J 9Q [Assemblée nationale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [19 juillet 1790.J comité des finances, informée que dans plusieurs •villes où il avait été ci-devant créé des offices de jurés-vendeurs de poisson, avec attribution d’un sol pour livre sur les ventes, à charge d’en faire bon le prix aux vendeurs, et même de leur avance; que ces offices ont été ensuite supprimés par édit et déclaration des mois d’août 1768 et décembre 1770, en exécution desquels les droits ci-devant attribués à ces offices sont perçus au compte du roi : informée de plus que différentes villes tentent d’abuser des décrets rendus sur la suppression des droits féodaux, pour en induire que les droits dont il s’agit sont également supprimés, a décrété et décrète : « Que toutes les contributions publiques continueront d’être levées et perçues de la même manière qu’elles l’ont été précédemment, à moins que leur extinction et suppression n’ait été expressément prononcée ; notamment que les droits perçus sur les ventes de poisson dans les villes de Rouen, Meaux, Beauvais, Mantes, Senlis, Beaumont, Pontoise, Gaudebec, Bernay, Bordeaux et autres, auront lieu comme du passé, jusqu’à ce qu’il y ait été autrement pourvu. » M. "Vernier, rapporteur du comité des finances , propose un second projet de décret relatif aux droits qui ont été affermés par les ci-devant Etats d'Artois , et ayant pour objet d’assurer la continuation et la perception de ces droits, jusqu’à ce qu’il ait été statué sur le mode d’imposition à établir dans les différents départements du royaume. L’Assemblée adopte le projet de décret, sauf rédaction, et ordonne que la rédaction définitive sera rapportée et insérée dans le procès-verbal de la séance de demain . M. le Président annonce que le second tour de scrutin pour l'élection d'un Président n’a pas donné de résultat et qu’en conséquence, il y aura lieu de procéder à un troisième tour. M. Merlin, rapporteur du comité d'aliénation des domaines nationaux, remet sous les yeux de l’Assemblée les articles du décret du 17 de ce mois, sur le retrait lignager et le droit d’écart. Le comi té, dit-il, d’après les observations de plusieurs personnesa cru nécessaire d’y joindre l’abolition d’un droit de mi-denier. Il vous propose également un article additionnel tendant à laisser aux retrayants la faculté de se faire payer l’intêret des sommes qu’ils auraient consignées pendant les instances, si mieux n’aiment les acquéreurs leur laisser suivre l’effet du retrait. M. Gaultier de jBianzat combat la nouvelle disposition proposée par le rapporteur et demande la question préalable. M. Goupil de Préfeln demande qu’on fasse disparaître du décret tout ce qui lui donne un effet rétroactif. M. Martineau observe qu’il a été décrété que toute demande en retrait lignager, qui n’a pas été jugée en dernier ressort, demeure nulle et non avenue. 11 ajoute qu’en ôtant aux juges le droit de statuer sur les demandes en retrait, on leur a concédé le droit de statuer sur les dépens. L’orateur considère les sommes consignées comme un dédommagement pour celui dont le droit était juste et il dit qu’il doit faire partie de la peine infligée au plaideur de mauvaise foi. M. Merlin, rapporteur , adopte l’opinion qui vient d’être émise. M. lianjuinais demande que le comité féodal soit tenu de présenter immédiatement un projet de décret sur l’abolition des substitutions. M. de Foucauld. On veut faire immiscer l’Assemblée dans ce qui ne la regarde pas. N’est-ce donc pas assez que nous ayons à achever le grand œuvre de la Constitution ? Veut-oü que nous ne laissions rien à faire à nos successeurs? Décrétez l’organisation judiciaire, celle de l’armée, etc., et puis vous décréterez tout ce que vous voudrez. M. Démeunier. La motion de M. Lanjuinais étant prématurée, je demande l’ordre du jour. (L’Assemblée prononce l’ordre du jour.) M. le Président met ensuite aux voix le projet de décret du comité d’aliénation, modifié par le rapporteur. Le décret est rendu ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale a décrété et décrète ce qui suit : « Art. 1er. Le retrait lignager et le retrait de mi-denier sont abolis. « Art. 2. Toute demande en