238 [Assemblée nationale,] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 mai 1791.] les plus importantes. C’en est une très nécessaire, très urgente, que de fixer d’une manière stable, d’une manière certaine, la manière de constater l’état civil des citoyens. ( Murmures : Elle existe cette loi! ). ... 11 n’est pas possible d’ajourner une loi qui doit fixer, non le sort d’une portion de Français, non le sort des catholiques, mais celui de tous les Français. M. de Tracy. Je demande la question préalable sur l’ajournement. La raison veut que l’état civil soit constaté pas les officiers civils; cela n’empêche par chacun de remplir ses devoirs religieux et même cela lui en laisse toute la faculté suivant les mouvements vrais de sa conscience, chose que l’oppression n’a jamais donnée. 11 faut ou renoncer aux principes de la Constilution ou en admettre cette conséquence essentielle. Je dis plus : il est pressant de l’admettre, parce qu’en attendant, il meurt, il naît des personnes, et que tous les jours l’état des personnes souffre, il y a periculum in morâ. On souffre tous les jours du retardement et il n’y a pas contre le projet que l’on vous propose une seule objection valable. Le principe est la copie fidèle de votre déclaration et la conséquence suivie de votre décret du 7 de ce mois. Je conclus donc à la question préalable sur l’ajournement. ( Applaudissements .) M. Dupont. Lorsque vous n’avez pas laissé les biens de votre ancien clergé à voire nouveau clergé, vous ne pouvez pas davantage lui donner les usurpations de votre ancien clergé. Votre ancien clergé avait usurpé des fonctions civiles; cela est évident... (Bruit.) . M. Gombert. On ne doit pas traiter une question si importante aussi cavalièrement. Gomme homme de la campagne, j’aperçois dans le décret des abus considérables; je demande que la question soit ajournée après la Constitution; et alors nous verrons comme les choses iront, et alors nous pourrons discuter cette affaire en connaissance de cause, parce que, si vous entassez abus sur abus, vous ferez une contre-révolution : c’est moi qui vous le prédis. M. Grelet de Beauregard appuie la demande de question préalable sur l’ajournement. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il y a lieu à délibérer sur l’ajournement.) M. Lanjuinais. Je demande la parole sur l’ajournement. (Non! non! — Bruit prolongé.) (L’Assemblée, consultée, prononce l’ajournement.) L’ordre du jour est un rapport du comité des monnaies sur l'organisation des Monnaies. M. de 'Virieu, au nom du comité des monnaies (1). Messieurs, depuis longtemps votre comité des monnaies vous a pressés d’adopter des mesures solides pour le rétablissement de l’ordre dans votre système monétaire, et vous a soumis de vastes travaux longtemps et profondément discutés avec tous les hommes les plus éclairés et les plus environnés par l’estime publique qu’il y ait en France. Une des branches les plus importantes de ce (l) Ce rapport u’est pas inséré au Moniteur. système est sans contredit l’organisation complète de toule administration des Monnaies, et elle est aujourd’hui dans le dernier délabrement. En effet, vos décrets sur la suppression de la vénalité des offices et sur la Constitution du nouvel ordre judiciaire, ont détruit toutes les bases de l’ancien système de surveillance et d’organisation des Monnaies. La cour des Monnaies connaissait privative-ment à toutes autres cours ou à tous autres juges de l’enregistrement des lois et règlements sur le fait des monnaies, et de leur exécution, circonstances et dépendances ; de la fabrication, du poids et du titre de toutes les espèces qui se fabriquaient aux coins et armes du roi ; des délits de tout genre, relatifs à la fabrication des monnaies, ou au crime de faux-monnayage; des vols commis dans l’intérieur des hôtels, des abus et malversations commis, tant par les officiers des Monnaies que par les artistes et ouvriers qui emploient les matières d’or et d’argent, et d’au très objets relatifs aux statuts des communautés de ces artistes; enfin des appellations, des jugements rendus, tant en matière civile que criminelle par Jes commissaires de la cour, les commissaires du roi en l’hôtel des Monnaies, le