676 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 septembre 1791.] patriotisme que le préopinant vient d’annoncer a l'Assemblée, c’est à celui qui a eu l’honneur de présider l’assemblée des électeurs de l'année 1789 qu’il appartient spécialement de lui rappeler quelques faits qui peuvent aider à sa décision. Je puis attester à l’Assemblée que le 25 du mois de juin 1789, époque où il pouvait y avoir quelque mérite de prendre un parti bien décidé en faveur des premières opérations de l’Assemblée nationale et de la liberté, M. de la Salle, un des électeurs du ci-devant ordre de la noblesse, fut le premier à l’assemblée électorale pour s’occuper de donner l’adhésion la plus formelle aux premiers décrets de l’Assemblée nationale. VoLà, Messieurs, le premier trait que je connaisse, et celui-là en vaut bien un autre. M. de la Salle, fidèle à ses principes, a été mis à la tête de l’armée nationale parisienne dès l’instant de sa formation. C’est sur lui seul que reposa le soin de maintenir la tranquillité publique dans les importantes journées du 13 et du 14 juillet 17c49, jusqu’à cequelagarde nationale fût organisée. Je crois, Messieurs, qu’il est inutile de vous détailler les dangers qu’a courus ce citoyen, et surtout son patriotisme qui ne s’est pas démenti un seul instant dans les fonctions importantes dont la confiance publique l’avait investi. Le 10 du mois d’août, te sieur de la Salle faillit être la victime d’une erreur populaire, et c’est d’après ces faits que, rentré dans la foule des citoyens, il est resté sans récompense. M. Désaudray, officier des troupes de ligne supprimé, s’est présenté le 14 du mois de juillet, à 10 heures du matin à l’hôtel de ville et a offert ses services. Ils ont été acceptés ; on lui a expédié un brevet, et le premier acte qu’il a fait du jouvoirdont l’avait investi la confiance de ses concitoyens a été de voler au secours du sieur Grouet, de l’arracher des bras de ceux qui, le prenant pour le gouverneur de la Bastille, ont manqué de le rendre victime de leur erreur. Il a reçu un coup sabre quia été pansé dans l’hôtel de ville ; néanmoins it n’a pas cessé un instant de continuer les fonctions qu’il remplissait. Messieurs, ce sont des citoyens de cette espèce pour lesquels je demande une pension de 2,0U0 écus. ( Mouvements divers.) M. dedustine. Un devoir dont l’Assemblée ne doit jamais s’écarter, c’est de ne distribuer que les faveurs qui sont en son pouvoir et de laisser au pouvoir exécutif le droit de proposer les pensions à donner. En conséquence, je demande qu’il soit fait une mention honorable au procès-verbal des actions de ces 2 officiers et que le surplus soit renvoyé au pouvoir exécutif. M. Rœderer. Le principe de M. de Gustine est extrêmement bon pour tous le3 acles dignes de récompense qui se sont passés dans les temps ordinaires; mais, quand il s’agit des services de la Révolution, d’un acte de la Révolution à sa naissance, c’est au pouvoir constituant, qui seul a les pouvoirs révolutionnaires, si je puis me servir de cette expression, à décerner de pareilles récompenses. En conséquence, je crois que l’Assemblée nationale doit suivre l’exemple qu’elle s’est déjà donné à elle-même : c’est elle qui a récompensé les gardes nationales tués devant Nancy; c’est elle qui doit attribuer les récompenses dues aux gardes nationales de Paris. Je propose toutefois un amendement à la moiion de M. Delavigne : c’est de réduire la somme qu’il propose à 2,000 livres pour M. de la Salle et de 1,000 livres pour M. Désaudray. ( Marques d'assentiment.) (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il sera accordé une pension de 2,000 livres à M. de la Salle et de 1,000 livres à M. Désaudray, en sus de leur traitement.) M. Lavie. Je propose à l’Assemblée de voter et d’insérer dans le procès-verbal des remer ciments , au nom de la nation, à la municipalité de Paris, à laquellenous avons tant d’obligations, ainsi qu’à M. Bailly, son maire. {Applaudissements). (Cette motion est décrétée.) M. Camus annonce qu’il est prêt à rendre compte de la fabrication