[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] 741 rait pas être conciliée, elle sera portée au tribunal d’administration. Art. 6. Les contestations entre les corps administratifs et les particuliers sur le règlement des indemnités dues à raison des terrains pris ou fouillés pour la confection des chemins, canaux ou autres ouvrages publics, seront portées de même, par voie de conciliation, devant le directoire de département et ensuite au tribunal d’administration, si la conciliation n’a pas de succès. Art. 7. Les particuliers qui se plaindront des torts et dommages, procédant du fait personnel des entrepreneurs, et non du fait de l’administration, se pourvoiront contre les entrepreneurs, d’abord devant la municipalité du lieu où les dommages auront été commis, et ensuite devant le tribunal d’administration, lorsque la municipalité n’aura pu concilier l’affaire. Art. 8. Aux cas des trois derniers articles ci-dessus, le tribunal d’administration prononcera en dernier ressort, mais toujours sur simples mémoires, et sans frais, après avoir pris l’avis motivé du directoire de département ou de la municipalité, ainsi qu’il est précédemment expliqué. TITRE XIV. De la suppression des anciens offices et tribunaux. Art. 1er. L’administration, en matière de voirie, appartiendra aux corps administratifs, et la police de conservation au tribunal d’administration pour les grandes routes, et aux juges de district pour les chemins vicinaux. Art. 2. En matière d’eaux et forêts, la conservation et l’administration appartiendront aux corps administratifs : les ventes et adjudications des bois seront faites devant eux; et les actions pour la punition et réparation des délits seront portées devant les juges de district, qui auront aussi l’exécution des règlements concernant les bois des particuliers, et la police de la pêche. Art. 3. Tout le contentieux relatif aux transactions du commerce maritime, dont les amirautés connaissent actuellement, étant attribué aux tribunaux de commerce, il sera pourvu, au surplus, à ce que la police de la navigation et des ports soit utilement administrée. Art. 4. La compétence des juridictions et de la cour des monnaies, soit pour la police des communautés qui travaillent les matières d’or et d’argent, soit pour les contestations entre les particuliers et les orfèvres, relatives au commerce de l’orfèvrerie, appartiendra aux juges du district ; et il sera pourvu par une commission d’officiers nommée par le Roi, tant à la surveillance de la fabrication des espèces dans les hôtels des monnaies, qu’à la décharge définitive des directeurs des monnaies. Art. 5. Au moyen des dispositions contenues dans les articles 3 et 4 du titre précédent, et dans les quatre articles ci-dessus du présent titre, les élections, greniers à sel, juridictions des traites, grueries, maîtrises des eaux et forêts, amirautés, juridictions et cours des monnaies, et les cours des aides, demeureront supprimés. Art. 6. Au moyen de l’abolition du régime féodal, les chambres des comptes demeureront supprimées aussitôt qu’il aura été pourvu à un nouveau régime de comptabilité. Art. 7. Au moyen de la disposition contenue en l’article 16 du titre 1er ci-dessus, les commit - timus au grand et au petit sceau, les lettres de garde gardienne, les privilèges de cléricature, de scolarité, du scel des châtelets de Paris, Orléans et Montpellier, des bourgeois de la ville de Paris, et de toute ville du royaume, et en général tous les privilèges et attributions en matière de juridiction ; ensemble tous les tribunaux de privilège ou d’attribution, tels que les requêtes du palais, les conservations des privilèges, des universités, les officialités, le grand conseil, la prévôté de l’hôtel, la juridiction prévôtale, les sièges de la connétablie, les tribunaux des maréchaux de France, et généralement tous les tribunaux autres que ceux établis par la présente constitution, sont supprimés et abolis. Art. 8. Au moyen de la nouvelle institution et organisation des tribunaux pour le service de la juridiction ordinaire, tous ceux actuellement existants sous les titres de vigueries, châtellenies, prévôtés, vicomtés, sénéchaussées, bailliages, châtelets, présidiaux, conseil provincial d’Artois, conseils supérieurs, parlements, et les conseils des parties, demeureront supprimés. Art. 9. Les officiers qui composent les différents tribunaux supprimés, cesseront leurs fonctions aussitôt que les nouveaux juges pourront entrer e n activité Art. 10. Ces officiers remettront au contrôleur général des finances, qui en rendra compte au comité des finances, et a celui de judicature, leurs quittances de finance, et autres actes de propriété, pour être procédé à la liquidation de leur indemnité. 