[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 juin 1790.] 276 évalué qu’à 5 ou 6 millions par mois, à compter du 1er mai jusqu’au 31 décembre. Vous ne serez donc pas surpris, Messieurs, si chaque mois, chaque jour, il faut un secours en assignats, et si, en attendant leur confection, il est nécessaire de faire usage de billets de la caisse d’escompte, portant promesse de fournir ces mêmes assignats. Tous les papiers qu’exige la fabrication des 400 millions sont maintenant à Paris, ou arrivent journellement, l’impression va commencer; le travail du graveur, destiné à revêtir les assignats de l’empreinte du roi, touche à son terme; les personnes qui doivent signer ces billets sont nommées : ainsi, selon toute apparence, avant trois semaines, il y aura une première distribution de ces assignats ; et l’on ne peut rien ajouter au zèle actif des membres du comité des finances qui se sont chargés de veiller sur tous les détails d’une opération si importante. M. de FoIIeville. Je l’avais bien prédit : — eh! que je connais le renard ! (On rit.) M. de FoIIeville. Je demande que tous les vendredis on nous donne connaissance du bordereau de situation du Trésor royal; que le premier vendredi de chaque mois on mette sous nos yeux l’état de la recette et de la dépense générale, et des assignats employés. J’observe que si les assignats sont mis en circulation progressivement et non en masse, il en résultera, sur les intérêts, une économie de 7 à 800,000 livres. J’ajoute qu’il est impossible de rester dans le désordre où nous sommes : on ne nous présente pas eu recette les recouvrements à faire sur les impositions des années passées. M. üorissart, rapporteur du comité des finances. Le premier ministre des finances a remis hier ce mémoire au comité : la somme de 30 millions, qui est demandée n’est point un emprunt additionnel ; mais c’est un emploi des assignats suivant la destination que vous leur avez donnée. Le comité des finances vous propose le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale décrète que les administrateurs de la caisse d’escompte seront autorisés à remettre au Trésor public une somme de 30 millions en billets de la caisse, portant promesse d’assignats, lesquels seront échangés avec des assignats-monnaie lors de leur émission. » M. l’âbbé ïllaury . Je ne m’élèverai pas contre l’anticipation d’assignats demandée ; je sais que le service de l’année exige des dépenses aux-uelles le Trésor public ne peut suffire. Pour vous xer sur un objet non moins important, je répéterai ce que j’ai dit, que jamais aucune question de finance n’a été traitée dans son universalité. Il est temps enfin, après quatorze mois, que les députés puissent présenter à la France la situation de ses affaires. Daignez considérer que la marche que l’on présente toujours est partielle et bornée. S’agit-il de dépense, on nous offre non des états, mais un aperçu ; s’agit-il de rentrée de fonds, on nous apporte la recette du dernier mois. Jusqu’à présent, le ministre n’avait correspondu qu’avec la Chambre des comptes ; cette forme ministérielle a mis hors de la voie qui doit nous être ouverte. Il semblerait qu’un compte fût impossible à rendre; il semblerait que le premier ministre des finances, qui a bien le temps de faire des brochures contre des particuliers, contre moi par exemple, ne puisse pas se livrer à ce travail : puisque la multitude de ses opérations ne l’empêche pas de s’occuper de ces détails, il trouverait bien le temps, malgré sa mauvaise santé, de nous donner des instructions précises sur nos finances. Je propose donc qu’il soit tenu de nous présenter, dans le plus court délai, trois mémoires particuliers de calculs : le premier renfermera l’état de la recette, le second celui de la dépense et le troisième celui de la dette ; on ne reçoit pas, on ne paye pas, on ne doit pas au hasard ; ces calculs doivent donc être faciles, ils doivent donc être faits. Vous voyez que ces trois comptes sont les flambeaux qui doivent répandre la lumière sur les finances, jusque-là nous ne pourrons faire un pas dans cette carrière. Si nous ne connaissons pas l’état de la recette, comment établir les impôts directs et indirects? Sî vous ne connaissez pas la dépense, vous ne pouvez prescrire les économies. Tant que vous ne connaîtrez pas la dette, les finances seront toujours un dédale impénétrable dans lequel vous ne pourrez rien apercevoir. La route que je vous propose est celle delà simplicité, de la vérité, de la loyauté : vous ne jugerez plus par des estimations vagues. Si l’on vous eût dit, au commencement de l’année, que la dépense extraordinaire de cette année devait monter à 389 millions, on vous aurait épouvantés : mais on vous a dit qu’on a il millions d’excédent, parce qu’on a à manger 400 millions d’assignats. (Il s'élève des murmures.) Quand je dis que les dépenses extraordinaires sont de 389 millions, je ne dis pas qu’on les gaspille : je sais bien que c’est pour rembourser la caisse d’escompte, les anticipations, les semestres arriérés des rentes ; mais, sans attaquer la légitimité de cet emploi, j’observe qu’il serait digne de l’attention de l’Assemblée de considérer que l’extinction de la créance de la caisse d’escompte et des anticipations va engloutir une ressource que vous ne pourrez pas toujours avoir. Vous êtes appelés non seulement à rétablir l’ordre dans les finances, mais encore à l’assurer pour toujours. Sans être juge des lumières des membres de l’Assemblée nationale, j’assure que je me suis occupé avec soin des finances, et qu’il m’a été impossible d’en connaître l’état : ce n’est cependant que lorsque vous l’aurez connu que vous pourrez statuer définitivement. Je demande donc que le premier ministre des finances soit tenu de nous présenter, dans le plus court délai, trois états certifiés par lui : l’un de la recette, l’autre de la dépense, et le dernier de la dette. (Ce discours est vivement applaudi.) L’Assemblée ajourne à demain la motion de M. l’abbé Maury. La séance est levée à trois heures un quart. ANNEXES A la séance de l'Assemblée nationale du 18 juin 1790. ANNEXE N° 1. Motion deM. Malouet contre les libellistes (l). J’ai demandé qu’il soit donné ordre au proeu-(1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur.