448 f Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ! ?f Sov�mbre T793 dans une seule loi tous les décrets rendus jusqu’à ce jour sur les monnaies (1). » Compte rendu du Moniteur universel (2). Romme, au nom du comité d’instruction pu¬ blique, présente un projet de décret, relatif à la nouvelle fabrication de la monnaie. Hamel. Je demande par amendement qu’au lieu de l’exergue proposée par le comité, le Peuple souverain, on mette celle-ci : Le Peuple seul est souverain. Robespierre. L’amendement de Ramel n’est qu’un commentaire de l’expression énergique et précise du comité. Il n’y a pas deux souverains, le souverain est un, c’est le peuple; je demande le maintien de la rédaction du comité. Thuriot. Je soutiens que l’amendement de Ramel est préférable à la rédaction du comité. Il explique mieux la vérité de cette maxime : Que la souveraineté réside dans le peuple seul. Je demande la priorité pour l’amendement. Barère. Puisqu’on est entré dans une discus¬ sion sur un objet aussi simple, on peut être le quatrième à demander la parole. En style moné¬ taire comme en style lapidaire, il faut être court ; en politique, il faut être pur. Il n’y a pas deux peuples français, il n’y a parmi les peuples que le Français qui soit souverain; ne donnons pas, par une expression, matière à un doute très dangereux dans ses conséquences. Je demande que l’on mette aux voix la rédaction du comité. Richard. Je ne pense pas comme Barère; je sais qu’en style lapidaire il faut être court, mais il faut être clair. Je soutiens que ces mots : le peuple souverain, ne suffisent pas. Cela dit bien que la souveraineté réside actuellement dans le peuple : cela explique bien le fait, mais ne dit pas le droit ; au lieu que l’amendement exprime tout. Il faut qu’on ne puisse jamais révoquer en doute, non seulement l’existence de la sou¬ veraineté, mais le droit. Je demande la priorité pour l’amendement de Ramel. Romme. Pour les peuples qui sont encore dans les fers du despotisme, il faut dire sans doute : Le peuple seul est souverain, réveillez-vous, brisez vos fers. Il n’en est pas ainsi du peuple fran¬ çais. Que votre monnaie circule dans l’étranger, on saura bien que la monnaie du peuple sonve-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 310. (2) Moniteur universel [n° 61 du 1er frimaire an II (jeudi 21 novembre 1793), p. 246, col. 2]. D’autre part, les Annales patriotiques et littéraires [n° 322 du 29 brumaire an II (mardi 19 novembre 1793), p. 1493, col. 1] rendent compte du rapport de Romme dans les termes suivants : « Un membre du comité des monnaies fait un rap¬ port sur la devise nouvelle à donner à la monnaie républicaine. Le rapporteur a terminé son discours par un projet de déci*et qui a excité quelques débats, fondés sur ces mots qu’il propose de placer sur chaque pièce : « Le peuple souverain. » « Ramel a demandé cette rédaction : « Le peuple seul est souverain. » « Robespierre, Barere, Rewbell parlent en faveur du projet du comité. La priorité est accordée à l’amendement de Ramel, et l’Assemblée adopte cette rédaction : « Le peuple seul est souverain. » rain est la monnaie du peuple français, puisque lui seul possède la souveraineté. Philippeaux. Je demande la clôture de la dis¬ cussion et la priorité pour l’amendement de Ramel. Barère. Puisqu’on a donné de l’importance à cette question, permettez-moi de dire encore un mot. Ou vous voulez mettre sur vos mon¬ naies une maxime philosophique incontestable, instruire les peuples par vos monnaies, et alors il faut mettre nécessairement : Les peuples sont souverains. Mais si vous voulez seulement annoncer par vos monnaies un fait, celui que la souveraineté réside dans le peuple français, il faut vous borner à l’expression aussi simple que majestueuse : Le peuple souverain. Ici j’in¬ voque le despotisme lui-même. Jamais les tyrans d’Espagne et de France mirent -ils sur leurs monnaies : Charles, seul roi des Espagnes; Louis, seul roi de France? Non. Eh bien ! il serait aussi ridicule de dire, sur les vôtres : Le peuple est seul souverain. Rewbell. Je soutiens que l’amendement s’é¬ carte absolument de ce qui existe; car il n’y a dans l’univers que le peuple français qui soit souverain. La véritable distinction qui puisse faire connaître que les Français ont reconquis leur souveraineté, est de dire : Le peuple souve¬ rain. Cette expression est grande, majestueuse, digne de vous, faite pour enflammer les autres peuples à mériter le même titre. La discussion est fermée. L’amendement de Ramel obtient la priorité. Il est décrété (1), avec le reste du projet du comité, en ces termes : (Suit le texte du décret que nous avons inséré ci-dessus d’après le procès-verbal.) « La Convention nationale décrète (2) : Art. 1er. « La statue qui doit représenter le peuple dans le monument à élever à la pointe occidentale de Pile de Paris, et pour lequel il est ouvert un con¬ cours, sera le sujet du sceau de l’État. Art. 2. « La légende sera : le Peuple seul est souverain ; sous la ligne de terre on lira : République fran¬ çaise, Pan II. Art. 3. « Le comité d’instruction publique présentera un rapport sur l’emploi du sceau de l’Etat et sur les sceaux des autorités constituées (3). » « La Convention nationale, sur l’exposition qui lui a été faite de l’état fâcheux dans lequel se (1) On remarquera que le procès-verbal ne fait nullement mention de l’adoption de l’amendement de Ramel et que le texte du décret n’est autre que celui proposé par Romme. (2) Sur la proposition de Romme, d’après la mi¬ nute du décret qui se trouve aux Archives natio¬ nales, carton G 277, dossier 726. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 311.