prévôt général, les juges-gardes, etc... Des juges établis sous les noms de général provincial, de juges-gardes et contrôleurs-contre-gardes avec un substitut du procureur général, un grefffier et di s huissiers, avaient la juridiction des monnaies et connaissaient en première instance de tous les délits concernant la fabrication, l’aliération et la distribution des monnaies fausses ou décriées, l’achat, la vente et l’emploi des matières d’or et d’argent. Ces mêmes juges et contrôleurs-contre-gardes, avec d’autres officiers appelés essayeurs et graveurs, étaient chargés des détails relatifs à la police de la fabrication. Les juges-gardes etcontrôleurs-contre-gardes devaient veiller sur toutes les opérations relatives à la fabrication des espèces, et la comptabilité des directeurs des monnaies. Les juges-gardes répondaient du poids des espèces, parce quelles ne pouvaient être délivrées au public, que lorsqu’ils les auraient vérifiées, et ils étaient garantis de leurs défectuosités. Les contrôleurs-contre-gardes étaient particulièrement chargés de tout ce qui concernait la forme, la tenue et l’inspection des registres prescrits par les règlements, tant pour la recette que pour l’emploi ues matières et des espèces, et ils suppléaient les juges-gardes, lorsqu’ils se trouvaient dans l’impossibilité de remplir leurs fonctions. Ces divers offices étant vénaux, on a vu souvent les directeurs des Monnaies les acheter sous main et en revêtir leurs affidés, ce qui anéantissait la surveillance en les mettant dans leur dépendance, et facilitant les moyens de les associer aux plus scandaleux bénéfices des plus coupables opérations. Faiblesse de poids dans les espèces, fabrications dérobées à la connaissance de l’administration, et dès lors vol fait à la nation des bénéfices du seigneuriage ; tous ces inconvénients tenaient à cet ordre vicieux de choses; et plus d’une fortune immense autant que scandaleuse, y a trouvé son principe et son aliment. A ces officiers qui réunissaient ainsi des fonctions administratives aux fonctions judiciaires, et qui, parla vénalité de leurs chargés, devenus indépendants de l’administration, qui ne pouvait exercer sur eux une police assez ferme, n’étaient que trop souvent les instruments des directeurs [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [19 mai 1791. qu’ils devaient surveiller; à ces officiers, dis-je, nous vous proposerons de substituer les commissaires du roi très parfaitement indépendants des directeurs et revêtus à la fois d’un grand caractère public, et de toute la force de l’administration, sous l’autorité de laquelle ils seront placés avec des règles sûres et précises pour les diriger et les réprimer s’ii en était besoin. Les essayeurs sont chargés de constater, par des essais, le titre des espèces, ouvrages et matières que l’on apporte au change, et de vérifier si les matières préparées par les directeurs sont au titre fixé par la loi. La vénalité de leurs offices donne lieu aux mêmes inconvénients dont nous avons fait le tableau en parlant des juges-gardes; mais il en e-t un de plus qui leur est particulier dans la nature de leurs fonctions. Non seulement ils font les essais qui constatent si les pièces fabriquées sont au titre, mais ils font des essais pendant que les matières sont en fusion dans le fourneau, et jugent si elles sont au titre pour être immédiatement coulées et fabriquées; il résulte de ce premier jugement d’abord, qu’ils dirigent le directeur de la Monnaie dans son travail, et affaiblissent ainsi sa responsabilité ; et en second lien, qu’après ce premier jugement, leur amour-propre est engagé à retrouver au second essai fait à loisir, et qu’ils ont la faculté de réitérer s’ils craignent de s’être trompés, le même titre que dans le premier essai fait, toujours avec une certaine précipitation, et qu’ils ne peuvent renouveler; ce qui conduit avec certitude à ce qui existe, je veux dire à l’empirance du titre des espèces mises en circulation. Les graveurs des monnaies sont chargés de graver les cares, poinçons et matrices que l’on emploie pour la marque des monnaies, et par une bizarrerie qu’a enfantée l’esprit de fiscalité, ledroit d’exercer ces fonctions, qui, par leur