[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 novembre 1789.] M. l’abbé de Montesquiou termine son discours pardes observations sur les doubles emplois, etc., et sur toutes les causes qui doivent rendre infidèles les calculs ou aperçus faits sur la valeur des biens du clergé. On crie de toutes parts : Aux voix! aux voix! M. le comte de Mirabeau propose un ajournement fixé à lundi. Il en donne pour raisons la réponse qu’il doit faire au défi de M. l’abbé de Montesquiou ; la demande des provinces bel-giques dont les députés veulent parler sur la question, et qu’on ne peut refuser d’entendre; et la difficulté d’opiner la nuit, même par appel nominal. Le oui et le non, dit-il, apportent-ils avec eux la figure de ceux qui opinent? M. Briois de Beaumetz annonce qu'il doit parler pour sa province, et demande acte du refus qu’on ferait de l’entendre. Beaucoup de membres s’élèvent pour exprimer le même vœu. M. d’Estourmel (1). Messieurs, dans la séance du soir du 4 août, j’ai eu l’honneur de vous annoncer que la noblesse entière, tant celle entrant aux Etats que celle qui n’y est point admise, m’avait choisi pour son représentant; que les trois ordres de la province du Cambrésis ont été soumis dans tous les temps à une contribution égale entre eux, et que j’étais convaincu qu’ils ne pouvaient qu’acquiesciér de nouveau aux vues de justice de l’Assemblée nationale. C'est cette justice, Messieurs, dont je réclame, dans ce moment, l’effet pour cette province. Son clergé, ainsi que celui des autres provinces belgiques (2), n’a jamais fait partie du clergé de France. Les lettres patentes du 21 mai 1777, accordées à la demande du corps administratif des états de la province, ont remis les gens de mainmorte, du pays et comté du Cambrésis, dans l’état où ils étaient lors de l’expédition des lettres patentes du 9 juillet 1738, qui interdisent au clergé de Flandre et de Hainaut la faculté de faire des acquisitions. * Le parlement de Flandre, auquel ressortit le Cambrésis, est en possession d’y fixer la quotité des portions congrues. Votre sagesse vous a fait décréter, Messieurs, qu’aucune province ne pourrait s’assembler jusqu’à ce que vous ayez réglé le mode de convocation dans lequel elles s’assembleront. La sagesse qui dirigeait les délibérations de la noblesse du Cambrésis l’a portée à charger son député de demander (son cahier n’ayant jamais été impératif) que les pensions sur les abbayes , à la mutation des abbés réguliers , soient, par préférence , appliquées aux ecclésiastiques de la province et que , dans aucun cas, la commende ne puisse y être introduite, même en faveur des cardinaux, Cette demande me paraît contraster avec le principe qu’on vous propose de décréter sur la propriété des biens du clergé. Le Cambrésis a le plus grand intérêt à ce que (1) Le Moniteur se borne à mentionner le discours de M. d’Estourmel. (2) On comprenait sous la dénomination de provinces belgiques: le Cambrésis, l’Artois, la Flandre et le Hainaut. 629 le revenu de ces biens soit consommé dans la province. Je fais donc la motion expresse au nom du Cambrésis (je crois pouvoir dire au nom de toutes ies provinces belgiques), que le jugement de la question soit renvoyé après l’organisation des assemblées provinciales, dont il est de la plus grande importance de s’occuper sans délai, pour que les provinces belgiques puissent former un vœu que leurs députés s'empresseront de transmettre à l’Assemblée nationale. M. le Président propose, à cause de l’heure avancée, de continuer la suite de la discussion à lundi prochain, à onze heures du matin. Cette proposition est adoptée et la séance est levée. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CAMUS. Séance du lundi 2 novembre 1789 (1). M. le Président annonce que M. Delettre, curé de Berny-Riviôre, député de Soissons, donne sa démission. M. le Président dit ensuite qu’il a reçu la lettre suivante, dont il donne lecture : De Saint-Germain-en-Laye, le 10 oclobre 1789. « Monsieur le président, « Voulez-vous bien avoir la bonté de prévenir l’Assemblée que je me démets de l’emploi qui m’avait été confié de député aux Etals libres et généraux de la France. « Je suis avec respect, monsieur le présiden t, votre, etc. '< Signé : LALLY-ToLLENDAL (2). » M. le Président. J’invite le comité des recherches à s'assembler sur-le-champ pour des affaires urgentes. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion sur les motions relatives à la propriété des biens ecclesiastiques. M. le Président demande si l’intention de l’Assemblée est que les députés des provinces belgiques soient particulièrement entendus. Il est décidé par un décret qu’ils le seront. M. Briois de Beaumetz. Je ne viens point ici développer des maximes particulières à ma province, mais des maximes nationales. La nation n'est pas propriétaire, le clergé ne l'est pas non plus. Le premier principe, en fait de propriété, est que celui qui n’est pas possesseur prouve sa propriété ; or, la nation ne possède pas : donc elle doit prouver et produire ses titres. On a dit : Le clergé n’est pas propriétaire ; donc c’est la nation. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. (2) Voy. annexée à la séance de ce jour la lettre de M. de Lally-Tollendal à ses commettants.