398 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [12 août 17S9.J ception se fera sur tous les citoyens et sur tous les biens, de la même manière et de la même forme : et il va être avisé aux moyens d'effectuer le payement proportionnel de toutes les contributions, même pour les six derniers mois de l’année d’imposition courante. «Art. 10. Une constitution nationale et la liberté publique étant plus avantageuses aux provinces que les privilèges dont quelques-unes jouissaient, et dont le sacrifice est nécessaire à l’union intime de toutes les parties de l’empire, il est déclaré que tous les privilèges particuliers des provinces, principautés, pays, cantons, villes et communautés d’habitants, soit pécuniaires, soit de toute autre nature, sont abolis sans retour, et demeureront confondus dans le droit commun de tous les Français. « Art. 11. Tous les citoyens, sans distinction de naissance, pourront être admis à tous les emplois et dignités ecclésiastiques, civiles et militaires, et nulle profession utile n’emportera dérogeance. a Art. 12. A l'avenir il ne sera envoyé en cour de Rome, en la vice-légation d’Avignon, en la nonciature de Lucerne, aucuns deniers pour annales ou pour quel-ue autre cause que ce soit; mais les diocésains s’a-resseront à leurs évêques pour toutes les provisions de bénéfices et dispenses, lesquelles seront accordées gratuitement, nonobstant toutes réserves, expectatives et partages de mois, toutes les églises de France devant jouir de la même liberté. « Art.l3.Lesdéports, droits decotte-morte, dépouilles, vacal, droits censaux, deniers de Saint-Pierre, et autres du même genre établis en faveur des évêques, archidiacres, archiprêtres, chapitres, curés primitifs et tous autres, sous quelque nom que ce soit, sont abolis, sauf à pourvoir, ainsi qu’il appartiendra, à la dotation des archidiaconés et des archiprêtres qui ne seraient pas suffisamment dotés. «Art. 14. La pluralité desbénéfices n’aura plus lieu à l’avenir, lorsque les revenus du bénéfice ou des bénéfices dont on sera titulaire excéderont la somme de 3,000 livres. Il ne sera pas permis non plus de posséder lusieurs pensions sur bénéfices, ou une pension et un énéfice, si le produit des objets de ce genre que l’on possède déjà excède la même somme de 3,000 livres. « Art. 15. Sur le compte qui sera rendu à l’Assemblée nationale de l’état des pensions, grâces et traitements, elle s’occupera, de concert avec le Roi, de la suppression de celles qui seraient excessives, sauf à déterminer à l’avenir une somme dont le Roi pourra disposer pour cet objet. «Art. 16. L’Assemblée nationale décrète qu’en mémoire des grandes et importantes délibérations qui viennent d’être prises pour le bonheur de la France, une médaille sera frappée, et qu’il sera chanté en actions de grâces un Te üearn daus toutes les paroisses et églises du royaume. « Art. 17. L’Assemblée nationale proclame solennellement le Roi Louis XVI Restaurateur de la liberté française. « Art. 18. L’Assemblée nationale se rendra en corps auprès du Roi, pour présenter à Sa Majesté l’arrêté quelle vient de prendre, lui porter l’hommage de sa plus respectueuse reconnaissance, et la supplier de permettre que le Te Deum soit chanté dans sa chapelle, et d’y assister elle-même. « L’Assemblée nationale s’occupera, immédiatement après la constitution, de la rédaction des lois nécessaires pour le développement des principes qu’elle a fixés par le présent arrêté, qui sera incessamment envoyé par MM. les députés dans toutes les provinces, avec le décret du 10 de ce mois, pour y être imprimé, publié, même au prône des p croisses, et affiché partout où besoin sera. » On fait lecture d’une proclamation faite au nom du Roi, par laquelle Sa Majesté annonce la suppression de toutes les capitaineries, et mande aux officiers et gardes de continuer leurs fonctions pour le fait seulement de la conservation des moissons et récoltes. Cette proclamation est conçue dans les termes suivants : « Sa Majesté, toujours disposée à tous les sacrifices que l’intérêt de ses sujets peut demander, même lorsqu’ils sont relatifs à ses plaisirs personnels, veut et entend que toutes les capitaineries soient supprimées ; mais en même temps Sa Majesté doit, pour le maintien de l’ordre et la conservation des propriétés, prendre des mesures efficaces, afin que, sous prétexte de chasse, personne ne puisse porter atteinte au droit d’autrui. A ces causes le Roi fait inhibitions et défenses à tous et à chacun de s’introduire dans les plaines ncn moissonnées, sous prétexte de chasse, et d’y commettre aucun dégât sous peine d’être puni suivant la rigueur des ordonnances. « Mande et ordonne à tous les officiers et gardes de ses capitaineries de continuer leurs fonctions pour le fait seulement de la conservation des moissons et récoltes ; enjoint aux maréchaussées de s’y réunir, aux milices bourgoises d’y veiller, et aux troupes réglées de prêter main-forte sur la réquisition des officiers de police. Et sera la présente ordonnance imprimée et affichée partout ou besoin sera , à ce qu’aucun n’en ignore. « Fait à Versailles, le 10 août mil sept cent quatre-vingt-neuf. « Signé : LOUIS. Plus bas, le comte de Saint-Pjuest. » En discutant l’article des pensions il a été observé qu’un ancien officier, M. de üarbonne, a offert dès le mois de novembre dernier, de faire remise au Trésor royal de 34,500 livres d’arrérages de pensions, et qu’il a fait le sacrifice de tous les droits qu’il percevrait dans sa terre même des droits honorifiques. Ensuite on fait la lecture d’une lettre datée de Lamotte-Tilly, le 8 de ce mois, écrite par M. Terray, qui fait remise d’une pension de 4,000 livres dont il jouit depuis trois ans, et qui lui avait été accordée après treize années employées à des fonctions publiques; il déclare que dans ce moment, l’avoir méritée et pouvoir en offrir l’extinction, était d’un prix infiniment au-dessus de ses services. (On applaudit .) MM. de Bonneville et de Chambray, députés de la noblesse du bailliage d'Evreux , ont présenté une déclaration, signé d’eux, portant qu’ils ont l’honneur de remettre sur le bureau les nouveaux pouvoirs qui leur ont été donnés par leurs commettants le 14 juillet dernier et qu’ils adhèrent. selon l’étendue de ces pouvoirs, à l’arrêlé pris par l’Assemblée nationale le 4 de ce mois; qii’en conséquence, ils ont envoyé ledit arrêté à leurs commettants. M. le Président a indiqué la séance à demain neuf heures du matin. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CHAPELIER. Séance du mercredi 12 août 1789 (1). M. le Président annonce à l’Assemblée qu’il n’a pu hier être admis auprès du Roi, mais qu’il doit obtenir audience aujourd’hui à deux heures et demie. Il met ensuite eu délibération si on ira (1) Celle séance est incomplète au Moniteur. | Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [12 août 1789.1 399 au Te Deum dans le costume ordinaire, ou bien dans celui de cérémonie. Il est décidé que le grand costume convient a cette cérémonie. Un de MM. les secrétaires fait lecture du proces-verbal de la séance du 4. M de Gaillon. Puisqu’on veut détruire le régime féodal, il faut porter la hache sur mus les abus qui en naissaient; en conséquence, je propose l’abolition du droit d’aînesse. M. le prince de Poix s’élève contre cette proposition. M. le comte de Mirabeau fait remarquer que, cette loi ne pouvant appartenir qu’à la législation civile, on ne doit s’en occuper qu’après l’achèvement de la constitution qui est en ce moment le véritable objet des travaux de l’Assemblée. M. le duc de Liancourt, au nom, du comité des finances, dit : Plusieurs membres du comité ont pensé que le traitement des députés devait être fixé. Dans un temps où vous ne pouviez offrir à la nation aucun avantage, aucune [réforme, où les finances étaient dans le plus grand désordre, il n’était pas temps de vous entretenir de cet objet ; aujourd’hui les circonstances ne sont plus les mêmes ; vous avez accordé un emprunt qui va remplir la caisse nationale et vous avez à montrer à la France tous les sacrifices qui ont été faits. Il est de toute vérité que les commettants doivent pourvoir aux besoins de leurs représentants. Plusieurs provinces ont déjà rempli ce devoir et il semble que l’Assemblée nationale doit faire un traitement égal pour tous et qu’il convient d’indemniser les députés de leurs frais de voyage. Je propose donc l’arrêté suivant: projet d’arrêté. « L’Assemblée nationale, sur la motion d’un de ses