596 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 août 1791.J conventuelle des ci-devant bénédictins de Saint-Benoît sera conservée pour y placer une école nationale. Adresse des juges composant le tribunal de la Roche-sur-Yon , qui, pénétrés des sentiments du plus pur patriotisme, offrent Ja somme de 1 ,800 livres pour l’entretien des gardes nationales, à prendre sur leur traitement, à raison de 450 livres par trimestre, dont le premier commencera au 1er juillet dernier. Ils sont prêts à continuer cette contribution, si le besoin de la chose publique l’exige. (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait une mention honorable de cette adresse dans le procès-verbal.) Lettre de M. H.-J. Besné , officier municipal de Saint-Brieuc , réélu électeur du département des Côtes-du-Nord, qui, désirant donner à sa patrie des preuves réelles de son amour et de son désintéressement, fait l’abandon de tout traitement qui pourrait lui être fait comme ancien directeur des économats de Saint-Brieuc. Cette lettre est ainsi conçue : « Monsieur le Président, « Quelque persuadé que je sois que l’Assemblée nationale réglera le sort de ceux qui ont perdu leur état, j’aime à penser que ceux qui ont quelque autre ressource donneront à la patrie des preuves de leur amour et de leur désintéressement. « C’est dans le sein même de l’Assemblée nationale que je veux consigner celui dont je suis animé, et je vous prie, Monsieur le président, de faire agréer à l’Assemblée l’abandon du traitement qui pourra m’être fait comme ancien directeur des économats de l’ancien évêché de Saint-Brieuc. {Applaudissements.) « Je suis, etc., « Signé : H.-J. BESNÉ, Réélu électeur du département des Côtes-du-Nord. » Lettre et adresse de M. Hue , peintre de V Académie, qui fait hommage de ses talents dans l’art de la peinture. Pétition adressée à l'Assemblée nationale , par plusieurs citoyens de la Guyane française, pour servir de suite aux réclamations et doléances de la majeure partie de cette île contre l’assemblée coloniale. (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette pétition au comité colonial.) Pétition présentée par le sieur Miaczynski, qui réclame le payement d’une créance (1). (L’Assemblée renvoie cette pétition au comité de liquidation.) M. Camus , un des commissaires nommés pour surveiller l’édition in-quarto du procès-verbal de l'Assemblée. Messieurs, M. Baudouin, votre imprimeur, vient de me remettre, et je dépose en son nom sur le bureau, un exemplaire du premier tome des procès-verbaux de l’Assemblée imprimé sur velin et relié en deux volumes. Tout le monde connaît le prix de ces sortes d’édition, leur rareté et leur beauté. L’exemplaire de celle (1) Voir oi-après,%ux Annexes de la séanoe, page 600, le mémoire «dressé par M. Miaczynski à l’Assemblée nationale. dont M. Baudouin vous fait hommage est une nouvelle preuve du soin qu’il donne à tout ce qui peut embellir et conserver les monuments des travaux de l’Assemblée. M. Baudouin me prie en même temps de vous annoncer que l’impression des procès-verbaux in-quarto se continue aussi rapidement qu’il est possible. Dans ce moment, il a sous presse un volume préliminaire qui contiendra les discours d’ouverture des états généraux et le procès-verbal des ci-devant ordres du clergé et de la noblesse, et le second volume du procès-verbal de l’Assemblée. Ce travail exige un long temps, et c’est là le seul obstacle qui s’oppose à la livraison de ces deux volumes. Je puis affirmer que celte édition est on ne peut mieux soignée; on apporte la plus grande attention à la rendre exacte et complète. Les pièces originales sont toujours comparées avec les copies, et les fautes sont corrigées avec le plus grand soin; il y a même des pièces que l’on ne peut retrouver que dans les archives. Un des deux volumes actuellement sous presse sera incessamment remis à chacun de vous; à l’égard des autres volumes, M. Baudouin m’a prié d’annoncer qu’à l’époque de notre départ, il remettrait à chaque député un engagement signé de lui portant la promesse de lui faire parvenir dans le lieu de son domicile, les volumes qui resteront à fournir à mesure qu’ils paraîtront. (L’Assemblée accepte l’offrande de M. Baudouin ; elle ordonne qu’il en sera fait mention honorable dans son procès-verbal, ainsi que de l’annonce faite en son nom.) M. Vernoiilllj , sculpteur en bois, originaire de Suisse, et naturalisé Français, paraît à la barre de l’Assemblée, et lui fait hommage d’un ouvrage de sculpture de sa composition, représentant sous différents emblèmes le triomphe de la liberté sur le despotisme. Il s’exprime ainsi : « Messieurs, originaire de ces climats agrestes où la nature semble avoir pris soin de nous garantir de l’invasion des tyrans, issu de ces hommes pour lesquels la liberté est un besoin impérieux et à qui Guillaume Tell l’a procurée depuis des siècles, j’essayerai vainement de vous peindre l’enthousiasme dont j’ai été saisi en voyant les Français, dans leur course rapide, nous laisser loin dans la carrière où nous les avions précédés. Mon âme s’est échauffée d’une sainte ardeur, et j’ai pensé qu’un citoyen vivement pénétré du patriotisme et des généreux efforts avec lesquels vous avez détruit le des: o-tisme pourrait tenter de retracer, sous une figure emblématique, cette victoire à jamais mémorable, et d'offrir aux regards des bons citoyens, dans un objet d’agrément et d’utilité, les droits imprescriptibles de l’homme, la séparation des pouvoirs et les forces invincibles résultant de l’union d’une nation libre. « Sans avoir observé les principes de l’art, j’ai suivi le seul instinct du patriotisme dans l’exécution du monument que j’ai l’honneur de vous présenter. Gomme la Constitution, dont il est l’emblème, est sans exemple, il est lui-même sans modèle. Daignez, Messieurs, en agréer l’hommage; j’obtiendrai la récompense la plus flatteuse pour un cœur libre. » M. le Président répond : « Monsieur, « Tout ce que les arts ont produit de chefs- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 août 1791.] d’œuvre depuis la Révolution suffirait pour prouver, sans le témoignage de l’histoire, que le règne de la liberté e.t aussi celui des talents et du génie. L’arliste, délivré des entraves d’un deSfOtisme inquisitorial et vexatoi te, donne un libre essor à sa pensée. Témoin des grands événements qui ont signalé l’époque de notre régénération, ii s’empresse de les traduire à la postérité par tous les moyens que lui fournit l’art qu’il professe. L’Assemblée nationale accepte avec satisfaction, Monsieur, l’hommage de votre patriotisme et de votre talent. Elle sait apprécier l’emblème ingénieux qui retrace dans un seul monument l’image des fers que nous avons brisés, et de la liberté que nous avons conquise. Elle vous invite à assister à sa séance. » (L’Assemblée, en acceptant l’hommage offert par M. Vernouilly, ordonne que rneni ion sera faite, dans le procès-verbal, du discours qu’il a prononcé et de la réponse de M. le Président.) M. Prieur, architecte , présente à l’Assemblée l’esquisse d’;ni monument destiné à consacrer la mémoire de la Révolution, et à fournir aux artistes, depuis longtemps sans activité, le moyen d’immortaliser la gloire de la nation. Il s’exprime ainsi : « Monsieur le Président, j’ai l’honneur d’offrir à l’Assemblée nationale, comme une preuve de mon hommage respectueux, l’esquisse d’un monument destiné à consacrer l’époque de la Constitution français* . La postérité aura peine à croire les événements arrivés de nos jours. Pé ¬ nétré de reconnaissance à la vue de la sagesse de nos premiers législateurs, de leur noble fermeté, de leurs sacrifices personnels, avec quelle fermeté n’approchera-t-elle pas de leurs noms chéris gravés sur le marbre ou sur l’airain 1 J’ai pensé, Monsieur le Président, que peut-être nos premiers législateurs ne se sépareront pas sans décréter l’é évation d’un monument peu dispendieux, mais digne d’une grande nation. Je vous en offre le modèle. Ne serait-il pas utile d’offrir aux regards d’un peuple libre, un objet qui pût lui rappeler sans cesse le bonheur? » M. le Président répond : « Monsieur, « C’est une conception vraiment digne d’un artiste citoyen que celle d’asseoir le temple de la liberté sur les ruines du despotisme. Le patriotisme et le génie s’empresseront, sans doute, à l’envi, de multiplier, sous toutes les formes, les monuments qui doivent attester à la postérité la plus reculée l’époque de notre régénération et le bienfait d’une Constitution plus durable que le marbre et l’airain. Parmi les hommages que les arts ont déjà rendus à la Révolution, l’Assemblée nationale distingue avec satisfaction celui que vous lui offrez en ce moment. Elle reconnaît dans le généreux désintéressement de votre proposition le vrai caractère du génie : elle prendra votre demande en considération, et vous invite à assis; er à sa séance. » ( L’Assemblée , satisfaite de l’hommage de M. Prieur, ordonne qu’il sera fait mention, dans le procès-verbal, de l’offrande qu’il lui a fuite e* de la réponse de M. le Président.) Une députation de la compagnie des gardes de la ville de Paris est introduite à la barre. 597 M. Hay, officier commandant, porte la parole et dit : « Messieurs, « La compagnie des gardes de la ville, quoique l’une des plus anciennes du royaume, n’a point encore frappé les regards bienfaisants de l’Assemblée nationale. Tant qu’elle a été occupée du grand œuvre de la Constitution qui doit assurer pour toujours le bonheur du peuple français et servir de modèle aux nations étrangères, nous avons craint de vou3 dérober un moment; e quelque désir que nous ayons eu tous, Messieurs de vous offrir l’hommage de notre respect et de notre dévouement, en renouvelant dans le temple de la liberté le serment que nous avons fait plus d’une fois de verser jusqu’à la dernière goutte de notre sang pour le maintien de la Constitution, et d’être fidèles à la nation, à la loi et au roi, nous nous sommes bornés, jusqu’à présent, dans la crainte d’interrompre vos travaux, à admirer la sagesse de vos décrets et à les faire exécuter de tout notre pouvoir. « Vous allez enfin prononcer sur notre sort ; nous ne cherchons pas à vous émouvoir par le récit de tous les sacrifices que nous avons faits depuis la Révolution : les attestations honorables que la commuue de Paris nous a données de nos services sont jointes aux autres titres que nous allons mettre sur votre bureau. Nous avons fait ce que nous devions, en servant la patrie et la cause de la liberté. Daignez seulement vous occuper de citoyens sans état et sans fortune. En nous réunissant à nos frères d’armes de la gendarmerie nationale, vous ferez le bonheur de 304 citoyens, que le plus pur patriotisme inspire, qu’aucun danger n’a effrayés, et pour qui la justice que vous leur aurez rendue sera un nouveau motif de bénir les auteurs de la Constitution. « Quant à moi, tous ces braves citoyens sont mes frères : je les ai toujours aimés et regardés comme mes enfants. Parvenu à l’âge de 76 ans révolus, où on ne peut plus espérer que quelques jours de vie, ma carrière est sur le point de finir. Ma consolation sera, en la finissant, l’espérance que j’aurai de leur laisser le bonheur avec le souvenir de tous les exemples que je leur ai donnés, de mon assiduité à tous mes devoirs, de ma fidélité, et de mon courage, dont j’ai donné la preuve en portant, le 17 juillet dernier, le drapeau rouge au Champ-de-Mars.Un coup de pistolet, dirigé sur M. le maire ou sur ce drapeau, a été frapper à la cuisse un cavalier qui est mort de sa blessure, je m’en crois responsable. Permettez, Monsieur le Président, qu’en rendant grâces à la Providence du danger dont elle m a préservé, je dépose sur votre bureau un assignat de 500 livres, pour remplacement du malheureux qui a succombé: ce don est proportionné à mes faibles facultés. (On applaudit à plusieurs reprises.) M. le Président répond : « Messieurs, « Le zèle vraiment patriotique que la compagnie des gardes de la ville de Paris a constamment manifesté, pour le maintien du bon ordre et de la Constitution, les services essentiels que ce corps a rendus dans plusieurs circonstances difficiles, les témoignages honorables qu’il a obtenus de la commune de Paris, tout vous assure des droits à l’attention et à l’intérêt de l’Assemblée nationale. Les représentants de la nation