[États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] 287 nous, Blanc, greffier, qui avons accepté ladite i commission, et promis de s’en acquitter fidèlement. Ladite nomination des députés ainsi faite, les-dits habitants ont, en notre présence, remis audit Tuscat, et à nous Blanc, greffier, leurs députés, le cahier, afin de le porter à l’assemblée qui se tiendra, le 2 du mois prochain, devant M. le lieutenant général, et nous ont donné tout pouvoir requis et nécessaire, à l’effet de les représenter à ladite assemblée pour toutes les opérations prescrites par 1 ordonnance de M. le lieutenant général, comme aussi de donner pouvoir général et suffisant de proposer, remontrer, aviser et consentir à tout ce qui peut concerner les besoins de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement de l’ordre fixe et durable dans toutes les parties de l'administration, la prospérité générale du royaume, et le bien de tous et chacun des sujets de Sa Majesté; Et, de leur part, lesdits députés se sont présentement chargés du cahier de doléances de ladite communauté, et ont promis de le porter à ladite assemblée, et de se conformer à tout ce qui est prescrit et ordonné par lesdites lettres du Roi, règlement y annexé, et ordonnance susdatée ; desquelles nominations de députés, remise de cahier, pouvoir et déclaration, nous avons à tous les susdits comparants donné acte ; et avons signé avec ceux desdits habitants qui savent signer, et avec lesdits députés, notre présent verbal, ainsi que le duplicata que nous avons présentement et réellement remis auxdits députés pour constater leurs pouvoirs. Et le présent sera déposé,.- et remis aux archives du secrétariat de cette communauté, lesdits jour et an. CAHIER Des doléances, plaintes et remontrances de la communauté de Chûteauneuf-le-Rouge, sénéchaussée d’Àix. Les habitants chefs de famille de ce lieu chargent leurs députés de représenter : Art. 1er. Que tous les habitants du royaume doivent être soumis aux mêmes impôts. Les exemptions sont des injustices et une source intarissable de procès. Nous sommes tous sujets du même souverain; nous devons tous contribuer aux charges communes. Les froids excessifs, qui ont causé un grand dommage aux habitants de ce lieu, sont un motif de plus pour une répartition égale des impôts, puisque ce sera un soulagement pour les pauvres. Art. 2. Les députés demanderont encore qu’il soit permis aux communautés de se racheter de tous les droits seigneuriaux, comme cens, taxe, banalités et autres; les droits ne font que grever les habitants et propriétaires de la campagne, et tendent à. rainer l’agriculture en dégoûtant et opprimant les cultivateurs. Les abus auxquels les droits tyranniques donnent lieu, ne font que rendre ces inconvénients plus sensibles. Autrefois, leshabitantsde C hà teau n eu f-le -Rouge payaient leur cens par le blé qu’ils recueillaient; quoi de plus naturel que de payer une imposition qui doit être prise sur les fruits avec ces fruits mêmes! Aujourd’hui le seigneur force ses vassaux à nettoyer à la main le blé qu’ils lui donnent; c’est une nouvelle surcharge pour un droit déjà très-onéreux par lui-même. La faculté de rachat tarira la source de ces abus, et rendra aux habitants des campagnes leur liberté primitive. Il existe, dans ce lieu, un droit d’herbage et de ramage, qui appartient au seigneur. Sous ce prétexte, les fermiers détruisent tous les fruits des habitants dans le moment où un hiver rigoureux vient, de -tuer la plupart des oliviers. Le droit d’herbage ôte aux habitants tout espoir de voir leurs arbres renaître; les oliviers poussent parle pied, mais le bétail mangera les jeunes rejetons : et par conséquent, plus d’espoir pour la réparation du désastre. Autrefois, la communauté avait le droit de bû-chererdans les bois, que le seigneur s’est attribué sous prétexte de la directe universelle. Aujourd’hui, on les prive de ce droit; et ils sont impitoyablement dénoncés toutes les fois qu’ils veulent user de ces facultés qui peuvent, seules, leur rendre l’habitation plus supportable. Ces inconvénients, ces abus de localité, dont cette communauté peut se plaindre, sont de nouveaux motifs qui exigent la suppression des droits seigneuriaux par la faculté de les racheter. Le rachat assure au seigneur sa propriété, et les habitants des campagnes recouvrent leur liberté primitive, les cultivateurs leurs encouragements, et l’agriculture est améliorée. Art. 3. Les députés réclameront encore que la chasse et la pêche soient libres. Le droit de chasse est attribué à chaque propriétaire, parce qu’il dérive de la défense naturelle. 