SÉANCE DU 18 FLORÉAL AN II (7 MAI 1794) - Nos 26 A 28 119 Soyez persuadés, Citoyens représentans, que dans cette adresse le conseil général manifeste en même temps l’esprit public de toute la commune de Pithiviers, qui dès le commencement de la Révolution n’a cessé de faire des offrandes généreuses pour l’intérêt de la chose publique. Cette commune fait don, dans ce moment aux braves défenseurs de la patrie, de 20 douzaines de chemises, de 34 paires de bas, elle y joint 5 paires de souliers, des cols, et 110 livres en assignats; elle a contribué, conjointement avec les Sociétés populaires de Pithiviers et des autres commîmes du district du dit lieu, à monter et équiper un cavalier choisi parmi ses concitoyens. A peine la loi a-t-elle parlé que les cloches ont été descendues et envoyées à leur destination; les nombreux et riches ornemens des ci-devant églises ont été livrés; 187 marcs 9 onces 3 gros d’argent provenant des châsses et autres amulettes doivent être fondues dans le creuset national. Nous allons déposer dans les magasins environ 10 milliers pesant de fer provenant des grilles des ci-devant églises et ci-devant châteaux; nous brûlons d’impatience de les voir convertir en fusils et en bayonnettes pour achever de terrasser l’hydre du despotisme ! Vous avez déjà, Citoyens représentans, décrété cette utile conversion. Vive donc à jamais la Convention nationale, qu’elle vive dans nos cœurs, que depuis longtemps nous lui avons dévoués, comme nous consacrons nos fortunes et nos vies au salut de la République ». Richard (notable), Lambert (notable), Girard (notable) [et 24 signatures illisibles]. 26 Le citoyen Pierre-Nicolas Bien, notaire public à Laon, fait déposer sur le bureau les titres de son office, et déclare faire don à la patrie du montant de sa finance. Mention honorable, et renvoi au Comité de liquidation (1). 27 Un secrétaire fait lecture du procès-verbal de la séance du 12 floréal. La rédaction est adoptée (2) . 28 THIBAUDEAU, au nom du Comité de la marine : La Convention nationale a établi, par son décret du 16 pluviôse dernier, des instituteurs sur tous les vaisseaux de 20 canons et au-dessus; c’était une justice qu’il était digne de la République de rendre aux marins. L’instruction est le besoin de tous les citoyens; il fallait des écoles sur les vaisseaux comme sur le continent, car les vaisseaux sont le domicile presque habituel des marins. (1) P.V., XXXVII, 44. (2) P.V., XXXVn, 44. Un article de ce décret portait qu’il serait fait une édition soignée de la Déclaration des Droits de l’Homme et de la constitution, à laquelle seraient ajoutées des notes explicatives et simples, et des traits historiques choisis de préférence parmi les actions des défenseurs de la liberté. Votre Comité d’instruction publique s’est occupé de l’exécution de ce décret. Jean Bon Saint-André presse l’envoi de cette espèce de livre élémentaire qui doit rappeler à chaque instant aux marins éloignés de leur patrie ce qu’ils lui doivent et ce qu’ils ont droit d’en attendre. Votre Comité n’a pas cru qu’il fallût ajouter de notes explicatives à la Déclaration des Droits de l’Homme et à l’acte constitutionnel. Assez de petits esprits, incapables de rien créer, les ont surchargés déjà d’obscures commentaires, les ont travestis en mauvais vers, et ont défiguré votre plus bel ouvrage sous le spécieux prétexte de l’améliorer. Que tous les Français apprennent, par votre exemple, que ce n’est qu’avec une sorte de respect religieux que l’on doit parler de ce pacte social puisé dans le sein de la nature, et tout à la fois simple et majestueux comme elle. La Déclaration des Droits de l’Homme ne sera jamais intelligible pour les ennemis de la patrie; mais tous les hommes que les fausses jouissances n’ont point dépravés, que les préjugés n’ont point hébétés, qui, restés près de la nature, ont toujours conservé dans leur cœur les germes de la liberté et de l’égalité, la comprendront bien sans commentaires. La mer fut toujours, même sous le despotisme, l’asile de la liberté et de l’indépendance; sur cet élément sans bornes l’homme conserve sa fierté naturelle, et son âme s’ouvre facilement à tout ce qui lui retrace ses droits et lui rappelle sa patrie. Il suffit donc de présenter aux marins la Déclaration des Droits de l’Homme et l’acte constitutionnel tels qu’ils sont sortis des mains des législateurs. L’instruction qui y sera jointe contient : 1°) Un abrégé très rapide de l’histoire de la marine chez les différents peuples; on y prouve, par la description topographique de la France, que la nature l’a destinée à naviguer sur toutes les mers; 2°) Le tableau des lois absurdes qui, sous le despotisme, avilissaient les marins les plus utiles par des distinctions ridicules, qui violaient leurs droits les plus sacrés, les excluaient des places, gênaient le commerce, et faisaient des forces navales la propriété de quelques nobles ignorants; Les principes sur lesquels doit reposer la marine d’un peuple libre, et la grande influence qu’une constitution républicaine doit donner à la France sur les mers comme sur le continent; 3°) Une indication des connaissances nécessaires aux marins, appuyée par des actions éclatantes des plus grands hommes de mer, tous pris dans la classe des sans-culottes. On a exposé aux marins que, dans les circonstances où se trouvait la France, attaquée de toutes parts par ses ennemis, l’art de la guerre ne devait pas être circonscrit dans les règles bornées d’une tactique de convention; que tout alors s’agrandit par le courage, l’audace et l’enthousiasme de la liberté; que la tactique de terre est la baïonnette, et la tactique de mer l’abordage; que c’est ainsi que les Romains changèrent les SÉANCE DU 18 FLORÉAL AN II (7 MAI 1794) - Nos 26 A 28 119 Soyez persuadés, Citoyens représentans, que dans cette adresse le conseil général manifeste en même temps l’esprit public de toute la commune de Pithiviers, qui dès le commencement de la Révolution n’a cessé de faire des offrandes généreuses pour l’intérêt de la chose publique. Cette commune fait don, dans ce moment aux braves défenseurs de la patrie, de 20 douzaines de chemises, de 34 paires de bas, elle y joint 5 paires de souliers, des cols, et 110 livres en assignats; elle a contribué, conjointement avec les Sociétés populaires de Pithiviers et des autres commîmes du district du dit lieu, à monter et équiper un cavalier choisi parmi ses concitoyens. A peine la loi a-t-elle parlé que les cloches ont été descendues et envoyées à leur destination; les nombreux et riches ornemens des ci-devant églises ont été livrés; 187 marcs 9 onces 3 gros d’argent provenant des châsses et autres amulettes doivent être fondues dans le creuset national. Nous allons déposer dans les magasins environ 10 milliers pesant de fer provenant des grilles des ci-devant églises et ci-devant châteaux; nous brûlons d’impatience de les voir convertir en fusils et en bayonnettes pour achever de terrasser l’hydre du despotisme ! Vous avez déjà, Citoyens représentans, décrété cette utile conversion. Vive donc à jamais la Convention nationale, qu’elle vive dans nos cœurs, que depuis longtemps nous lui avons dévoués, comme nous consacrons nos fortunes et nos vies au salut de la République ». Richard (notable), Lambert (notable), Girard (notable) [et 24 signatures illisibles]. 26 Le citoyen Pierre-Nicolas Bien, notaire public à Laon, fait déposer sur le bureau les titres de son office, et déclare faire don à la patrie du montant de sa finance. Mention honorable, et renvoi au Comité de liquidation (1). 27 Un secrétaire fait lecture du procès-verbal de la séance du 12 floréal. La rédaction est adoptée (2) . 28 THIBAUDEAU, au nom du Comité de la marine : La Convention nationale a établi, par son décret du 16 pluviôse dernier, des instituteurs sur tous les vaisseaux de 20 canons et au-dessus; c’était une justice qu’il était digne de la République de rendre aux marins. L’instruction est le besoin de tous les citoyens; il fallait des écoles sur les vaisseaux comme sur le continent, car les vaisseaux sont le domicile presque habituel des marins. (1) P.V., XXXVII, 44. (2) P.V., XXXVn, 44. Un article de ce décret portait qu’il serait fait une édition soignée de la Déclaration des Droits de l’Homme et de la constitution, à laquelle seraient ajoutées des notes explicatives et simples, et des traits historiques choisis de préférence parmi les actions des défenseurs de la liberté. Votre Comité d’instruction publique s’est occupé de l’exécution de ce décret. Jean Bon Saint-André presse l’envoi de cette espèce de livre élémentaire qui doit rappeler à chaque instant aux marins éloignés de leur patrie ce qu’ils lui doivent et ce qu’ils ont droit d’en attendre. Votre Comité n’a pas cru qu’il fallût ajouter de notes explicatives à la Déclaration des Droits de l’Homme et à l’acte constitutionnel. Assez de petits esprits, incapables de rien créer, les ont surchargés déjà d’obscures commentaires, les ont travestis en mauvais vers, et ont défiguré votre plus bel ouvrage sous le spécieux prétexte de l’améliorer. Que tous les Français apprennent, par votre exemple, que ce n’est qu’avec une sorte de respect religieux que l’on doit parler de ce pacte social puisé dans le sein de la nature, et tout à la fois simple et majestueux comme elle. La Déclaration des Droits de l’Homme ne sera jamais intelligible pour les ennemis de la patrie; mais tous les hommes que les fausses jouissances n’ont point dépravés, que les préjugés n’ont point hébétés, qui, restés près de la nature, ont toujours conservé dans leur cœur les germes de la liberté et de l’égalité, la comprendront bien sans commentaires. La mer fut toujours, même sous le despotisme, l’asile de la liberté et de l’indépendance; sur cet élément sans bornes l’homme conserve sa fierté naturelle, et son âme s’ouvre facilement à tout ce qui lui retrace ses droits et lui rappelle sa patrie. Il suffit donc de présenter aux marins la Déclaration des Droits de l’Homme et l’acte constitutionnel tels qu’ils sont sortis des mains des législateurs. L’instruction qui y sera jointe contient : 1°) Un abrégé très rapide de l’histoire de la marine chez les différents peuples; on y prouve, par la description topographique de la France, que la nature l’a destinée à naviguer sur toutes les mers; 2°) Le tableau des lois absurdes qui, sous le despotisme, avilissaient les marins les plus utiles par des distinctions ridicules, qui violaient leurs droits les plus sacrés, les excluaient des places, gênaient le commerce, et faisaient des forces navales la propriété de quelques nobles ignorants; Les principes sur lesquels doit reposer la marine d’un peuple libre, et la grande influence qu’une constitution républicaine doit donner à la France sur les mers comme sur le continent; 3°) Une indication des connaissances nécessaires aux marins, appuyée par des actions éclatantes des plus grands hommes de mer, tous pris dans la classe des sans-culottes. On a exposé aux marins que, dans les circonstances où se trouvait la France, attaquée de toutes parts par ses ennemis, l’art de la guerre ne devait pas être circonscrit dans les règles bornées d’une tactique de convention; que tout alors s’agrandit par le courage, l’audace et l’enthousiasme de la liberté; que la tactique de terre est la baïonnette, et la tactique de mer l’abordage; que c’est ainsi que les Romains changèrent les