I Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 122 janvier 1791.] 425 par laquelle il instruit l’Assemblée nationale du résultat de la vente de 6 maisons nationales situées en cette capitale. M. Liucas. Je demande à l’Assemblée la permission de l’informer de la disposition où sont presque tous les curés du département de l’Ailier à prêter le serment civique. A l’appui de ce que je viens de dire, je demande à lire la lettre d’un d'eux. Elle est ainsi conçue : « Je suis trop ami de l’ordre et de la tranquillité pour jamais me prêter à ce qui pourrait les troubler. Le serment civique que l’on exige de nous n’est point nouveau pour nous; nous l’avons déjà prêté plusieurs fois dans les assemblées primaires auxquelles nous avons assisté ( Murmures du côté droit); aussi ne fait-il point la moindre sansation dans nos cantons, non plus que les écrits que l’on y répand avec profession. Je ne connais aucun de mes confrères qui veuille s'y refuser; tous sont disposés à le prêter. » {Murmure du côté droit.) Voilà de quoi j’ai l'honneur de vous faire part. M. Vernier, au nom du comité des finances. Je ne dois pas vous dissimuler, Messieurs, que les administrateurs du département d’Ille-et-Vi-laine prédirent au mois d’août qu’ils avaient à craindre les inondations pour les digues de Dol; ils écrivirent au comité des finances; mais on ne crut pas voir les objets assez pressants pour déférer à leurs plaintes. Cependant, Messieurs, leur crainte a été justifiée; les digues, dans les nuits des 4 et 5, des 5 et 6, ont été entamées dans une infinité de parties. Il est urgent de les réparer. Déjà le département a mis les ouvriers en action et il a fait prendre 3,928 1. 10 s. dans une caisse publique, pour être pourvu au payement. Aujourd’hui, Messieurs, il vous demande d’emprunter de la caisse publique une nouvelle somme pour faire travailler à ces réparations urgentes. On ne peut se refuser à leur accorder provisoirement cette somme qui sera d’ailleurs imputée sur celle qui leur sera distribuée pour les ponts et chaussées. En conséquence, votre comité des finances m’a chargé de vous présenter le décret que je vais vous lire : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances sur les accidents qu’on t éprouvé le3 digues de Dol, département de l’Ille-et-Vilaine, dans les nuits du 4 au 5, du 5 au 6 du courant; sur les dangers qu’il y aurait, pour les habitants de ces contrées, à retarder les réparations qu’elles exigent, et sur les pertes immenses qui en pourraient résulter; décrète, d’après l’avis du district et du département, que le receveur des revenus publics comptera provisoirement, et en 2 payements égaux, de quinzaine à autre, la somme de 34,000 livres sur l’ordonnance des administrateurs du département, pour être incessamment employée aux réparations les plus urgentes desdites digues, sous la surveillance des districts et département, sur laquelle somme sera remboursée celle de 3,928 1. 10 s. qui a dû être comptée par le sieur Massé, d’après les ordres du directoire; le tout sous l’obligation de rendre compte, et sauf à décider en définitif à la charge de qui tomberont les réparations dont il s’agit. » (Ce décret est adopté.) M. Defermon, au nom du comité de la marine. Messieurs, au nom de votre comité de la marine, je viens vous proposer des dispositions nouvelles au code pénal de la marine. Les plaintes que le capitaine de la frégate « La Capricieuse » vient de rendre à Rochefort contre tout son équipage, nous a fait sentir que nous n’avions point prévu ce cas. Gomment convoquer en pareille circonstance le juré martial? Il pourrait arriver qu’il ne se trouvât pas le nombre d’officiers du grade exigé pas vos décrets. Nous croyons avoir pourvu à tout par les articles suivants : Art. 1er. « Dans le cas où le capitaine d’un bâtiment se rendrait accusateur contre son équipage, ou une partie de son équipage, la plainte sera portée par lui au commandant de l’escadre dont le bâtiment faisait partie, ou au commandant du port, si le bâtiment n’était point en escadre ; ce commandant indiquera en nombre double, parmi les hommes de mer étrangers au bâtiment, ceux qui doivent composer le jury, conformément à l’article 5 du titre Ier du coae pénal; le prononcé du jury sera porté à un conseil de justice, également indiqué parle commandant de l’escadre ou du port, et composé d’officiers étrangers au bâtiment, au nombre de 5 au moins, et, s’il est possible, en nombre égal à celui des officiers de l’état-major du bâtiment. Ce conseil s’assemblera à bord du vaisseau commandant dans l’escadre ou de l’amiral dans le port, et le commandant du port fera, s’il y a lieu, exécuter le jugement du conseil de justice. Art. 2. « Dans les cas où on ne pourrait trouver dans une escadre, ou dans un port, le nombre d’officiers de chaque grade nécessaire pour composer un conseil martial, ils seront remplacés par les officiers les plus anciens des grades inférieurs qui seraient présents dans le port ou dans l’escadre, pourvu qu’ils soient au moins lieutenants de vaisseaux ». (Ce projet de décret est adopté.) M. Blaré, curé à Saint-Domingue, et membre de la ci-devant assemblée coloniale, demande et obtient la permission de retourner chez lui pour cause de santé. L’ordre du jour est un rapport des comités d'agriculture et de commerce et des contributions publiques sur les droits de traites. M. Oondard, rapporteur (1). Messieurs, dans un premier rapport (2), j’ai eu l’honneur de vous rendre compte de l’ancien état de la France, quant aux droits imposés sur le commerce, tant intérieur qu’extérieur. Vous avez décrété la suppression des barrières locales ; vous avez détruit, pour jamais, cette foule de droits impolitiques, créés successivement à la faveur de besoins momentanés, et dont la nation sollicitait, depuis deux siècles, l’anéantissement. Vous avez précédemment aboli les droits de péage, d’autant plus onéreux que leur perception était plus répétée et non moins vexatoire que tous ceux que vous avez proscrits : ainsi, le com-(1) Ce document n’est pas inséré au Moniteur. (2) Voyez le l*r rapport de M. Goudard, séance du 27 août 1790, Archives parlementaires, t. XVIII, p. 303 et suivantes. 416 (Assemblée nationale.J merce ne sera plus opprimé, rançonné par ces perceptions arbitraires qui troublaient toutes les spéculations, et dont l’étude était, pour ainsi dire impraticable. Je crois inutile de vous retracer les motifs qui ont déterminé un décret aussi bienfaisant; il est exécuté. Les douanes sont reléguées sur les ports et à l’extrême frontière; mais la perception des droits sur les relations commerciales de la France avec l’étranger n’est point encore établie. Vous avez décrété que cette perception serait fondée sur un tarif uniforme et commun à tous les bureaux, situés sur l’extrême frontière. Je vous avais soumis ce tarif, au nom du comité d’agriculture et de commerce; une grande uestion s’est présentée à votre discussion, celle es prohibitions; vous avez déterminé les bases d’après lesquelles vous avez voulu que le tarif fût formé; votre comité des contributions publiques a été adjoint à celui d’agriculture et de commerce pour la révision de cet important travail qui intéresse la nation sous tant de rapports : c’est le résultat d’une très longue discussion que je viens vous soumettre dans ce moment. Vos comités ont reçu les mémoires des divers départements : ainsi, tous les points du royaume ont été appelés à cette discussion; les négociants en particulier ont été entendus souvent contradictoirement, lorsqu’ils différaient d’opinion ; toutes les objections ont été appréciées; et nous ne nous sommes déterminés qu’après les plus mûres réflexions; et toujours par ce grand principe, l’intérêt général du commerce combiné avec l’intérêt national, dont il est inséparable. 