des 800 millions en assignats ; mais attendu la multitude d’affaires dont l’Assemblée est chargée dans cette séance, il demande l’impression de son rapport. (Cette impression est ordonnée.) (1). M. le Président. La paro'e est à M. Bureaux de Pusy pour faire un rapport sur V organisation de la garde du roi. M. Bureaux de Pusy, au nom du comité militaire. Messieurs, vous avez décrétéque leroiaurait une garde et \o s avez posé les bases de l’organisation générale de cette gerde dans la Constitution même. Actuellement le roi propose l’organisation de sa garde. Le comité militaire, àqui cette proposition a été renvoyée, n’ayant trouvé rien qui ne fut conforme à vos principes constitutionnels, a rédigé, sous forme de décret, la proposition du roi ; et c’est celle que je vais avoir l’honneur de vous soumettre : « L’Assemblée nationale, délibérant sur la proposition du roi, après avoir entendu son comité militaire, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Conformément aux dispositions de l’acte constitutionnel, la garde du roi sera divisée en 2 corps; l’un de 1,200 hommes d’infanterie, l’autre de 600 hommes de cavalerie, ainsi qu’il sera plus amplement expliqué ci-après. Art. 2. « Le grand état-major de la garde du roi sera composé d’un lieutenant général commandant en chef, de 2 maréchaux de camp, commandant l’un l’infanterie, l’autre la cavalerie, et de 2 adjudants généraux colonels, attachés l’un à la garde à pied, l’autre à la garde à cheval. Art. 3. « La garde à pied sera partagée en 3 divisions, de 400 nommes chacune. Art. 4. « L’état-major de chaque division de la garde à pied sera composé d’un colonel commandant de division, de 2 lieutenants-colonels, et de 2 adjudants-majors. Art. 5. « Chaque division de la garde à pied sera de 8 compagnies de 50 hommes, commandées chacune par un capitaine, un tieuteaant et un sous-lieutenant. (1) Voir ci-après ce document aux annexes de la séance, page 690. [30 septembre 1791.] [Assemblée nationale] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. A;t. 6. « La garde à cheval sera partagée en 3 divisions de 2Ü0 hommes chacune. Art. 7. « L’état-major de chaque division de la garde à cheval sera composé d’uu colonel commandant de division, de 2 lieutenants-colonels, et de 2 adjudants-majors. Art. 8. « Chaque division de la garde à cheval sera de 4 compagnies de 50 hommes, commandées chacune par un capitaine, un lieutenant et un sous-lieutenant. Art. 9. « La garde d’honneur fournie par la garde nationale, prendra la droite sur la garde à pied. Le roi sera prié de régler invariablement les postes que la garde nationale devra occuper lorsqu’elle sera de service auprès de sa personne. Art. 10. « Les 3 officiers généraux, chers de la garde du roi, feront toujours au choix de Sa Majesté. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. de Cernon, au nom du comité des finances. Messieurs, je viens au nom de votre comité de s finances vous présenter le compte de M. Baudouin, imprimeur de V Assemblée nationale. Au moment où l’Assemblée se rassembla, elle était sans imprimeur: M. Baudouin fut alors présenté et prit avec vos commissaires l’engagement d’imprimerie procès-verbal in-8° et d’en remettre un exemplaire à chacun des membres de l’Assemblée nationale; il annonça en même temps qu’il compterait de clerc à maître avec l’Assemblée pour toutes autres impressions étrangères à ce travail ; c’est de cet objet que votre comité m’a principalement chargé de vous rendre compte ; depuis, M. Baudouin a entrepris une édition in-4° du procès-verbal, dont il a encore pris l’engagement de remettre un exemplaire à chacun des députés. Toute l’Assemblée sait avec quel soiu M. Baudouin a rempli son engagement.... Plusieurs membres : Pas trop bien ! M. de Cernon, rapporteur... Nous lui devons delà reconnaissance pour l’activité avec laquelle il s’est livré à ce travail. Je vous rappellerai encore la confiance avec laquelle M. Baudouin a avancé ses propres fonds, mettant ainsi sa fortune à découvert, l’exactitude avec laquelle il a rempli les engagements qu’il contractait pour vous lorsqu’il imprimait tout ce dont vous ordonniez l’impression, sans avoir d’autre engagement de votre part, que l’espérance qu’il fondait sur le compte que je viens vous présenter, lorsque les contrefaçons, lorsque les journaux qui le devançaient, anéantissaient souvent les bénéfices qu’il pouvait attendre. M. Baudouin croyait en effet que, le procès-verbal étant plus exact que tous les journaux, il aurait un grand nombre de souscripteurs ; mais les journaux, devenant plus agréables au public que ce procès-verbal, ont anéanti les nombreux souscripteurs qui s’étaient tout d’abord présentés : ses bénéfices ont donc vite diminué pour s’éteindre bientôt : de 2,700 le nombre des abonnés est tombé à 900. M. Baudouin n’en a pas 677 moins continué son envoi et jamais pas même aujourd’hui, il n’a fait de réclamation : il ne vous demande de lui payer que ce qui lui est rigoureusement dû pour ses dépenses. Le second objet qui pouvait légitimer des réclamations de M. Baudouin, était le travail sur les pensions, dontvous aviez décrété l’impression. Il fit cette impression en effet; mais ces listes de pensions ont cessé de se vendre. Aujourd’hui les obligations que vous avez à remplir envers M. Baudouin, peuvent s’étendre à tous les objets étrangers au procès-verbal, comme les nombreux projets de décrets, les rapports, les tableaux des finances, les adresses, les opinions particulières, les affiches ; enfin, tout ce qui concernait le service de l’Assemblée. Vos commissaires ont examiné le compte détaillé, article par article, que M. Baudouin leur a remis; ils l’ont vérifié; ils se sont assurés que toutes les pièces y énoncées ont été réellement imprimées : toutes ont été représentées en nature. Il résulte que M. Baudouin est créancier de 336,000 livres, et ce résultat a été calculé à tant la feuille d’impression. Sans doute, cette manière de calculer est la plus modérée de toutes, surtout lorsqu’on a été obligé de faire des impressions pendant ia nuit, de faire des envois à domicile. Je répète que l’on ne comprend point dans le compte dont je vous entretiens, le procès-verbal queM. Baudouin a toujours fourni gratuitement. Vos comités ne se sontpas contentés dece simple mémoire ; ils ont vu que M. Baudouin avait pris rengagement de compter de clerc à maître, c’est-à-dire de rendre compte à l’Assemblée de sa situation; ils ont donc réclamé un état de situation. M. Baudouin a donc présenté son compte par dépenses et par recettes. 11 e î résulte qu’il a dépensé 1,174,000 livres ; ilen ôte la recette qui est de 1,069,000 livres. Il y a donc dans ses affaires un déficit de 105,000 livres, entre ses recettes et dépenses, qui, joint à la propriété qu’il avait antérieurement, et qu’il a versée tout entière dans ces affaires, forme précisément en chiffres ronds la somme que vous lui devez. La troisième opération par laquelle M. Baudouin a voulu convaincre vos commissaires de la légitimité de sa créance, est la remise de son bilan ; il résulte de la comparaison de l’évaluation de son imprimerie, avec l’état de ses dettes. Il est encore prouvé par laque M. Baudouin sera au pair dans ses affaires en remplissant les engagements qu’il a faits. Il est donc bien prouvé par cet examen que vous devez à M. Baudouin 336,090 livres. Surcette somme, il a reçu du comité des finances, qui a cru à différentes reprises devoir lui procurer une aide, 119,000 livres environ : il reste donc à lui payer 217,000 et quelques centaines de livres ; et c’est la somme que votre comité vous propose de lui faire payer. (Cette proposition est adoptée.) M. Regnaud (de Saint-Jean-d'Angély). Messieurs, il résulte du compte qui vient de vous être soumis que les affaires de M. Baudouin seront seulement au pair lorsque vous lui aurez payé ce que vous lui devez; il résulte encore qu’il continuera à vous donner le procès-verbal dont la dépense sera entièrement à sa charge. Je demande que vous lui accordiez une gratification. M. Barnave. Je demande qu’il soit accordé à M. Baudouin une gratification de 30,000 livres.