retrait lignager ou de mi-denier, qui n’aura pas été consentie ou adjugée en dernier ressort avant la publication du présent décret, sera et demeurera comme-non avenue ; et il ne pourra être fait droit que sur les dépens des procédures antérieures à cette époque, ensemble sur les intérêts de sommes qui auraient été consignées par les retrayants. « Art. 3. L’Assemblée nationale supprime le droit connu dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais sous les noms d 'Ecart, Escas ou Bou-tehors, et éteint toutes les procédures, poursuites ou recherches qui auraient ce droit pour objet. « Art. 4. Supprime également, avec pareille extinction de toutes procédures, poursuites et recherches, les droits de Treizain perçus par la commune de Nîmes sur les particuliers domiciliés ou non domiciliés qui aliènent leur dernière maison ou héritage ; ensemble les droits d’abzug, détraction, émigration, florin de succession, ou autres semblables qui ont eu lieu jusqu’à présent au profit de ci-devant seigneurs ou de communautés d’habitants ; comme aussi tous les droits que certaines villes ou communes sont en possession de lever sur les biens qui passent des mains d’un bourgeois ou domicilié, dans celles d’un forain, soit par succession, soit par toute autre voie.» M. Rahaud de Saint-Etienne. Tous avez chargé votre comité de Constitution de vous présenter un projet de décret sur l'uniforme que doivent porter toutes les gardes nationales du royaume; voici le résultat de notre travail : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité de Constitution sur l’uniforme à donner aux gardes nationales du royaume, a décrété et décrète : « 1° Qu’il n’y aura qu’un seul et même uniforme pour toutes les gardes nationales, et qu’en conséquence tous les citoyens français, admis dans les gardes nationales, ne pourront porter d’autre uniforme que celui qui va être prescrit ; habit bleu de roi, doublure blanche, parements et revers écarlate, le passe-poil blanc, collet blanc et passe-poil écarlate, épaulettes jaunes ou en or, la manche ouverte, la poche en dehors à trois [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 juillet 1790.]] 191 pointes, la veste et la culotte blanche; sur le bouton, il sera écrit: District de.... ; leretroussis de l’habit écarlate; sur l’un des retroussis, il sera écrit en lettres jaunes ou or, le mot la loi; et sur Vautre retroussis, le mot liberté. « 2° Que les gardes nationales, qui ont adopté un uniforme autre que celui qui est prescrit ci-dessus, pourront continuer de le porter jusqu’au 14 juillet prochain. « 3° Que les gardes nationales des lieux où il n’y avait point encore d’uniforme établi , et qui en ont adopté un pour assister à la confédération, pourront également continuer de le porter, mais seulement jusqu’au 14 juillet prochain, jour auquel toutes les gardes nationales du royaume porteront le même habit. M. Dupont (de Nemours). Je crois qu’il est essentiel de distinguer les gardes nationales des divers départements : si quelque jour elles étaient employées pour repousser l’ennemi, il faudrait que le général pût connaître quel est le département qui débouche de tel ou tel côté. Je demande qu’il y ait une distinction dans les revers. M. de Foucault. Je demande que conformément à la belle devise qu’ont adoptée les Français, il soit écrit sur les retroussis : la loi et le roi. M. Barnave. Je propose de substituer le mot de Constitution à celui de la loi. Ce mot ne présente qu’une idée vague, tandis que le mot Constitution a l’avantage de comprendre la loi et le roi. M. Martineau Je pense que le mot Constitution ne peut être gravé parce qu’il y a trop de lettres. M. de Toustain. Je propose de mettre sur les retroussis : défenseurs de la liberté. M. BrîIIat-Savarin. Par mesure d’économie, il faut proroger jusqu’au 14 juillet 1792, le délai rigoureux pour les changements d’uniforme. M. Démeunier. J’observe que presque tous les uniformes des gardes nationales sont bleus et qu’il suffit d’établir des signes extérieurs de fraternité et d’égalité entre tous les citoyens. M. le Président met aux voix le projet de décret du comité de Constitution. Il est adopté avec les modifications suivantes : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité de Constitution sur l’uniforme à donner aux gardes nationales du royaume, a décrété et décrète. « 1°. Qu’il n’y aura qu’un seul et même uniforme pour toutes les gardes nationales du royaume; qu’en conséquence tous les citoyens français, admis dans les gardes nationales, ne pourront porter d’autre uniforme que celui qui va être prescrit. Habit bleu-de-roi, doublure blanche, parements et revers écarlate, et passepoil blanc; collet blanc, et passe-poil écarlate; épaulettes jaunes ou en or, la manche ouverte à trois petits boutons, la poche en dehors à trois pointes et trois boutons, avec passe-poil rouge : sur le bouton il sera écrit: District de... Les retroussis de l’habit écarlate ; sur l’un des retroussis, il sera écrit en lettres jaunes ou en or, ce mot : Constitution ; et sur l’autre retroussis, ce mot : Liberté. Veste et culotte blanches. « 2°. Que les gardes nationales qui ont adopté un uniforme autre que celui qui est prescrit ci-dessus, ne pourront continuer de le porter que jusqu’au 14 juillet prochain, jour anniversaire de la fédération. « 3° Que les gardes nationales des lieux où il n’y avait point encore d’uniforme établi, et qui en a adopté un pour assister à la fédération, pourront également continuer de le porter, mais seulement jusqu’au 14 juillet prochain, jour auquel toutes les gardes nationales du royaume porteront le même uniforme. » M. Rabaud (de Saint-Etienne). Afin d’éviter des discussions sur les lieux ou seront déposées les bannières que la municipalité de Paris a données aux fédérés de chaque département , le comité de Constitution a cru devoir vous proposer le décret suivant : « L’Assemblée nationale déclare que les bannières données par la commune de Paris aux quatre-vingt-trois départements, et consacrées à la fédération du 14 juillet, seront placées et transportées dans les lieux où le conseil de l’administration de chaque département tiendra ses séances, soit que le chef-lieu se trouve provisoire, définitif ou alternatif. « Quant aux départements où les chefs-lieux ne sont pas encore choisis, la bannière sera provisoirement déposée dans la ville neutre où les électeurs seront convoqués pour déterminer le chef-lieu, afin d’être placée ensuite dans le lieu où l’administration tiendra ses séances, conformément au présent décret. » (Ce projet de décret est mis aux voix et adopté sans discussion.) M. le Président. L’ordre du jour est la discussion de la motion faite par M. de Nouilles, dans la séance du 15 juillet , au sujet de l'armée. M. de Woailles, député de Nemours. Si la proposition que je vous ai déjà faite d’attribuer au Corps législatif le droit de fixer le nombre des individus de chaque grade qui doivent composer l’armée, eût été énoncée avec plus de détail, sans doute elle aurait obtenu l’assentiment général ; il s’agit de distinguer les différents pouvoirs : ce n’est pas dans le sein de cette Assemblée qu’on voudra enlever à la nation un droit constitutionnel. Je vais rappeler les principes. Le pouvoir exécutif ne peut exister séparément des pouvoirs politiques. Il ne peut exister qu’aux conditions sur lesquelles la nation a voulu qu’il existât; il ne peut avoir de forces que celles que la nation a voulu lui confier. L’organisation de ces forces appartient à la nation ou à ses représentants, et non pas à lui-même, car il est bien évident qu’on ne peut pas lui laisser le droit de se constituer et de s’organiser; il est nécessaire de représenter les décrets précédemment rendus sur l’armée. Vous avez décrété, le 28 février, qu’au Corps législatif appartenait le droit de statuer sur la somme à désigner annuellement pour les dépenses militaires, sur le nombre d’hommes dont l’armée doit être composée, sur la solde de chaque grade, sur les règles d’admission au service et d’avancement dans tous les grades, sur les formes des enrôlements et les conditions des dégagements, sur l’admission des troupes étrangères au service de la nation, sur les lois relatives aux délits et peines militaires, et enfin sur le traitement de l’armée en cas de licenciement. Par votre décret du 2(5 juin, vous avez appliqué toutes ces lois à