membres, a décrété : « lo Que le traitement qui doit être fait à chaque député serait payé par jour ..... et que pour le voyage de chacun, il lui serait tenu compte de quatre jours s’il n’est pas au delà de 50 lieues de Versailles, de huit jours s’il est dans la distance de cent lieues et de quinze jours si l’éloignement est plus considérable ; « 2° Qu’il serait établi un comité de quatre personnes pour s’entendre avec le ministre de la feuille des bénéfices, pour aviser au moyen de payer ce traitement. » M. Chasset fait ensuite une motion tendant à la nomination de plusieurs comités, pour l’exécution de l’arrêté pris le 11 : 1° D’un comité de quinze personnes choisies au scrutin dans les bureaux, et parmi les membres n’ayant aucune fonction particulière dans l’Assemblée, pour préparer le travail des affaires du clergé ; 2° D’un comité composé d’un même nombre de membres, et élus de la même manière pour s’occuper des règlements à faire sur la liquidation des offices de judicature ; 3° D’un comité pour les droits féodaux, dont les membres seraient choisis par généralité Cette motion est accueillie par l’Assemblée. M. Desmeuniers. Si l’on discute séparément dans l’Assemblée les divers projets de déclaration des droits, on perdra un temps considérable: en conséquence, je demande l’établissement d’un comité, qui, après l’examen de ces divers projets, présentera lundi prochain une déclaration des droits qui sera soumise alors à la discussion de l’Assemblée, et je demande que les membres qui avaient déjà proposé des projets de déclaration soient exclus de ce comité. Cette proposition est adoptée, et il est décidé en outre que ce comité sera composé de cinq membres. M. Target, membre du comité de rédaction , lit un projet d'adresse au Roi, conçu dans les termes suivants : a Sire, l’Assemblée nationale apporte à Votre Majesté une offrande vraiment digne de votre cœur: c’est un monument élevé par le patriotisme et la générosité de tous les citoyens. Les privilèges, les droits particuliers, les distinctions nuisibles au bien public ont disparu. Provinces, villes, ecclésiastiques, nobles, citoyens des communes, tous ont fait éclater, comme à l’envi, le dévouement le plus mémoralile ; tous ont abandonné leurs antiques usages avec plus de joie, que la vanité n’avait jamais mis d’ardeur à les réclamer. Vous ne voyez devant vous, Sire, que des Français soumis aïix mêmes lois, gouvernés par les mêmes principes, pénétrés des mêmes sentiments, et prêts à donner leur vie pour les intérêts de la nation et de son Roi. Comment cet esprit si noble et si pur n’aurait-il pas été ranimé encore par l’expression de votre confiance, par la touchante promesse de cette constante et amicale harmonie , dont jusqu’à présent peu de rois avaient assuré leurs sujets, et dont Votre Majesté a senti que les Français étaient dignes? « Votre choix, Sire, offre à la nation des ministres qu’elle vous eût présentés elle-même. C’est parmi les dépositaires des intérêts publics, que vous choisissez les dépositaires de votre autorité. Vous voulez que l’Assemblée nationale se réunisse à Votre Majesté pour le rétablissement de l’ordre public et de la tranquillité générale. Vous sacrifiez au bonheur du peuple vos plaisirs personnels. « Agréez donc, Sire, notre respectueuse reconnaissance et l’hommage de notre amour, et portez dans tous les âges le seul titre qui puisse ajouter de l’éclat à la Majesté Royale ; ;le titre que nos acclamations unanimes vous ont déféré; le titre de restaurateur de la liberté française. » On propose de renouveler le comité de rédaction, le temps d’exercice de ceux qui le compo-saientétant expiré. M. Régnault rappelle qu’il a été décidé que le comité de vérification ferait une liste des députés vérifiés, et demande qu’elle soit remise incessamment, afin qu’elle puisse servir à faire l’appel dans les délibérations importantes qui se préparent pour les jours suivants. M. Lavle, qui avait formé opposition à la députation de M. Gobel, évêque de Lydda, suffragant de Bâle, déclare se départir de son opposition, et demande que le jugement de cette contestation soit remis à la fia de la session. M. Gobel, évêque de Lydda, fait ses remercî-ments à M. Lavie; il proteste qu’il prouvera tou-