11 peut donc nous être permis de dire que le tarif, que nous vous présentons aujourd’hui, est porté au point de perfection dont il était susceptible dans l’état actuel; car un tarif, exempt d’inconvénients, serait une entreprise impossible; il faut appeler le secours de l’expérience, pour connaître les réformes dont il est susceptible ; il faut s’en reposer sur les chambres de commerce, sur les lumières et l’intérêt des manufacturiers et des négociant? qui auront la faculté d’envoyer à l’administration leurs réflexions; il faut s’en remettre aux législatures, qui vous succéderont, du soin d’une nouvelle révision ; elles n’auront pas, comme vous, à tout refondre, à créer un nouvel ordre de choses, des débris d’un système vexatoire et destructif de tout commerce, de toute industrie; elles pourront, avec facilité, dans une nouvelle révision, rectifier le tarif ; vous aurez toujours fait un grand bien et préparé le mieux que l’on désire et que les hommes atteignent si difficilement. J’écarterai de la discussion les détails fastidieux dans lesquels vos comités ont dû entrer : je me bornerai à vous soumettre, au nom de vos deux comités, les bases et les principes de ce nouveau tarif, dont il est instant d’ordonner la perception en remplacement des droits actuellement existants ; les manufactures et le commerce souffrent de ce retard, et le Trésor public appelle, par ses besoins, les ressources de cette perception. Le tarifsedivisenécessairementen deux classes: droits d’entrée, droit de sortie ; je commence par les droits d’entrée qui se divisent en onze articles. Art. 1er. C’est une vérité reconnue que la ,Franfce est loin de recueillir, en matières première?, tout ce |22 janvier t79j,J qui est nécessaire à l’aliment de ses manufactures et de ses fabriques. Elles absorbent, soit pour la consommation nationale, soit pour l’exportation, toutes celles qu’elle récolte ; son importation, qui est pour l’industrie si avantageuse , appelle un excédent de matières premières que l’étranger nous fournit ; pour conserver ce précieux avantage, il faut attirer des matières premières; le besoin que nous en avons excède cent millions, année commune. C’est de ce point qu’il faut partir, et c’est ce grand intérêt qu’il faut consulter, pour imposer ou ne pas imposer les marchandises qui ont le caractère de matières premières. Tout ce que vous avez fait, Messieurs, en faveur de l’agriculture doit, sans doute, accroître les productions nationales ; vosinstitutions, toutes vos lois tendent à ce but ; vivifier l’agriculture. On doit donc espérer que les laines, les chanvres, les lins, les graines à huile, les olives, les mûriers, etc., ne tarderont pas à présenter des récoltes assez abondantes pour subvenir à la plus graude partie de nos besoins. Mais jusqu’à cette époque, peu éloignée peut-être, la politique, l’intérêt pressant de vos manufactures commandent d’admettre les matière? premières en exemption de tous droits. Je n’ai pas besoin, Messieurs, de démontre? cette proposition; il suffit de l’énoncer devant des législateurs qui embrassent, par la peusée, toutes les parties du système politique et commercial. imposer les matières premières, serait en effet renchérir, dans la proportion du droit, les objets manufacturés; dès lors, plus de cou-? curreuce chez l'étranger, diminution dans l’exportation, anéantissement de l’industrie. La con» sommation nationale offrirait également des désavantages; car il serait indispensable d’élever le prix des objets manufacturés en France, dans la proportion des droits perçus sur les matières; et, dans cette hypothèse, le taux des droits d’em trée sur les manufactures étrangères serait di-r minué dans la proportion de ceux imposés sur les matières premières, au détriment des avan-r tages qu’un bon tarif doit procurer à l’industrie nationale. C’est donc pour nous-mêmes, Messieurs, qu’il est juste, nécessaire, de prononcer l’affranchissement des droits d’entrée, relativement aux matières premières; vos comités, en agissant d’après ces principes, sont bien sûrs qu’une telle disposition n’excitera nulle réclamation au milieu de vous. Exceptions. Je dois cependant vous observer qu’il en est quelques-unes qui ont paru susceptibles d’uu droit modéré, d’environ 2 1/2 0/0 de leur valeur* attendu que la France fournit des productions à peu près de même nature, dans la proportion de ses besoins, et qu’il est d’une bonne politique de leur assurer une préférence quelconque sarcelles de l’étranger. Ces principes n’éprouveront vraisemblablement aucune contradiction; ils ont cependant paru, à vos deux comités, mériter une exception, relativement aux charbons de terre, aux soies, aux huiles de poisson, à celles d’olives, nécessaires pour les fabriques, et aux savons de Marseille qui doivent être imposés en proportion des huiles qui entrent dans leur composition. Je dois vous présenter, sommairement, tes ma-ARCH1VES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 janvier 1791.] 427 tifs qui ont déterminé, à cet égard, l’opinion de ▼os deux comités. Charbons de pierre et de terre. La France ne manque pas de mines de charbon de pierre et de terre ; mais la localité de ces mines ne leur permettrait d’approvisionner plusieurs provinces qu’à des frais très considérables : on ne peut d’ailleurs se dissimuler que les charbons de ces mines sont, pour la plupart, inférieurs à ceux que nous fournit l’Angleterre; il faut donc pourvoir, tant aux besoins des fabriques qui emploient ce combustible, qu’à l’intérêt de nos mines; et vos comités ont pensé que ce double point de vue serait rempli, en modérant généralement le droit actuel sur le charbon de terre de l’étranger, en le réduisant à 6 livres le tonneau de 2,200, ou environ, sur les charbons importés par les ports qui seraient difficilement approvisionnés par les mines nationales, et en îe fixant à 10 livres sur les importations effectuées par les ports qui ont la ressource des mines nationales. Soies. Le droit actuel sur les soies peut être estimé à peu près de 5 à 6 0/0 de la valeur, y compris les 10 sous pour livre, perçus au profit du Trésor public. Le droit principal est aliéné au profit de la ville de Lyon, par où l'introduction est aujourd’hui d’onligation absolue. Cette aliénation n’est point gratuite, et ne peut être considérée comme un octroi particulier; elle est le prix de 18 millions de capitaux, empruntés pour l’Etat et versés dans le Trésor public; le produit du droit principal, monte à 675,000 livres, il est inférieur à l’intérêt des capitaux fournis pour prix de l’aliénation; en sus du droit principal, il est perçu un sou pour livre au profit des hôpitaux de Lyon; les 10 sous pour livre font partie des revenus de l’Etat. Vos comités ont pensé d’abord que cette aliénation devait être révoquée, et que dans le travail qui serait fait sur les villes, il serait pourvu au juste dédommagement qui serait dû à celle qui a versé des capitaux dont elle n’a jamais été remboursée, et dont le produit du droit n’a même pas pu fournir au payement des intérêts. Cet objet, tout important qu’il est, doit se confondre avec les vues générales que vous adopterez sur les villes, et vous conduit nécessairement à prendre leurs situations particulières en considération, parce qu’elle tient au système général de l’imposition, et à la grande administration des finances. D’un autre côté, si l’époque où il fut statué que les soies acquitteraient nécessairement le droit à Lyon, cette ville était presque la seule dans le royaume qui eût des fabriques importantes de soies, il put paraître convenable alors de la rendre l’entrepôt presque universel de toutes les matières premières de ce genre de manufactures. Mais aujourd’hui que les choses ont changé, qu’il s’est établi des fabriques du même genre, à Tours, à Nîmes, à Saint-Etienne, à Sainl-Cha-mond, à Paris, soit en rubans, soit en étoffes de tous les genres; la faveur qui leur est due réclame qu’elles aient la faculté de faire venir directement de l’étranger les soies qui sont nécessaires à leur entretien, et d’en acquitter les droits aux bureaux des frontières; nouveau motif pour que la nation retire ce droit à elle, et la perception aux bureaux des frontières est une conséquence de la disposition générale du reculement des barrières. Ces principes sont tellement les vôtres, que vous seriez étonnés que vos comités vous en eussent présenté de contraires. Des vues d’utilité générale et d’égalité pourraient-elles n’être pas accueillies par vous? Votre justice examinera l’intérêt particulier, et trouvera, dans les ressources de la nation, des moyens de satisfaire à toutes vos obligations. Vos comités se sont donc uniquement occupés de déterminer, d’après ces premières réflexions, quel serait le droit auquel il conviendrait d’as-» sujettir les soies étrangères. Dans l'examen de cette question, il est nécessaire de considérer l’intérêt national et de favq� riser la culture des mûriers et l’éducation des vers à soie; car ce fut par cette considération que le droit fut établi. Cette considération doit se faire maintenir encore quoique nous ayons un besoin réel de cette matière première; mais sous l’ancien régime, on est toujours sorti des justes proportions. Le droit a été successivement porté de 14 sols la livre à 22 sols, tant par les 10 sols pour livre dont le gouvernement les a grevés à son profit, que par le sol pour livre additionnel au profit des hôpitaux de Lyon. Le gouvernement forçait les villes à emprunter pour lui : un impôt servait à acquitter les intérêts, et bientôt cet impôt déjà considérable devenait l’occasioa d’une nouvelle charge. On imposait sans mesure; vous n’établissez des droits que dans une juste pro« portion : vos comités ont donc dû vous proposer, sans égard au produit qui est aujourd’hui de 5,100,000 livres environ, de réduire le droit sur les soies graises et non ouvrées à 10 sols la livre, au lieu de 22 sols taux actuel. Eu se bornant à ce droit les soies, matières premières, sont ménagées, et nos productions en ce genre, infiniment précieuses par leurs qualités, reçoivent l’encouragement et la protection dont cetto partie de l’agriculture a besoin. Il a de même pensé, pour l’intérêt de nos manufactures et de notre industrie, devoir réduire à 20 sols, le droit sur les soies ouvrées et sur celles à coudre qui ont reçu leur première préparation. Les soies en cocons sont affranchies de tout droit, et celles venant de l’Inde et de la Chine par notre commerce direct avec ces nations, étant des matières très précieuses et très nécessaires pour nos fabriques de gaze, votre comité vous propose de ne les assujettir qu’à la moitié des droits fixés pour les soies venant de l’Italie, ou de toute autre contrée étrangère. Ces dispositions, dictées par l’intérêt de l’agriculture et de notre industrie, seront utiles au Trésor public, uisqu’elles ménageront un produit de plus de 00,000 livres sur cet article des importations de l’étranger. Vos comités, considérant l’importance du commerce des soies, et la nécessité où la France se, trouve d’être, à cet égard, tributaire de l’étranger, se seraient déterminés à vous proposer de substituer leur libre exportation à la prohibition qui subsiste ; ce parti serait peut-être un moyen positif de faire de la France l’entrepôt général où les étrangers viendraient s’approvisionner de cette matière première : maie l’utilité de conserver nos soies originaires, l’inquiétude que leur extraction pourrait donner à nos fabriques,. leur pat fait penser que la prohibition deyait être 428 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 janvier 1791.] maintenue momentanément , et jusqu’à ce que la matière plus approfondie mette des législatures subséquentes en état de prendre, à cet égard, un parti définitif; en attendant , il suffira de consentir le transit en faveur des soies d’Italie destinées pour l’étranger, par emprunt de notre territoire. Huiles de poisson. Vos comités, Messieurs, ne se sont point fait illusion sur l’utilité de cette matière première ; mais en même temps ils ont reconnu la nécessité de maintenir la prohibition présentement existante, en admettant une exception en faveur des Etats-Unis de l’Amérique, dont les huiles de poisson continueront d’être reçues en France en payant 5 livres par quintal, conformément aux romesses faites par le gouvernement aux Etats-nis d’Amérique. Cette exception en faveur des Etats-Unis est fondée sur le désir que nous avons d’étendre nos opérations commerciales avec cette nation qui nous est chère à tant de titres : la politique de cette mesure ne peut vous échapper. Mais si nous recevons les huiles de baleine et depoissondes autres puissances étrangères, nous anéantirons nos pêches; nous serons forcés de renoncer aux avantages que la France s’est promis de l’établissement formé par les Nautukois à Dunkerque, établissement dont les succès ont passé nos espérances, et que les nouveaux citoyens se proposent de porter dans plusieurs autres ports de la France. Je dois cependant vous soumettre, Messieurs, une question relativement aux encouragements accordés à la pêche des Nautukois; ils consistent dans une prime de 50 livres par tonneau du poids de 2,000 livres d’huile de poisson qu'ils rapportent en France ; cette prime (en estimant à 30 livres le quintal, le prix de ces sortes d’huiles) est de 16, 1/3 0/0, de la valeur; elle équivaut à un privilège exclusif; elle interdit toute concurrence aux armateurs français qui désireraient établir cette sorte de spéculation ; il serait donc juste de les y faire participer : et si vous admettez cette mesure, il est probable que bientôt les armateurs de Bayonne, Saint-Jean-de-Luz et autres ports du royaume se rappelleront leurs anciens succès dans la pêche de la baleine, et s’empresseront d’imiter les Nautukois que la politique et l’intérêt de pourvoir aux besoins de nos manufactures, nous a fait appeler en France. Cet objet sera la matière d’un rapport particulier qui vous sera présenté par votre comité d’agriculture et de commerce. Huiles d'olives , propres aux manufactures et à la fabrication des savons. Cet article, Messieurs, est un de ceux qui ont fixé plus particulièrement l'attention de vos deux comités; les prétentions des fabricants de savon de Marseille sont tellement différentes de celles des fabricants de Languedoc, Provence, Roussillon et Dauphiné, qu’il a paru nécessaire de ne rien statuer sur la fixation des huiles et savons, sans avoir mûrement examiné les mémoires respectifs. Les huiles d’olives, connues souslenom d’huiles de la rivière de Gènes et propres à la table, étaient assujtettes à des droits revenant ensemble à 8 1. 12 s. 6 d. le quintal; et celles de Provence, lors de leur importation dans les autres provinces du royaume, acquittaient 6 livres par quintal ; la différence était donc de 2 1. 12 s. 6 d. par quintal. Les décrets qui ont aboli le droit de fabrication des huiles et ceux de circulation, affranchissent les huiles nationales de tout impôt; conséquemment elles seront assurées d’obtenir la préférence sur celles de la rivière de Gènes, que vos comités ont pensé devoir être assujetties à un droit de 7 1. 10 s. par quintal lors de leur importation en France, et sur cet article il n’existe aucune réclamation. Il n’en est pas de même des huiles communes d’Espagne et de Portugal, de Naples, de Sicile et du Levant, propres aux manufactures ou à la fabrication des savons. Les Marseillais demandent que les droits sur ces huiles, qui étaient de 5 livres par quintal, soient réduits de moitié, et que celui des savons fabriqués à Marseille ne soit fixé qu’à 1 1. 10 s. par quintal, attendu qu’il rentre trois cinquièmesd’huile dans la fabrication d’un quintal de savon. La Provence, au contraire, demande que le droit actuel sur ces sortes d’huiles soit maintenu, et que les savons de Marseille soient imposés à un droit de 3 livres le quintal. Cette différence d’opinions est une conséquence de la suppression des droits de circulation et de fabrication sur les huiles. En effet, les savons fabriqués en Provence, Languedoc, Roussillon et Dauphiné, avec des huiles étrangères, étaient ci-devant assujettis à divers droits revenant à plus de 6 livres le quintal, lorsqu’ils étaient introduits dans les autres provinces du royaume. Ceux de Marseille, fabriqués avec des huiles étrangères, ne devaient au contraire que 4 1. 10 s. par quintal; ainsi par le fait et la nature des droits, Marseille avait un grand avantage pour la fabrication des savons, et les fabriques du Languedoc, de la Provence, du Roussillon et du Dauphiné, ne pouvaient soutenir la concurrence que dans l’intérieur de ces provinces, parce que les savons n’y étaient grevés que du droit qu’elles avaient acquitté sur les huiles étrangères qui entraient dans leur composition. Actuellement les droits de circulation et celui de fabrication n’existent plus : ainsi les fabricants de l’intérieur qui n’emploieront que des huiles nationales, jouiront de l’exemption de tout droit à la circulation, tandis que les fabricants de Marseille, qui n’emploient que des huiles étrangères, acquitteront, à l’entrée de leurs savons un droit proportionnel à la quantité d’huile qui entre dans leur composition. Ces avantages sont naturels; car si d’un côté les droits de fabrication sur les huiles, et ceux de circulation sont supprimés, la contribution foncière sera d’un autre côté plus élevée, en sorte que la valeur des productions du soi doit subir un accroissement. Ainsi les provinces qui cultivent les oliviers doivent jouir de l’affranchissement de tout impôt sur les huiles qu’elles récolteront ou qu’elles emploieront à la fabrication des savons, tandis que les huiles étrangères, qui entreront dans la composition des savons, doivent acquitter un droit réprésentatif de la contribution foncière. C’est d’après ces réflexions, Messieurs, que vos deux comités ont pensé que le droit sur les huiles communes importées ae l’étranger devait être fixé à 4 1. 10 s. par quintal, et que celui sur les (23 janvier 1791.] (Assemblée nationale.] savons de Marseille, fabriqués pour la plus grande partie avec des huiles étrangères, devait être réduit à 3 livres par quintal. Les fabricants de Marseille se plaignent de ces fixations ; ils prétendent que le droit de 4 1. 10 s. par quintal sur les huiles propres aux fabriques, est trop élevé, et que cette matière première ne demande pas moins de protection que les autres qui sont affranchies de tout droit; ils soutiennent également que les savons étant un objet de consommation indispensable, il est impolitique de les grever d’un impôt aussi considérable que celui de 3 livres par quintal ; ils prétendent enfin que la fixation du droit à 3 livres par quintal sur leurs savons excède la proportion de celui de 4 i. 10 s. par quintal imposé sur les huiles, et que cette proportion n’est que de 57 s. 6 d. par quintal de savon, puisque 100 livres d’huile donnent 156 livres de savon. Je vous observerai d’abord, Messieurs, que l’importation des huiles d'olives étrangères, destinées pour les fabriques de l’intérieur, est un objet très peu considérable, puisqu’elle n’excède pas un million pesant, année commune, et que la France ne manque pas d’huiles qui peuvent être employées aux mêmes usages. L’importation considérable de ces sortes d’huiles est presque entièrement effectuée à Marseille pour la fabrication des savons; et très certainement c'est beaucoup faire pour ce genre de consommation, que de réduire d’un tiers le droit de 4 1. 10 s. par quintal, qui était anciennement perçu sur les savons de Marseille. Tels sont les principes qui ont déterminé l’opinion de vos deux comités sur la fixation des droits sur les huiles communes étrangères, et sur les savons de Marseille. Les fabricants de cette ville se plaignent de la disproportion de ce droit sur les huiles, et de celui fixé sur les savons. Cette disproportion est si faible qu’elle n’aurait pas dû présenter matière à objection. En effet, en admettant qu’un quintal d’huile fabrique 156 livres de savon, le droit par quintal de savon reviendrait à 2 1. 17 s. 3 d., 2 tiers par quintal de savon ; mais ces fabricants ont des compensations qui doivent les satisfaire : 1° le droit sur les huiles n’est point acquitté à l’entrée de Marseille ; il n’est perçu sur les savons que lors de leur importation dans les ports du royaume : ainsi, dans le cas de naufrage ou d’avarie, le fabricant de Marseille ne perd point les droits dont il n’a pas fait les avances, au lieu ue celui de l’intérieur, qui emploie des huiles trangères, acquitte les droits à leur introduction en France, en supporte l’intérêt et les perd, si les savons qu’il expédie pour le royaume, font naufragés dans la traversée; 2° le fabricant de l’intérieur est forcé de faire l’avance des droits sur les huiles, et de supporter les intérêts de cette avance, tandis que celui de Marseille n’y est point exposé. Il a aussi des frais de transports à supporter, et dont Marseille est exempte sur les autres matières qui entrent dans la composition des savons, puisqu’il est obligé de venir en faire l’achat à Marseille. Ces motifs ont paru décisifs à vos deux comités pour établir le droit sur les savons de Marseille à 3 livres le quintal, en fixant celui des huiles à 4 1. 10 s. par quintal. Les fabricants de Marseille font encore une autre objection ; ils disent qu’ils emploient des huiles deProvence concurremment avec des huiles étrangères, et que les savons fabriqués avec des huiles nationales devant être affranchis de tou t droit, il serait juste de leur accorder une réfrac-429 tion proportionnelle à la quantité d’huiles nationales qu’ils justifieront employées à leur fabrication. Cette demande serait fondée, si les fabricants de l’intérieur, qui emploieront des huiles étrangères, n’étaient assujettis au payement des droits d’entrée, sans aucune restitution de ces mêmes droits sur les savons qu’ils seront dans le cas de réexporter à l’étranger ; ainsi, la compensation est établie. D'ailleurs, il y aurait un moyen positif d’anéantir les objections des fabricants de Marseille. Ce serait d’imposer le droit sur les huiles étrangères à l'entrée de Marseille, et d’affranchir les savons, tant à l’exportation qu’à la circulation dans l’intérieur : ce moyen serait sim pie, il ne présenterait aucune difficulté; il établirait la parité de traitement entre les fabricants de savons de Marseille, et ceux des ci-devant provinces du Languedoc, du Roussillon, de la Provence et du Dauphiné. C’est à vous, Messieurs, à prononcer sur ce3 difficultés et sur les objections respectives. Je ne me permettrai plus qu’une observation qui a fixé particulièrement l’attention de vos comités ; le produit du droit de 4 1. 10 s. par quintal sur les savons de Marseille était de 1,638,000 livres; celui du droit sur les huiles d’olives communes pour les fabriques revenait à 48,000 livres : total 1 ,686,000 livres; le droit de 4 1. 10 s. par quintal sur les huiles d’olives communes, et de 3 livres également par quintal sur les savons de Marseille, ne donnera qu’un produit de 1,135,000 livres : conséquemment la diminution des droits est au profit de la consommation de 511,000 livres. Si la proposition des fabricants de Marseille était agréée, le produit de 1,135,000 livres serait réduit à 571,000 livres, et vous feriez, sans aucune nécessité, sans aucun avantage, un sacrifice de 564,000 livres sur les produits que vous pouvez espérer sur cette branche delà partie des traites. J’ai cru devoir fixer votre attention pour un objet de cette importance : je reprends l’exposé des bases et des principes du nouveau tarif. Art. 2. Diverses productions du sol. Fruits crus} fruits secs et légumes secs. Les droits à cet égard sont modérés et varient dans la proportion de 2 1/2 à 5 0/0de la valeur. Us sont un léger impôt sur la consommation nationale, et suffisent pour assurer la préférence, ou au moins une concurrence certaine aux productions de notre sol. Art. 3. Métaux non ouvrés. Cet article comprend principalement les fers et aciers, les plombs et étains; car les cuivres bruts, ayant été regardés par vos comités comme une matière première, sont affranchis de tous droits. A l’égard des autres métaux le droit est à peu près dans la proportion de 5 à 10 0/0 de la valeur, y compris le droit de marque des fers réservés sur les fers et aciers de l’étranger. Cette proportion est suffisante pour assurer la préférence aux mines et forges nationales qui, affranchies des droits de péage, de circulation et de la marque des fers, pourront aisément soutenir la concurrence de l’étranger. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 janvier 1791.] 430 [AséetaLléfc nationale.] Art. 4. Droguerie pour la médecine. La France est nécessairement tributaire de l’étranger pour ces sortes de productions. Leur consommation intéresse les hôpitaux et toutes les classes de citoyens. Ce motif a déterminé vos deux comités à ne les imposer que dans la proportion d’un droit modique de 2 1/2 0/0 de la valeur; mais je vous observe que les drogueries qui seront importées par le commerce national de l’Inde et de la Chine, ne payeront que moitié de ces droits. Art. 5. Epiceries . Les épiciers n’ont pas paru susceptibles de la même faveur; le droit à leur égard est dans la proportion de 5 à 10 0/0 de leur valeur. Cependant celles qui nous parviendront par le commerce de l’Inde acquitteront un droit beaucoup plus modéré, parce qu’il est juste de favoriser notre navigation et nos relations dans l’Inde. Art. 6. Chairs et beurres salés , et fromages. La suppression de l’impôt du sel doit nous faire espérer que bientôt nous cesserons sur ces articles d’être tributaires de l’étranger. Vos comités ont pensé qu'ils étaient susceptibles d'un droit plus élevé, et il est fixé de 5 à 10 0/0; mais ils ont en même temps estimé qu’il était convenable de ne point déroger à l’exemption ou modération dont jouissent les fromages, chairs et beurres salés, destinés pour les colonies et pour les armements. Il viendra, sans doute, un temps où cette faveur cessera d’être utile, et les législatures suivantes prendront alors le parti que leurs lumières et leur sagesse leur suggéreront. Art. 7. Vins , eaux-de-vie et liqueurs. Il n’est personne qui ne reconnaisse la supériorité de la France pour ces sortes de productions; elle récolte des vins de la meilleure qualité; ses eaux-de-vie sont supérieures à celles d’Espagne et du Portugal. Ces motifs, joints à la difficulté de la contrebande, ont fait penser à vos comités qu’ils étaient susceptibles du droit le plus fort que vous avez décrété pour l’entrée; il sera un tribut volontaire à l’égard des liqueurs et vins de liqueurs, tribut payé par le riche ou l’homme aisé; il formera, quant aux vins et eaux-de-vie ordinaires, une juste indemnité de la préférence que les consommateurs accorderont à ceüx de 1 étranger sur les vins et eaux-de-vie du royaume. Art. 8. Productions de la pêche. Vos comités, Messieurs, ont pensé que les principes que vous aviez adoptés pour la fixation des droits d’entrée sur les importations de l’étranger, n’étaient pas tellement impératifs, qu’ils ne dussent recevoir aucune exception. Ils ont estimé que les productions de la pêche étaient dans ce cas; en conséquence, ils se sont déterminés à maintenir les droits anciennement établis, ou à ne s’en écarter que d’une manière presque insensible pour encourager la pêche nationale, qui est la meilleure école de nos matelots. Art. 9. Fabriques et manufactures diverses. Dans un système commercial, il ne faut, pour l’intérêt général, prononcer qu’avec une sage réserve des prohibitions absolues, et établir des droits prohibitifs, que dans une mesure qui n’invite pas à la contrebande ; on ne s’est pas toujours tenu à cette règle de prudence, et les produits des manufactures étrangères, chargés dans les principes de droits de 20 à 30 0/0 de la valeur, se trouvaient imposés de 30 à 45 0/0, et souvent au delà, par l’addition successive des sous pour livres. Lorsqu’il s’est agi du traité de commerce avec l’Angleterre, le ministère a pensé que nos manufactures rivaliseraient aisément avec celles des Anglais, si ces dernières acquittaient à leur introduction en France un droit de 10, 12 et 15 0/0. Le principe était bon, et les plaintes qui se sont élevées de toutes parts contre le traité du commerce avec l’Angleterre, auraient moins de fondement si les perceptions avaient pu être conformes aux bases fixées par ce traité. Mais malheureusement on s’est contenté du principe; on a pensé que les déclarations du commerce seraient fidèles, et que les perceptions ne s’éloigneraient pas beaucoup des proportions déterminées par le traité. L’expérience a fait connaître combien le ministère s’est trompé sur cet article. Les déclarations ont été faites à moitié, au tiers, au quart de la valeur effective, en sorte que les droits n’ont été perçus que dans la proportion de 3, 4, 5 et 6 0/0, et dans un temps encore où les manufactures nationales étaient grevées de droits de circulation d’un taux souvent supérieur à celui des droits réellement acquittés par les manufactures anglaises. Vos comités, Messieurs, ont pris les précautions nécessaires pour éviter dé pareilles erreurs; ils ont pensé que votre intention était que le taux des droits fût acquitté dans les proportions que vous avez déterminées; et, pour y parvenir, ils se sont appliqués à l’appréciation de la valeur réelle des marchandises à laquelle ils ont adapté des taux de 5, 7, 10, 12 et 15 0/0, suivant le plus ou moins de facilité que présentent les introductions frauduleuses. Ainsi, les montres, les dentelles et les mousselines ne sont imposées qu’à des droits modérés, afin de mettre le percepteur en rivalité avec la contrebande, qui n’exigerait qu’une assurance modique de 3, 4 et 5 0/0 de la valeur. Cependant les mousselines de Suisse, rayées et à carreaux* se trouveront imposées à un droit d’environ 100/0, parce que leur poids est très fort dans la proportion de leur valeur. Les bonneteries, les draps et étoffes sont tarifés dans la proportion de 7, 8, 9, 10 et 12 0/0 de la valeur, suivant le plus ou le moins de facilités que présente leur introduction ; mais ces droits déterminés au poids, ne seront pas susceptibles d’une réduction au-dessous de leur valeur effective, comme ceux dont la perception est réglée par les déclarations. Enfin vos comités ont adopté la proportion de [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 janvier 1791.] 431 12 à 15 0/0 sur les cuirs ouvrés et apprêtés; sur les fers ouvrés, la quincaillerie, la mercerie et autres objets, dont l’introduction, ne pouvant avoir lieu qu’en grosses parties, ne présenterait pas, vu la modicité de leur valeur intrinsèque, un bénéfice suffisant pour compenser les risques de l’introduction, et payer le prix des agents. Ces bases, Messieurs, ont paru, à vos deux comités, suffisantes pour conserver à nos fabriques et manufactures la préférence qu’il est juste de lui assurer sur celles de l’étranger; je ne dois cependant pas vous dissimuler qu’il est un article qui a excité beaucoup de réclamations, il concerne le droit sur les toiles, et je crois devoir le soumettre à votre décision. Un arrêt du 27 mars 1692 a fixé le droit sur les toiles étrangères, savoir: sur les toiles de lin à 8 livres, et sur celles de chanvre à 4 livres par pièce de 15 aunes. Ces droits sont sujets aux 10 sols pour livre ; conséquemment le droit d’entrée est de 16 sols par aune sur les toiles de lin et de 8 sols sur celles de chanvre, ce qui établit une proportion commune de 12 sols par aune. Mais ces droitssout absolumentillusoires, parce qu’en vertu d’un arrêt du 24 mars 1744, les toiles étrangères, sont admises par les bureaux du département du Nord, en payant 1 1. 17 s. 6 d. par quintal pour les toiles dont la valeur n’excède pas 1 1. 5 s. l’aune, et 7 1. 10 s. pour les toiles fines. Cette différence de droits détermine les toiles étrangères, destinées pour le royaume, à prendre leur route par les Pays-Bas de la domination de l’empereur, d’où elles entrent par les bureaux des ci-devant provinces de Flandre et du Hainaut, en ne payant que les droits modérés de l’arrêt de 1744. Arrivées en Flandre et Hainaut, ces toiles reçoivent l’empreinte de toiles nationales, et comme telles, circulent dans le royaume, et sont expédiées pour nos colonies comme toiles nationales, au grand préjudice de nos manufactures. Les toiles de Suisse affranchies, en passant à Lyon, de moitié des droits de l’arrêt de 1692, ont souvent préféré à cette faveur, d’emprunter le transit pour l’Allemagne et les Pays-Bas de l’empereur, parce qu’au moyen de ce transit, elles entraient en ne payant que 1 1. 17 s. 6 d. par quintal. Les droits fixés par l’arrêt de 1692 reviennent à 20 ou 30 0/0 de la valeur ; et vos comités ne se sont point dissimulé qu’ils présentent à la fraude un appât trop considérable, pour que l’on puisse espérer d’y mettre un frein effectif. Ils ont en même temps reconnu que les droits fixés par l’arrêt de 1744 étaient infiniment trop faibles pour ménager à nos manufactures la préférence qu’il est juste de leur accorder. Il a été nécessaire de prendre un parti sur la fixation du droit auquel les toiles étrangères seraient Assujetties, et vos comités ont discuté cette matière avec tdute l’attention qu’elle méritait. Il a été question de savoir si l’on adopterait deux classes de droits, l’un pour les toiles fines, et l’autre pour les toiles communes; mais l’introduction des toiles se faisant ordinairement par assortiment, vos comités ont pensé que la division des toiles en deux classes présenterait des sources de contestations sans nombre entre le commerce et les préposés à la perception; et d’après ce motif, ils ont estimé que le droit sur les toiles devait être unique et fixé à un taux uniforme, sans distinction de qualités. dette détermination prise, Vos coi comités ont procédé à la fixation du droit auquel les toiles étrangères seraient soumises. Il a été reconnu que 160 aunes de toiles communes pesaient ordinairement un quintal, et que 285 aunes de toiles fines ne donnaient que le même poids, en sorte qu’en évaluant à la même proportion l’introduction des toiles fines et communes, on peut estimer un quintal comme représentant 200 aunes de toiles de toutes sortes. On a calculé ensuite que les assortiments de toiles venant de Flandre sont supportées en France, dans la proportion de deux cinquièmes de toiles fines et trois cinquièmes de toiles communes, et que le prix commun de ces assortiments ne pouvait être évalué au-dessus de 2 1. 10 s. D’après cette base, on a déterminé la fixation du droit à 30 livres le quintal, proportion à peu près de 7 à 8 0/0 de la valeur effective. Je dois vous observer que cette fixation paraît avoir excité beaucoup de mécontentements de la part de nos manufactures, et je m’attends qu’elle sera critiquée; mais afin de déterminer votre décision sur un objet aussi important, je dois vous exposer les motifs qui ont fixé l’opinion de vos comités pour la fixation du droit de 30 livres le quintal. 1° L’introduction des toiles étrangères en France forme un objet de plus de 20 millions année commune; cette introduction a lieu généralement par les bureaux situés dans le département du Nord : les droits de 1 1. 17 s. 6 d., et 7 1. 10 s., le quintal, ne reviennent pas à 4 1. 10 s., pour l’assortiment des toiles fines et communes; ainsi le droit de 30 livres est à peu près six fois au-dessus de celui de l’arrêt de 1744, et vos comités ont pensé qu’il serait inutile pour le moment, et peut-être impolitique, de l’exhausser au delà, parce qu’un droit plus considérable, en nous privant de tirer les qualités de toiles étrangères que nous ne fabriquons pas et qui sont nécessaires à l’assortiment de celles de nos propres manufactures que nous fournissons à l’Espagne, à l’Italie et aux colonies, anéantirait un commerceimmensè et réciproque, dont l’étranger s’emparerait à nos dépens.D’ailleurs, les limites de la Flandre autrichienne sont presque partout mêlées et enclavées avec celles du département du Nord, et cette situation rendrait les introductions frauduleuses très aisées si le droit était trop élevé. Ainsi l’intérêt du Trésor public S’est joint aux vues de la politique dans la fixation qui vous est proposée par vos deux comités. Je suis entré dans ces détails, Messieurs, aliil de prévenir les objections qui pourraient vous être faites contre la fixation du droit de 30 livres le quintal adopté par vos comités. vos comités, en se conformant à votre décision, ont restreint vos prohibitions à très peu d'articles, savoir : 1° Les médicaments composés, dont la vétusté ou la mauvaise qualité peuvent être nuisibles à la santé. L’article de la pharmacie en France est assez perfectionné, pour nous procurer sans peine et à peu de frais toutes les ressources nécessaires à la santé. 2° Les dorures fausses et les fils d’or faux, filés sur soie. Cette prohibition a paru nécessaire pour empêcher le consommateur d’être trompé. D’ailleurs, la fabrication du fil d’or faux, filé sur soie, est prohibée en France. 3° La poudre à tirer et le salpêtre; L’introduction de la poudre étrangère serait incompatible avec le privilège exclusif de la fabrication des poudres, tant que vous le maintiendrez. La prohibition du salpêtre étrangei4 est foüdéè 432 lAasemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 janvier 1791.] aur les conventions faites par la régie des poudres avec les salpètriers. Par cette convention, la régie s’est engagée à prendre, au prix de 12 francs la livre, tout le salpêtre qui lui serait livré. Ce marché ne pourrait plus avoir son exécution, si l’importation du salpêtre étranger était permise. On abandonnerait la recherche du salpêtre dans le royaume, et dans une guerre imprévue la nation pourrait se trouver dans la dépendance de l’étranger pour son approvisionnement de poudre à tirer. Mais il convient d’obliger la régie à fournir aux fabricants des eaux fortes et autres acides, les salpêtres dont ils ont besoin, à un prix très modéré, et il vous sera proposé des mesures à cet égard. 4° Les eaux-de-vie, autres que de vins et connues sous, la dénomination de rhums, tafias, et eaux-de-vie de genièvre, leur admission porterait le plus grand préjudice aux eaux-de-vie du royaume. D’ailleurs, votre comité d’agriculture et de commerce aura incessamment à mettre sous vos yeux les réclamations de toutes les raffineries de sucre du royaume, qui vous demandent avec beaucoup de justice a être autorisées à la distillation de leurs sirops pour être convertis en eaux-de-vie, ce qui jusqu’à présent leur a été rigoureusement défendu, et les force à exporter ces matières à l’étranger qui profite d’une main-d’œuvre intéressante, qu’il serait utile à la nation de conserver. 5°. Les verreries autres que les bouteilles et la verroterie; cette prohibition facile à maintenir a paru indispensable, attendu que la visite des voitures chargées de verrerie est impraticable, et que leur introduction faciliterait évidemment celle des objets manufacturés et autres articles, en fraude des droits d’entrée fixés par le tarif. Tels sont, Messieurs, les observations que j’ai dû vous soumettre, pour déterminer votre décision sur les droits d’entrée contenus au tarif qui vous est présenté par vos deux comités. Je n’aurai que peu de réflexions à vous offrir sur les droits de sortie. Droits de sortie. Il a paru convenable d’affranchir de tous droits de sortie les productions du sol et de notre industrie; parce qu'ayant à rivaliser avec celles de l’étranger, la perception de ces droits, en augmentant les valeurs originaires, nuirait à leur débouché. Ainsi très peu d’articles sont soumis à des droits de sortie, savoir ; 1° les bestiaux tarifés dans la proportion de 2 1/2 à 5 0/0 de la valeur; 2° quelques matières premières imposées à peu près dans la même proportion, tels que les cotons en laine, les cires brutes, les bois feuillards, les graines et herbes pour la teinture, les graisses et suifs, les fils simples bis et écrus ; les laines, les peaux et cuirs en vert et quelques autres objets. Mais il est plusieurs matières premières à l’égard desquelles il a paru nécessaire à vos comités de maintenir la prohibition présentement existante, attendu le préjudice que leur extraction causerait à nos fabriques et manufactures : 1° Les bois de constructions et merrains ; 2° la bourdaine employée dans la fabrication de la fioudre à tirer; 3° le charbon de bois ; 4° toutes es matières propres à la fabrication de la colle et du papier, ainsi que celles pour nos tanneries et notre chapellerie ; 5° la mine de fer. Leur prohibition a paru préférable à des droits, attendu que leur peu de valeur ne permettrait d’en établir que de disproportionnés au taux que vous avez adopté, et que l’extraction de ces matières premières serait difficilement remplacée par les importations de l’étranger : on ne pourra néanmoins se dispenser d’accorder quelques exceptions locales, telles que l’extraction du minerai par le Roussillon, à défaut de bois et d’usines dans une proportion suffisante, pour le consommer sur les lieux ; les écorces de tan, les bois et charbons que quelques cantons qui touchent l’extrême frontière, produisent en quantité excédant leur consommation, et dont à raison de l’éloignement ou des mauvais chemins, ils ne peuvent pas trouver le débouché dans le royaume, vous autoriserez sans doute l’exportation de cet excédent à l’étranger. Ces exceptions locales pourront être accordées sur les représentations des directoires de départements ; votre comité d’agriculture et de commerce a déjà recueilli plusieurs demandes qui ont été formées pour cet objet; il attend encore des renseignements sur plusieurs autres, et il vous proposera un projet de décret à cet égard. L’article des vins a paru, Messieurs, à vos comités, mériter une attention particulière ; il n'est pas douteux que l’étranger sera toujours tributaire de la France, quant aux vins d’une qualité supérieure, et très certainement un droit de 5, même de 10 0/0, ne pourrait nuire à leur extraction ; mais nous récoltons au delà de nos besoins des quantités considérables de vins d’une qualité commune, et d’un bas prix, dont le débouché deviendrait très difficile, s’il était contrarié par un droit exorbitant ; il est donc nécessaire de leur ménager les facilités propres à leur procurer le débouché, et les droits à l’égard de ces vins doivent être très modérés. Or, si on détermine un droit fixe sur la valeur commune des vins exportés par tel port ou bureau, le droit est nul et presque insensible relativement aux vins d’un grand prix ; il devient exorbitant pour les vins communs de médiocre qualité. La justice exigerait donc que le droit fût déterminé d’après la valeur des vins qui seront exportés, et c’est le parti auquel vos deux comités se seraient arrêtés, s’il ne présentait des difficultés peut-être insurmontables. En effet, si l’on fixe le droit de sortie sur les vins à 5 Ü/0 de la valeur, il faudra nécessairement une déclaration de cette valeur ; des formalités difficiles à remplir pour assurer la sincérité de cette déclaration, des retenues dans le cas de mésestimation, des ventes publiques qui seront à bas prix, et finalement des contestations sans nombre entre les commis et les expéditionnaires, lorsque les chargements dans un port comme celui de Bordeaux seront très multipliés. Ces inconvénients sont grands et inévitables ; mais pour les prévenir, il ne serait pas juste d’adopter un droit fixe, suivant le port ou le bureau d’expédition, puisque le droit serait exclusif à l’égard des vins de médiocre qualité, tandis qu’ils procureraient aux vins d’un prix supérieur, un avantage dont ils n’ont aucun besoin pour leur débouché, et qui n’en accroîtrait pas l’exportation. D’après ces considérations, vos deux comités ont pensé que pour éviter toute injustice, pour conserver aux vins de France les avantages de l’exportation, sans néanmoins priver le Trésor public du tribut que nous paye L’étranger qui ne [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 janvier 179l.| 433 peut se passer de nos vins, il convenait d’imposer leur sortie à un droit fixe, avec faculté aux expéditionnaires de n’acquitter ce droit que dans la proportiou de 5 0/0 de la valeur, quant aux vins pour lesquels le droit fixe déterminé pour chaque port ou bureau excéderait la proportion de 5 0/0 : en prenant ce parti, tous les intérêts seront conciliés; les vins, par exemple, qui seront expédiés par le port de Bordeaux, et dont la valeur sera de 200 livres le muid etau-dessus, acquitteront le droit de 9 livres par muid sans aucune réclamation ; mais ceux pour lesquels ce droit serait trop considérable, ne payeront à la sortie que 5 0/0 de la valeur sur la déclaration de l’expéditionnaire, dont les mésestimations seront arrêtées par la crainte des retenues auxquelles il s’exposerait en recevant le dixième en sus de la valeur déclaré. e Vos comités, Messieurs, ne se sont pas dissimulé que ce mode de perception ne serait pas totalement exempt de difficultés; mais c’est celui qui est le plus conforme à la justice, et ce motif est décisif en sa faveur. Je dois cependant vous observer qu’il est quelques vins dont la faible qualité mérite une exemption, et dont l’exportation ne doit être assujettie qu’à un modiquedroit desortie équivalent, pour ainsi dire, à l’affranchissement : tels sont les petits vins blancs du département de la Loire-Inférieure; ceux des ci-devant provinces des Trois-Evêchés, Lorraine et Barrois, composant actuellement le département de la Meurthe et de la Moselle, ceux enfin de l’ancienne province de Franche-Comté qui forme le départementdu Mont-Jura, du Doubs et de la Haute-Saône. Il serait donc juste pour leur conserver une faveur indispensable à leur débouché, pour ne point altérer le commerce qui subsiste entre l’Allemagne et les ci-devant provinces de Lorraine et Trois-Evêehés, dont les voituriers chargent en retour les petits vins de ces provinces et du Barrois; pour ne point grever d’un impôt sensible les vins de la ci-devant province de Franche-Comté qui n’y sont point actuellement assujettis, de modérer à 10 sols par muid, mesure de Paris, les droits de sortie sur les vins qui seront exportés par le département de la Basse-Loire, du Mont-Jura, du Doubs et de la Moselle, lorsqu’ils seront d’une valeur inférieure au prix de 30 livres par muid. En adoptant ce parti, vous éviterez le double inconvénient d’accorder une faveur inutile aux vins d’une grande valeur, et de gêner l’extraction de ceux qui sont d’un bas prix, ou d’une médiocre qualité. Cette mesure relativement aux droits de sortie sur les vins, ne vous est proposée que dans le cas où vous n’adopteriez pas le projet qui vous a été soumis par votre comité de l’imposition, tendant à assujettir à un droit d’enlèvement la totalité des vins récoltés en France ; car si vous adoptez cette proposition en remplacement des divers droits d’aides qui affectent les boissons à la fabrication, à l’enlèvement, à la vente et la revente en gros et à la circulation, l’exportation des vins devrait être affranchie de tous droits, puisque autrement ceux qui auraient la destination de l’étranger acquitteraient un droit de 9 à 10 0/0, capable de nuire à leur débouché. Il est donc essentiel, Messieurs, que vous preniez un parti relativement à cette proposition. Un autre objet qui ne sollicite pas moins votre attention et une prompte décision, c’est celui de l’impôt du tabac. Votre comité des contributions lre Série. T. XXII. publiques est spécialement chargé de cet objet. Je ne