nature, exigent des talents personnels dans les arts, était devenu le prix d’une finance. Qu’en arrivait-il? On achetait un office de graveur sans savoir tenir un burin, et l’on faisait ensuite exercer par un simple ouvrier orfèvre ou serrurier ces fonctions qui exigent à la fois, par leur délicatesse, et le caractère d’un homme public qui réponde à la nation de sa fidélité, et les talents de l’artiste. L’incorrection grossière des empreintes de la plupart de nos monna;es rend sensible, aux yeux les moins exercés dans les arts, l’inconvénient de cette absurde disposition. Et qui pourrait nier que le faux monnayage a du être favorisé plus d’une fois par des coins que ces ouvriers sans titre et sans caractère reconnu ont été si souvent à portée de fabriquer en contravention ? Nous vous proposerons pour parer à ces dangers de donner ces places au concours, afin que la publicité des épreuves garantisse les talents de ceux qu’on emploiera, et que la gloire des succès devienne un motif de plus de fidélité pour des individus qui, par cela même, seront placés dans une plus grande évidence. Ces divers offices étant tous, dans l’état actuel, payés uniquement eu raison du travail, l’état de tous ceux qui doivent surveiller les directeurs est trop précaire, ils sont exposés à mourir de faim dans les monnaies peu actives; il en résulte que ces places ne sont point assez distinguées, qu’elles ne peuvent devenir un état suffisant dans la société, et que les sujets qui les occupent no sont pas retenus autant qu’il serait nécessaire par ces liens invisibles, mais si puissants, de l’es. 239 time de sa propre dignité et de la considération publique ; et que les vrais talents ne peuvent s’attacher à des fonctions qui ne leur assurent par une honnête sabsistance.il en résulte encore que le sort de ces personnes dépendant, je ne dis pas seulement pour leur aisance, mais même pour le plus strict nécessaire, de la quantité des fabrications, bonnes ou mauvaises, authentiques ou clandestines, toutes les intéressent également; car ce qui leur importe est bien moins leur perfection que leur multitude, et comme on l’a vu quelquefois arriver, un directeur, pour les assouplir, s’ii les trouve trop iidèlement sévères, peut les ruiner en suspendant exprès ses fabrications. Pour prévenir ces inconvénients, nous vous proposerons de fixer, par des traitements raisonnables, le sort des officiers des Monnaies, en sorte qu’ils soient entièrement indépendants du directeur qu’ils doivent surveiller, et que tout homme bien né puisse s’attacher avec une suffisante considération à des places qui lui donnent une existence convenable. Cependant il faut observer que le graveur ne peut être sujet à la même responsabilité que les essayeurs et les commissaires du roi, pour lesquels leur exactitude vigilante est le seul moyen de n’être pas compromis, et qu’il est cependant indispensable de stimuler son activité pour qu’aucun retard de sa part ne puisse faire languir les travaux; nous vous proposons donc indépendamment du traitement fixe qui doit lui donner de quoi subsister dans tous les cas, de lui accorder un payement en raison de son travail; c’est l’unique moyen de s’assurer de sou activité et de la perfection de ses œuvres. Quire ces officiers, il existe dans chaque Monnaie un directeur qui est chargé delà recette des espèces et matières que le public y apporte, et de leur conversion en espèces; ces hommes sont ainsi à la fois artistes et officiers publics. Tous ces offices étaient vénaux. Enfin Je gouvernement employait encore des officiers ou commissaires pour l’inspection et la surveillance générale du travail, sous les noms de commissaires du conseil, d’inspecteur général des essais et affinage, essayeur général, graveur général; je ne parle pas de la place d’inspecteur des monnaies, place sans fonctions, qui ne donnait que des appointements et un beau logement sans nulle occupation. Il résulte de ce tableau de l’ancien ordre de choses anéanti par vos décrets, et qu’il s'agit aujourd’hui de remplacer, que tout, excepté les dernières places administratives dont nous venons de parier, était confié à des hommes eo titre d’offices achetés à prix d’argent, qui forts de l’inamovibilité