4e ANNEXE. Rapport de M. Tronchet, seconde partie , questions particulières aux provinces de Béarn , et de la Basse-Navarre (1). Les députés du Béarn nous ont remis deux mémoires très-clairs et très-courts, dont la lecture suffira pour vous faire connaître les difficultés qui sont particulières aux provinces du Béarn et de la Basse-Navarre, et qui naissent des usages locaux sous la forme actuelle de la procédure criminelle dans le ressort du parlement de Pau. Après que vous en aurez entendu la lecture (2), j’aurai l’honneur de vous présenter quelques réflexions fort simples, et le projet de décret qui nous a paru devoir en résulter. Il n’est pas difficile de sentir combien est abusif pour le Béarn l’usage qui en soumet les habitants à être jugés, en matière criminelle, en première et dernière instance, au parlement. Il y a moins d’inconvénients pour les habitants de la Basse-Navarre, qui ont le choix de porter ces sortes d’affaires ou devant les juges ordinaires, sauf l’appel, ou en première et dernière instance devant le parlement. 11 en résulte cependant qu’il dépend du plaignant d’enlever à l’accusé le droit de subir deux jugements et deux examens sur des contestations qui intéressent son honneur ou sa vie. 11 n’est pas moins extraordinaire que le procureur du Roi, dans certains cas, soit tout à la (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. (2) Ces deux mémoires sont imprimés à la suite de ce rapport. 742 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] fois la partie plaignante et le ministre informateur. Mais vous touchez de trop près, Messieurs, à l’époque qui doit donner une meilleure constitution à la France dans l’organisation du pouvoir judiciaire, et soumettre tout le royaume à un régime commun et uniforme. Votre comité a donc cru que vous pourriez fermer les yeux pour quelques instants sur ces vices particuliers à l’organisation des tribunaux du Béarn et de la Basse-Navarre, et vous borner, quant à présent, à y lever les obstacles qui pourraient suspendre l’exécution de vos décrets relatifs à la réformation provisoire de la procédure criminelle. La première difficulté qui se présente est celle de savoir dans quels lieux doivent être faites les listes et les nominations des notables adjoints. Régulièrement ce ne devrait être qu’à Pau et près le parlement, puisqu’il est, au moins pour le Béarn, le seul tribunal qui connaisse des matières criminelles, puisque les procureurs des districts et les commissaires enquêteurs ne sont que des délégués du parlement. Mais il y aurait beaucoup d’inconvénients à n’avoir des adjoints que dans le lieu du siège du parlement; les actes d’instruction qui précèdent le décret, ne se faisant point dans la ville de Pau, il faudrait que les adjoints domiciliés dans� celte ville, se transportassent dans les divers districts, ou parsans, ou dans les lieux où les commissaires enquêteurs se transporteraient eux-mêmes, ce qui rendrait la fonction d’adjoint très-onéreuse, et pourrait apporter beaucoup de retardement à l’instruction des procédures criminelles. D’ailleurs, dans la Basse-Navarre il y a des procédures criminelles qui s’instruisent et se jugent en première instance dans les sénéchaussées ou châtellenies, et où par conséquent il faut établir des adjoints. Il en faut aussi pour les procédures dont l’instruction peut se faire dans la ville même de Pau. Nous vous proposerons donc d’ordonner qu’il sera élu des adjoints : l°dans le chef-lieu de chaque district ou parsan du Béarn, pour toute l’étendue de ce district; 2° dans chaque sénéchaussée ou châtellenie de la Basse-Navarre; 3° enfin dans la ville même ou siège le parlement. Les adjoints seront destinés à assister aux actes d’instruction, selon qu’ils se feront par les procureurs du Roi des districts, ou par les procureurs du Roi des sénéchaussées et châtellenies, ou par les commissaires enquêteurs. Ces établissements fournis, il ne s’agit plus que d’assujettir les procureurs du Roi des districts ou des sénéchaussées, et la cour elle-même à se conformer à vos règlements, sur la nécessité de l’assistance des adjoints aux actes d’instruction indiqués par vos décrets. Mais il faudra encore arrêter un abus qui s’est introduit dans les fonctions des procureurs du roi des districts, et que la seule autorité du parlement n’a pu réformer jusqu’ici. Cet abus est celui de la trop grande liberté que la coutume semble accorder aux procureurs des districts de se transporter au domicile des témoins pour y réunir leurs dépositions, ce qui occasionne des déplacements fréquents dans toute l’étendue de leurs districts, et multiplie ainsi leurs vacations et les frais, souvent sans nécessité. Voici le projet de décret que nous vous proposons d’après ces vues. PROJET DE DÉCRET Pour le Béarn et la Basse-Navarre. Art. 1er. Dans les provinces du Béarn et de la Basse-Navarre, les affaires criminelles continueront de s’instruire et d’être jugées par les personnes et dans les tribunaux auxquels l’usage actuel en a donné le droit, jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné, sous les conditions et avec les modifications ci-après prescrites. Art. 2. Dans tous les chefs-lieux des districts, ou parsans du Béarn, la municipalité, et en cas qu’il n’y ait pas de municipalité, la communauté des habitants nommera un nombre suffisant de notables, eu égard à l’étendue du district, pour remplir la fonction d’adjoint dans les plaintes et dans les actes d’instruction qui y seront faits par les procureurs du Roi du district, ou parsan, dans les cas qui sont de leur compétence. Art. 3. Dans chaque sénéchaussée ou châtellenie de la Basse-Navarre, la municipalité, et en cas qu’il n’y ait pas de municipalité, la communauté des habitants nommera pareillement un nombre suffisant de notables, eu égard à l’étendue du ressort, pour remplir la fonction d’adjoint dans les plaintes et dans les actes d’instruction qui y seront faits, soit par les commissaires enquêteurs, soit par le procureur du Roi de la sénéchaussée ou châtellenie. Art. 4. 11 sera en outre nommé dans la ville de Pau, par la municipalité, un nombre suffisant de notables pour remplir la fonction d’adjoint dans les plaintes et dans les actes d’instruction, qui ont accoutumé d’être faits par le parlement, et dans le lieu de son établissement. Art. 5. La liste des notables nommés pour adjoints dans les districts, ou parsans du Béarn, sera déposée au greffe des sénéchaussées les plus voisines du chef-lieu du district. La liste des notables nommés pour adjoints dans les sénéchaussées ou châtellenies delà Basse-Navarre, sera déposée au greffe desdites sénéchaussées, et celle des notables nommés pour adjoints dans la ville de Pau, sera déposée au greffe du parlement. Art. 6. Les plaintes qui seront présentées, soit aux procureurs du Roi des districts, ou parsans du Béarn, soit au parlement, soit aux sénéchaussées, soit aux châtellenies de la Basse-Navarre, ne le seront qu’en présence de deux adjoints, amenés par le plaignant et choisis par lui dans le nombre de ceux compris aux listes du district ou parsan, des sénéchaussées ou du parlement, selon que la plainte sera rendue devant le procureur du Roi du parsan, ou en la sénéchaussée, ou au parlement. Art. 7. Toutes les informations, qui précéderont le décret, et qui seront faites par les procureurs du Roi de districts ou parsans, soit sur la plainte des particuliers, soit d’office, et celles qui seront faites par les commissaires enquêteurs, ou procureurs du Roi des sénéchaussées ou châtellenies, le seront en présence de deux notables adjoints. Art. 8. Les procureurs du Roi de districts, ou parsans de Béarn, seront tenus de procéder à l’audition des témoins dans le chef-lieu de leurs districts. Ils ne pourront se transporter au domicile des témoins, si ce n’est dans