viens point aujourd’hui provoquer votre décision sur une question aussi importante, et me livrer à une discussion qui doit être faite séparément; mais vos comités, Messieurs, pour ne rien préjuger, n’ont porté le tabac dans le tarif que pour mémoire, parce qu’ils ont pensé que dans l’intervalle du décret sur le tarif, jusqu’au moment de sa promulgation, qui sera nécessairement retardée par l’impression d’une nouvelle édition du tarif dans une forme plus légale, vous pourriez décider cette grande question, et qu’alors le tabac se trouvera naturellement placé au rang que vous lui aurez assigné. Après vous avoir entretenus du tarif qui doit régler les opérations commerciales de la France avec l’étranger, je dois vous exposer les principes que vos comités ont cru devoir adopter, quant aux droits dont seront susceptibles les marchandises de l’Inde et de la Chine,' qui nous parviendront par notre commerce direct. Ces principes vous ont déjà été présentés, il y a quelques mois, dans le rapport de M. de Fontenay, sur le commerce français au delà du cap de Bonne-Espérance : mais les changements que vos décrets postérieurs ont fait éprouver au premier projet du tarif général, eu ont également nécessité sur la Fixation des droits que devront acquitter les marchandises du commerce national de l’Inde et de la Chine. Les matières premières doivent être affranchies de tous droits, puisque c’est une exemption qu’il convient d’accorder à celles que la France lire de l’étranger, ainsi que je vous Fai précédemment exposé. Les drogueries n’acquitteront que la moitié des droits fixés par le tarif général; le droit sera encore plus modéré sur les épiceries : c’est une faveur qu’il paraît juste et nécessaire d’accorder à noire navigation. D’ailleurs, il serait utiie et avantageux que notre commerce direct pût remplacer les importations des Hollandais. Les toiles de coton peuvent, à beaucoup d’égards, être considérées comme une matière première, étant même d’une nécessité absolue pour nos fabriques d’impression; nous n’avons pas pensé que le droit sur celles de l’Inde dût être dans une telle disproportion avec celui sur les marchandises de même nature importées directement de l’étranger, qu’il favorisât le monopole des armateurs de Elude. Nous avons en conséquence porté le droit sur les toiles de coton de notre commerce de l’Inde aux deux tiers des droits proposés sur celles venant de l’étranger, avantage suffisant pour leur assurer toujours la préférence sur ces dernières. Par le même principe, les mousselines de l’Inde ne payeront que 150 livres du quintal, tandis que les mousselines étrangères acquitteront le droit sur le pied de 200 livres; il faut observer qu’iudépendamment de cette différence sur la qualité du droit, la qualité des mousselines de l’Inde, beaucoup plus fines et conséquemment plus légères, leur assure un avantage décidé sur l’acquittement du droit. Les toiles peintes provenant du commerce de l’Inde sont actuellement prohibées; les toiles rayées et à carreaux et les guinées ne sont admises que pour la destination du commerce d’Afrique. Vos comités ont pensé que les unes et les autres pouvaient être reçues pour la consommation du royaume, en payant pour les premières le même droit que les toiles peintes venant de l’étranger, et pour les autres, 75 livres par quintal. Celles-ci continueront de jouir de Eaffrao-28 43 4 (Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |22 janvier 1791.J chissement du droit, quand elles seront mises en entrepôt à la destination de l’Afrique. Les cotons filés acquitteront un droit de 12 sols par livre, qui revient à peu près à 5 0/0 de la valeur. Les cafés importés par nos bâtiments de l’Inde étaient assujettis à un droit de 37 1. 10 s. par quintal ; vos comités ont pensé que ce droit pouvait être réduit à 20 livres. 11 est un article essentiel qui a paru mériter une exception. Il concerne les étoffes de soie, ou dans le tissu desquelles il entre de la soie, ainsi que les étoffes d’écorce d’arbres. Vos comités ont pensé que l’importation devait en être absolument écartée : l’intérêt de nos fabriques et manufactures exige impérieusement cette prohibition ; il leur serait impossible de soutenir la concurrence avec ces étoffes. En effet, dans ces régions éloignées, le bas prix de la main-d’œuvre et des matières premières établit la valeur originaire de ces étoffes à 60 0/0 au moins au-dessous de leur valeur en France. Leur peu de volume ne constitue pas des frais de transport très considérables : le commerce pourrait donc les donner à 50 0/0 au-dessous du prix des étoffes que nous fabriquons; et si, pour ramener l’égalité, on avait recours à des droits de 40 et 50 0/0 de la valeur, ils seraient constamment éludés par la contrebande. Ces motifs, Messieurs, sont décisifs en faveur de la prohibition; vous pouvez d’autant mieux l’adopter, que le commerce de l’Inde est absolument passif pour la France, et que nous n’avons à craindre aucune réciprocité de la part des puissances de l’Inde et de la Chine. Il est donc juste de ne point exposer nos manufactures à la rivalité de leurs étoffes. Je vous observerai encore que les productions des îles de France et de Bourbon seront traitées à l'instar de celles de nos colonies d’Amérique, et c’est une mesure qu’il est juste d’adopter. Il me reste* Messieurs, à fixer votre opinion sur le traitement que devront supporter les marchandises de notre commerce dans l’Inde, déclarées pour retourner à l’étranger. Il a paru à vos comités que la quotité des droits, proposée sur les drogueries et les épiceries, n’était point assez considérable pour nuire à leur réexportation, qü’il en était de même sur les ouvrages vernis et les porcelaines. Les toiles de coton, les mousselines et autres tissus ne lui ont pas paru dans le même cas. Il est vrai que, depuis 1769 jusqu’en 1784, la destination de ces marchandises pour l’étranger ne les affranchissait pas du droit d’induit de 5 0/0 de la valeur qu’elles supportaient. Cependant vos cqmités ne se sont point dissimulé que l’acquittement des nouveaux droits, quelque modérés qu’ils soient, pourrait nuire à leur débouché; en conséquence, ifs se sont décidés à vous proposer la restitution de la moitié des droits qui auront été perçus sur ces tissus. Vos comités auraient désiré ne pas différer de vous présenter leurs vues sur la fixation des droits auxquels il conviendra d’assujettir les productions des colonies françaises. Mais cet objet mérite des considérations particulières; vos comités s’en occupent, et ne tarderont pas de les soumettre à la sagesse de vos délibérations, après s’être concertés avec le comité colonial, de manière à concilier les intérêts des colonies et de la métropole; et vos comités ne négligeront rien pour vous présenter des bases conformes à vos principes, et propres à concilier tous les intérêts. ; Cet article est indépendant du tarif, dont il n’est plus possible de différer la promulgation, sans compromettre essentiellement les intérêts de notre commerce et de notre industrie; ainsi j’ai l’honneur de vous proposer en leur nom le projet de décret suivant : Projet de décret. L’Àssémblée nationale, après avoir entendu lé rapport de ses comités d’agriculture et de commerce, et des contributions publiques, décrète ce qui suit : À compter du 1er ....... prochain, Je présent tarif servira à la perception des droits d’entrée et de sortie du royaume sur toutes les matières, denrées et marchandises qui y sont assujetties, sauf les exceptions qui seront incessamment réglées ; et ce tarif sera annexé au décret des 30 et 31 octobre dernier. Les droits fixés par le tableau joint au même tarit pour les marchandises provenant du commerce français au delà du cap de Bonne-Espérance, seront perçus à compter de la même époque. Et sera, le présent décret, porté à l’acceptation du roi, qui sera prié de donner les ordres nécessaires pour son exécution. Projet Tarif.