qui leur était ainsi assurée, commettaient très souvent des malversations impunies et presque impossibles à prévenir; qu’il existait une confusion de fonctions administratives et judiciaires qui nuisaient éminemment à l’exécution des lois et à la possibilité de prévenir les abus, seule manière efficace de les réprimer. Vous avez déjà séparé la juridiction des fonctions administratives. Par vos décrets sur la constitution judiciaire, vous l’avez attribuée aux tribunaux ordinaires, et vous avez chargé une commission royale de la partie de la surveillance et de l’administration. Par votre décret du 5 avril, sanctionné le 10 du même mois, vous avez réglé la marche de cette commission et déterminé l’objet et la forme de ses travaux. Mais votre ouvrage n’est point complet, les bases générales sont posées, l’administration su- 240 [Assemblée nationale.] périeure est déterminée; mais rien n’est fixé sur les détails qu’elle doit diriger et surveiller. L’ad ¬ ministration manque ainsi de moyens et de règles, et les tribunaux appelés à juger les contraventions manquent des directions et des lois nécessaires ; c’est ce travail que nous venons vous offrir. Nous avons cherché, d’une part, à réunir en un corps tout ce que les anciens règlements présentaient de sage et d’utile, mais qui épars dans des volumes de lois, d’édits, de déclarations, d’arrêts du conseil quelquefois contradictoires, était trop difficile à démêler; et nous rendons ainsi, et au public et aux intéressés et aux juges, le service de simplifier et d’éclaircir parfaitement les fonctions, les devoirs et les principes qui doivent les diriger. D’une autre part nous avons cherché à donner plus d’unité à tout cet ensemble; nous avons tâché de bien distinguer toutes les fonctions diverses qui, pour le succès de la surveillance, doivent se contrôler réciproquement, et de rendre ces diverses sentinelles de la bonne foi publique, tellement indépendantes les unes des autres, que leur intérêt même se trouvât autant dans leur exactitude, qu’on l’a vu ci-devant se marier à leur négligence. Enfin, en appelant, dans tous les cas où les circonstances le permettent, les administrateurs choisis par le peuple, nous avons voulu qu’un des objets qui le touche le plus, et que l’intérêt particulier a toujours tenu jusqu’ici éloigné de ses yeux et enveloppé des plus embrouillées, des plus ténébreuses rubriques, ne pût échapper de nouveau à sa vigilance; nous avons ainsi rappelé les principes que vous avez tant de fois professés, nous avons fortifié cette alliance si naturelle du peuple avec le trône, ce concours si indispensable vers le bien de leur commune volonté : a liaoce heureuse, nécessaire, sacrée, que trop souvent l’avarice et la perversité se sont efforcées de rompre. Le projet de loi que nous vous proposons, détermine d’abord le parti à prendre pour les officiers supprimés par vos précédents décrets; ces articles sont simples et portent leur explication avec eux-mêmes. Le titre 11 détermine le nombre et le choix des divers fonctionnaires qui seront chargés tant de la fabrication des monnaies, que de la surveillance et de la vérification du travail; et nous avons cherché à supprimer les emplois parasites et inutiles, autant qu’à établir ceux qui sont nécessaires à la perfection et à ia sûreté du travail. Le titre III expose clairement les fonctions attribuées à chacun, et c’est ici où nous avons eu le plus besoin d’attention ; car c’est ici qu’on a vu régner la plus dangereuse confusion dans l’ancien système; c’était autant à cette confusion qu’aux funestes effets de la vénalité qu’on a dû les infidélités par lesquelles le titre de nos louis a baissé progressivement, en soixante ans, de trois trente-deuxièmes au moins; ce qui, en nuisant sourdement à nos plus chers intérêts de commerce, a coûté plus de trois millions à l'Etat, lors de la refonte de 1785, pour ramener les espèces à leur titre véritable. Le litre IV prescrit les précautions à prendre pour constater la bonté des espèces, la justesse de leur poids, la perfection de leur fabrication avant de les délivrer au public, et les formes pour assurer la foi publique dans cette délivrance qui se fera sous les yeux des délégués immédiats du