[Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 juillet 1791 .] Art. 4. Titres et opérations qui doivent servir à estimer le revenu des dîmes à la suppression desquelles l'Assemblée nationale a accordé une indemnité. « II y a un moyen sûr de conoaître le produit d’une dîme ; c’est de savoir : 1° sur quelle étendue de terre elle se perçoit ; 2° quel est le genre de fruits que cette terre donne ; 3° à quelle quotité la dîme se lève ; 4° quels sont les frais à faire pour recevoir la dîme, engranger les grains, et, en un mot, pour réduire la dîme, soit en argent, soit en toute autre valeur commerciale. « Les connaissances dont on vient de parler s’acquièrent par la remise d’éiats relatifs à la perception, et par des visites d’experts. L’Assemblée a ordonné ces opérations par ses décrets du 23 octobre 1790 et du 5 mars 1791 ; mais, en même temps, elle a considéré qu’elles étaient longues et coûteuses; et pensant qu’oo pouvait y suppléer par des baux, quand ils ne seraient pas suspects, elle a voulu (décret du 23 octobre, tit. V, art. 5), que l’évaluation fût faite d’après les baux, lorsqu’on serait en état d’en rapporter un ou plusieurs, qui réuniraient les trois conditions suivantes : être actuellement subsistants, en 1790; avoir une date certaine, antérieure au 4 août 1789 ; remonter à 15 années au delà de l’époque du 4 août 1789. Les estimations ou les baux sont les seuls actes d’après lesquels on puisse estimer en masse les revenus des dîmes à la suppression desquelles l’Assemblée nationale a accordé une indemnité. Si les décrets ordonnent la production des titres d’acquisition et de propriété, ce n’est que pour renseigner la consistance de la dîme dont on demande l’indemnité. On serait souvent injuste ou envers l’Etat ou envers les déeimateurs, si l’on prenait pour base de leur liquidation, les actes d’acquisition de la dîme. Lorsque l’acte d’acquisition serait ancien, ou que l’acquéreur aurait, par une circonstance quelconque, fait un bon marché, le propriétaire dépossédé ne trouverait pas, dans le dédommagement réglé sur le pied de cet acte, la juste indemnité de ce qu’il perd. Dans le cas, au contraire, où l’acquéreur aurait acheté trop cher, l’indemnité fixée sur le prix de l’acquisition lui donnerait plus qu’il n’avait réellement. Le décret du 5 mars 1791 , article 3, a autorisé les possesseurs des dîmes inféodées à produire, à défaut de baux ayant les conditions requises par les décrets, des contrats d’acquisition postérieurs à l’année 1785, et antérieurs au 4 août 1789 ; mais cette disposition n’est applicable qu’au cas de la demande d’une reconnaissance provisoire. Le temps nécessaire pour procéder à une estimation, à défaut de baux, aurait rendu à peu près inutile aux propriétaires l’avantage que 1 Assemblée a voulu leur procurer par les reconnaissances provisoires ; il fallait trouver un expédient pour suppléer aux baux dans ce cas particulier : l’Assemblée a adopté celui de la production d’un contrat d’acquisition. Ou doit se conformer à son décret, et sur la seule vue du contrat d’acquisition, on doit délivrer la moitié du prix en reconnaissance provisoire ; mais on ne doit pas étendre ce décret à un cas pour lequel il n’a point prononcé. Le cas particulier de l’acquisition moderne d’une dîme ecclésiastique, celui d’une dîme prise à titre d’enga lïe Séhie. T. XXIX. gement, font exception aux règles générales; pour le premier cas, selon ce qui a été observé dans l’article second (p. 60) ; pour le second cas, selon ce qui est porté parle décret du 18 janvier 1791. Le décret du 23 octobre 1790, article 6, autorise les propriétaires de dîmes dont les archives et les titres auraient été brûlés ou pillés à l'occasion des troubles survenus depuis 1789, àfaire preuve, soit par actes, soit par témoins, d’une possession de 30 ans, antérieure à l’incendie ou pillage, de l’existence, de la nature et de la quotité de leurs droits de dîmes. On a paru appréhender que cette disposition ne contrariât en quelque point les principes sur la nature des preuves qui doivent établir le droit de lever une dîme inféodée. Le décret n’a rien