous pavillon français pourront être composés par moitié d’étrangers; et ceux sous pavillon d’Espagne, pourront aussi être composés par moitié de Français. Art. 3. « Seront également soumis les pêcheurs catalans et autres étrangers, comme les nationaux, au payement de la contribution dite de la demi-part, lorsqu’ils viendront vendre leurs poissons dans les marchés français. Art. 4. « La parité de charges et d’obligations entre les nationaux et les Catalans, assurant aux uns comme aux autres une parité de droits dans l’exercice de leur profession, les pêcheurs catalans, domiciliés à Marseille, jouiront en commun pour l’éten-dage de leurs filets, des terrains appartenant à la communauté des pêcheurs, seront appelés à ses assemblées et délibérations, et pourront être élus prud’hommes aux mêmes titres et conditions que les nationaux. Art. 5. « Les assemblées delà communautédes pêcheurs, pour toutes les élections et pour la reddition des comptes de recette et dépense de la communauté, seront tenues en présence d’un officier municipal et du procureur de la commune ou de son substitut, lequel aura le droit de requérir ce qu’il avisera pour constater l’authenticité des comptes, et parvenir à la liquidation des dettes de la communauté. Art. 6. « Les délibérations de ladite communauté pour 325 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 décembre 1790.] l’administration des revenus, et les contestations qui surviendraient sur le fait des élections, seront soumises à la décision du directoire du district, et, en dernière instance, à celle du directoire du département. Art. 7. « Tous les patrons pêcheurs, propriétaires d’un bateau monté de quatre hommes au moins, le patron et le mousse compris, ne pourront être soumis à aucun service public hors de l’enceinte du port et de la rade qu’ils habitent. Art. 8. « Le roi sera prié de donner ses ordres au ministre des affaires étrangères, pour concerter avec la cour d’Espagne les moyens d’attacher au service de l’une et l’autre nation, les gens de mer français et espagnols, domiciliés ou stationnaires sur les côtes de France et d’Espagne. (Les huit articles qui précèdent sont successivement mis aux voix et adoptés.) (Le même rapporteur, d’après quelques observations qui lui ont été faites, a proposé un article additionnel en faveur de la ville de Cassis; cet article, qui a été décrété, est ainsi conçu :) Art. 9. <> L’Assembléenationale, prenant en considération la pétition de la ville de Cassis, pour le rétablissement, dans son port, de la juridiction des prud'hommes, dont elle jouissait anciennement, décrète que ladite juridiction y sera rétablie, et qu’il sera accordé sur les côtes de la Méditer-rannée de pareils établisements à tous les ports qui en feront présenter la demande par les municipalités et corps administratifs des lieux. » (L’ensemble du décret est mis aux voix et adopté.) M1 dernier, rapporteur du comité des finances. Messieurs, vous avez entendu les détails des débordements de la Loire, de l’Ailier et du Cher: j’ai à vous entretenir des désastres qu’ont causé ces rivières à leur source. Dans le département de la Haute-Loire, l’inondation a été subite sur une étendue de quinze lieues. Voici une lettre du district de Monistron, écrite à un des députés du département: « J’ai remonté la Loire et les autres rivières voisines; je n’ai trouvé que des ruines, des arbres, des maisons renversés. J’ai vu les malheureux habitants occupés à chercher dans la vase et le limon leurs provisions anciennes. — Voilà, me di -aient-ils, ce qui nous reste pour nourrir nos femmes et nos enfants. — Nous n’avons d’autre espoir que dans la sensibilité de l’Assemblée nationale. » Vous avez accorde des secours à d’autres départements qui ont beaucoup moins souffert : le comité vous propose de donner 15,000 livres de plus à ce département et à celui du Puy-de-Dôme qui a été peut-être plus maltraité encore. Le projet de décret du comité des finances est mis aux voix et adopté dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, décrète qu’il sera provisoirement accordé une somme de 45,000 livres à chacun des départements de la Haute-Loire et du Puy-de-Dôme, pour être employé auxsécours les plus urgents et aux réparations les plus pressantes des dégâts occasionnés par les chutesd’eaux qui ont grossi subitement dans leurs sources, la Loire, l’Ailier et la Dore; les administrateurs de ce département demeurent chargés de faire la distribution desdites sommes dans une juste proportion et d’en rendre compte. » M. Vernier présente, au nom du même comité, trois autres rapports : le 1er est relatif à l’accusation intentée contre le maire d’Anie itenil pour s’être opposé, soi-disaut à la perception des impôts, et avoir propagé des principes co itr ;ire3 à la Constitution. Il se trouve que le fait est faux; que les directoires de district et département ont rendu le meilleur témoignage de ce fonctionnaire public — Le 2e a pour objet d’accorder provisoirement aux oratoriens de Saiens une pension de 1200 livres jusqu’à ce qu’il y ait été autrement pourvu. — Le 3e concerne les frais de la médaille frappée à l’occasion de la journée du 4 août, aux fins de ne point les faire peser sur la nation et de les faire payer aux membres de l’Assemblée sur leurs premiers mandats. Les t rois projets de décret du comité des finances sont mis aux voix et adoptés, sans débat, dans la forme suivante : Premier décret. « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, sur une imputation faite au sieur Collas, maire d’Argenti-uil, par Jean-Baptiste Avis Desfoutaines, brigadier au recouvrement des impositions royales, dans son procès-verbal du 21 juillet 1790, de s’être opposé à la perception des deniers publics, et d’avoir parlé d’une manière peu respectueuse du Corps législatif, décrète, d’après l’avis du district et département, et sans avoir égard audit procès-verbal, qu’il n’y a pas lieu à inculpation contre le maire d’Argenteuil ; qu’elle est satisfaite du zèle qu’il a constamment apporté, ainsi que la municipalité dudit lieu, au maintien et à l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale. » Deuxième décret. « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, considérant que le collège des pères de l’Oratoire établi à Salins, ne peut se soutenir sans des secours extraordinaires, et que, par la suppression des jésuites, les biens qui appartenaient à cette société dans le ressort de ce département avaient été vendus sans procurer aucun secours audit collège, quoique le roi, par ses lettres patentes du 30 juillet 1766, eut ré-ervé expressément de s’expliquer sur l’emploi qui serait fait des revenus des biens des jésuites pour l’éducation de ses sujets de F. anche-Comlé, décrète que sur les fonds libres de la caisse de régie des bénéfices et d'administration des biens "provenant des jésuites dans la ci-devarit province de Franche-Comté, il sera prov soir unent accordé à la ville et au collège des pères de l’Oratoire de Salins, la somme de 1,200 livres par au, jusqu’à ce qu’il ait été pourvu définitivement à l’emploi du revenu provenant des biens des jésuites dans ladite province. » Troisième décret. « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, ordonne, en exécution de ses décrets des 4 août 1789 et 30 septembre 1790,