peuple. [19 mai 1791.] Le titre V est la clef de la voûte : il renferm e les dernières précautions que la sagesse peut commander pour conserver l’activité des premiers surveillants, pour constater en définitive la perfection ou les vices du travail et les délits de; agents de toutes les classes, que l’intérêt public ne peut laisser un seuünstant impunis, sans que l’aisance ues riches et la subsistance du peuple ne soient compromis au plus haut degré ; ce titre renferme encore ce qui est plus nécessaire dans un gouvernement libre que dans tout autre, la détermination précise des délits à punir et des peines justes et proportionnées qui doivent les réprimer. Ici nous avons rencontré dans l’ancien système quelques bases défectueuses. Les vices d’une organisation compliquée, confuse, ténébreuse, souillée de tous les plus dangereux inconvénients de la vénalité, devaient nécessairement embarrasser la surveillance du gouvernement. La sévérité des peines étant presque la seule ressource qu’il y avait trouvée, on eu avait établi que leur raideur même rendait inexécutables. Par exemple lorsque dans le jugement des monnaies d’un directeur une seule pièce se trouvait au-dessous du titre, toute la fabrication était jugée mauvaise, quelque fort que puissent être au-dessus du titre toutes les autres pièces essayées, et cependant ce directeur ne fabriquait que guidé par l’essayeur qui, pendant que le métal était en fusion, en faisait l’essai et décidait de sou titre. Ainsi il pouvait être puni, pour Ja faute d’un officier, son juge naturel; et sa punition était exagérée, puisque la fabrication faible d’un seul jour lui attirait la punition qu’eût méritée la faute de toute l’année. 11 eu résultait que la commisération ou l’intrigue sauvaient sans cesse les coupables, et que ces lois sauvages n’ont pu empêcher l’affaiblissement continuel de nos espèces. Nous avons donc cherché à proportionner la peine au délit, avec autant de soin que nous en avions mis à rendre chacun tellement responsable de ses propres œuvres, que rien ne pût 1 excuser ni le soustraire à la punition qu’il aura encourue. Enfin nous avons jugé que la surveillance ne pouvait êtreassez active si l’on ne procédait deux fois par an au moins, au jugement définitif des espèces, et peut être dans des fabrications très actives devrait-on le faire plus souvent. En cela nous avons dérogé à l’ancien usage selon lequel ce jugement n’avait lieu qu’une fois par an, excepté la monnaie de Paris, qui le subissait à chaque semestre. Je me dispense d’entrer dans de plus longs détails en cet instant; il sera plus utile et plus clair de les réserver pour former uue espèce de commentaire sur les arlicles qui pourraient en avoir besoin, à mesure qu’ils seront soumis à la discussion. Je n’ai plus qu’une remarque générale à faire. C’est que l’Assemblée ne doit point retarder d’un instant des lois si nécessaires, et sollicitées, avec la plus vive instance, par une administration qui ne peut marcher sans ces règles que le nouvel ordre de choses exige. Il est malheureux, sans doute, que depuis plusieurs mois que votre comité vous a soumis la plupart de ces objets dans plusieurs rapports imprimés et distribués, en vous pressant de vous en occup* r, vous ne les ayez pas encore déterminés; mais la plus impérieuse nécessité vous commande aujourd’hui de ne pas laisser davantage durer le désordre dans une partie si importante, et qui offre un ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 mai 1791.] �41 champ si vaste, et une si utile obscurité à la même cupidité. Cette même cupidité à déjà multiplié, avec un succès que vous ne permettrez sans doute pas davantage, ses efforts, pour rendre vain le zèle de vos commissaires : mais fidèles à leur devoir et à l’esprit rigoureux et sévère d’ordre, qui vous a fait attaquer de front tout ce que vous avez jugé nuisible au peuple, ils n’ont ménagé aucun intérêt particulier, et ils osent vous exhorter à vous délier de ces êtres étrangers à l’Assemblée, qui ont cherché si souvent à suspendre cette partie de vos travaux; ils ont senti, dès le premier jour, que les vues de vos commissaires avaient été au but sans flotter, et leurs manœuvres n’ont été que la preuve de la justesse avec laquelle nous avons touché le vif de leur intérêt. Vous retrouverez, sans doute, encore ici votre antique vigueur, et après avoir abattu des géants, vous ne livrerez pas à des pygmées, les sources de la richesse publique. M. de Virieu, rapporteur, donne ensuite lecture du projet de décret qui est immédiatement mis en discussion. Les articles suivants sont soumis à la délibération et adoptés en ces termes : TITRE Ier. Suppression des offices. Art. 1er. « Les offices de trésorier général, d’essayeur général, de juges gardes et contrôleurs contre-gardes, de directeurs et trésoriers particuliers, d’essayeurs et graveurs des monnaies ; l’office d’inspecteur du monnayage et celui de contrôleur au change de la Monnaie de Paris ; les offices de changeurs, la commission de graveur général des monnaies, et toutes commissions en vertu desquelles quelques personnes exercent, eu égard à la vacance d’aucuns offices des Monnaies, les fonctions y attachées, sont et demeureront supprimés. Art. 2. « Les titulaires des offices et les pourvus des commissions supprimées par l’article précédent, continueront d’en exercer les fonctions jusqu’au moment où il aura été pourvu à leur remplacement, ainsi et de la manière qui sera ci-après exprimée. Art. 3. « Les titulaires des offices supprimés par l’article premier feront remettre au comité de liquidation, les titres ou expéditions collationnées des titres nécessaires à leur liquidation et remboursement, auquel remboursement il ne pourra néanmoins être pourvu, à l’égard des officiers comptables, qu’après le jugement et l’apurement de leurs comptes ; et à l’égard des officiers susceptibles de condamnation d’amendes, qu’après le jugement des espèces à la délivrance desquelles ils ont concouru. Art. 4. « Les officiers supprimés par les articles précédents, qui occupent des logements dans les hôtels des Monnaies, seront tenus de se retirer, et de laisser lesdits logements libres pour le 15 juillet prochain. 1" Série. T. XXVI. Art. 5. « Toutes les personnes qui occupent, soit dans les hôtels des Monnaies, soit dans les bâtiments en dépendant, et faisant partie des domaines nationaux, des logements, sans être attachées au service des monnaies par les fonctions portées aux décrets de l’Assemblée nationale, seront pareillement tenues de se retirer, et de laisser libres lesdits logements et bâtiments, à compter du même jour 15 juillet. TITRE II. Du nombre et du choix des fonctionnaires publics qui seront chargés , tant de la fabrication des monnaies , que de la surveillance et de la vérification de ce travail. Art. 1er. « Il y aura 3 fonctionnaires généraux attachés au service des Monnaies, savoir : un inspecteur des essais, un essayeur et un graveur. Art. 2. « Il sera établi, dans chaque Monnaie, un commissaire du roi, un adjoint dudit commissaire, un directeur, un essayeur et un graveur. Art. 3. Les compagnies de monnayeurs Rétablies dans chaque Monnaie, continueront provisoirement d’exercer les fonctions qui leur sont confiées. Les compagnies des ajusteurs et tailleresses sont et demeurent supprimées. Art. 4. « L’inspecteur général des essais, les commissaires du roi, leurs adjoints et les directeurs, seront nommés par le roi ; l’essayeur général sera pareillement nommé par le roi ; mais il sera pris dans le nombre des essayeurs qui auront exercé, pendant 12 ans au moins, leurs fonctions, soit à Paris, soit dans les autres hôtels des monnaies ; les places de graveur général, d’essayeurs et de graveurs particuliers seront toutes données au concours. Art. 5. « Lorsqu’une place de commissaire du roi deviendra vacante, son successeur sera choisi dans le nombre des adjoints. Art. 6. « Les parents et alliés d’un directeur de Monnaie, jusqu’au quatrième degré inclusivement, ne pourront être pourvus d’aucune place dans la Monnaie à laquelle il sera attaché. Art. 7. « Les directeurs seront tenus de fournir une caution en immeuble, dont la quotité sera déterminée par un décret particulier de l’Assemblée nationale. Art. 8. « L’inspecteur, le graveur et l’essayeur général seront, ainsi que tous les autres fonctionnaires attachés au service des monnaies, sujets à révocation dans les cas déterminés par la loi. 16