11 faut que le cultivateur puisse préserver les productions de leurs fonds des incursions du gibier ; et l’on voit trop souvent, dans les terres seigneuriales, les bêles, conservées pour les plaisirs du seigneur, manger la subsistance du pauvre vassal. Que d’abus ce droit n’entraine-t-il pas après lui ! le seigneur et ses gens foulent toutes les propriétés et ne respectent rien ! Art. 4. Les députés demanderont, en quatrième lieu, la suppression, des justices seigneuriales; des officiers établis psr le Roi doivent seuls rendre la justice à ses peuples. Il ne faut pas qu’un sujet, quel qu’il soit, destitue et choisisse, à son gré, les officiers d’un tribunal; la dignité de la justice souffre de cet abus. Art. 5. Les députés demanderont la suppression de la dîme et des droits casuels des curés. La dîme n’est due qu’au pasteur du lieu où elle se recueille; et son produit doit être proportionné aux soins de ce pasteur. Il suit de là que des corps ou des particuliers, qui ne font rien pour les habitants d’un lieu, ne doivent avoir aucun droit sur leurs fruits. D’autre part, si la dîme est trop forte pour les charges, il faut la diminuer; et si elle est trop faible, il faut l’augmenter. Il n’y a donc qu’à la supprimer et à la remplacer par une redevance que les habitants feront à leur pasteur, et qui sera déterminée par les Etats généraux. Ici, on peut encore remarquer qu’il est très-extraordinaire que les habitants de Ghâteauneu f-le-Rouge payent la dîme au quatorzième, et que le seigneur, pour ses biens nobles, ne la paye qu’au vingtième. Enfin, les députés de cette communauté adhéreront aux autres doléances qui seront proposées pour le bien général du royaume, et celui de la Provence en particulier. A laquelle assemblée il a été délibéré, tout d’un commun accord, qu’il serait envoyé pour député le sieur François Tuscat, syndic dudit I lieu, et nous, Blanc, greffier de ladite communauté. 288 [États gén. 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Signé De Poisier, lieutenant de juge; Barthélemy; Jourdan; Paul; Jourdan. Collationné : Signé : Blanc, greffier. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances que les habitants de la communauté d’Eguilles , sénéchaussée d'Aix en Provence , entendent être faites à Sa Majesté ; et moyens de pourvoir et subvenir aux besoins de l’Etat, ainsi qu’à tout ce qui peut intéresser la prospérité du royaume et celle de tous et chacun les sujets de Sa Majesté qu’ils croient devoir être présentés au Roi et aux Etats généraux du royaume (1). Art. 1er. Que tous les impôts sans exception seront également répartis à proportion des possessions sur tous et un chacun les membres de l’Etat, sans distinction d’ordre; et que tous privilèges à cet égard seront abrogés à jamais, étant juste que tous ceux qui profitent des mêmes avantages participent également aux mêmes charges. Art. 2. Que, par les mêmes motifs, les députés et représentants de l’ordre du tiers-état seront toujours en nombre égal à celui des députés des deux autres ordres du clergé et de la noblesse réunis dans toutes les assemblées des trois ordres ès Etats, soit généraux, soit provinciaux, ou tous autres quelconques. Art. 3. Que le retour périodique et régulier des Etats généraux sera fixé à trois ans, pour y prendre en considération l’état du royaume; et que les Etats provinciaux, qui se tiendront régulièrement toutes les années, seront, à l’avenir, composés sur le pied des Etats généraux, de manière qu’ils forment une représentation légale de tous les individus de chaque ordre. Art. 4. Qu’aucune loi bursale, ni aucune loi générale et permanente quelconque, ne seront établies qu’au sein des Etats généraux, de l’avis, et conjointement, des gens des trois états du royaume. Art. 5. Que la liberté individuelle sera assurée par l’abolition de toutes lettres closes , lettres d’exil, et autres espèces d’ordres arbitraires. Art. 