d’opposé aux principes. Quand les archives sont brûlées, on ne peut plus prouver directement, par les titres qui y étaient conservés, le fait ou de l’inféodation d’une dîme, ou des reconnaissances féodales, ou de la possession centenaire; il fd ut alors avoir recours soit à des titres étrangers, mais énonciatifs, soit à des dépositions de témoins. Ces titres énonciatifs ou ces témoins doivent établir différents faits qui sçmlbien distingués dans le décret. Ils doivent justifier : 1° de l’existence du droit, déposer que telle personne jouissait d’une dîme ; 2° de la nature du droit, déposer que la dîme était connue pour dîme inféodée, levée comme telle; 3° de la quotité et de la possession depuis 30 ans. Une pareille enquête ne saurait porter atteinte aux principes, au contraire elle les confirme; car, si des témoins, par exemple, déposaient qu’ils ont connaissance que, depuis telle époque, un tel jouissait d’une dîme qui passait pour inféodée, mais qu’avant cette époque la dîme appartenait à un corps ecclésiastique et était réputée ecclésiastique, on jugerait que la possession de la dîme, comme inféodée, n’est pas légitime, et on refuserait l’indemnité. Si les témoins, en attestant la possession trentenaire, n’indiquent pas l’époque à laquelle elle a commencé, il résulte de leur déposition la preuve d’une possession immémoriale, c’est-à-dire telle, qu’on ne connaît aucune possession contraire; et cette possession immémoriale doit suppléer à la possession centenaire, dans le cas où les actes qui auraient établi la possession de 100 ans se trouvent détruits par une force majeure. « Quant au surplus des questions qui peuvent se présenter, on doit se conformer aux décrets rendus spécialement pour la liquidation des dîmes inféodées ; aux décrets qui contiennent des règles générales sur les liquidations ; aux lois anciennes que l’Assemblée nationale n’a point abrogées sur les conditions requises pour que les acies dont on prétend induire des conséquences, soient reconnus en forme probante.» (Cette instruction est adoptée.) M. Camus, rapporteur, propose en conséquence le décret suivant: « L’Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture de l’instruction proposée par le comité central de liquidation, pour la liquidation des dîmes dont elle a ordonné le remboursement, approuve ladite instruction, et décrète qu’elle sera suivie par les corps administratifs et par le directeur général de la liquidation, pour l’évaluation de l’indemnité des dîmes supprimées avec indemnité. L’instruction et le présent décret seront imprimés et adressés à tous les départements. » 5 QQ [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [31 juillet 1791. ( Ce décret est adopté. ) M. Bureaux de Pnsy, mi nom des comités de marine , des colonies et militaire. Messieurs, ce matin, vous avez ordonné àvos comités de marine, colonial et militaire, de vouslrendre compte, dans le plus court délai, des événements survenus à Lorient les 24 et 25 de ce mois. Les instructions qu’ont reçues vos comités à cet égard, sont renfermées dans la lettre écrite par le commandant de ce port, et dont vous avez entendu ce matin la lecture. On voit dans cette lettre qu’il y a eu un mouvement tumultueux dans ce port, que la vie de plusieurs individus a été menacée, que l’effervescence paraissait s’apaiser, et que les officiers publics ont fparfaitement rempli leur devoir, ainsi que la garde nationale. D’après ces considérations, les comités ont pensé qu’il pouvait être utile, surtout dans ce moment où l’on veut mettre le gouvernement en activité, de ne pas constamment dicter aux ministres ce qu’ils doivent savoir eux-mêmes ; ue, n’ayant aucune plainte à porter contre aucun es fonctionnaires publics, il suffisait d’approuver la conduite qu’ils avaient tenue, et de rappeler aux autres leur devoir, et que sur le surplus il n’y avait pas lieu à délibérer, et qü’il fallait laisser aux lois leur cours. En conséquence, voici le projet que vos comités m’ont chargé de vous soumettre : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités colonial, militaire et de la marine, sur les événements arrivés à Lorient les 24 et 25 du présent mois ; considérant que les ministres, les corps administratifs, les commissaires civils sont chargés de veiller au maintien de l’ordre public, à la sûreté des personnes et des propriétés; qu’ils sont revêtus par la Constitution de l’autorité nécessaire pour remplir ces divers objets; qu’enfinils sont chacun respectivement et personnellement responsables de leur inexécution; rendant d’ailleurs justice à la conduite delà municipalité et de la garde nationale de Lorient et comptant sur l’activité et la con-tinuitéde leur zèle, déclare que, quant à présent, il n’y a pas lieu à délibérer sur les lettres du ministre de la marine et du commandant du port de Lorient en date des 25 et 30 de ce mois. » M. Prieur. Je suis d’avis qu’il faut renvoyer au pouvoir exécutif pour faire exécuter les lois. M. Bureaux de Pusy, rapporteur. J’observerai à M. Prieur que c’est le pouvoir exécutif, dans la rigueur de la loi, qui renvoie la question à l’Assemblée. (L’Assemblée, consultée, adopte l’amendement de M. Prieur.) En conséquence, le projet de décret est mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités des colonies, de la marine et militaire, sur les faits arrivés à Lorient les 24 et 25 du présent mois; considérant que les ministres, les corps administratifs et les commissaires civils sont institués pour veiller au maintien de l’ordre public, à la sûreté des personnes et des propriétés ; qu’ils sont revêtus par la Constitution de l’autorité nécessaire pour remplir ces divers objets; qu’enfin, ils sont chacun respectivement et personnellement res-ponsablesde leur inexécution; rendant, d’ailleurs, justice à la conduite de la garde nationale et de la municipalité de Lorient, et comptant sur l’activité et la continuité de leur zèle, déclare qu’elle renvoie au pouvoir exécutif pour maintenir l’exécution des lois. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. le Président. Messieurs, le résultat du scrutin pour la nomination du président a donné une grande majorité en faveur de M. Alexandre de Beauharnais. ( Applaudissements .) Les nouveaux secrétaires élus en remplacement de MM. Augier-Sauzay, Vadier et Greuzé-Lalouche, sont MM. Blancard, Benoît Leslerpt (de Beauvais) et Babey. La séance est levée à dix heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. ALEXANDRE DE BEAUHARNAIS. Séance du dimanche 31 juillet 1791 (1). La séance est ouverte à onze heures du matin. M. Oefermon, président , ouvre la séance. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du vendredi 29 juillet, qui est adopté. M. le Président. J’ai eu l’honneur d’annoncer hier à l’Assemblée que le scrutin avait porté à la présidence M. Alexandre de Beauharnais; je lui cède le fauteuil. M. Alexandre de Beauharnais , président , prend place au fauteuil. ( Vifs applaudissements.) M. Belavigne, secrétaire. Messieurs, voici un don patriotique adressé à l'Assemblée nationale par les sous-officiers du 5e régiment des chasseurs à cheval , ci-devant Hainaut , dont un député est à la barre. Leur adresse est ainsi conçue : » Messieurs, « Les sous-officiers en chef du 5e régiment de chasseurs à cheval, ci-devant Hainaut, pénétrés du plus profond respect pour les augustes représentants du peuple français m’ont chargé de vous apporter le tribut d’hommages que l’armée entière s’empresse de vous rendre en récompense des bienfaits qui émanent de vos sages lois. « Défenseurs de la patrie, ils ont cru qu’il ne suffisait pas de verser leur sang pour elle, mais qu’ils lui devaient encore le sacrifice de toutes leurs facultés ; c’est dans ce sentiment qui les anime qu’ils osent adresser un don patriotique de 300 livres pour l’entretien des gardes nationales, en attendant de pouvoir donner de plus fortes preuves de leur attachement à la Constitution, en réalisant le serment de vivre libres ou mourir, en combattant les ennemis de la patrie. » {Applaudissements.) M. 1© Président répond (en s’adressant au député des chasseurs de Hainaut) : « L’Assemblée nationale reçoit avec reconnais-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur.