50 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE La Convention rend le décret suivant: La Convention nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Salut public, décrète que les troupes de la République qui ont fait le siège de l’Ecluse ont bien mérité de la Patrie (81). Bréard : Il vient d’arriver en ce moment au comité de Salut public un courrier qui apporte la confirmation de la nouvelle de la prise de Valenciennes, annoncée ce matin par la voix du télégraphe (Vifs applaudissements plusieurs fois réitérés.) La dépêche est entre les mains de notre collègue Carnot. Je ne puis vous donner tous les détails qu’elle renferme; je vous dirai seulement qu’on a pris dans la place onze cents émigrés (Les applaudissements redoublent et se mêlent aux cris mille fois répétés de Vive la République !) On y a trouvé deux cent vingt-sept pièces de canon en batterie, des magasins considérables de tout genre, et notamment huit cent milliers de poudre, et plus de mille bêtes à cornes (Les applaudissements recommencent et se prolongent.) (82). 37 Le même comité [par l’organe de Treilhard] propose ensuite diverses promotions d’officiers, et la Convention nationale décrète ce qui suit: La Convention nationale, sur la proposition du comité de Salut public, nomme aux dix emplois vacans dans l’armée, et qui sont à son choix, les citoyens ci-après: 1. A celui de capitaine du huitième bataillon de la Côte-d’Or, Gagnebin, capitaine de la légion réformée des Sans-culottes. Ce jeune militaire s’est distingué dans toutes les affaires où cette légion s’est trouvée à l’armée d’Italie, notamment à celle de Gillette, le 18 septembre 1793, où il a monté le premier à la redoute. 2. A celui de lieutenant du même bataillon, Sensenbrener, sergent-major au deuxième bataillon de la cent vingt-troisième demi-brigade. A la prise de Mons, ce brave militaire étant à la tête des tirailleurs avec le capitaine Grignon, apperçoit deux pièces de canon vigoureusement défendues par l’ennemi, fonce dessus, frappe de mort les ca-(81) P.-V., XLIV, 195; C 317, pl. 1280, p. 45; décret n° 10 607. Rapporteur : Treilhard. Bull., 11 fruct.; Moniteur, XXI, 607-608; Débats, n° 707, 708; M.U., XLIII, p. 188-189; 194-195; Ann. R.F., n° 269; Ann. Pair., n° 605; F. de la Républ., n° 421; Gazette Fr., n° 971; J. Mont, n°121-122; J. Fr., n° 703; C. Eg., n° 740-741; J. S.-Culottes, n° 560; J. Perlet, n° 705; Rép., n° 252; J. Univ., n° 1739; J. Paris, n° 606; Mess. Soir., n° 740. La plupart des gazettes reproduisent la lettre du représentant Lacombe Saint-Michel. (82) Moniteur, XXI, 608; Bull.. 11 fruct.; Débats, n° 708; M.U., XLIII, p. 191; Rép., n° 252; Ann. Patr., n° 605; C. Eg., n° 740; J. Perlet, n° 705; F. de la Rép., n° 421; Gazette Fr., n° 971. nonniers et s’empare de leurs pièces; toutes deux, de gros calibre, chargées à mitraille, alloient faire feu sur la colonne républicaine qui s’avançoit. 3. A celui de capitaine au bataillon de l’Egalité, Charente-Inférieure, Contamine, lieutenant au premier bataillon du cinquante-cinquième régiment. Il faisoit les fonctions d’aide-de-camp du général Serviez pendant le blocus de Landau : Serviez ayant été dénoncé comme chef des insurrections qui eurent lieu dans cette place, Contamine, par cette seule raison, fut arrêté, remplacé et traduit à Paris. Il vient d’être rendu à la liberté après plusieurs mois de détention; son innocence est reconnue; plusieurs représentans du peuple attestent même qu’il s’est montré aussi intrépide que bon patriote. 4. A celui de lieutenant au même bataillon, Bruiron, grenadier au premier bataillon de la Marne. C’est celui dont il vient d’être question dans le rapport du représentant du peuple Lacombe, pour avoir été, au milieu d’une grêle de mitraille et de mousqueterie, jusqu’à la crête du glacis, éteindre quatre pots-à-feu l’un après l’autre. 5. A celui de capitaine au premier bataillon du soixantième régiment, Lebrun, sous-lieutenant au quatrième bataillon des tirailleurs du Nord. A l’affaire du 29 floréal, il a chargé seul sur cinq canonniers ennemis, en a tué un d’un coup de sabre, un second d’un coup de pistolet, a mis les autres en fuite à coup de sabre, et s’est emparé de la pièce et des chevaux. 6. A celui de sous-lieutenant au premier bataillon des Alpes-Maritimes, Marc Anco-gne, soldat au soixante-onzième régiment d’infanterie. Dans l’action qui a précédé la prise d’Ypres, ce brave soldat est menacé d’un coup de sabre par un ennemi qui lui dit de se rendre : « Un républicain ne se rend pas, répond-il aussitôt», et écarte le coup que l’Autrichien lui portoit sur la tête; mais succombant sous le nombre, il est fait prisonnier; le combat s’engage entre son bataillon et les ennemis; pendant l’action, ce brave militaire se dirige sur le porte-drapeau, le renverse, enlève ce signe des esclaves et rejoint ses frères d’armes. Ancogne est venu faire hommage de ce drapeau à la Convention. 7. A celui de capitaine au premier régiment de cavalerie, Charles Soubeiran, ci-devant capitaine de grenadiers dans un bataillon d’infanterie légère. Il a donné des preuves de bravoure aux avant-postes de l’armée des Pyrénées-Occidentales. Ses nombreuses blessures l’ont empêché de s’embarquer pour les Isles avec son bataillon, et il se trouve sans emploi, ayant été remplacé. Il s’est particulièrement distingué à l’affaire de Sarre, où un détachement de 250 républicains soutint pendant 51 SÉANCE DU 11 FRUCTIDOR AN II (28 AOÛT 1794) - N08 39-40 une heure et demie tous les efforts de l’armée espagnole, l’arrêta et culbuta sa cavalerie. 8. A celui de capitaine au dixième régiment de chasseurs, François Casimir Allier, ci-devant adjoint aux adjudans-généraux. 11 se trouve sans emploi par le changement de destination de l’adjudant-général auquel il était attaché. Les représentans du peuple attestent la conduite courageuse qu’il a tenue tant à Mayence que dans la Vendée. 9. A celui de lieutenant au même régiment, Antoine Ardoin, chasseur au cinquième régiment. A l’affaire du 10 floréal il a enlevé un drapeau à l’ennemi; et, sur la proposition, qui lui fut faite de venir l’apporter à la Convention, il le refusa, préférant rester à son poste pour en arracher d’autres aux esclaves. 10. A celui de sous-lieutenant dans le même corps, Dandurand, maréchal-des-lo-gis au quatorzième régiment de chasseurs. 11 reçoit dans une seule affaire à la Vendée trente-un coups de sabre, et tombe entre les mains des rebelles. « Crie vive Louis XVII, lui disent-ils, ou tu es mort ». Il répond avec feu: Vive la République, recueille toutes ses forces, et le sabre à la main, il se fait jour à travers les brigands, et s’échappe à leur rage. Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance (83). 38 Après avoir entendu le rapport de son comité de Liquidation, la Convention nationale rend le décret suivant: La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Liquidation, décrète ce qui suit: Article premier. — Il sera payé par la trésorerie nationale, aux défenseurs de la patrie dénommés dans les deux états annexés à la minute du présent décret, la somme de 135 420 L à titre de pension de retraite dont ils sont susceptibles, aux termes des lois des 16 mai 1792, 6 juin, 2 juillet 1793 (vieux style), 6 nivôse et 21 pluviôse derniers; SAVOIR 1°. A ceux mutilés et blessés en combattant pour la cause de la liberté, la somme de 83 820 L. 2°. A ceux que des infirmités résultantes de l’exercice de leurs fonctions ont forcé de se retirer du service, celle de 51 600 L. (83) P.V., XLIV, 195-198; C 317, pl. 1280, p. 46; décret n° 10 612. Rapporteur : Treilhard. Bull., 11 fruct.; Débats, n° 708; M.U., XLIII, p. 200-201; Ann. R.F., n° 269; F. de la Républ., n° 421; J. Fr., n° 703; C. Eg., n° 742; J. ' Mont., n° 122. Art. IL — Les sommes énoncées à l’article précédent seront réparties entre ces militaires blessés ou infirmes, d’après les proportions indiquées par les dits états; et le paiement des pensions commencera à courir des époques qui s’y trouvent également désignées. Art. III. — Il sera fait déduction aux pensionnaires de sommes qu’ils peuvent avoir reçues à compte ou à titre de secours provisoire. Ils se conformeront d’ailleurs aux dispositions des lois précédemment rendues sur les pensions, et notamment de celles des 10 février, 17 juillet 1793 (vieux style), 16 vendémiaire et 9 nivôse derniers. Art. IV. — Sur la réclamation de Vincent Massoutié, grenadier au quatre-vingt-dixième régiment d’infanterie, la Convention nationale décrète que la pension de ce militaire, fixée par le décret du 29 vendémiaire à 365 L, sera portée, conformément aux lois précitées, à 800 livres, attendu qu’il justifie par des certificats en forme qu’il est totalement privé de l’usage de sa main droite; qu’il lui sera en conséquence expédié un brevet de sous-lieutenant, et que l’article qui le concerne dans le décret du 29 vendémiaire, sera rayé tant sur la minute que sur les expéditions, et partout où besoin sera (84). 39 Un membre, au nom du comité de Législation, fait un rapport sur le citoyen Bernard, condamné à six ans de fers, et propose le décret suivant qui est adopté. La Convention nationale, après avoir entendu son comité de Législation; Considérant que le jugement rendu, le 29 prairial dernier, par le tribunal militaire établi près l’armée des Côtes de Cherbourg, qui condamne à six années de fers Apollinaire Bernard, lieutenant de la dix-neuvième demi-brigade d’infanterie légère, comme auteur du viol de la fille aînée de Jean Lengevin, est rendu hors l’arrondissement de ce tribunal contre le vœu des lois des 12 mai 1793 (vieux style) et 3 pluviôse dernier; Déclare nul et comme non avenu le jugement dont il s’agit, et renvoie Bernard devant le tribunal militaire établi près l’armée des Côtes de Brest, auquel le comité de Législation fera parvenir sans délai la pétition de Bernard, avec les pièces jointes et le rapport fait par Bezard. Le présent décret ne sera pas imprimé; il sera inséré au bulletin de correspondance, et (84) P. V., XLIV, 198-199; M.U., XLIII, p. 202. Décret n° 10 598. Rapporteur : Eschasseriaux jeune, d’après C*Il20, p. 270. Voir aussi décret n° 10 608, Rapporteur anonyme.