6. Que les codes civil et criminel seront réformés, afin que les justiciables puissent obtenir, sur les lieux, une justice plus prompte et moins dispendieuse ; et qu’à cet effet, toutes commissions particulières et évocations au conseil seront abolies. Art. 7. Que, pour favoriser et diminuer les gênes du commerce, les douanes seront reculées aux frontières. Art. 8. Que la province jouira, pour l’exportation de ses denrées et productions hors du royaume, .des mêmes privilèges et modérations des droits dont jouit la province la plus favorisée. Art. 9. Que le commerce et la circulation des grains seront libres; mais que tous accaparements de blé seront défendus; et que, pour y obvier, tout particulier, faisant commerce de grains, sera obligé de déclarer aux officiers municipaux des lieux où il les déposera, la quantité qu’il en a en magasin, et de l’exposer en vente à un prix modéré, lorsqu’il sera ainsi dit par les officiers municipaux. Art. 10. Que la contrainte par corps pour fait (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. [Sénéchaussée d’Aix.) d’imposition royale ou municipale sera abolie; et que les exécuteurs des deniers publics seront tenus de se faire payer sur les objets soumis aux-dites impositions. Art. 11. Pour favoriser l’agriculture et l’entretien des bestiaux, le prix du sel sera diminué. On propose, pour y parvenir, le plan donné par un particulier de Tarascon, qui le fait revenir à bas prix, sans qu’il y ait une diminution de revenu pour l’Etat. Art. 12. Que, pour encourager la culture des terres, les cens et directes qui les grèvent pourront être rachetés moyennant un capital proportionné au revenu et à la nature de ces droits. Abolition de tous les autres droits seigneuriaux. Art. 13. Que, pour la conservation des récoltes, et pour prévenir les dégâts que les bêtes fauves et le gibier causent aux fruits de la terre, il sera permis à chaque propriétaire de les chasser dans ses fonds et domaines, même situés dans les terres seigneuriales. Art. 14. Suppression de la juridiction seigneuriale; établissement d’une juridiction royale; la police et l’autorisation des conseils aux consuls. Art. 15. Suppression de la dîme; les évêques, abbés, curés et vicaires réglés à un revenu suffisant pour vivre honorablement suivant leur état. Art. 16. Que l’entrée dans tous les bénéfices ecclésiastiques, dans le service militaire et dans la magistrature, sera ouverte à tous ceux du tiers-état qui en auront les talents requis. Art. 17. La dette de l’Etat sera consolidée. Art. 18. Les ministres seront responsables à la nation de l’emploi des fonds. Art. 19. La réduction des droits de contrôle et insinuation à un taux modique. Art. 20. La liberté de la presse. Art. 21. Le respect le plus absolu pour toutes lettres contiées à la poste. Art. 22. La faculté à tous voituriers d’atteler quatre chevaux à leurs charrettes dans la Provence, ainsi qu’il est permis dans toutes les provinces du royaume. Art. 23. L’abonnement des péages dans tout le royaume. Art. 24. La liberté de semer du tabac et du safran dans tout le royaume. Art. 25. Prendre en considération le mémoire du sieur Goullin, maître chirurgien, qui a été lu et approuvé par la présente assemblée, qui a délibéré de le joindre au présent cahier. Art. 26. La liberté à tout artisan de s’établir et exercer son métier dans toutes les villes du royaume, à l’exception de celle de Paris, sans payer de maîtrise. Fait et arrêté à Eguilles,dans l’église paroissiale, le 29 mars 1789. Signé Jean-François Ollivier, M.-C.; Joseph Artaud, consul; Maurice Reynaud, consul; Aubry; Séguin; Giraud; Aubry; Marmieux; Joseph Reynaud; Marroc; Antoine Richaud ; Denis Guilton; Mathieu Guy; André Richard; J. Devause; Joseph Séguin; Guele; François Bompar; Arnieu, Antoine Artaud; B. Richard'’; Ch. Bompar; Jean-Joseph Revbaud; Eyrier; B. Maurin; Louis Martin; Jean Marroc; Tharan; Goullin; Dioulouzat; Serres; Michel, üenaux; Gnard; Romery; Joseph Gros cadet; B. Artaud; E.-V. Artaud; Renaut; Joseph Artaud; François Joye; Maximin Coste; A. Reynier; J. Quartier; Thomas; Lange Aillaud; César Artaud; Antoine Barbier; Matrey; L. Giraud; J. Armieur; L . Girard ; Jean-Pascal Artaud ; J. Reynaud ; A. Pre-cheury; Pierre Loiat; J.-JosephGisseris; J.tP. Ail-