340 lAssen.blée uationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [25 avril 1791.J Plusieurs membres demandent de renvoyer au comité colonial la lettre du ministre de la marine, et les pièces y jointes. (L’Ass.mblée consultée décrète le renvoi.) M. Barnave.Je ne ferai aucune réflexion sur les nouvelles que l’Assemblée vient d’entendre; mais je crois qu’il est de la justice et de la loyauté de lui donner connaissance à l’instant même d’une pièce qui, depuis deux jours, est déposée dans mes mains. Les membres de la ci-devant assemblée générale de Saint-Domingue, dégagés des suggestions qui les avaient égarés, m’ont remis une adresse, par laquelle ils reconnaissent leurs erreurs, jurent obéissance aux décrets, et rétractent les écrits où ces décrets ont pu être attaqués. Si cette pièce eût été connue plus tard, on aurait pu croire qu’elle était l’effet de l’impression des nouvelles qu’on vient de lire; il est de mon devoir d’en fixer l’époque, afin que le mouvement libre et pur, dont elle est l’effet, ne puisse pas être mis en doute. Je vais vous donner lecture de l’adresse : « Les Américains réunis ci Paris, et ci-devant composant l’assemblée générale de la partie française de Saint-Domingue , à l' Assemblée nationale. « Messieurs, « Vous avez prononcé souverainement sur nos actes et sur notre caractère politique : vous vous êtes réservé de statuer sur nos personnes : telles sont en substance les dispositions de votre décret du 12 octobre de l’année dernière. Notre soumission sans réserve à ce décret vous a déterminés à écouter notre justification individuelle, et à nous montrer tout l’intérêt dù à des hommes qui ont été honorés de la confiance de leurs concitoyens, dans la plus importante des colonies françaises. Agréez, Messieurs, nos actions de grâces pour les moments que vous avez consacrés à nous entendre. « L’instant de nous juger est venu : votre decret va nous placer au nombre desbonscitoyens, ou nous confondre parmi les mauvais : si nos desseins ont été remplis par celui qui nous a servi d’interprète, nous nous flattons qu’il ne reste plus de doute sur la pureté de nos intentions. Nous croyons néanmoins devoir publier une dernière profession de foi, qui achèvera de nous faire connaître aux représentants delà nation et aux amis de la patrie. « Nous remplissons franchement notre devoir en abdiquant comme erronés des travaux que vous avez jugés tels; mais ces erreurs n’ont jamais pris leur source dans une volonté coupable; elles n’ont été produites que par l’éloignement où nous étions de tous secours, et par les circonstances dont le torrent nous a entraînés : quiconque se fût trouvé dans une position telle que la nôtre, eût vu naître les mêmes orages, et peut-être de plus violents. Vous n’onblieiv z pa� que nous étions placés au sein d’une Révolution où tout était nouveau, où les meilleurs esprits pouvaient s’égarer dans la recherche du bien, et où nous n’apercevions vos œuvres qu’à travers un épais nuage. « C’était pour nous une assez grande douleur de n'avoir pu, dans notre patrie, conduire nos concitoyens à la félicité qu’ils nous avaient chargés de leur procurer, etqu’ils atleudaicf d<- ne -•■in n Le comb;e du malheur a été de voir que nos actes nous aient fait accuser de projets sinistres de scission et d’indépendance; enfin le devoir vraiment douloureux à remplir est d’avoir à justifier notre attachement à la France. « Ne sommes-nous pas les descendants de ces insulaires qui se sont volontairement unis à elle? N’avons-nous pas prouvé, dans tous les temps, que le nom français nous était cher? Notre sang n’a-t-il pas souvent coulé pour le conserver? Quoi! dans des jours malheureux, nous nous serions signalés par notre affection pour notre mère patrie! rmus aurions patiemment partage ses infortunes et ses chaînes! et maintenant nous ne voudrions pas nous associera sa liberté, à son bonheur et à sa gloire! « Quand cet attachement à la France ne serait pas inné en nous, et ne nous aurait pas été transmis par nos pères, notre intérêt personnel ne vous serait-il pas garant de noire fidélité? 11 nous commande de demeurer annexés à l’Empire français; nous ne pouvons exister à part dans l’ordre social; ainsi le veut la nature, qui nous a accordé des terres fertiles en denrées de luxe; ainsi le veut la saine politique, qui nous invite à rechercher la protection d’un grand peuple, car on n’est pas impunément faible et riche; ainsi le veut, et notre organisation intérieure, et le genre de notre population, et diverses autres considérations qu’il serait superflu de rapporter. « Notre plus ardent désir est donc de voir s’évanouir sans retour ces soupçons qui nous ont précédés et suivis dans la métropole, et sur lesquels nous avons gémi trop longtemps : nous voulons que notre inviolable attachement à la France soit manifesté à tous ceux qui le partagent avec nous. Il ne nous est pas possible de supporter que l’on nous croie réfractaires à la volonté des légitimes représentants de la nation. Nous n’hésitons donc pas à reconnaître authentiquement que l’Assemblée nationale est investie de la puissance suprême sur tout ce qui porte le nom français ; que tous les membres de l’Empire doivent être soumis à ce qui a été décrété par elle : ainsi, attachement et soumi ssion à la loi, telie a été, telle est et telle sera notre maxime constante et inébranlable. Si quelqu’un de nos écrits a paru contrarier cette maxime, nous le rétractons hautement, nous nous faisons gloire de protester de notre obéissance, parce que nous savons bien qu’une telle obéissance est honorable, qu’elle est le premier devoir du citoyen et l'apanage des hommes libres, et nous réitérons ici la demande que nous avons déjà faite d’en prêter le serment dans vos mains. « Comment ne serions-nous pas touchés de-reconnaissance pour les législateurs de l’Empire? Par quel inconcevable aveuglement ne chercherions-nous pas à faire triompher vos décrets? Vous nous offrez un gouvernement doux et modéré, et tous les bienfaits qu’a produits la Révolution : que pourrions-nous souhaiter de p;us? Avant qu’il existât une Assemblée [nationale, nous n’aurions jamais espéré tant de biens, et nous ne pouvons pas être assez insensés pour les rejeter. -« Tous nos vœux sont d’être bientôt en possession des biens que vous nous destinez : nos co citoyens, dont les intérêts nous seront toujours s;a rcs, ont besoin dYn jouir pour oublier les maux auxquels ils ont été si longtemps en proie. Les instructions que vous êtes sur le point de décréter ne sauraient recevoir une exécution prompte; elles ne l’obtiendront qu’avec le