le cas d’une exoine valable proposée par le témoin, et justifiée. Ils ne pourront également se transporter dans [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] un autre lieu du ressort de leur district, pour procéder à l’audition des témoins, si ce n’est dans le cas prescrit par l’article 8 du décret des 8 et 9 octobre dernier. Art. 9. Au surplus, toutes les dispositions des décrets des 8 et 9 octobre et ...... décembre dernier, seront exécutées selon leur forme et teneur, parles procureurs du Roi de districts ou parsans, et des sénéchaussées, et par tous les juges des tribunaux et de la cour du Béarn et de la Basse-Navarre, chacun en ce qui les concerne, soit pour la réception des plaintes, soit pour les actes d’instructions, soit pour le jugement des procès criminels. Mémoire pour les députés du Béarn au sujet du décret des 8 et 9 octobre , sur la ré formation de quelques points de la jurisprudence criminelle. Ce décret, utile et désiré par tous les bons citoyens, donne lieu à de grandes difficultés dans le Béarn; mais c’est moins au décret qu’il faut les rapporter, qu’à l’ordre particulier qui s’y observe dans l’administration de la justice criminelle. Le parlement est seul en possession de connaître des matières criminelles; il les juge en premier et dernier ressort, mais il ne reçoit point des plaintes, excepté dans des cas graves et extraordinaires. Les plaintes sont portées devant des procureurs du Boi, distribués dans différents cantons de la province, appelés parsans, qui sont au nombre de treize. Les personnes qui ont à se plaindre de quelque délit ou crime, se présentent devant ces procureurs du Boi, qui reçoivent leur plainte, leur donnent des lettres pour assigner des témoins, et informent à charge et décharge, sans avoir besoin d’y être autorisés par quelque ordonnance des juges; ils peuvent même, dans des crimes graves, informer d’oftice, sans avoir besoin d’une plainte, ni d'être requis par une partie civile. Les informations étant finies, le procureur du Roi les clôture et les envoie cachetées au greffe du parlement, qui les décrète et y statue suivant l’exigence des cas. Le ministère des procureurs du Roi est entièrement rempli par l’audition des témoins; il ne peut même rien requérir sur les informations qu’il a rédigées. Il est facile, d’après ces notions, de s’apercevoir que le décret du 8 novembre éprouve de grands inconvénients en Béarn. Ce décret suppose, comme il est naturel, que c’est un tribunal qui est nanti de la plainte, et que c’est le juge qui informe et qui continue l’instruction du procès criminel; mais c’est toute autre chose en Béarn, où les sénéchaux, qui sont au nombre de cinq, ne connaissent point des matières criminelles, qui sont toutes dévolues à la Chambre de la Tournelle du parlement, et où les treize procureurs du Roi reçoivent les plaintes et font les informations sur lesquelles le parlement décrète et instruit les procès criminels. Après ces observations sur les usages du pays, on passe à l’indication des dispositions desquelles naissent les principales difficultés : 1° L’article 1er du décret veut que dans tous les lieux où il y a un ou plusieurs tribunaux judiciaires, la municipalité nomme un nombre suffisant de notables, etc. A suivre strictement la disposition de cet article, on ne devrait nommer des notables .que dans la ville de Pau, parce que c’est le seul endroit où il y a un tribunal qui soit en possession de connaître des affaires criminelles; mais si on ne devait nommer d�s notables qu’à Pau, et que ces notables dussent se transporter dans les treize cantons ou parsans qui forment les districts des procureurs du Boi, lorsque ces derniers sont dans le cas d’informer, ce serait une dépense énorme, et l’exécution du décret deviendrait impraticable. Il faut plutôt supposer que le procureur du Boi qui fait les fonctions du juge, en recevant la plainte et en informant de sa propre autorité, est le tribunal dont parle l’article 1er du décret, et on doit ordonner provisoirement et jusqu’à ce que l’organisation du pouvoir judiciaire soit formée; que dans tous les chefs-iieux des districts ou parsans, il sera nommé des notables, eu égard à l’étendue du district, pour assister à la plainte en conformité de l’article 3 du décret, sans préjudice d’en être nommé d’autres à Pau, pour assister à l’instruction des procès criminels, conformément aux autres dispositions du décret : 1° Le dépôt de la liste des notables, dont parle l’article 2, ne peut souffrir aucune difficulté, quant à l’instruction du procès criminel qui se fait à Pau, ni pour le district ou parsan de cette ville, parce qu’il y a un greffe pour les matières criminelles où ce dépôt peut être fait. Mais il serait contraire à l’objet du décret, que toutes les listes des treize chefs-lieux des parsans dussent être déposées dans ce greffe, attendu son éloignement de la plupart des parsans et la difficulté de les rendre notoires par ce moyen. Il convient d’ordonner à cet égard, que les listes seront déposées aux greffes des sénéchaussées ou des hôtels de ville les plus voisins, à la diligence du greftier ou secrétaire du chef-lieu du district ou parsan. 2° Les articles 5 et 8 prévoient les cas du déplacement du juge pour la rédaction des procès-verbaux de constatation du délit, et pour une information urgente et provisoire qui se ferait sur le lieu même pour le flagrant délit. En Béarn les procureurs des parsans étaient dans l’usage de courir les paroisses et de se transporter sur la réquisition des plaignants, dans les domiciles des témoins, ce qui était ainsi prescrit par l’article 3 de la coutume, au titre des procureurs . Mais il était résulté de cet usage des abus infinis qui étaient devenus très-onéreux au people, attendu qu’ils servaient de prétexte pour multiplier les vacations. Le parlement a tenté de réprimer ces abus par différents arrêts, et n’a pu y parvenir entièrement. Le décret de l’Assemblée suppose que les informations se feront dans le siège du tribunal, hors le cas dont parle l’article 8. Il faut laisser subsister cette nécessité même par rapport au Béarn, en supposant que les chefs-lieux des parsans seront réputés le siège du tribunal qui reçoit les plaintes, et il ne reste qu’à prévoir le cas où un témoin à entendre sera infirme, ou hors d’état de se rendre au chef-lieu du parsan ! pour être entendu, et autoriser dans ce cas les | procureurs du parsan à se transporter sur la = réquisition écrite du plaignant au domicile du I témoin, cette exception sera une nouvelle con-l firmation de la règle générale admise par le dé-? cret. 741 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] D’après ces observations on propose à MM. les commissaires d’insérer dans un nouveau décret les articles ou les expressions qui leur paraîtront nécessaires pour remédier provisoirement aux difficultés qui résultent de la constitution du Béarn et de l’ordre qui s’y observe dans l’administration de la justice criminelle. — Mourot, député du Béarn. Second mémoire ou observations particulières à la Basse-Navarre. Le député du Béarn en présentant son mémoire sur les matières criminelles, n’a porté ses vues que sur la province qu’il représente; mais l’ouvrage de Messieurs les membres du comité serait imparfait pour le ressort du parlement de Pau, s’il ne leur observait que la Basse-Navarre qui en fait partie est encore dans une situation plus désavantageuse que le Béarn. Cette dernière province a du moins des officiers en titre d’office pourvus par le Roi, qui, sous le nom de procureurs du parsan, reçoivent les plaintes et procèdent aux informations; mais en Navarre il n’y a que de simples commissaires connus sous le nom de commissaires enquêteurs qui ne sont pourvus que d’une commission donnée par le greffier en chef du parlement, et visée par le premier président. Ce sont ces commissaires qui procèdent aux informations qui se font d’autorité du parlement, et il y a cette différence entre ces commissaires et le procureur du parsan du Béarn, que les premiers ne peuvent pas recevoir des plaintes directement; il faut que les parties se pourvoient par requête au parlement qui permet l’information et nomme par son appointement le commissaire enquêteur qui doit y procéder. Muni de cette permission d’informer, le plaignant se présente devant l’enquêteur commis qui lui donne ses lettres pour assigner les témoins; et l’information étant clôturée, le commissaire l’envoie en original au greffe du parlement, attendu qu’il n’a aucun greffe ni aucun greffier, non plus que les procureurs du parsan du Béarn. Pour éviter toute méprise dans l’emploi des expressions, on doit encore prévenir que ces commissaires de Navarre ne font que les informations permises par le parlement, et non celles permises par le sénéchal de Navarre ou par la châtellenie de Saint-Jean dans la même province, lorsque les parties usant, suivant leur droit, de la liberté acquise aux habitants de ces deux provinces de plaider au sénéchal en la châtellenie de Saint-Jean ou au parlement en première instance, se pourvoient au sénéchal ou à la châtellenie. C’est dans ce cas le procureur du Roi au sénéchal, ou en la châtellenie, qui procède aux informations. Le juge ne s’en mêle point non plus qu’en Béarn. Ces éclaircissements ont paru nécessaires afin de mettre MM. les commissaires à portée d’embrasser toutes les difficultés relatives au ressort du parlement de Pau. — Mourot, député du Béarn. 5e ANNEXE. Principes fondamentaux de la police et de la justice , présentés au nom du comité de constitution, par M. Duport, député de Paris ( l). (Imprimé par ordre de l’Assemblée nationale.) Au moment où les comités réunis de constitution et de jurisprudence criminelle sont sur le point de présenter à l’Assemblée nationale le plan d’organisation de la police et de la justice criminelle, j’ai cru qu’il pouvait être utile d’offrir d’avance à la méditation de ceux qui vont s’occuper d’objets si importants, les principales bases de notre travail. C’est un inconvénient pour les membres de l’Assemblée nationale que, forcés de passer rapidement d’un objet à un autre, ils n’arrivent pas toujours préparés par la réflexion aux sujets qui y sont traités. Cet inconvénient serait terrible dans la matière actuelle, puisque de simples erreurs peuvent entraîner les plus fâcheuses conséquences pour l’honneur, la liberté et la vie des citoyens. Art 1er. La police et la justice, comme toutes les autres institutions sociales, ne sont établies que pour l’avantage commun des membres de la société; leur objet est d’assurer à chacun d’eux l’exercice de ses droits naturels et civils, et de lui en garantir la jouissance contre le trouble qu’il pourrait recevoir de la part des autres individus. Art. 2. Tout homme ayant, par la nature, un droit égal à la vie, à l’honneur, à la liberté, quiconque tue, blesse, insulte ou détient illégalement un homme , attente aux droits naturels de cet homme. Art. 3. Tout homme ayant, par la société, un droit égal à sa sûreté, à sa propriété, quiconque dérobe, détruit ou retient injustement la propriété d’un individu, attente aux droits civils de cet individu. Art. 4. La société n’a de moyen de garantir à tous l’exercice et la jouissance de leurs droits naturels et civils, qu’en donnant à chacun des motifs suffisants pour Je forcer à respecter les droits d’autrui. Art. 5. Le premier, et le plus imprortant de ces motifs, c’est que les lois soient justes, égales pour tous, faites et dirigées entièrement pour le bonheur de tous; que chacun puisse voir dans le respect qu’on a en pour ses droits, celui qu’il doit porter aux droits des autres. Art. 6. Sans cette condition, la paix de la société n’est pas même désirable; elle n’est plu3 qu’un ordre forcé, le ressort n’est plus la justice, mais la crainte. La société n’a pas le droit de contraindre à l’exécution de pareille lois. Car, de quel droit exigerait-elle d’un particulier qu’il observât la justice, lorsqu’elle cesse de l’observer elle-même à son égard ? Art. 7. Le second de ces motifs est l’établissement des peines. Si les lois sont justes et sages, si elles assurent à chacun la jouissance de ses droits, alors seulement la loi peut établir des peines contre ceux qui tendent à les violer, ou, ce qui est la même chose, à troubler l’exercice des droits naturels et civils des individus. Art. 8. En fait de peine, le minimum est ordonné par l’humanité, et conseillé par la politique, toutes les fois que le but de la loi peut être rempli (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur.